Début 1941, des pourparlers avaient lieu entre Hitler et Yosuke Matsuoka, le ministre nippon des affaires étrangères, pro-nazi convaincu. Le Führer comptait sur le Japon pour dissuader les États-Unis d'entrer en guerre. Hitler et Ribbentrop étaient désireux d'entraîner le Japon dans le conflit, non pas contre les USA ou l'URSS, mais contre l'Empire britannique.
Le 23 février une rencontre entre Ribbentrop et un autre pro-nazi, l'ambassadeur japonais Hiroshi Oshima, a pour but de convaincre le Japon d'adopter un ton ferme dans les négociations avec Washington. Le ministre allemand prétend alors qu'une défaite de l'Allemagne entraînerait l'écroulement du régime impérialiste japonais.
En forçant le Japon à s'attaquer aux colonies btritanniques, Hitler espérait voir la Grande-Bretagne dans l'obligation de diviser ses forces et les États-Unis concentrer leurs opérations dans le Pacifique, diminuant ainsi l'aide de ces derniers à leurs alliés insulaires. Le Führer tenait à dissimuler Barbarossa à ses alliés italiens et aux Japonais.
18 mars, conférence au sommet en Allemagne:
Raeder déclare que toutes les conditions sont réunies pour que les Japonais attaquent Singapour. Il y a un os; Le Japon exigerait que les Allemands débarquent en Angleterre comme condition préalable. Le grand Amiral conseille donc à Hitler d'informer Matsuoka de ses intentions belliqueuses à l'encontre de la Russie. Nul ne sait ce que le Führer a jugé bon lui répondre, mais il n'en fit rien.
26 mars, Hitler reçoit Matsuoka et tente à nouveau de le convaincre d'attaquer Singapour. Il lui sert encore un long discours comme quoi l'Angleterre a perdu la guerre et se raccroche à deux brins d'herbe, la Russie et l'Amérique. La Russie n'oserait pas se mesurer aux 170 divisions de la Wehrmacht; l'Amérique ?
L'Amérique ? Elle a le choix entre trois solutions: s'armer elle-même; aider l'Angleterre; faire la guerre ailleurs que sur le front européen. Si elle aide l'Angleterre, elle ne pourra plus s'armer. Si elle l'abandonne, celle-ci sera détruite et l'Amérique se trouvera isolée en face des trois puissances coalisées de l'Axe. Faire la guerre sur un autre front ? En aucun cas, l'Amérique n'en est capable.
Matsuoka répondit qu'il ne "gouvernait malheureusement pas l'Empire du Mikado et que, pour le moment, il ne pouvait prendre d'engagement en son nom..." Le Japon n'a peut-ête pas avalé toutes ces tergiversations mais on peut supposer qu'il en a tenu quand même compte pour attaquer... Pearl Harbor !!!
4 avril, Matsuoka, de retour à Berlin après une visite au Duce, rencontre Hitler qui commence à croire sa propre propagande sur la faible puissance militaire américaine. Il en profite pour lui faire signer la promesse fatale suivante: "Au cas où le Japon entrerait en conflit armé avec les États-Unis, l'Allemagne prendra immédiatement les mesures nécessaires."
Le silence de Hitler sur son projet Barbarossa entraîna un retour de situation qu'il n'avait pas prévu. Matsuoka, lors de son retour vers le Japon, signa le 13 avril à Moscou un traité de neutralité réciproque avec Staline en cas d'agression contre l'un ou l'autre de leur pays. Le sens de l'honneur japonais leur fit respecter cet engagement malgré les pressions allemandes exercées ultérieurement. Il était aussi probablement dans leur intérêt de ne pas s'attaquer au géant russe si la situation ne l'exigeait pas. Le Kremlin, lui, dût se féliciter de cette décision puisque 4 mois plus tard Hitler implorait le Japon d'attaquer Vladivodstok. Pourtant, au moment de la signature, Hitler se "réjouissait" de cet accord en pensant que le Japon aurait ainsi les mains libres pour attaquer Singapour.