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Les Marines dans la victoire sur Okinawa (2/3)

Moins connue que les batailles du front Européen, la guerre du Pacifique n'en reste pas moins tout autant meurtrière et décisive dans la fin de la seconde guerre mondiale.
MODERATEUR ; alfa1965

Les Marines dans la victoire sur Okinawa (2/3)

Nouveau message Post Numéro: 1  Nouveau message de Kelilean  Nouveau message 07 Avr 2006, 16:28

J'ai scindé mon travail de traduction en trois parties, à la fois parce que le texte est conséquent mais aussi pour faciliter la lecture.

La campagne finale : les Marines dans la victoire sur Okinawa.
Par le colonel Joseph H. Alexander, USMC (Ret)
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Introduction

L'aube du 29 mai 1945 voyait la 1st Marine Division débuter sa cinquième semaine consécutive d'assaut frontal en tant que partie prenanye de l'offensive hâchée de la 10th US Army contre les défenses japonaises centrées sur le château de Shuri, dans le sud d'Okinawa. L'opération Iceberg, la campagne visant à s'emparer d'Okinawa, avait maintenant débuté depuis près de deux mois - et menaçait de s'enliser. L'entrée en matière grisante et rapidement bouclée de la campagne avait été remplacée semaine après semaine par une guerre d'attrition coûteuse et épuisante contre le complexe de Shuri.

La 1st Marine Division, placée entre deux autres unités du même type avec un champ de manoeuvre étroit mais précieux, avait à peine avancé de 1 000 m au cours des 18 derniers jours -une moyenne de 55 m pour chaque jour ensanglanté. Le secteur était rythmé par les lignes de crête raides et alvéolées, se succédant les unes après les autres -successivement Kakazu, Dakeshi et Wana (avec son meurtrier ravin inversé, en pente). Juste au-delà reposait la longue épaule de Shuri Ridge, le centre névralgique de la 32ème armée japonaise et l'avant-poste de douzaines d'observateurs avancés de l'artillerie ennemie qui avaient rendu si misérable la vie des forces américaines durant ces longs mois.

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Deux Marines, Davis P. Hargraves avec sa Thompson et Gabriel Chavarria avec son BAR, du 2nd Battalion, 1st Marines, avancent sur Wana Ridge le 18 mai 1945.


Mais en ce matin pluvieux, le 29 mai, les choses semblaient quelque peu différentes, plus calmes. Après des jours d'intenses combats, les Américains s'étaient finalement emparés de deux avant-postes de la ligne Shuri : Conical Hill à l'est, capturé par la 96th I.D., et le complexe du Pain de Sucre à l'ouest, pris par la 6th Marine Division. Shuri ne semblait plus invincible pour longtemps.

La A Company, 1st Battalion du 5th Marines s'avança avec précaution, s'attendant à être prise sous l'habituelle tempête de feu de l'artillerie japonaise à chaque moment. Il n'y en eut pas. Les Marines atteignirent le sommet de la crête de Shuri Ridge après seulement un difficile échange de tirs. Surpris, le commandant de la compagnie regarda en direction de l'ouest le long de la crête, à quelques centaines de mètres, vers les ruines du château de Shuri, une forteresse médiévale des anciens souverains des Ruykyu. Chacun parmi la 10th US Army s'attendait à ce que les Japonais défendent Shuri jusqu'à la mort -mais la place semblait faiblement tenue. Le feu d'armes légères n'apparaissait venir que de ce qui ne pouvait être qu'une arrière-garde. Les radios de campagne résonnèrent de ces surprenantes nouvelles. Le château de Shuri lui-même se tenait au-delà des limites de la division et du corps, mais ceux-ci étaient là pour le prendre. Les Marines de la vague d'assaut demandèrent la permission de capturer cet objectif de choix.

Le Major General Pedro del Valle, commandant la 1st Marine Division, n'hésita pas une seconde. Par tous les droits, le château de Shuri revenait à sa voisine la 77th I.D. Et Valle savait que son homologue, le Major General Andrew D. Bruce, serait en colère si les Marines lui ravissaient cette prise longuement désirée avant que ses propres soldats n'arrivent sur place. Mais c'était une opportunité sans précédent de saisir l'objectif principal de la 10th US Army. Del Valle donna son blanc-seing. Muni de celui-ci, la A Company, 1/5, balaya la crête sur tout son long vers l'ouest, rencontrant une faible opposition, et prit possession du complexe ravagé. L'état-major de del Valle aura à faire quelques beaux jeux de jambes pour maintenir la cohésion avec ses voisins de l'US Army. C'est seulement ensuite qu'ils apprirent que la 77th I.D. avait planifié un important bombardement du château ce matin-là. Des appels radios frénétiques évitèrent la tragédie toute proche juste à temps. Le résultat de l'action préventive des Marines rendit furieux le général Bruce. Del Valle se rappellait : « Je ne pense pas qu'un seul des commandants de divisions de l'US Army m'adressera à nouveau la parole après ce qui vient d'arriver. ».

Mise à part cette compétition interarmes, les Américains avaient accompli beaucoup ce matin-là. Pendant deux mois, les hauteurs de Shuri avaient fourni aux Japonais de superbes points d'observations pour un feu réglé sur la cité portuaire de Naha et sur la zone entière de 10 km dans la partie sud d'Okinawa. Même après cette prise, alors que la A/1/5 se déployait sur de solides positions défensives parmi les ruines du château, les Américains étaient conscients du fait qu'une arrière-garde japonaise occupait encore le complexe du quartier-général souterrain, gigantesque, directement sous leurs chaussures boueuses. Ils seraient étonnés d'apprendre que le QG souterrain de la 32ème armée mesurait quelques 380 m de long et plus de 50 m de profondeur - tout cela creusé à la pioche et la pelle.

Les Japonais avaient en fait devancé la marche de la 10th US Army. La plupart de leurs forces avaient fait retraite au sud durant les pluies incessantes, et occuperaient bientôt le troisième (et dernier) anneau de leurs défenses souterraines et préparées, une série d'escarpements fortifiés dans la péninsule de Kiyamu.

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Un tas de ruines : tout ce qui reste du château de Shuri, ses murs, ses douves en arrière-plan, et la cité de Shuri au-delà, après la conquête du secteur par le 5th Marines. Les arbres décharnés sont les survivants d'une vaste forêt qui l'entourait en temps de paix.


La prise du château de Shuri représentait indéniablement un événement important dans la campagne d'Okinawa, mais c'était une victoire trompeuse. Tout comme la levée du drapeau à Iwo Jima sur le mont Suribachi signifiait seulement la fin du commencement de cette bataille prolongée, la capture de Shuri ne mit pas fin aux combats. La féroce bataille sur Okinawa devait encore durer 24 jours. Et les pluies d'obus tombèrent toujours, et les horreurs et les morts continuèrent.




Compte à rebours jusqu'au « Love-Day »

Les trois longs mois de bataille à Okinawa couvrirent un arc de 1 120 km de Formose à Kyushu et impliquèrent un million de combattants -Américains, Japonais, Britanniques et les natifs d'Okinawa. Munie d'une ampleur rivalisant avec celle du débarquement en Normandie au mois de juin précédent, la bataille pour Okinawa fut la plus grande et la plus coûteuse de toutes celles de la guerre du Pacifique. Pour chacun des 82 jours d'affrontement, la bataille préleva près de 3 000 morts parmi les soldats et les infortunés non-combattants.

Le Japon impérial, au printemps de 1945, pouvait être regardé comme un animal sauvage enragé, cerné et désespéré. Les dirigeants japonais savaient très bien que si Okinawa tombait entre les mains américaines, elle serait transformée en une gigantesque base d'opérations -l'Angleterre du Pacifique- pour l'invasion ultime du sol sacré de la mère-patrie. Ils étaient capables de tout sacrifier pour éviter la disgrâce imprononçable de la capitulation sans conditions et de l'occupation étrangère.

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Une équipe de combat des Marines lourdement armée, avec BAR et lance-flammes, fait mouvement et se dirige sur ses objectifs à travers les ruines causées par le bombardement préliminaire.



Okinawa représenterait donc pour l'US Navy son plus grand challenge opérationnel : protéger une énorme et vulnérable Task Force amphibie agglutinée à la tête de pont contre la plus impie des furies : les kamikazes japonais. De la même manière, Okinawa serait un test pour voir si la force de projection amphibie américaine était arrivée à maturation – si les Américains sur le théâtre du Pacifique pouvaient planifier et exécuter un assaut massif contre une large bande de terre sérieusement défendue, s'ils pouvaient intégrer les capacités tactiques de tous les services, repousser toutes les formes imaginables de contre-attaques et maintenir la force opérationnelle à terre. L'opération Iceberg ne serait pas conduite dans le vide. L'action préliminaire à l'invasion démarrerait alors que les campagnes majeures à Iwo Jima et aux Philippines étaient en train d'être achevées, un reflet de la grande expansion de la puissance militaire américaine dans le Pacifique, avec pourtant un étirement plus lointain des ressources alliées.

Mais aussi chère et aussi dramatique que la bataille d'Okinawa ait pu être, les deux côtés voyaient clairement le combat comme un avant-goût de plus pour l'affrontement désespéré à venir lors de l'inévitable invasion des îles-mères japonaises. La proximité d'Okinawa avec le Japon – bien à la portée des bombardiers moyens et des chasseurs d'escorte- et son utilité avec ses ports militaires, ses aérodromes, ses mouillages, ses zones d'entraînement faisaient de cette île réduite un objectif impératif pour les Américains, éclipsant les plans plus précoces prévoyant la prise de Formose pour le même but.

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Okinawa, la plus large des îles Ryukyu, repose comme le sommet d'un triangle presque équidistant de zones stratégiques. Kyushu est à 560 km plus au nord, Formose à 530 km au sud-ouest, Shangaï à 720 km à l'ouest. Comme beaucoup de champs de bataille du Pacifique, Okinawa conservait un héritage paisible. Bien qu'officiellement préfecture administrative du Japon, et territoire japonais de fait après une conquête par des opérations militaires en 1879, Okinawa était fière de ses différences distinctives, de son long legs chinois et de son influence malaisienne, et d'un sens unique de la communauté.

Le Quartier Général Impérial japonais de Tokyo fit peu pour renforcer la garnison d'Okinawa dans les premières années de la guerre du Pacifique. Avec la chute de Saïpan à la mi-1944, pourtant, il commença à envoyer des renforts et du matériel de fortification au sein des zones critiques de la « zone intérieure stratégique » incluant Iwo Jima, Peleliu, les Philippines et Okinawa.

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Sur Okinawa, le QG impérial établit une nouvelle armée de campagne, la 32ème armée, et s'efforça d'y verser des éléments entraînés provenant de tout le grand périmètre défensif du Japon, en Chine, en Mandchourie ou des îles nationales. Mais les sous-marins américains en prélevèrent un lourd tribut. Le 29 juin 1944, le USS Sturgeon torpilla le Toyama Maru qui sombra avec 5 600 hommes de la 44ème brigade mixte indépendante, destinée à Okinawa. Cela prendra le reste de l'année aux Japonais pour trouver des remplaçants qualifiés.

En octobre 1944, le US Joint Chiefs of Staff avait reconnu la valeur stratégique primordiale des Ryukyu et avait donné l'ordre à l'amiral Chester W. Nimitz, commandant en chef et commandant de la flotte du Pacifique, de s'emparer d'Okinawa immédiatement après la fin de la campagne sur Iwo Jima. Le JCS ordonna à Nimitz de « prendre, occuper et défendre Okinawa. »-pour ensuite transformer cette île capturée en une énorme base avancée pour l'invasion du Japon.

Nimitz se tourna une fois encore vers ses commandants les plus expérimentés pour exécuter la mission demandée. L'amiral Raymond A. Spruance, le vainqueur de Midway, des Gilbert, des Marshall, des Mariannes et de la bataille de la mer des Philippines, commanderait la 5ème flotte US, certainement la plus puissante armada de navires de guerre jamais rassemblée. Le vice-amiral Richmond Kelly Turner, vétéran talentueux et irascible des débarquements dans les Salomons et le Pacifique Central, commanderait encore toutes les forces amphibies sous les ordres de Spruance. Mais la contrepartie militaire de Turner ne serait être plus longtemps le vieux et familier cheval de bataille, Marine Lieutenant General, Holland M. Smith. Iwo Jima devait être le dernier combat de ce dinosaure. Désormais les forces expéditionnaires avaient atteint la taille d'une armée de campagne regroupant quelques 182 000 combattants. L'Army Lieutenant General Simon Bolivar Buckner, Jr., fils d'un général confédéré qui avait combattu Grant à Fort Donelson durant la guerre de Sécession, commanderait la nouvellement créée 10th US Army.

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Début avril, le commandant de la 10th US Army, Buckner (à gauche), et le chef du 3ème corps amphibie, Geiger (à droite), se rencontrent pour discuter de la progression de la campagne. Après la mort de Buckner près de la fin de la bataille, Geiger prit la suite et gagna sa troisième étoile.


Le général Buckner prit la peine de d'assurer que la composition de son état-major reflétait la composition multiservices de son commandement. 34 officiers des Marines y servaient, par exemple, incluant le Brigadier General Oliver P. Smith, USMC, en tant que Marine Deputy Chief of Staff. Comme Smith le fit remarquer plus tard, « la 10th US Army devint en effet une Task Force combinée sous les ordres du CINCPOA. ».

Six divisions de vétérans -quatre de l'US Army, deux des Marines- formaient la force de débarquement de Buckner, avec en plus une division de chaque service tenue en réserve. C'était là une autre indication de la croissance du potentiel amphibie américain dans le Pacifique. Auparavant, les Américains avaient difficilement réuni une division pour Guadalcanal, puis deux pour les Gilbert, les Marshall et les Palaus, trois enfin pour Saïpan et Iwo Jima. Au printemps 1945, Spruance et Buckner pouvaient compter sur huit divisions expérimentées, en plus de celles toujours engagées sur Luçon et Iwo Jima.

La 10th US Army de Buckner comprenait trois composantes opérationnelles majeures. L'Army Major General John R. Hod commandait le XXIV Corps, avec les 7th, 77th et 96th I.D., ainsi que la 27th I.D. en réserve à flots. Le Marine Major General Roy S. Geiger commandait le 3ème corps amphibie regroupant les 1st et 6th Marine Divisions, avec la 2nd Marine Division en réserve flottante. Les deux corps d'armée avaient l'expérience de campagnes récentes, le XXIV à Leyte, le 3ème à Guam et Peleliu. La troisième composante majeure du commandement de Buckner était la Tactical Air Force de la 10th US Army, commandée par le Marine Major General Francis P. Mulcahy, qui dirigeait aussi le 2nd Marine Tactical Wing. Son Fighter Command était mené par le Marine Brigadier General William J. Wallace.




Les officiers généraux des Marines

Les quatre officiers généraux des Marines à Okinawa étaient des vétérans éprouvés et très versés dans les opérations multiservices -qualités qui renforcèrent les contributions de l'USMC dans le succès de la 10th US Army.

Le Major General Roy S. Geiger, USMC, commandait le 3ème corps amphibie. Geiger était âgé de 60 ans, et natif de Middleburg, en Floride, diplômé à la fois de l'Ecole Normale de Floride et de l'université de droit de Stetson. Il s'engagea dans les Marines en 1907 et devint pilote aéronaval (le cinquième précisément) en 1917. Geiger effectua des missions de combat en France durant la Première guerre mondiale et commanda une escadrille du Northern Bombing Group. A Guadalcanal, en 1942, il dirigea le 1st Marine Aircraft Wing et en 1943, il assuma la direction du 1st Marine Amphibious Corps (future 3rd Marine Amphibious Corps) à Bougainville et pour les invasions de Guam et des Palaus. Geiger avait du flair pour le combat ; même à Okinawa il mena de fréquentes visites sur la ligne de front et aux postes avancés. En deux occasions il s'appropria un avion d'observation pour mener une reconnaissance personnelle au-dessus du champ de bataille. Avec la mort du général Buckner, Geiger prit la suite de la 10th US Army, attribution singulière et appropriée, et fut immédiatement promu Lieutenant General par l'USMC. Geiger releva ensuite le General Holland M. Smith en tant que commandant en chef de la Fleet Marine Force du Pacifique. Dans cette tâche, il fut un des rares Marines à être invités à assister à la cérémonie de reddition officielle du Japon à bord de l'USS Missouri, le 2 septembre 1945, dans la baie de Tokyo. Il fut aussi observateur en 1946 lors du test atomique au milieu du lagon de Bikini, et son évaluation sombre de la vulnérabilité des futurs assauts navires de surface à terre face aux armes atomiques encouragea l'USMC à développer l'hélicoptère de transport. Le général Geiger mourut en 1947.

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Le Major General Roy S. Geiger.


Le Major General Pedro A. del Valle, USMC, commandait la 1st Marine Division. Del Valle, âgé de 51 ans, était originaire de San Juan à Porto Rico, et était sorti diplômé de l'Académie Navale en 1915. Il commanda un détachement de Marines à bord du cuirassé USS Texas dans l'Atlantique Nord durant la Première guerre mondiale. Les années suivantes passées en service en mer et en expéditions dans les Caraïbes et en Amérique Centrale fournirent à del Valle une vision parfaite de la manière dont les Marines devaient servir la Navy et leur nation durant la guerre. En 1931 le Major General Rodolph C. Berkeley désigna le Major del Valle pour le « Landing Operations Text Board » à Quantico, la première étape organisationnelle mise au point par les Marines (avec des experts de la Navy sur le feu naval) pour développer une doctrine travaillée de l'assaut amphibie. Son essai provocant, « Du navire au rivage dans les opérations amphibies », paru dans la Marine Corps Gazette de février 1932, défia ses amis officiers de penser sérieusement d'une autre façon l'éxécution d'un débarquement. Une décennie plus tard, del Valle, artilleur vétéran, commanda le 11th Marines avec distinction durant la campagne de Guadalcanal. Plus d'un Japonais survivant s'émerveilla de « l'artillerie automatique » des Marines. Del Valle commanda ensuite l'artillerie du 3ème corps amphibie à Guam avant d'assumer le commandement de « The Old Breed » à Okinawa. Il disparut en 1978.

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Le Major General Pedro A. del Valle.


Le Major General Lemuel S. Shepherd,Jr., USMC, commandait la 6th Marine Division. Agé de 49 ans, il était natif de Norfolk, en Virginie, et était sorti diplômé en 1917 de l'Institut Militaire de son état. Il servit en se distinguant au feu avec le 5th Marines en France durant la Première guerre mondiale, recevant trois blessures et la Navy Cross. Sheperd devint un de ces rares officiers d'infanterie ayant parcouru tous les échelons de grades, de la section de fusiliers à la division. Au début de la guerre du Pacifique, il commandait le 9th Marines, servant comme commandant adjoint de la 1st Marine Division à Cap Gloucester, et dirigeant la 1st Provisionial Marine Brigade à Guam. En septembre 1944, à Guadalcanal, il devint le premier commandant de la nouvellement formée 6th Marine Division et la mena avec une grande valeur durant la campagne d'Okinawa. Après la guerre, il prit la tête de la Fleet Marine Force du Pacifique, pendant deux années de la guerre de Corée et finit ensuite en tant que 20ème leader de l'USMC. Il mourut en 1990.

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Général Lemuel C. Shepherd, Jr.


Le Major General Francis P. Mulcahy, USMC, dirigeait le 2nd Marine Aircraft Wing et la Tenth Army Tactical Air Force (TAF). Mulcahy avait 51 ans et venait de Rochester dans l'état de New-York. Il était diplômé de l'université Notre-Dame. Il fut nommé à un commandement en 1917 et tenta la Naval Flight School la même année. Comme Roy Geiger, Mulcahy effectua des missions de bombardement en France durant la Première guerre mondiale. Il devint un des pionniers de l'USMC dans l'appui aérien rapproché aux opérations terrestres durant l'entre-deux-guerres, pendant les campagnes dans les Caraïbes et en Amérique centrale. Au moment de l'attaque japonaise sur Pearl Harbor, Mulcahy était observateur au sein de la Western Desert Air Force britannique en Afrique du Nord. Il fut redéployé dans le Pacifique en tant que chef du 2nd Marine Aircraft Wing. Dans les derniers mois de la campagne de Guadalcanal, Mulcahy servit avec brio en tant que commandant des forces aériennes alliées dans les Salomons. Il se porta volontaire pour l'assignement à la TAF, déployant à terre de manière rapide les appareils sur les terrains fraîchement capturés de Yontan et de Kadena et travailla étroitement le déploiement de combat des aviateurs provenant des divers services contre la menace des kamikazes et en appui au sol de la 10th US Army durant sa campagne prolongée à l'intérieur des terres. Pour ses exploits héroïques en France en 1918, aux Salomons en 1942 et 1943 et à Okinawa, il reçut trois Distinguished Service Medals. Il disparut en 1973.

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Major General Francis P. Mulcahy.


Les différentes unités des Marines devant participer à Iceberg étaient éparpillées dans le Pacifique. La 1st Marine Division, commandée par le Major General Pedro A. del Valle, était partie de Peleliu pour la « pitoyable Pavuvu » dans les îles Russell afin de préparer la prochaine campagne. La 1st Marine Division avait été la première du genre à être déployée dans le Pacifique et elle avait participé aux difficiles attaques amphibies de Guadalcanal, du Cap Gloucester et de Peleliu. Au moins un tiers de ses hommes étaient des vétérans de deux des batailles citées ; l'autre tiers avait au moins une des trois opérations à son actif. La petite Pavuvu limitiait sérieusement les possibilités d'un entraînement poussé, mais un exercice à grande échelle dans les environs de Guadalcanal permit à la division d'amalgamer les nouveaux arrivants et les vétérans sur le retour. Le général del Valle, un officier d'artillerie consommé, s'assura que les troupes menaient leurs exercices en coopération avec les blindés et sous l'ombrelle de protection du feu des obusiers de l'artillerie.

La 6th Marine Division devint la seule division formée au-delà des mers pendant la guerre quand le Major General Lemuel C. Sheperd, Jr., activa les couleurs et assuma le commandement à Guadalcanal en septembre 1944. L'unité avait beau être nouvelle, il était difficile de trouver un bleu dans les rangs des officiers. Beaucoup des premiers raiders des Marines avec l'expérience du combat dans les Salomons formaient le coeur du 4th Marines. Le régiment avait également débarqué à Emirau et à Guam. Le 22nd Marines avait derrière lui Eniwetok et Guam, à nouveau. Et si le 29th Marines comprenait une large part de nouvelles recrues, son 1st Battalion avait joué un rôle pivot dans la campagne de Saïpan. Le général Sheperd usa de son temps et des larges aménagements disponibles sur Guadalcanal pour conduire un entraînement progressif et construit, de la section au régiment. Regardant déjà vers Okinawa, Sheperd mis l'accent sur le déploiement rapide des troupes, les combats à grande échelle et le combat en zone urbaine.

La 2nd Marine Division, commandée par le Major General LeRoy R. Hunt, était revenue à Saïpan après avoir conquis Tinian. Sur cette île, la division reçut 8 000 recrues en remplacement des pertes et s'efforça de s'entraîner pour une série de missions variées et frustrantes puisqu'elle était, en effet, dans la réserve stratégique. L'unité possédait déjà un parcours inégalable durant la guerre du Pacifique -Guadalcanal, Tarawa, Saïpan et Tinian- et sa simple présence dans les eaux des Ryukyu constituerait une formidable « force amphibie en place » qui distrairait les Japonais d'Okinawa. Pourtant, la division paierait un prix disproportionné en regard de son rôle de demoiselle d'honneur dans la campagne à venir.




L-Day et le mouvement jusqu'au contact

L'opération Iceberg débuta avec un départ rugissant. Les quelques Japonais encore présents dans le voisinage de l'assaut principal aux premières lueurs du L-Day, le 1er avril 1945, purent immédiatement réaliser la sagesse du général Ushijima de concéder le débarquement américain sans résistance. L'énorme armada, assemblée à travers tous les ports de l'Océan Pacifique, s'était concentrée comme prévu le long de la côté sud-ouest d'Okinawa et se tenait prête à projeter sans délai la force de débarquement de 182 000 hommes sur les plages. Ce serait une entrée en matière vigoureuse et ultime, le résumé de toutes les leçons amphibies apprises si douloureusement lors des premiers débarquements à Guadalcanal ou en Afrique du Nord.

L'amiral Turner passa en revue pour la dernière fois les conditions météos dans la zone prévue du débarquement. Comme à Iwo Jima, les assaillants seraient aidés par un temps clément lors du premier jour, toujours critique, du débarquement. Les cieux passeraient de couverts à clairs, un vent modéré soufflerait d'est au nord-est, le ressac serait modéré de même que la température ambiante. A 4h06, Turner annonça « Land the Landing Force », la phrase familière qui marquait le décompte séquentiel pour les premières vagues d'assaut touchant la plage à l'heure-H. Les troupes d'assaut qui enjambaient déjà les bords de leurs transports furent ensuite témoins d'une inoubliable préparation d'artillerie navale -le bombardement soutenu par obus et roquettes de la part de centaines de navires, alternant avec des formations d'appareils effectuant des attaques en rase-mottes au dessus des plages, straffant et bombardant à volonté. La contre-batterie ennemie sembla dispersée et inefficace, même contre une telle masse de cibles tentantes assemblée au large. Turner confirma l'heure-H pour 8h30.

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Prenant part au bombardement préliminaire d'Okinawa, le cuirassé USS Idaho (BB 42) fait feu sur des cibles prédéfinies de l'île avec ses pièces de 14 pouces. Une fois les troupes débarquées, le feu de soutien naval se transforme en un barrage roulant qui ouvre la voie aux fantassins.


Maintenant c'était le tour de la 2nd Marines Division et des navires de la Force de Diversion de leurrer les Japonais en feignant un débarquement sur la côte opposée. Cet ersatz de force amphibie avança à toute vapeur vers ses positions, lançant des tracteurs amphibies et des Higgins Boats, les chargeant visiblement avec des Marines équipés pour le combat, puis les dispersant en direction de Minatoga Beach en sept vagues. Regardant attentivement sa montre, le commandant de la quatrième vague franchit la ligne de départ exactement à 8h30, heure de l'heure-H réelle sur la côté ouest. Les LVT et autres embarcations firent alors rapidement demi-tour et retournèrent vers les transports, mission accomplie.

Il y a peu de doutes que le débarquement de diversion (une performance répétée le jour suivant) ait atteint ses objectifs. En fait, le général Ushijima retint des unités d'infanterie majeures, de première ligne et de l'artillerie dans la zone de Minatoga plusieurs semaines durant dans l'éventualité d'un second débarquement qu'il anticipait complètement. La garnison rapporta également au QG le matin du L-Day que « la tentative de débarquement de l'ennemi sur la côté orientale avait complètement échoué avec de lourdes pertes. ».

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Une flottille de LSM-R délivre une dernière salve avant que les troupes ne touchent la plage. A l'impact, les roquettes labourent la terre et causent des dommages considérables.

Mais cette diversion réussie eut un coût considérable. Des kamikazes japonais, convaincus d'avoir à faire à la force de débarquement principale, attaquèrent la petite force en cette même matinée, et endommagèrent sérieusement le transport de troupes Hinsdale et le LST 844. Le 3rd Battalion du 2nd Marines et le 2nd Amphibian Tractor Battalion perdirent près de 50 hommes ; les deux bâtiments perdirent un nombre à peu près égal de marins. Ironiquement, la division censée connaître le moins de pertes durant la bataille du L-Day perdit plus d'hommes que n'importe quelle autre division de la 10th US Army. L'officier opérations de la division, remonté, le lieutenant-colonel Samuel G. Taxis : « Nous avions demandé une couverture aérienne pour cette diversion mais on nous a répondu que la menace serait secondaire. ».

Dans les approches au sud-ouest, le corps principal ne rencontra aucune interférence. Un récif de corail étendu fournissait une barrière littorale aux plages de Hagushi, mais en 1945 les récifs ne posaient déjà plus problème aux forces de débarquement. A la différence de Tarawa, où le récif dominait le développement tactique de la bataille, le général Buckner, à Okinawa, disposait de plus de 1 400 LVT pour transporter ses échelons d'assaut des navires au rivage sans aucune hésitation. Ces longues lignes de LVT s'étendaint sur près de 13 km, tandis que ceux-ci bouillonnaient sur leur ligne de départ, ainsi que les chenilles de quelques 360 LVT-A blindés dont les tourelles montées équipées d'obusiers de 75 mm tiraient en rafales sur la plage alors qu'ils avançaient sur les derniers 4 000 m. Derrière les LVT suivaient près de 700 DUKW, des camions amphibies qui transportaient les premiers bataillons d'artillerie de soutien direct. L'horizon derrière les DUKW semblait rempli de lignes de péniches de débarquement. Ils feraient une pause au récif pour s'unir avec les LVT situés à l'extérieur. Les soldats et les Marines avaient de la même manière répétés minutieusement les opérations de transfert de ligne. Il n'y aurait pas de répit dans l'assaut ce jour-ci.

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La maîtrise amphibie à l'oeuvre : les Marines de la première vague dans leurs tracteurs amphibies (LVT) foncent en direction de la plage durant le L-Day sous la protection du tir d'un cuirassé.


L'embouchure de la rivière Bishi Gawa marquait la frontière entre le XXIV Corps et le III AC le long des plages de Hagushi. Le plan tactique des Marines prévoyait le débarquement des deux divisions de front, la 1st sur la droite, la 6th sur la gauche. Chaque division débarquerait à son tour avec deux régiments de front. Les régiments concernés, du nord au sud, étaient les 22nd, 4th, 7th et 5th Marines. Reflétant des années de pratique, la première vague d'assaut toucha terre précisément à 8h30, l'heure-H. Les Marines s'éjectèrent hors de leurs LVT, essaimèrent par dessus les fossés et les digues et entrèrent dans l'inconnu. La grande invasion d'Okinawa avait commencé. Durant la première heure, la 10th US Army mit à terre 16 000 hommes.

Les troupes d'assaut subirent un choc universel lors du mouvement des navires vers le rivage. En dépit des prédictions lugubres du renseignement et de leur propre expérience du combat, le débarquement fut « du gâteau » -virtuellement sans opposition. La section de mortiers du Private First Class Gene Sledge marchait en chantant « Little Brown Jug » à pleins poumons. Le caporal James L. Day, chef d'une escouade de fusiliers attachée à la Company F, 2nd Battalion du 22nd Marines, qui avait auparavant débarqué à Eniwetok et à Guam, ne pouvait croire cette bonne fortune : « Je n'avais pas entendu un seul coup de toute la matinée. C'était incroyable !. ». Beaucoup de vétérans s'attendaient à subir un violent feu ennemi à n'importe quel moment. Plus tard dans la journée, le LVT du général del Valle s'embourba dans une fondrière sur la plage, le véhicule devenant ainsi une cible immobile et intéressante. « Ce furent les pires 20 minutes que j'ai jamais connues dans ma vie. », dit-il.

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La matinée continua d'offrir de bonnes surprises aux assaillants. Ils ne trouvèrent aucune mine le long de la plage, découvrirent le pont principal sur la rivière Bishi encore intact, et -merveille des merveilles- deux aérodromes pratiquement sans défense. La 6th Marine Division prit Yontan Airfield à 13h00 ; la 7th I.D. n'eut aucun problème pour sécuriser la toute proche Kadena.

Le nettoyage rapide des plages et de leurs environs immédiats laissa toute liberté pour amener les renforts, et les commandants de divisions n'hésitèrent pas à accélérer le débarquement des chars, des bataillons d'artillerie et des réserves. Le renforcement gigantesque eut lieu avec seulement quelques écueils. Quatre pièces d'artillerie sombrèrent lorsque leurs DUKW s'échouèrent le long du récif. Plusieurs chars Sherman restèrent aussi sur ce dernier. Et le 3rd Battalion du 1st Marines atteignit la ligne de transfert à 18h, mais dut passer une nuit inconfortable dans ses péniches car un nombre suffisant de LVT n'avait pu être rassemblé pour le dernier transit. Ce furent des incidents mineurs. De manière incroyable, à la fin de la journée, la 10th US Army avait mis à terre 60 000 combattants, occupant une tête de pont longue de près de 13 km et sur une profondeur de plus de 3 km. C'était la mesure réelle de l'efficacité et de la compétence amphibie éprouvée de la 5ème flotte américaine.

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Les LVT-A de la A Company, 1st Armoured Amphibious Battalion, transportent la vague d'assaut du 4th Marines, 6th Marine Division, sur Red Beach. Les LVT-A sont armés d'obusiers de 75 mm et de mitrailleuses cal. 50, qui seront employés plus tard dans la campagne lorsque la 32ème armée japonaise tentera des débarquements amphibies sur les flancs de la 10th US Army, en avril.


L'énorme débarquement ne se fit pas cependant sans effusion de sang. Un sniper blessa le major John H. Gustafson, commandant du 3rd Battalion, 5th Marines, en fin d'après-midi. D'autres soldats furent victimes de tirs de mortiers ou de mitrailleuses. Mais les pertes de toute la 10th US Army, incluant la malchanceuse 2nd Marine Division, se montait à 28 morts, 104 blessés et 27 disparus pour le L-Day. Cela représentait à peine 10 % des pertes supportées par le 5ème Corps Amphibie lors du premier jour sur Iwo Jima.

La vigueur de l'assaut ne se ralentit pas sensiblement après que la 10th US Army eut quitté la tête de pont. La 7th I.D. atteignit la côte orientale le deuxième jour. Le troisième jour, la 1st Marine Division s'empara de la péninsule de Katchin, coupant effectivement l'île en deux. A cette date, les éléments du III AC avaient atteint des objectifs censés être pris initialement au bout de 11 jours. Le lieutenant-colonel Victor H. Krulal, officier opérations pour la 6th Marine Division, se rappelle le général Shepherd lui disant « En avant !. Avance aussi vite que tu le peux. Nous avons battu ces guignols à la course. ». « Eh, bon Dieu, répondit Krulak, nous ne les avons pas battus à la course !. Ils n'étaient pas là. ».

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Les troupes d'assaut du 1st Battalion, 7th Marines, escaladent une digue après le débarquement sur Blue Beach 2, le 1er avril 1945, sans aucune opposition.


Pendant que la 6th Marine Division glissait au nord et que la 1st Marine Division faisait mouvement à l'ouest et au nord-ouest, les problèmes immédiats ne vinrent pas des Japonais mais d'un lent système de ravitaillement, organisé depuis la plage. La ligne de transfert en marge du récif travaillait bien pour les troupes mais était de peu d'utilité pour les chargements. Les responsables de plages de la Navy s'efforcèrent de construire une chaussée élaborée sur le récif, mais dans le même temps, la 1st Marine Division fit la démonstration de quelques-uns de ses acquis logistiques appris sur le tas à Peleliu. Elle monta des grues mouvantes sur des chaussées renforcées et sécurisa les embarcations du côté de la mer par rapport au récif. Les bateaux étaient tirés le long du récif en eaux profondes ; les grues soulevaient des filets remplis avec les chargements de combat des navires pour les mettre dans les écoutilles de DUKW ou de LVT attendant du côté du rivage par rapport au récif pour effectuer le trajet final vers la plage. Cela fonctionna si bien que la division dut aller répandre ses connaissances au sein des autres unités de la 10th US Army.

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D'autres Marines sont débarqués sur la tête de pont par les LCVP. Débarquant, ils courent jusqu'au rivage à travers le calme ressac au-dessus du récif de corail.


La congestion des plages retarda aussi le processus. Les deux divisions de Marines durent avoir recours à leurs réserves prévues pour former des équipe de plages. Leur inexpérience dans ce travail vital, combiné avec le constant appel des groupes pour le remplacement, causa des problèmes de contrôle du trafic, d'établissement de dépôts de ravitaillement fonctionnels et de larcins. Ce n'était en rien une nouveauté : d'autres divisions, lors des opérations précédentes, avaient rencontré les mêmes inconvénients. L'avance rapide des divisions d'assaut nécessitait une énorme quantité d'essence pour le transport motorisé, mais celui-ci mettait du temps à être débarqué et à être acheminé. Le maillage routier pour le moins rudimentaire d'Okinawa compliquait le problème. Le colonel Edward W. Snedecker, commandant le 7th Marines, résuma la situation dans ce rapport emprunt de franchise : « Le mouvement à partir des plages de débarquement sur la côte ouest d'Okinawa à travers l'île fut plus que difficile à cause du terrain rencontré, accidenté. Ce fut physiquement éprouvant pour le personnel qui a été transporté pendant un moment. Il y a également un sérieux problème de ravitaillement dans la zone du 7th en raison du manque de routes. ».

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Les Marines de la 6th Division lors d'une paisible "marche au soleil", à Ishikawa, à L+3. Leur promenade idyllique prendra bientôt fin lorsqu'ils arriveront plus au nord sur le flanc des collines approchant la ville et sur le tout proche Mont Yae Take, où se trouvent de redoutables positions défensives japonaises.
Dernière édition par Kelilean le 04 Juil 2006, 17:47, édité 3 fois.


 

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Nouveau message Post Numéro: 2  Nouveau message de romualdtaillon  Nouveau message 07 Avr 2006, 16:54

Encore une fois, un magnifique travail de mise en page et de recherche iconographique !!


 

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Nouveau message Post Numéro: 3  Nouveau message de Kelilean  Nouveau message 07 Avr 2006, 17:05

Encore une fois, un magnifique travail de mise en page et de recherche iconographique !!


Merci Romuald !. Je précise cependant que les photos et les cartes accompagnent le texte, ce qui me facilite bien la tâche. Il existe en effet de multiples clichés de la bataille d'Okinawa disponibles sur le net.

Avec les deux autres parties, et vue la place prise le forum par celle-ci, l'étude sera vraiment conséquente quand j'aurais terminé...

Amicalement,

:wink:


 

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Nouveau message Post Numéro: 4  Nouveau message de Kelilean  Nouveau message 04 Juil 2006, 17:46

Les batailles navales et aériennes


La stratégie japonaise pour défendre Okinawa utilisa du mieux possible les ressources de la nation et le fanatisme « rampant » . Tandis que le général Ushijima écraserait dans le sang la force américaine débarquée dans une bataille d'attrition bien préparée, l'arme aérienne japonaise ravagerait la 5ème flotte américaine agglutinée à l'île pour le soutien rapproché. La bataille se caractériserait ainsi par une combinaison unique de défense terrestre presque passive avec une offensive aérienne violente qui emploierait les tactiques kamikazes à une échelle inconnue jusqu'alors.

Au printemps de 1945, les Américains connaissaient bien la propension japonaise aux attaques suicides individuelles, ayant l'expérience des kamikazes aux Philippines, des nageurs de combat anti-navires dans les eaux proches d'Iwo Jima, et des « bombes humaines », démolisseurs antichars de Peleliu. Mais le quartier général impérial éleva ces tactiques à un niveau sans précédent à Okinawa en mettant en oeuvre le kikusui (Chrysanthèmes flottants), autrement dit des attaques aériennes suicides massives contre la flotte. Tandis que de petits groupes de kamikazes attaqueraient celle-ci de nuit, les pires dommages viendraient des raids concentrés des kikusui. Les Japonais lancèrent au total dix assauts kikusui distincts durant la bataille -certains d'entre eux comprenant jusqu'à 350 appareils- , et le QG impérial combina celles-ci avec d'autres surprises tactiques, comme les contre-attaques des 12-13 avril et des 3-4 mai, ou la sortie sans retour du Yamato. Les résultats s'avérèrent coûteux pour les deux camps.


L'US Army à Okinawa


Ce serait une injustice de ne pas mentionner l'US Army et sa participation significative à la bataille. En fait, l'Army déploya autant de troupes, subit des pertes en proportion, et combattit avec la même valeur que les Marines. Les batailles de l'Army pour Kakazu Ridge, Conical Hill et l'escarpement de Yuza Dake sont autant de pierres de touche sacrées de ce service que les actions des Marines sur Kunishi Ridge ou le Pain de Sucre. La campagne d'Okinawa est encore citée comme modèle de coopération interservices, en dépit de cas isolés de « rivalité infantile » .

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Des fantassins de l'US Army ont découvert un canot à moteur utilisé pour des opérations suicides contre l'US Navy, au large d'Okinawa.


A un point de la mi-1943, le Joint Chiefs of Staff pouvait seulement compter trois divisions dans le Pacifique possédant une « expérience amphibie » : les 1st et 2nd Marine Divisions, fortes des expériences de Tulagi et de Guadalcanal ; et la 7th I.D., fraîchement arrivée des Aléoutiennes. A cette même époque, ces mêmes unités se joignirent à quatre autres divisions pour constituer la 10th US Army à Okinawa, et le nombre de divisions déployées dans le Pacifique ayant l'expérience des opérations amphibies avait été multiplié par sept. Les trois principales unités d'assaut du XXIV Corps du Major General John R. Hodge avaient l'expérience récente des « débarquements en tempête » à Leyte. Cette campagne était la première pour la 96th Division, qui s'en acquitta elle-même très bien, et la troisième opération pour la 7th I.D., après Attu et Kwajalein. Leyte avait aussi vu la 77th Division, unité revenue de la bataille de Guam, exécuté un débarquement hardi à Ormoc qui surprit les défenseurs japonais. La 27th Division était nouvelle dans le XXIV Corps, une unité de la Garde Nationale encore regardée avec aigreur par les Marines après le fléau de Saïpan, mais une unité fière de ses expériences amphibies dans les Mariannes et les Gilbert. Aucune division de l'Army n'eut le luxe de préparations étendues pour Okinawa. Le général Mac Arthur ne ménagea pas le XXIV Corps, diminué et exsangue après 110 jours de combat sur Leyte et l'affecta à la 10th US Army sept semaines avant le débarquement sur Okinawa. La 27th Division eut plus de temps mais endura des conditions d'entraînement insatisfaisantes dans les jungles d'Espiritu Santo.

Les exemples de totale coopération entre les unités de l'Army et les Marines sont légions dans la campagne d'Okinawa. Les P-47 Thunderbolts de l'USAAF volèrent pour des missions de bombardement à longue distance et de supériorité aérienne pour la TAF du général Mulcahy. Les unités d'artillerie de l'Army et des Marines supportèrent de manière routinière leurs camarades des autres branches durant la course prolongée contre la Ligne Shuri. Les Marines ressentaient un respect certain pour les obusiers de 8 pouces de l'Army ; souvent, ces armes lourdes fournissaient le seul moyen efficace pour réduire des points forts japonais particulièrement bien défendus. En outre, le général Buckner attacha les inestimables « Zippo Tanks » du 713th Armored Flame Thrower Battalion et des batteries de mortiers de 4,2 inches aux deux divisions de Marines. La 6th Marine Division disposait également du 708th Amphibian Tank Battalion, attaché pour l'ensemble de la campagne. Chacune de ces unités détachées reçut la Presidential Unit Citation pour leur service avec les divisions de Marines.

Sur une base moins formelle, l'Army prêta souvent un support logistique aux Marines tandis que l'action se déplaçait lentement vers le sud sous des pluies incessantes. Même la quatrième révision de la table d'organisation des divisions de Marines ne fournissait pas des atouts suffisants en matière de transport pour une si longue campagne menée à des distances de plus en plus lointaines de la tête de pont initiale. Un manque de navires amphibies de transport assignés aux Marines réduisit plus tard le nombre de véhicules à roues ou chenillés disponibles. Souvent, la générosité des unités de soutien de l'Army comblait la différence pour faire en sorte que les Marines mangent chaque jour. Le meilleur exemple de cet esprit d'équipe se produisit le 4 juin, lorsque des éléments de la 96th I.D. fournirent des rations au lieutenant-colonel Richard P. Ross, commandant le 3rd Battalion du 1st Marines, donnant une lueur d'espoir à ce que le bataillon reportait autrement comme « le jour le plus misérable passé sur Okinawa » .

Okinawa, en résumé, était trop grande et trop coriace pour être l'affaire d'un seul service. La campagne de 82 jours contre un ennemi tenace et bien armée requérait un travail d'équipe inhabituel et une coopération entre tous les services.



Des essaims de kamikazes tourmentèrent la 5ème flotte depuis le temps où la force d'assaut était entrée dans les eaux des Ryukyu et jusqu'à la fin de la campagne. Certains commandants intermédiaires de la Navy évoquaient la menace dédaigneusement – des pilotes inexpérimentés dans des avions délabrés lancés avec tout juste assez de carburant pour atteindre Okinawa. En effet, la plupart des 2 373 kamikazes jetés dans la bataille ne virent jamais leurs objectifs. Mais ceux des pilotes des unités d'attaque spéciale qui franchissaient le barrage aérien et celui de la DCA infligèrent de sérieux dommages à la 5ème flotte. A la fin de la campagne, quelques 34 navires ou péniches avaient été coulés, 368 endommagés, et 9 000 hommes étaient hors de combat -les plus lourdes pertes jamais enregistrées par l'US Navy au cours d'un seul affrontement.

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Attaque kamikaze le 11 avril 1945. Les dommages causés à l'US Navy par les avions-suicides durant la campagne d'Okinawa furent certes sévères, mais en aucun cas décisifs.


La situation en mer devint si critique qu'à une occasion, la fumée des navires en flammes et les écrans fumigènes des navires au large aveuglèrent l'aérodrome de Yontan, causant trois crashs d'appareils de retour de missions de protection. Comme l'assaut se poursuivait, l'amiral Spruance observa franchement « Les avions suicides constituent une arme très efficace qu'il ne faut pas sous-estimer. » . Spruance parlait en connaisseur. Les kamikazes avaient frappé son premier navire-amiral, le croiseur lourd USS Indianapolis, juste avant le début de la campagne, puis ils avaient à nouveau touché le navire-amiral de remplacement, le cuirassé USS New Mexico, quelques semaines plus tard.

Les Japonais qui attaquaient la flotte américaine au large d'Okinawa employèrent aussi leur arme ultime, la bombe humaine volante « Okha » (fleur de cerisier), appelé par dérision du côté américain « Baka » (en japonais, cinglé). C'était une fusée pilotée, propulsée par du carburant solide, transportant plusieurs tonnes d'explosifs, lancée sur les navires à partir du ventre d'un bombardier bimoteur. Les bombes Baka devinrent de facto les premiers missiles antinavires guidés, fonçant en hurlant en direction de leur cible à une vitesse inouïe de près de 1 000 km/h. Une de ces armes raya de la surface de la mer le destroyer USS Manert L. Abele. Fort heureusement, la plupart des Baka manquèrent leur cible, les missiles se révélant trop rapides pour que leurs pilotes inexpérimentés puissent les contrôler efficacement dans les quelques secondes dont ils disposaient.

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Un navire américain sévèrement endommagé stationne dans le "chantier de démolition" de Kerama Retto. Il est inspecté par l'US Navy pour juger ou non de sa remise en état, s'il y a lieu.


L'attaque suicide ultime résida dans la dernière sortie du supercuirassé Yamato, le dernier des grands cuirassés de la planète, dont les redoutés canons de 457 mm pouvaient surclasser tout ce qu'alignait l'US Navy en matière de puissance de feu. Le QG impérial planifia pour le Yamato une dernière mission, dans un schéma bizarre, sans couverture aérienne et avec une poignée d'escorteurs de surface, et avec assez de combustible seulement pour un aller simple. La mission du Yamato devait distraire les porte-avions américains d'une puissante attaque kikusui lancée pour achever le reste de la flotte. Au final, le Yamato devait s'échouer sur la côte ouest d'Okinawa, utilisant ses énormes canons pour détruire les péniches et la flotte de débarquement stationnée au large. Le plan était absurde.

Dans les premières années de la guerre, la sortie de ce navire de guerre géant aurait causé la consternation parmi la flotte chargée de protéger une tête de pont amphibie. Plus maintenant ! . Les sous-marins américains en patrouille avertirent rapidement Spruance du départ du Yamato des eaux du Japon. « Dois-je m'en occuper ou tu t'en charges ? » demanda-t-il au vice-amiral Marc A. Mitscher, commandant les porte-avions rapides de la TF 58. Spruance savait pertinemment que sa force de cuirassés brûlait d'une rencontre de surface pour venger les pertes subies à Pearl Harbor, mais ce n'était pas le moment d'être sentimental : « Tu t'en occupes. » conclut-il. Avec ce blanc-seing, les Hellcats et les Avengers de Mitscher ronronnèrent bientôt dans les airs, interceptèrent le Yamato à quelques 160 km de la tête de pont, et le coulèrent rapidement avec bombes et torpilles. Le coût : 8 avions abattus et 12 hommes perdus.

Une autre mission suicide japonaise étrange se révéla plus efficace. Dans la nuit du 24 au 25 mai, une demi-douzaine d'avions de transport embarqua des Giretsu, les commandos japonais, et s'approcha de l'aérodrome de Yontan. Les canonniers de la DCA en alerte en abattirent cinq. Le dernier appareil réalisa un atterrissage sur le ventre en plein sur le terrain, déchargeant ses troupes tandis qu'il se consumait dans les flammes. Le commando fit sauter 8 avions américains, en endommagea sérieusement deux autres, fit partir en flammes 70 000 gallons d'essence pour l'aviation, et de manière générale créa de grands ravages durant toute la nuit. Les troupes au sol et celles de sécurité, anxieuses, tiraient sur des ombres, touchant plus leurs propres camarades que les Japonais. Il fallut 12 h pour éliminer tous les commandos japonais du secteur.

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Raid japonais nocturne sur l'aérodrome de Yontan, 16 avril 1945. Le ciel est zébré par les traçantes de la DCA américaine. Les Corsairs de la VMF-311 se distinguent au premier plan.


L'amiral Spruance en mer et le général Mulcahy au sol entreprirent des efforts herculéens pour réduire l'efficacité des attaques suicides japonaises. Les porte-avions rapides assaillirent les aérodromes japonais de Kyushu et de Formose, mais il y en avait plus d'une centaine, et comme à l'accoutumée les Japonais se révélèrent des maîtres dans l'art du camouflage. De petites opérations de débarquement furent effectuées par les soldats et les Marines pour s'emparer des îles avoisinantes afin d'y installer des guets d'alerte aérienne et des centres avancés de direction de la chasse. Et les avions de chasse des trois branches furent mis à contribution pour intercepter les vagues intermittentes d'avions ennemis.

Tous les appareils japonais n'étaient cependant pas des kamikazes. Un nombre égal de chasseurs et de bombardiers accompagnait chaque raid pour le guider sur ses objectifs et attaquer les Américains par des moyens conventionnels. Parmi ceux-ci, on trouvait des chasseurs de dernière génération, comme le fameux Nakajima Ki-84 Frank. Des duels aériens mortels prirent place au-dessus des centaines de km² des étendues océaniques.

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Des Avengers du Marine Torpedo Bomber Squadron 232, vus par le hublot d'un appareil de transport servant d'appareil de navigation durant le vol au-dessus de l'océan entre Ulithi et Kadena, sur Okinawa. Le premier échelon atterrit le 22 avril et commence les missions d'appui le lendemain.


Les porte-avions rapides, avec une large autonomie, assuraient les premières interceptions. Si la plupart des pilotes étaient de la Navy, la Task Force regroupait aussi deux squadrons de chasse des Marines sur chacun des porte-avions USS Bunker Hill et USS Bennington. Un pilote des Marines de ce dernier, le lieutenant Kenneth E. Huntington, était aux commandes du seul Corsair impliqué dans l'attaque du Yamato. Huntington manoeuvra habilement à travers le rideau de feu de la défense anti-aérienne et plaça soigneusement sa bombe sur la tourelle avant du cuirassé. Comme cela a été rapporté par le correspondant de guerre Robert Sherrod, « Un Marine, une bombe, une Navy Cross. » .


L'aviation des Marines à Okinawa


« Okinawa fut le point culminant du développement de la doctrine du support aérien dans le Pacifique. » déclara le colonel Vernon E. Megee, commandant de la Landing Force Air Support Units durant la campagne. « Les procédures que nous utilisions alors étaient le résultat des leçons retenues durant toutes les campagnes précédentes, y compris les Philippines. » . En effet, l'aviation de l'USMC remplit à Okinawa tout un éventail de missions, du largage de ravitaillement au bombardement d'un cuirassé ennemi.

Ce sont près de 700 appareils des Marines, de tous types, qui prirent part à la campagne d'Okinawa. Près de 450 d'entre eux furent engagés au combat pendant plus de la moitié de la bataille. La plupart des unités aériennes des Marines servaient sous l'égide de la Tactical Air Force (TAF) de la 10th US Army, commandée par le Major General Francis P. Mulcahy (relevé le 8 juin par le Major General Louis E. Woods, de l'USMC). En dehors de la TAF, il y avait les squadrons de chasse des Marines embarqués sur les porte-avions de ligne ou d'escorte et les avions de transport à grand rayon d'action.

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Un Corsair tire une salve de roquettes contre les positions japonaises d'Okinawa.

L'amiral Raymond A. Spruance, commandant toutes les forces alliées durant l'opération Iceberg, pensait que l'arme aérienne japonaise serait la plus grande menace pour le succès de l'opération d'invasion. Le premier objectif de la 10th Army, en conséquence, devint la prise des aérodromes de Yontan et de Kadena pour permettre l'installation au sol de chasseurs. Les alliés le réussirent dès le premier jour du débarquement. Le jour suivant, le général Mulcahy débarqua à terre et la TAF commença ses opérations. L'objectif numéro un de Mulcahy était de maintenir la supériorité aérienne au-dessus d'Okinawa et de la 5ème flotte. Au regard des attaques kamikazes sans précédent déclenchées par les Japonais contre la Task Force, cette mission resta la préoccupation de Mulcahy pendant de nombreuses semaines.

Les deux aviations de l'Army et des Marines devaient coopérer au sein de la TAF de Mulcahy. Cette force gagnera en puissance jusqu'à compter 15 squadrons de chasse des Marines, 10 de l'Army, 2 squadrons de torpilleurs des Marines et 16 squadrons de bombardiers de l'Army. Dans l'exécution de leurs missions de supériorité aérienne, les Marines volaient sur les Chance Vought F4U Corsairs, et les squadrons de chasse de nuit de l'USMC naviguaient sur des F6F Hellcats équipés de radars. Les squadrons de chasse de l'Army alignaient des Republic P-47 Thunderbolts, et ses squadrons de chasse nocturne des Northrop P-61 Black Widow.

Les pilotes américains ne livraient pas uniquement leurs duels aériens contre les kamikazes : ils faisaient face aussi à une floppée de derniers modèles de chasseurs japonais, Jack ou Franck par exemple. Au cours de la campagne, les pilotes de la TAF abattirent quelques 625 appareils ennemis. Le colonel Ward E. Dickey et son Marine Air Group 33 détinrent le record avec 214 kills ; plus de la moitié fut l'oeuvre des « Death Rattlers », le VMF-323 du Major George F. Axtell.

La nécessité pour la TAF de protéger la flotte causa des inquiétudes à certains officiers à terre qui craignirent que leur soutien aérien rapproché soit réduit à une peau de chagrin. Mais les squadrons embarqués de l'US Navy et certains des Marines assurèrent la relève, fournissant plus de 60 % des missions d'appui rapproché. Entre le 1er avril et le 21 juin, la combinaison de la Navy et de la TAF délivra 14 244 sorties d'appui au sol. Près de 5 000 étaient destinés aux Marines du III Amphibious Corps. Dans cette oeuvre gigantesque, les pilotes engagés larguèrent quelques 152 000 gallons de napalm sur les positions adverses.

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Un Grasshoper d'un Marine Observation Squadron vole au-dessus de Naha, permettant à un observateur de réaliser des clichés obliques utilisés ensuite par l'artillerie pour repérer les cibles et évaluer les dégâts déjà infligés.


Des équipes de liaison aérienne accompagnaient les divisions de première ligne et étaient utilisées pour demander un appui aérien rapproché et diriger (mais non contrôler : le front était trop étroit) les appareils sur la cible. La coordination au plus bas échelon des appels aériens devint le territoire de trois Marine Landing Force Air Support Control Units, l'une représentant la 10th Army auprès du commandant de la flotte, les autres étant responsables du XXIV et du III Amphibious Corps. Cette technique affinait encore les expérimentations débutées par le colonel Megee à Iwo Jima. Dans la plupart des cas, le soutien aérien rapproché aux unités se révéla extraordinairement efficace. Quelques unités rapportèrent des frappes précises et en sûreté effectuées à moins de 100 m de distance. Parfois, il y eut des retards, des accidents (moins d'une douzaine répertoriés), ou des situations dans lesquelles le front était trop flou pour autoriser un quelconque support aérien – ainsi, la bataille que la 6th Marine Division mena dans la péninsule d'Oroku.

Les autres unités aériennes des Marines contribuèrent de manière significative à la victoire sur Okinawa. Les squadrons de torpilleurs (VMTB) menaient leurs Grummann Avengers (TBF) dans une météo « zéro-zéro » pour larguer près de 400 000 livres de rations, de matériel médical, de munitions au-dessus des troupes au sol - opération grandement facilitée par la préparation hors pair des colis par la Section de livraison aérienne du III AC. Et les petits et fragiles Grasshoppers des 4 Marine Observation Squadrons (VMO) effectuèrent 3 486 missions de réglage d'artillerie, de reconnaissance photographique ou d'évacuation médicale. Un officier général d'artillerie décrira les pilotes des VMO comme « les héros méconnus de l'aviation des Marines... souvent ils volaient au même niveau que les ouvertures des grottes et ils pouvaient regarder et voir s'il y avait un canon dans la place. » . Le colonel Yahara se plaignit que ses unités d'artillerie avaient fait l'amère expérience que la présence des Grasshoppers au-dessus de leurs têtes présageait une contrebatterie rapide si une pièce japonaise avait le malheur d'ouvrir le feu.

Les aviateurs des Marines servirent à Okinawa avec un élan tout particulier. Durant un dogfight désespéré, un pilote s'écria à la radio « Venez et aidez-moi, j'ai coincé un Frank et deux Zekes ! . » . Ce furent ces derniers mots, mais le fighting spirit persistait. Comme l'a dit grâcieusement un commandant de destroyer délivré des essaims de kamikazes par l'intervention de Corsairs de l'USMC : « Je suis capable d'emmener mon navire jusqu'aux plages du Japon si j'ai ces Marines avec moi ! . » .

Les chasseurs des MAG 31 et 33, volant depuis Yontan au sein de la TAF de Mulcahy, fournirent la plupart des missions CAP au-dessus de la flotte, pendant les premières semaines de la bataille. Les exigences des CAP grimpèrent de 12 appareils initialement jusqu'à 32, avec en outre une douzaine d'appareils en alerte sur la piste. Les missions impliquaient de longues heures de patrouille, dans un temps souvent détestable, entrecoupées de rencontres violentes avec les raiders japonais. Les avions des CAP couraient un double risque. Les appareils en plein duels aériens parvenaient souvent au-dessus des canons antiaériens de la flotte et de leurs artilleurs pour le moins nerveux, et ceux-ci abattaient fréquemment les appareils des deux camps involontairement.

Le 16 avril, la VMF-441 se précipita au secours du destroyer piquet USS Laffey, déjà frappé par cinq avions suicides. Les Corsairs mirent rapidement en flammes 17 avions ennemis, perdant seulement un des leurs qui avait poursuivi un kamikaze si près des flots que les deux appareils heurtèrent la superstructure du navire et furent pulvérisés.

Le 22 avril, les « Death Rattlers » du VMF-323 interceptèrent une large formation japonaise approchant de la flotte au crépuscule. 3 pilotes descendirent 16 appareils nippons en 20 mn. Le commandant du squadron, le major George T. Axtell, s'en adjugea 5, devant ainsi « as en un jour » . Il décrit lui-même ces duels aériens soudains : « Nous volions dans et en-dehors d'une pluie drue et de nombreux nuages. Les appareils des deux camps furent projetés dans une mêlée indescriptible. De chaque côté où je tournais la tête surgissait un nouvel avion ennemi... ce fut rapide et furieux et l'engagement se termina après 30 mn de duels acharnés. » .

Mais en dépit des efforts de ces aviateurs et de ceux des équipages au sol, les kamikazes étaient si nombreux que certains franchissaient les mailles du filet. Bientôt, le mouillage à l'abri de Kerama Retto commença à prendre l'allure d'un cimetière flottant pour les navires lourdement endommagés. De petits groupes de kamikazes faisaient irruption chaque nuit, et la flotte semblait particulièrement vulnérable durant les nuits de pleine lune. Un officier de la marine décrivait les raiders nocturnes comme « des sorcières sur leurs manches à balais » . Plus que les autres, les victimes de ces attaques nocturnes étaient les « small boys », les navires piquets et les navires amphibies de petites dimensions. Le Signalman 3/C Nick Floros, âgé de 19 ans, servait un canon antiaérien de 20 mm monté sur le petit LSM-120, au milieu de la nuit, lorsqu'un kamikaze apparut « sortant de nulle part, glissant à basse altitude, moteur coupé, telle une gigantesque chauve-souris. » . L'appareil frappa le LSM adjacent dans une explosion terrifiante avant que la DCA n'ait pu tiré un seul bous. Le petit LSM, chargé de ravitaillement pour les troupes à terre, survécut à cet énorme impact mais fut immédiatement consigné au « chantier de démolition » à Kerama Retto.

Le QG impérial, qui acceptait sans broncher les revendications gonflées rapportées par quelques observateurs accompagnant les raids kikusui, croyait que les attaques suicides massives avaient fortement estropié la flotte américaine. C'était un voeu pieux. La 5ème flotte avait été touchée nerveusement et dans sa chair par les kamikazes, mais elle était simplement trop gigantesque pour être rayée de la carte. La flotte supporta le pire de ces attaques aériennes apparemment sans terme, sans jamais renoncer à sa mission première qui était d'appuyer le débarquement amphibie sur Okinawa. Le support d'artillerie navale, par exemple, n'avait jamais été aussi efficace, avec pas moins de 3 800 tonnes d'obus délivrées en ouverture le Love-Day. Pendant l'essentiel de la campagne, chaque régiment du front reçut le soutien direct d'un navire « call fire » et d'un autre navire « illuminating fire » . Le symbole de cet excellent appui naval, souligné par bien des membres de la force débarquée, est sans doute le message du général Shepherd au commandant de la Northern Attack Force pendant l'assaut de la 6th Marine Division sur le mont Yae Take : « L'efficacité de votre support de feu naval est mesuré par le vaste nombre de Japonais rencontrés. Tous morts. » .

De la même manière, et même pendant la période la plus intense des attaques kikusui entre le 1er et le 16 avril, la flotte déchargea la quantité effarante de 557 000 tonnes de ravitaillement pour la 10th Army sur les plages d'Hagushi, exécuta un assaut à l'échelle d'une division sur Ie Shima, et nettoya mines et obstacles sous le feu ennemi pour ouvrir le port de Nago. Le seul effet direct des raids kamikazes massifs sur la conduite des opérations de la 10th Army à terre fut le naufrage, le 6 avril, des deux transports de munitions Logan Victory et Hobbs Victory. Le manque qui en résultat d'obus d'artillerie de 105 et de 155 mm retarda la première grande offensive du général Buckner conte les défenses de Shuri de trois jours seulement. Dans tous les aspects, la 5ème flotte fit honneur à son sobriquet médiatique de « flotte qui reste à demeure » .

Mais comme avril cédait la place à mai, et que la 10th Army semblait embourbée dans des attaques frontales insensées face à la ligne Shuri, les amiraux Spruance et Turner commencèrent à presser Buckner d'améliorer ses tactiques afin de diminuer la vulnérabilité de la flotte. L'amiral Nimitz, se sentant concerné, s'envola vers Okinawa pour conseiller Buckner. « Je perds un navire et demi chaque jour que je passe ici », dit Nimitz, « à vous de changer ce état de choses. » .

Les officiers généraux des Marines pressèrent Buckner de jouer « la carte amphibie » et d'exécuter un débarquement massif sur la côte sud-est, particulièrement sur l'alternance des plages de Minatoga, pour tourner le flanc droit des Japonais. Ils furent rejoints dans leur recommandation par plusieurs généraux de l'Army qui avaient déjà compris que les assauts frontaux le long de la ligne Shuri deviendraient une boucherie. Le commandant de l'USMC, le général Alexander A. Vandegrift, visita l'île et appuya ces suggestions auprès de Buckner. Après tout, Buckner avait à sa disposition la 2nd Marine Division, une unité éprouvée des débarquements amphibies, qui avait montré de quoi elle était capable le Love-Day face aux plages de Minatoga. Buckner avait rapatrié sa réserve flottante à Saïpan pour éviter qu'elle ne subisse des pertes en mer du fait des kamikazes, mais la division avait ses bateaux assignés sous la main, prêts au combat. La 2nd Marine Division pouvait ouvrir un second front à Okinawa en quelques jours à peine.

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Des Marines viennent de jeter une charge explosive dans une grotte, et attendent, les armes à la main, la sortie d'éventuels survivants japonais. Une des innombrables grottes que comptent les crêtes et les collines d'Okinawa, qui devront être prises l'une après l'autre, au prix de lourdes pertes et de combats intenses.


Le général Buckner était un commandant compétent et populaire, mais il avait une expérience limitée de l'art de la guerre amphibie et était d'une nature conservatrice. Son état-major l'alerta sur les problèmes logistiques que poseraient l'ouverture d'un second front. Ses conseillers pour le renseignement prédisaient une résistance ennemie opiniâtre sur la tête de pont de Minatoga. Buckner en avait assez entendu sur l'opération coûteuse d'Anzio, en Italie, pour être suffisamment méfiant à l'encontre de tout débarquement exécuté trop loin de l'effort principal. Il croyait sincèrement que les Japonais assurant la défense de la ligne Shuri craqueraient bientôt sous l'effet conjugué de la masse de puissance de feu rassemblée et de son infanterie. Buckner rejeta donc l'option amphibie comme hors de propos. De manière surprenante, Nimitz et son chef d'état-major, l'amiral Forrest Sherman, approuvèrent. Ce n'était pas le cas de l'amiral Spruance et de Turner, des Marines. Comme Spruance devait l'admettre plus tard dans une lettre privée, « il y a des fois où j'attends avec impatience quelque chose dans le genre de l'élan de Holland Smith. » . Le général Shepherd notait : « Le général Buckner ne voit pas d'un bon oeil les opérations amphibies. » . Même le colonel Hirochimi Yahara, l'officier opérations de la 32ème armée japonaise, admit durant son interrogatoire qu'il était resté perplexe devant l'adhésion des Américains à un assaut purement frontal, du nord vers le sud : « L'absence d'un débarquement [dans le sud] intrigua l'état-major de la 32ème armée », dit-il, « particulièrement après le début de mai où il devint impossible de faire plus qu'une résistance symbolique dans le sud. » .

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Par la suite, la 2nd Marine Division avait commencé à se sentir comme un yo-yo lors de la préparation des différentes missions qui lui étaient assignées pour l'opération Iceberg. Le lieutenant-colonel Taxis, division G-3, ne pouvait pardonner la décision de Buckner. « Je ressentirai toujours », dit-il après la guerre, « que la 10ème armée aurait dû être préparée sur l'instant lorsqu'il se trouva que les hommes étaient embourbés, ils auraient dû lancer un crochet en bas à gauche contre les plages méridionales... ils avaient le potentiel infernal d'une division renforcée, entraînée à mettre en l'air des moucherons sur une moustache. » .

Buckner maintînt sa décision. Il n'y aurait pas de « crochet à gauche » . A la place, les 1st et 6th Marine Divisions se joigneraient à l'offensive sur Shuri comme les divisions d'infanterie de la 10th US Army. La 2nd Marine Division, amputée d'une équipé de débarquement de la taille d'un régiment renforcé (8th Marines), retourna se languir à Saïpan. Ensuite arrivèrent sur Okinawa les incessantes pluies de printemps.


Assaut sur Shuri


Le rapport de bataille de la 10th US Army sur les combats d'Okinawa recèle un compliment discret concernant les efforts défensifs initiés par la 32ème armée japonaise : « Le développement continu et l'amélioration de l'art de la guerre des grottes fut le plus remarquable atout des tactiques ennemies sur Okinawa. » . Dans leur décision de défendre les hauteurs de Shuri le long de l'étranglement du sud d'Okinawa, le général Ushijima et son état-major avait sélectionné le terrain qui dominerait le mieux deux caractéristiques stratégiques essentielles de l'île : le port de Naha à l'ouest, et le mouillage protégé de la baie Nakagusuku (plus tard baie de Buckner) à l'est. En conséquence, les Américains devraient se forcer un passage à l'intérieur des champs de mort préparés par Ushijima afin d'atteindre leurs objectifs essentiels.

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Un habitant d'Okinawa sort d'une grotte où vient d'être jetée une grenade fumigène. Beaucoups de civils se refugièrent dans les grottes, espérant ainsi se préserver du fracas de la bataille à l'extérieur. Malheureusement, les Marines scellaient de nombreuses grottes quand ils croyaient avoir à faire à des nids de résistance japonais.


Tout dans le terrain favorisait les défenseurs. La topographie complexe des crêtes, des fossés et des escarpements servaient à compartimenter le champ de bataille en de nombreux et petits champs de tir, tandis que l'absence générale de végétation permettait aux défenseurs une couverture totale de l'espace et même d'interposer des feux de soutien avec des points fortifiés intermédiaires. Comme à Iwo Jima, l'armée japonaise se battit largement à partir de positions souterraines, afin de compenser la supériorité américaine en puissance de feu. Et même dans le terrain le plus accessible, les Japonais prirent avantage des milliers de tombeaux en dur d'Okinawa, façonnés en forme de lyre, pour fournir des avant-postes avancés. Il y avait des positions aveugles dans les défenses, c'est sûr, mais les trouver et les exploiter prit un temps considérable aux Américains et leur coûta très cher.

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Un "Ronson", équipé d'un lance-flammes, arrose une position japonaise cachée dans une des nombreuses tombes d'Okinawa bâties à flanc de colline.


Les combats les plus sévères de la campagne prirent place au sein d'un champ de bataille extrêmement réduit. La distance linéaire de Yanabaru, sur la côte orientale, au pont sur la rivière Asa à Naha, du côté opposé de l'île, couvrait quelques 9 000 yards. Le général Buckner poussa initialement de front avec deux divisions de l'US Army. Au 8 mai, il avait doublé son engagement : deux divisions de l'US Army, XXIVth Corps, à l'est, deux divisions de Marines du IIIrd A.C. À l'est. Pourtant chaque division se battrait dans ses propres, coûteuses et désespérées batailles contre des soldats japonais disciplinés défendant un terrain savamment fortifié. Il n'y avait aucune route facile en direction du sud.

En supprimant une attaque de flanc amphibie à la fin avril, le général Buckner avait des divisions fraîches à employer dans on offensive générale en direction de Shuri. Ainsi, la 77th Division releva la 96th au centre, et la 1st Marine Division commença à relever la 27th Division à l'ouest. Le colonel Kenneth B. Chappell et son 1st Marines prirent place sur la ligne de front le dernier jour d'avril et supportèrent un feu dense à partir du moment où ils en approchèrent. Jusqu'à ce que le 5th Marines soit arrivé pour relever les éléments restants de la 27th Division, les artilleurs japonais supportant les vétérans de la 62ème division d'infanterie firent feu sur tout ce qui bougeait. « C'est l'enfer, ici, le Marine », fit remarquer un soldat désabusé au Private First Class Sledge du 3rd Battalion, 5th Marines. « Je sais », répondit dans une bravade contrefaite Sledge, « j'ai combattu à Peleliu. » . Mais bientôt Sledge dût courir pour sauver sa peau : « Comme on avançait en terrain découvert, des obus japonais de tous calibres sifflaient, hurlaient et rugissaient autour de nous dans une fréquence de plus en plus prononcée. L'impact et le tonnerre des explosions étaient un cauchemar... c'était un chaos épouvantable. J'étais littéralement terrifié. » .

Le général del Valle assuma le commandement de la zone occidentale à partir du 1er mai, à 14h, et donna des ordres pour une attaque en règle le lendemain matin. Ce soir-là, un officier de l'état-major apporta au générale une carte japonaise capturée, complètement annotée avec les positions des Américains. Avec un malaise croissant, del Valle réalisa que ses opposants savaient déjà que la 1st Marine Division était entrée dans la bataille.

La division attaqua le lendemain vers le sud à travers un terrain décousu connu sous le nom, ensuite, de poche de Awacha. Malgré toutes leurs prouesses au combat, les Marines se révélèrent tout aussi sensibles au flot ininterrompu de balles et d'obus qui leur arrivaient dessus que les soldats qu'ils avaient remplacés. Ce jour désappointant inclut aussi quelques signes avant-coureurs des futures conditions de combat. Premièrement, il pleuvait en continu chaque jour. Ensuite, à chaque fois que le 5th Marines s'emparait de la hauteur la plus proche, il était soumis au feu intense des points fortifiés japonais situés à proximité et à celui des positions japonaises en hauteur qui les surplombaient et qui se trouvaient dans le secteur adjacent de la 77th Division, immédiatement au sud-est, et ils devaient donc se retirer. Enfin, les Marines passaient l'essentiel de la nuit en combats au corps-à-corps contre de nombreux Japonais infiltrés dans leurs lignes. « Cela », dit un survivant, « était en train de devenir une vraie saloperie ! . » .

Les vétérans de Peleliu que comptaient la 1st Marine Division n'étaient pas novices dans la guerre des grottes. En clair, aucune autre division dans la campagne ne pouvait se prévaloir d'une telle richesse d'expériences pratiques. Et bien que rien à Okinawa ne puisse se comparer aux falaises escarpées d'Umurbrogol, à la végétation dense et à l'alignement sans fin de crêtes fortifiées, la « Old Breed » faisait face dans cette bataille à un ennemi plus habile et plus nombreux qui avait préparé avec soin chaque piège dans ce paysage lunaire. En venant à bout des barrières séquentielles d'Awasha, Dakeshi et de Wana, la 1st Marine Division connut quatre semaines complètes d'enfer. L'effet d'entonnoir des falaises et des fossés réduisait la plupart des attaques à de brutaux assauts frontaux totalement exposés, menés conjointement par l'infanterie, le génie et les chars. Le général del Valle caractérisa ce combat de groupes de faibles ampleur : « un match lent mais avec des opportunités de manoeuvres temporaires et limitées. » .

Le général Buckner saisit l'imagination des médias avec sa métaphore au sujet des tactiques « du chalumeau et du tire-bouchons » employées pour mener une guerre des grottes efficace, mais c'était simplement répéter l'évidence pour les vétérans de l'US Army qui avaient connu Biak et ceux des Marines qui avaient survécu à Peleliu et Iwo Jima. Les lance-flammes représentaient le chalumeau, et les charges de démolition le tire-bouchons – qui étaient cependant associés, à courte portée, par les chars et par les fantassins exposés qui les appuyaient.

Le 3 mai, les pluies diminuèrent d'intensité et le 5th Marines reprit ses assauts, cette fois-ci prenant et tenant un bon tiers du terrain clé que constituait la poche d'Awacha. Mais la réduction systématiques des autres points fortifiés prendrait encore une semaine entière de combats acharnés. Le feu de soutien s'avéra excellent. Maintenant c'était au tour de l'US Army de faire la faveur de partager son soutien d'artillerie. Dans ce cas précis, le régiment d'artillerie de campagne de la 27th Division resta sur la ligne, et avec ses observateurs avancés et ses hommes de troupe intimement familiarisés avec le terrain du secteur, rendit des services inestimables.


 

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Re:

Nouveau message Post Numéro: 5  Nouveau message de Shiro  Nouveau message 02 Mar 2009, 09:56

Kelilean a écrit: Les Japonais qui attaquaient la flotte américaine au large d'Okinawa employèrent aussi leur arme ultime, la bombe humaine volante « Okha » (fleur de cerisier), appelé par dérision du côté américain « Baka » (en japonais, cinglé). C'était une fusée pilotée, propulsée par du carburant solide, transportant plusieurs tonnes d'explosifs, lancée sur les navires à partir du ventre d'un bombardier bimoteur. Les bombes Baka devinrent de facto les premiers missiles antinavires guidés, fonçant en hurlant en direction de leur cible à une vitesse inouïe de près de 1 000 km/h. Une de ces armes raya de la surface de la mer le destroyer USS Manert L. Abele. Fort heureusement, la plupart des Baka manquèrent leur cible, les missiles se révélant trop rapides pour que leurs pilotes inexpérimentés puissent les contrôler efficacement dans les quelques secondes dont ils disposaient.


Mille excuses mais je voudrais revenir un peu sur ce sujet. Je sais que la derniere visite du posteur date d'il y a plus de 2 ans mais pour ma part, il m'a fallu du temps pour demander autour de moi. :oops: et ce n'est pas toujours facile.

Personne ne connaissait a part la signification de " fleur de cerisier ". Il va de soi que certains specialistes connaissent mais la population en general ne connait pas.

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Re: Re:

Nouveau message Post Numéro: 6  Nouveau message de romualdtaillon  Nouveau message 02 Mar 2009, 16:06

Shiro a écrit: Mille excuses mais je voudrais revenir un peu sur ce sujet. Je sais que la derniere visite du posteur date d'il y a plus de 2 ans mais pour ma part, il m'a fallu du temps pour demander autour de moi. :oops: et ce n'est pas toujours facile.

Personne ne connaissait a part la signification de " fleur de cerisier ". Il va de soi que certains specialistes connaissent mais la population en general ne connait pas.


Associés au caractère éphémère mais splendide de la vie, les fleurs de cerisier étaient parfois peintes sur la coque des avions ou des ohka...

Un excellent ouvrage qui traite entre autres de cette utilisation par le régime shōwa du concept de bourgeon de cerise dans tout ce qui se rattachait aux missions suicides : Emiko Ohnuki-Tierney, Kamikaze Diaries : Reflections of Japanese Student Soldiers, 2007

Pour t'en donner une idée, voici trois extraits de journaux de pilotes suicides que j'y ai puisé pour mon article sur les Kamikaze dans 2e Guerre mondiale :

«Il doit y avoir une certaine paix d’esprit à consacrer ma vie à l’empereur… Pour être honnête, je ne peux pas affirmer que le désir de mourir pour l’empereur est authentique, encré dans mon cœur. Toutefois, on a décidé que je mourrai pour l’empereur.» Journal d’Ichizō Hayashi, pilote tokkōtai.

«À Masanori et Kiyoko,
...Votre père est devenu un dieu et il vous protège sans cesse. Vous deux, étudiez fort, et aidez aussi votre mère dans ses tâches. Masanori et Kiyoko, papa ne peut plus jouer au cheval avec vous mais vous deux, devenez amis et restez près l'un de l'autre. Votre papa était un joyeux drille qui s'est embarqué dans un gros bombardier et a détruit l'ennemi. Vous deux, grandissez et devenez aussi fort que papa et s'il vous plaît, vengez ma mort.» Journal du lieutenant colonel Masanobu Kuno, pilote tokkōtai.

«Ma courte vie de 21 ans est sur le point de se transporter demain dans le monde de la mort. Quelques vagues pensées au sujet de mon âme intronisée au Yasukuni, au sujet du monde incompréhensible de la mort, et d'autres qui vont et viennent. (...) Je me suis senti embarrassé de réaliser que j'étais encore autant attaché à la vie après tout ce temps. Quel couard ! Honte à moi! Je me disais "Es-tu prêt maintenant?" et il y a ait une voix qui répondait "Oui, je suis prêt!" mais il y avait aussi cette voix qui ne cessait de hurler "Je ne veux pas mourir!".» Journal de Goro Nagamine, pilote tokkōtai.


http://www.discountpresse.com/2e-guerre-mondiale,95041.html


Pour l'ignorance de la population, il me semble que c'est en harmonie avec les connaissances générales du nippon sur la SGM...


 

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Re: Re:

Nouveau message Post Numéro: 7  Nouveau message de Shiro  Nouveau message 10 Mar 2009, 13:23

romualdtaillon a écrit:Pour l'ignorance de la population, il me semble que c'est en harmonie avec les connaissances générales du nippon sur la SGM...


Bonsoir Romuald,

Tu m'as donne plusieurs exemples des Tokkatai. Beaucoup de personnes d'un certain age connaissent " doki no sakura ".

http://www.youtube.com/watch?gl=JP&hl=ja&v=-BoozeA5D9g

mais ceci n'a rien a voir avec les " okha ".

Au plaisir de te lire.

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Re: Re:

Nouveau message Post Numéro: 8  Nouveau message de romualdtaillon  Nouveau message 10 Mar 2009, 15:11

Shiro a écrit:
romualdtaillon a écrit:Pour l'ignorance de la population, il me semble que c'est en harmonie avec les connaissances générales du nippon sur la SGM...


Bonsoir Romuald,

Tu m'as donne plusieurs exemples des Tokkatai. Beaucoup de personnes d'un certain age connaissent " doki no sakura ".

http://www.youtube.com/watch?gl=JP&hl=ja&v=-BoozeA5D9g

mais ceci n'a rien a voir avec les " okha ".

Au plaisir de te lire.


Bonjour,

les Ohka ne sont qu'une catégorie des tokubetsu kōgeki tai (tokkōtai), mise en service en mars 1945. Elles étaient pilotées par le même type d'individus.

Pour le Daihonei, il n'y avait pas vraiment de distinction entre les Ohka, les Kaiten, les Fukuryu, les Shinyo , les Maru-ni et les avions.

La symbolique du sacrifice et du cerisier était la même pour toutes les unités. Si les nippons ont ooublié aujourd'hui l'existence de ces unités spéciales, c'est simplement qu'elles étaient plus rares que les escadrons d'avions.


 

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