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ENFANTS DE NAZIS ... Que sont-ils devenus ?

Nouveau messagePosté: 05 Mar 2016, 19:25
de fbonnus
Gudrun Himmler, Edda Göring... que sont devenus les fils et les filles de hauts dignitaires du IIIe Reich ? Tania Crasnianski a retracé leur destin dans un livre.

Göring, ce fanfaron, ne s'occupe de rien. Goebbels en fait beaucoup, mais il se met toujours en avant. Tous reçoivent des médailles, sauf papa, alors qu'il devrait être le premier à en recevoir." La jeune fille de 16 ans qui écrit ces lignes a pour nom Gudrun Himmler. Le papa en question, on a deviné son nom. Parmi les rejetons des pontes du IIIe Reich, dont la Franco-Allemande Tania Crasnianski retrace les destins si particuliers dans Enfants de nazis, la fille du patron de l'organisation SS emporte haut la main la palme de la fidélité.
À l'origine de la Wiking-Jugend, formation née en 1952 sur le modèle des Jeunesses hitlériennes, Gudrun Himmler (née en 1929) est demeurée pendant des décennies l'égérie de tous les groupuscules néonazis qui, au nom du bon vieux temps, se sont rassemblés sous sa bienveillante égide. Le contraste est flagrant entre la modestie des postes qu'elle occupa dans la société - serveuse, secrétaire, dont elle fut parfois chassée pour cause de patronyme - et la grandeur des rêves engloutis qu'elle continua à caresser dans son appartement de la Georgenstrasse de Munich, petit musée dévoué à la gloire de papa.

Déni...
On retrouve la même dévotion chez Edda Göring, qui, dans un appartement de la même ville, entretenait avec sa mère le culte göringien avec ce qu'on avait bien voulu leur laisser des innombrables rapines de son père. "Il n'était pas un fanatique. On pouvait lire la paix dans ses yeux. Je l'ai beaucoup aimé et on voyait qu'il m'aimait." Certes. Difficile de couper le lien pour des enfants adorés par des parents qui, pour être aimants, n'en étaient pas moins criminels. On retrouve ainsi la fameuse schizophrénie du commandant du camp d'Auschwitz, Rudolf Höss, qui jouait avec ses bambins après avoir fait gazer des centaines d'enfants juifs. Difficile aussi de se remettre d'un début fulgurant dans la vie - Edda Göring fut portraiturée dans toute l'Allemagne, reçut 628 000 télégrammes à sa naissance et un Lucas Cranach, qu'elle tenta après la guerre de conserver - et de devoir ensuite traîner le boulet d'un nom infamant. Car on veut bien croire que grandir en s'appelant Göring ou Himmler ne fut pas une partie de plaisir.

D'une part, il y a donc le déni. Mon papa n'a rien fait, le monde l'a injustement jugé. Un déni qui implique la défense, la réhabilitation, voire la contre-attaque : le fils de Rudolf Hess, Wolf Rüdiger, consacre trois ouvrages à la gloire de son père, dont l'un qui dénonce l'assassinat dont il aurait été la victime en prison en 1987, avant que son propre fils, informaticien, ne crée un site Internet négationniste.

Image
Heinrich Himmler en compagnie de son épouse, Margarete, de sa fille Gudrun (au centre) - avec une amie -
et de son fils adoptif Gerhard, en 1935. Heinrich Himmler en compagnie de son épouse, Margarete, de sa fille Gudrun (au centre) -
avec une amie - et de son fils adoptif Gerhard, en 1935. © Realworks Ltd/Die Welt/EPA/MAXPPP


...ou règlements de comptes
Mais ces enfants sont évidemment à l'image de l'Allemagne : ils peuvent ainsi ressembler à cette deuxième génération qui demanda des comptes à ses parents. D'où des cas de rejet furieux, de haine contre des pères qui n'éprouvèrent jamais le moindre remords. Devenu journaliste, Niklas Frank, le fils de Hans Frank, gouverneur général de Pologne, garda toute sa vie sur lui une photo de son père décédé : "Je suis satisfait des aspects de la photo, il est bien mort." Persuadé très tôt, à la différence de ses frères et soeurs, d'appartenir à une famille de criminels, il publiera une série de livres scandales, dont le premier a un titre éloquent : Le père. Un règlement de comptes. Il se résout même à ne pas avoir d'enfants pour ne pas prolonger cette lignée maudite, comme les petits-neveux et nièces de Göring, Bettina et Matthias, qui se firent stériliser. Les séquelles de ces héritages plus ou moins bien assumés furent, on le devine, innombrables.

Dans une fratrie, tout le monde ne réagit pas à l'unisson. Il y a Gudrun Himmler, mais aussi Katrin, la petite-nièce, qui se convertit au judaïsme. Si l'architecte Albert Speer Jr prolonge étrangement le style de son père bâtisseur - il proposa pour les JO de Pékin un projet gigantesque reliant la Cité interdite au stade -, sa soeur Hilde, un des chefs de file des Verts en Allemagne, a reçu le prix Moses Mendelssohn pour la tolérance entre les peuples. Hans-Jürgen Höss défend son père antisémite, tandis que son fils, Rainer, mène campagne contre le racisme et l'antisémitisme et que la soeur de ce dernier, Brigitte, se cache, allant jusqu'à taire l'identité de leur arrière-grand-père à ses propres enfants.

Entre l'adoration aveugle et la haine farouche, un "juste milieu" existe parfois. C'est la voie empruntée par Martin Adolf Bormann, qui devient prêtre et embrasse le christianisme que son père a combattu violemment. S'il condamne l'homme politique, il n'éprouve aucune détestation du père. C'est aussi la tentative amorcée par Rolf Mengele, qui, en 1977, se lance dans un voyage secret pour s'expliquer avec un père se terrant à São Paulo et qu'il n'a jamais vu. Le résultat est un dialogue de sourds et une autre manifestation de ce que le psychologue israélien Dan Bar-On, qui avait rencontré certains de ces enfants, appela "l'héritage du silence".

Editions : Grasset
Parution : 09/03/2016
Pages : 288
Format :225 x 140 mm
Prix : 20.90 €
Prix du livre en numérique: 14.99 €
EAN : 9782246859789

Disponible à la Fnac => http://livre.fnac.com/a9321341/Tania-Cr ... s-de-nazis

Source : Article de FRANÇOIS-GUILLAUME LORRAIN / le Point.fr

Re: ENFANTS DE NAZIS ... Que sont-ils devenus ?

Nouveau messagePosté: 05 Mar 2016, 19:53
de frontovik 14
Merci Fred pour ce post sur un sujet très intéressant. Comment vivre sa vie quand on est un "enfant de salaud" et que faire de cet héritage encombrant...