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La bataille de Saipan, la perte de l'île et les suites japonaises de la conduite de la guerre

Moins connue que les batailles du front Européen, la guerre du Pacifique n'en reste pas moins tout autant meurtrière et décisive dans la fin de la seconde guerre mondiale.
MODERATEUR ; alfa1965

Re: La bataille de Saipan, la perte de l'île et les suites japonaises de la conduite de la guerre

Nouveau message Post Numéro: 11  Nouveau message de kfranc01  Nouveau message 05 Sep 2021, 20:16

L'une des raisons de l'inefficacité de la défense japonaise face aux américains est que le système de commandement japonais était non coordonné, mal défini et inefficace ; l'armée et la marine élaborant des plans chacun de son côté, qu'ils cherchaient ensuite à vendre au gouvernement; sachant que Tojo n'avait qu'une voix dans les discussions mais ne pouvait imposer une direction commune.

De toute manière, Tojo est loin d'avoir eu les capacités d'un bon stratège militaire. La stratégie qu'il a vendu à l'Empereur se résume à une succession de raids puissant volontairement très violent avec des forces réduites très bien armées et équipés. Sans vision stratégique globale autre que de 'virer' les occidentaux d'Asie, et sans trop se préoccuper de leur éventuel retour ni de leur puissance économique - considérant les occidentaux comme 'moralement faible'.

Après l’attaque américaine contre Truk, Tojo réforme des deux états-majors de l’armée et de la marine. Le vieux maréchal Sugiyama, qui est au Japon ce que le général Marshall est à cette époque pour l’armée américaine, est remercié; et il en est de même de l’amiral Nagano, chef de l’état-major naval, celui qui a conçu le plan de Pearl Harbour.

Tojo pris tout les pouvoirs, devient ministre de plusieurs portefeuilles (guerre, marine, munitions....); mais dans les faits cela aggrava la situation car chaque corps garda son indépendance d'une part; et

Un vieux marchand de vêtement à Hokkaïdo s’était écrié dans la rue : « L’empereur est un aveugle imbécile, sinon il n’aurait pas nommé Tôjô Premier ministre ! »

Cela ne mit même pas fin à l'opposition de la marine à sa politique, marine qui était opposé à la confrontation avec les américains...
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Re: La bataille de Saipan, la perte de l'île et les suites japonaises de la conduite de la guerre

Nouveau message Post Numéro: 12  Nouveau message de kfranc01  Nouveau message 06 Sep 2021, 00:16

thucydide a écrit:Cela faisait de la stratégie évidente des américains , saut de puces, d'îles en îles , acquérir une îles base assez proche du Japon et bombarder stratégiquement.
L'interrogation est plutôt du côté japonnais, ont ils vraiment rien prévu, pourquoi se disséminer sur plusieurs fronts, ne pas renforcer des îles en base aériennes et d'appui , surveiller plus les américains...?
Ils semblent souvent surpris.


Pour répondre à cela, il faut se replonger dans la stratégie japonaise; que j'ai étudié à l'école de guerre il y a quelques 30 ans… je vais m'appuyer sur un essai de stratégie ici résumé.

On se demande par quels moyens un pays démuni de tout, que ce soit en ressources essentielles, en potentiel militaire et en population, pouvait-il espérer porter un défi, avec succès, à la coalition des deux grandes puissances navales et mili­taires du monde, l’Angleterre et les USA ? Cette question est centrale.

Pour répondre à cela, il faut remonter au-delà de 1941, vers le passé du Japon, à l’époque de ses guerres contre la Chine et la Russie. La stratégie Japonaise fut bâtit sur l'expériences de ces conflits transposés dans le monde de 1941, éclairant la conduite de la guerre par les Ja­ponais. Le Japon comparé à la Russie et la Chine et leurs immenses réserves, est un nain. Si le Japon avait lancé une attaque classique sur un pied d’égalité contre ces géants, il aurait couru au désastre comme on s’y attendait en 1895 et en 1904-1905. Cependant, dans les deux guerres, le Japon est victorieux.
Le secret des succès japo­nais dans ces guerres est dû à l’habileté avec laquelle les Ja­ponais ont utilisé leur supériorité sur mer afin de rame­ner le conflit illimité qu’ils savaient ne pouvoir surmonter, à une guerre limitée en rapport avec leurs forces ex­trêmement limitées. Dans les deux cas, ils s’emparèrent de la maî­trise de la mer et ils exploitèrent cette supériorité unilaté­rale afin de conquérir leurs objectifs territoriaux, volontai­rement limi­tés à la Corée et à la Mandchourie du sud; puis ils mi­rent leurs adversaires au défi de les en chasser.
Dans les deux conflits, les Chinois et les Russes se virent confrontés à la dangereuse perspective d’être contraints d’exercer une forte pression sur les forces japonaises de terre, du fait de l’élimination temporaire de leurs forces navales, ils ne pou­vaient jamais espérer étendre ce succès chèrement payé à une victoire décisive sur mer. Ainsi, il n’est pas surprenant que, d’abord la Chine, puis ensuite les Russes, aient préféré signer une paix négociée plutôt que de continuer la lutte, sa­chant qu’au mieux, cela se terminerait par une évacua­tion.

En 1904-1905, le plan de guerre ja­ponais reposait sur la ca­pacité de la marine à tenir en échec les forces navales russes, permettant à l’armée de débarquer et de chasser les Russes de Co­rée et de Mandchourie du sud. Ce­pendant, le Japon eut à faire face à deux flottes russes, chacune à peu près égale à la to­talité de la sienne, la flotte d’Extrême-Orient à Port Arthur et la flotte de la Baltique en Europe. Le tout avec un danger létal, l’industrie de constructions navales japo­naise man­quait de ressources pour le remplacement éventuel des cuirassés et croiseurs fer de lance et fondements de sa stratégie navale. Le Japon ne pouvait se permettre de les perdre.
Pour cela, le Japon choisit une stratégie d’économie de ses forces navale: la flotte japonaise res­ta en réserve dans ses bases, prête cependant à être jetée dans la bataille si cela était nécessaire. La mis­sion d’user l’escadre russe reviendrait à d’autres armes plus ai­sées à remplacer : mines, blocus, torpilleurs et armée ja­po­naise, sacrifiant des milliers d’hommes des meilleu­res troupes pour conquérir des hauteurs d’où il pourrait sur­veiller le port et d’où l’artillerie à longue portée détruit l’escadre russe d'Extrême-Orient au mouillage.
C’est ainsi que la flotte japonaise fut capable de conserver la maîtrise de la mer et cela sans sortir de son rôle d’ultime recours. Quand, quelques mois après la chute de Port Arthur, la flotte de la Baltique arriva, Togo put la rencontrer avec des forces intac­tes ce qui lui permit, au combat de Tsoushima, de l'écraser… Il faut dire que la qualité de cette flotte Russe laissait à désirer.

Les mêmes éléments, qui ont été déterminants dans la stratégie japonaise de 1895 et de 1904-1905, se retrou­vent dans les fondements de celle de 1941.

En 1941, malgré la création d'une vaste force économique et militaire, ses faiblesses fondamentales n’ont pas disparu. Sa principale source de puissance, sa main d’œuvre, était employée à la production industrielle et agricole avec des méthodes peu rentables, dans un système aber­rant. Sa capacité industrielle, est du niveau d’une puissance industrielle moyenne comme la Belgique. En outre, ce développement industriel est dépendant de l’extérieur pour les sources d’énergie et les matières premières : pétrole, minerais, étain, chrome, caoutchouc. De plus, le Japon est enlisé dans la guerre avec la Chine nationaliste.

Ou bien la guerre devait cesser, ce que les chefs militaires refu­saient d’accepter, ou bien le Japon était contraint d’étendre la guerre en envahissant la Birmanie britannique pour couper les lignes de ravitaillement Chinois. Un tel mouvement vers le sud permet de mettre main basse sur les ressources de la Malaisie bri­tannique, de Su­matra, de Java et de Bornéo, résolvant le problème de la faiblesse économique du Japon. Mais, les chefs de l’armée et de la marine sa­vaient que l’invasion des possessions britanniques et hol­lan­daises de l’Asie du sud-est entraînerait inévitablement l’entrée en guerre des États-Unis.

De plus, cette situation politico-militaire excessivement ten­due le devint encore plus quand, en juillet 1941, les États-Unis, suivis par la Grande-Bretagne et les Pays-Bas, imposèrent au Japon un embargo financier et économique suite à leur main mise sur l'Indochine Française.

Le Japon envisagea trois solutions :
- ou bien arrêter les opérations contre la Chine et l’Indochine et en venir à des négociations avec les démo­craties anglo-saxonnes
- ou bien menacer le gouvernement des États-Unis de « quelque chose de terrible » dans le but de faire lever l’embargo
- ou bien, finalement, utiliser simultanément la force pour sortir de l’impasse militaire et pour briser l’embargo éco­nomique, impliquant une guerre avec les USA.

Contrairement à l’assurance que l’armée montrait pour son offensive en Asie du sud-est devant durer deux à trois mois, les chefs de la marine manifestèrent une grande réserve à l’idée de ce conflit.

La stratégie adopté fut rien moins qu’une ré­édition de la stratégie de la guerre limitée qui avait montré son efficacité dans les guerres contre la Chine et la Russie. Comme dans les conflits précédents, les stratèges japonais se sont abstenus d’envisager une victoire complète au-delà de leurs moyens ; ils limitèrent leurs efforts à isoler, à occuper et à défendre un objectif stratégique limité: l’invasion et l’encerclement de l’Asie du Sud-Est. De cette façon, la résistance chinoise serait réduite par la rup­ture de ses communications avec la Birmanie. La fai­blesse de l’économie japonaise, si fortement dépendante de l’extérieur pour les matières premières, serait réglée d’un coup.

Comme dans les deux guerres précédentes, une fois le Japon à l’abri des pressions économiques, il pourrait en toute quiétude mettre au défi ses adversaires de le chasser de ses conquêtes.

Le Japon bénéficierait d’une position d’où il pourrait dissuader les inévitables contre-attaques et, par l’usure, il obligerait ses ennemis d’accepter, une fois de plus, le fait accompli à condition qu’il ne se laisse pas en­traîner dans des aventures déraisonnables et qu’il conserve sagement ses forces en état de combattre.

Les conquêtes de Bornéo, Java, Sumatra, la Malaisie et la Birmanie représentaient l’essentiel de ce plan où, toutefois, celle des Philippines ne paraissait pas absolu­ment nécessaire, car, économiquement, elles ajou­taient fort peu aux ressources des territoires des mers du sud.

Stratégi­quement, les Philippines, malgré leur position de flanc, ne constituaient pas un tremplin indispensable à une offensive contre ces ter­ritoires. L'avis des généraux étaient de ne pas s'en emparer pour éviter une guerre avec les Etat Unis.

Yamamoto n’eu pas cette ap­proche ; pour lui, l’intervention des États-Unis était à prévoir et la seule politique réaliste consistait à la faire avorter par une attaque surprise sur les forces et les bases navales américaines du Pacifique, laissant la main libre au Japon pour s'implanter en Asie du Sud Est.

Après Pearl Harbor, on peut se demander pourquoi les Japonais n’ont pas été jusqu’au bout en prenant les îles Hawaï ? Cette décision est, en fait, parfaite­ment cohérente avec le concept fondamentale d'une guerre limitée.

Les Japonais furent alors soumis à la même contrainte que 36 ans plus tôt : préserver leur flotte de bataille en tant que fer de lance pour assurer la maîtrise du Pacifique occidental ; cette flotte de bataille représentait la réserve sur laquelle reposait la faculté des stratèges japonais pour ré­pondre aux contre-attaques alliées dans la seconde phase défensive de leur plan de guerre. Ce qui impose une condition fondamentale qui veut que la force principale soit à l’abri de toute perte sé­rieuse. Ainsi, même après l’élimination temporaire des bâti­ments de ligne alliés, les stratèges japonais n’étaient pas fa­vorables pour exposer les leurs aux attaques des sous­-marins et de l’aviation alliés ; au contraire, ils conservaient leurs grandes unités le plus à l’arrière possible, préférant utiliser pour leur offensive contre des forces alliées affai­blies, des unités légères plus aisément remplaçables, des transports et des détachements de terre et de l’air.

En neutralisant et en isolant les positions alliées les unes après les autres, par des attaques aériennes avant de lancer à l’assaut des transports vulnérables mais fortement escortés, les Japonais, furent en mesure de progresser très rapidement par une série de raids d’une position stratégique à une autre sans don­ner au commandement allié la moindre occasion d’enrayer l’offensive.

La conquête de la Malaisie et des Indes néerlandai­ses libéra des forces japonaises considérables qui furent en­voyées pour réduire la résistance aux Philippines à la­quelle les Japonais ne s’attendaient pas - et pour un combat qui n'était d'ailleurs pas stratégique comme nous l'avons vu. Avant même la fin de la lutte pour les Philippines, l’effondrement de la résistance alliée dans le sud avait mis les Japonais devant la décision la plus grave qu’ils auraient à prendre de toute la guerre : fallait-il poursuivre ou non l’offensive jusque dans l’océan Indien ?

Ils se contentèrent d'affaiblir la flotte britannique en attaquant à Colombo, coulant un porte avions et deux croiseurs; puis ils se retirèrent à Singapour pour ne jamais revenir dans l'océan Indien hors raids trop peu fréquent pour être efficace, laissant les routes de ravitaillement alliées ouvertes…

Concentrer leurs forces navales dans l’océan In­dien en vue de cou­per les lignes de communications alliées leur aurait demandé d'aban­donner la conception d’une guerre limitée prudente en fa­veur d’une guerre illimité et globale ; mettre de côté leur idée d’indépendance straté­gique jalousement gardée pour coopérer avec les forces européennes de l’Axe, alliés pour lesquels ils éprouvaient méfiance et crainte…. Les stratèges japonais ne se rendirent pas compte qu’ils n’avaient pas le choix et que leur prudente stratégie indé­pendante et limitée manquait d’efficacité dans un conflit mondial...

Les effets désastreux du plan japonais de guerre li­mi­tée, appliqué à l’occupation et à la défense de l’Asie du Sud-Est, eurent d’autres conséquences. Ce plan les paralysa, non seulement, dans la seule direction qui aurait pu leur laisser une chance de succès mais, de plus, il les empê­cha d’agir dans quelque direction que ce soit en rassemblant toutes leurs forces.

Dès le début, les japonais reconnurent la né­cessité absolue d’empêcher l’Australie de devenir pour les Alliées une base principale pour leurs contre-offensives. Exac­tement comme pour l’Inde, ils se rendirent compte que l’Australie, dans son ensemble, était un morceau trop gros à avaler. Cependant, ils espérèrent qu’en occupant les terri­toires du nord et en coupant des lignes de communication avec La Nouvelle-Calédonie, la Nouvelle-Zélande et les Sa­moa, ils auraient la possibilité d’isoler et de neutraliser l’Australie. Ils portèrent le plus gros de leurs efforts dans cette direction tout en continuant d’attaquer la Malaisie et Java Si les chefs militaires japonais, à ce moment, avaient abandonner leur stratégie reposant sur des offensives méthodiques, pas à pas, ils auraient pu laisser de côté la Nouvelle-Guinée, protégée par leur aviation embarquée sur les porte-avions, et se saisir de Port Moresby, le centre stra­tégique de la défense australienne qui n’était défendu que par une unique brigade de soldats peu entraînés…

Mais, fi­dèles à leur principe de ne pas avancer vers un nouvel ob­jectif sans avoir une couverture aérienne efficace, les Japo­nais hésitèrent et perdirent une occasion. Quand, au début de mai, ils reprirent leur offensive vers la Nouvelle-Calédo­nie et la Nouvelle-Zélande, ils furent stoppés par deux contre-attaques, à Tulagi et dans la mer de Corail. Arrivées à ce point, les réactions des Ja­ponais sont des plus difficiles à saisir. L’influence paraly­sante de leur idée de guerre limitée est évidente, car leur poussée pour neutraliser l’Australie fut abandon­née aux premiers signe d’une résistance de crainte de perdre leur précieux navires qu'ils voulaient garder pour la phase défensive de leur scénario. Au lieu de reprendre leur poussée avec leur puissance disponible, ils dispersent leurs forces dans quatre directions parfai­tement divergentes par des attaques à Madagascar et dans le port de Sydney, par d’importantes forces expédi­tionnaires contre les Aléoutiennes et contre Midway - tomba dans le piège dressé par les améri­cains et perdant d’un coup la majeure partie de la flotte de porte-avions; ce qu'ils voulaient justement éviter en stoppa l'offensive vers l'Australie ! La défaite de Midway donna à la puissance offensive japonaise un arrêt sévère, mais elle ne la brisa pas.

Le débarquement des US Marines à Guadalcanal, une semaine avant que les Japonais n’aient le temps de compléter l’installation du terrain d’aviation et de recevoir les forces de terre et navales sous sa protection, parvint à prendre l’ennemi par surprise. Les Ja­ponais conservaient une chance de voir le sort leur être fa­vorable, car ils possédaient des ressources considérables sur le terrain, des lignes de communications incomparablement plus courtes et ils avaient infligé de très sérieuses pertes aux Alliés. Mais, une fois de plus, la nécessité de conduire une guerre économique, qui était leur constante préoccupa­tion, fut fatale. Au lieu d’utiliser leur su­périorité pour écraser les Américains à Guadalca­nal avec leurs forces réunies, ils choisirent de les jeter au compte goutte dans la bataille. Au moment où les Japonais se déci­dèrent à faire un effort sérieux, il était trop tard.

Le commandement amé­ricain et sa stratégie étaient passés d’une défensive pru­dente à une offensive agressive et l’équilibre des forces commença à leur être favorable. Ainsi, les offensives massi­ves des Japonais de la fin octobre à la mi-novembre 1942 se ter­minèrent par un désas­tre complet.

La première phase du plan de guerre japonais, la phase de l’isolement et de l’occupation de l’objectif, l’Asie du sud-est, était maintenant arrivée à sa fin. Les tentatives pour éliminer ou neutraliser, au-delà de ces limites, les bases d’où les Alliés pouvaient lancer des contre-attaques, n’avaient été couronnées que d’un succès partiel. Singapour, Java, les Philippines, Guam, Wake et l’ouest des Aléoutiennes avaient été pris. La résis­tance chinoise ne s’était pas effondrée, malgré la rupture de ses communica­tions avec la Birmanie, et l’Australie n’avait pas été neutra­lisée.

Cependant, en dépit de ces échecs, les stratèges japo­nais avaient de bonnes raisons d’espérer réaliser la seconde partie de leur plan, la plus diffi­cile : amener les Alliés à s’avouer vaincus après les avoir soumis à une guerre d’usure pour qu’ils acceptent le fait accompli.

Dans toutes les direc­tions, excepté celle de l’Union soviétique, les Japonais avaient établi autour de leur aire centrale d’action, une zone-tampon étendue où les contre-attaques alliées seraient en­rayées.

Les distances que les Alliés auraient à franchir dans leur avance à travers le Pacifique et l’océan Indien, ralenti­raient leurs efforts. Les jungles de Birmanie, de Nou­velle-Guinée comme celles des Salomon, que les Japonais n’avaient pu pénétrer que très difficilement, étaient de solides remparts. La résistance tenace des sol­dats japonais fanatisés retarderait considérablement les of­fensives alliées comme à Guadalcanal où chaque pouce de terrain gagné entraînait des pertes humaines importantes.

Mais surtout, les japonais comptaient sur le réseau très dense des bases aériennes et navales permettant de s’opposer à une avance alliée, grâce à une concentration de forces formant un cercle infran­chissable autour d’une zone centrale. Derrière le cercle de défenses étroitement conjuguées, la force de réserve de la flotte de bataille japo­naise se tiendrait prête à donner le coup de grâce à n’importe quelle force alliée ayant réussi à forcer les défen­ses extérieures.

Ainsi, le japon disperse ses forces dans des directions opposées pour occuper ce cercle de défense. Les bâtiments de combat cuirassés, porte-avions, croiseurs lourds, furent retirés des zones dangereuses pour être mis à l’abri dans des zones à l’arrière. Pendant les dix-huit mois suivants, aucune de ces unités ne fut coulée par l’ennemi. En revanche, les forces maritime légères ainsi que les forces terrestres et aériennes, prévues pour s’opposer au premier élan de l’offensive alliée, furent envoyées en avant dans des zones critiques.

En Nouvelle-Guinée, la contre-­offensive, lente et coûteuse en hommes, contre les restes des forces ja­ponaises qui avaient menacé Port Noresby paru donner raisons aux stratèges japonais. De même, les très durs combats livrés dans les Salomon contribuèrent à endormir les japonais dans l’idée que, en dépit de leurs pertes, le plan prévu pour user les forces alliées n’était pas si mau­vais.

Cette illusion apaisante fut brutalement ébranlée par la grande offensive américaine dans le Pacifique central au cours de l’hiver 1943.

L’effort sans précédent des États-Unis dans la construction navale avait, pendant l’automne et l’hiver de cette année-là, permis le renversement complet et irrémédiable du rapport de force au profit des États-Unis. La récente force de frappe que représentait la 5e Flotte sous les ordres de l’amiral Spruance était en mesure de s’opposer à toute force japonaise, quelle qu’elle soit ; la concentration en porte-avions de cette flotte permettait à Spruance de pas­ser en force à travers le système de positions défensives, celui que les stratèges japonais avaient jugé infranchissa­ble.

Avec des escadrilles de 800 et bientôt de plus de 1 000 avions em­barqués à sa disposition, l’amiral se plaçait dans une situa­tion où il pouvait écraser les forces aériennes ad­verses en frappant à n’importe quel point du dispositif de défense ja­ponais pour neutraliser les positions clé, pour annihiler leur résistance sous la puissance d’une supériorité aérienne ab­solue et sous les effets des bombardements des canons de la flotte, inconnus jusqu’alors ; enfin, à partir des bases nou­vellement conquises, les forces américaines s’emparèrent du reste des positions japonaises dont certai­nes furent contour­nées et coupées de leur ravitaillement.

De plus, grâce au sys­tème révolutionnaire des bases mobi­les de ravitaillement organisé dès les premières attaques, l’amiral Spruance fut à même de surmonter les difficultés logistiques qui, jusqu’à ce moment, paraissaient insurmon­tables et sur lesquelles les stratèges japonais avaient beau­coup compté ; finalement, il put conduire son offensive sans marquer de temps d’arrêt aussi loin qu’il le désirait.

Cette conception, entièrement neuve d’utiliser la puis­sance sur mer, bouleversait tellement les idées reçues que les stratèges japonais furent incapables de saisir im­médiate­ment sa signification profonde et ses conséquences. Ils se rendirent tellement peu compte de ce qui leur arrivait qu’ils ne comprirent pas que la prise des îles Gilbert corres­pondait à une forme entièrement nouvelle de la stratégie améri­caine ; ils considéraient cette avancée comme une simple at­taque de flanc. Les pertes des Marines à Ta­rawa, largement divulguées, contribuèrent à leur faire croire que tout allait conformément au plan prévu et que leurs avant-postes remplissaient avec succès leur mission d’user l’élan des contre-offensives alliées…

La conquête manifestement moins meurtrière de Kwajalein aux îles Marshall, ne fut pas suffisante pour atti­rer leur attention sur la réalité de la situation. Ce ne fut qu’après cette conquête que l’amiral Spruance s’attaqua très sérieusement et avec efficacité, à leur importante base na­vale de Truk, centre des opérations dans le sud-est ; c’est alors que, brusquement, ils réalisèrent clairement que l’ensemble de leurs plans de guerre avait été réduit à néant, sans rémission, en l’espace de trois mois, de la mi-novembre 1943 à la mi-février 1944.

En effet, la chute des positions-clé japonaises des Gil­bert et des Marshall signifiait plus que l’effondrement même de leur zone avancée de défense. Ce n’était, ni plus, ni moins, que l’échec complet de tout le système stratégique.

Ce sys­tème, comme déjà expliqué, reposait à la fois dans sa phase défensive et offensive, sur un partage des fonctions entre deux éléments complémentaires d’une part, les forces terres­tres, aériennes et navales avancées et, d’autre part, la force centrale de réserve du gros de la flotte.


Dans ce partage des fonctions, le rôle des forces avancées sacrifiées fut, non seu­lement de mettre en échec et de contenir l’adver­saire mais, si elles ne pouvaient empêcher les contre-of­fensives alliées, de percer leur défense, elles se devaient, au moins, d’absorber le choc de celles-ci, de manière à infliger aux Américains des pertes telles que le gros de la flotte de bataille japonaise aurait l’occasion de lancer une terrible ac­tion dévastatrice.

Ainsi, quand les forces avan­cées ne purent contenir celles de l’amiral Spruance, et en­core moins les af­faiblir, non seulement, elles s’effondrèrent d’elles-mêmes, mais leur chute affecta gravement la puis­sance d’intervention du gros de la flotte de bataille japo­naise de réserve, laquelle se trouvait en état d’infériorité et ne pou­vait donc s’opposer, avec des chances de succès, à l’offensive de la marine américaine.

Sans avoir eu l’occasion de frapper une seule fois, cette flotte de réserve a été réduite, du jour au lendemain, à l’état de "fleet in being", exerçant plus qu'une action dissua­sive. Le désastre était inévitable. S’ils décidaient de ris­quer le gros de leur flotte en tentant d’arrêter Spruance, il est probable qu’elle serait défaite perdant d’un coup l’avantage de l’effet dis­suasif. Si, au contraire, ils continuaient à conserver leur "fleet in being", ils seraient incapables d’empêcher Spruance de conquérir leurs posi­tions, les unes après les autres…

En face de ce dilemme, les stratèges japonais furent incapables d’adopter l’une ou l’autre solution et restèrent assis entre deux chaises.

A deux reprises consécutives, au moment où les Américains s’approchaient des Mariannes et de Leyte, ils lancèrent le gros de leur flotte, dans une tenta­tive désespérée pour les arrêter, mais, à chaque fois, ils étaient si indécis, agissant à contre-cœur au lieu de se lancer à fond dans l’entreprise, qu’ils sacrifièrent leurs meilleures forces inutilement, le restant devant périr lamentablement pendant les grandes offensives aéronavales de mars et de juillet de l’année suivante.

En 1944, la stratégie des kamikazes, conjuguée avec les distances particulièrement grandes, paraissait laisser aux japo­nais une chance de faire traîner la guerre en longueur et d’échapper au désastre complet. Comme l’offensive américaine venait des positions éparses japonaises conquises à la périphérie et se portait vers le Ja­pon proprement dit, Philippines et Formose, elle entrait dans des zones qu’il ne serait pas facile d’isoler et dans les­quelles les adversaires pourraient concentrer et déplacer des forces terrestres et aériennes non négligeables ; ils uti­liseraient ces avantages pour freiner l’offensive américaine et rendre celle-ci si coûteuse pour l’assaillant que les Japo­nais, à la fin du conflit, bénéficieraient de quelque chose de mieux qu’une reddition sans conditions.

L’entêtement fana­tique permit donc de continuer la lutte, bien que son issue ne puisse plus longtemps être mise en doute ; ce fut les mauvaises surprises des bombardements par les formations de B29, volant à une altitude inatteignable, écrasant d'un tapis de bombes incendiaires les villes du Japon, puis la bombe atomique, qui força l’Empereur à mettre un terme à cette guerre insensée.

Pour conclure, l’erreur des stratèges japonais fut profonde. Les conflits avec la Russie et la Chine pouvaient être limités stratégiquement parce que qu’ils l’étaient politiquement et aussi parce que pour les Russes et pour les Chinois les intérêts en jeu étaient marginaux. Quand l’issue des conflits leur fut défavo­rable, elles acceptèrent de traiter, même dans des conditions désavantageuses, plutôt que de prolonger une guerre qui commençait à réveiller les dissensions internes, risquant de les transformer en rébellion ouverte. Lors de la seconde guerre mondiale, avant tout, ils évaluèrent mal le rapport étroit entre la conception politique et la conception stratégique du conflit, ce qui leur fit faire, politi­quement, une guerre à mort ayant le caractère d’un affron­tement racial absolu et qu’ils avaient essayé de me­ner, straté­giquement, à une guerre limitée.

Source: Essai de stratégie navale, chapitre VI, La stratégie japonaise de Herbert Rosinski
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Re: La bataille de Saipan, la perte de l'île et les suites japonaises de la conduite de la guerre

Nouveau message Post Numéro: 13  Nouveau message de pierma  Nouveau message 06 Sep 2021, 16:51

Kfranck, cet exposé géo-stratégique est magistral et très instructif.

C'est la première fois que je vois exposées aussi clairement les conceptions stratégiques du Japon, et cela, à toutes les phases du conflit. Et leur hypothèse de départ rend très clair leur acharnement ultime : depuis le début, il s'agissait de décourager l'adversaire pour qu'il négocie.

D'où cette persistance absurde - et criminelle envers leur propre peuple - qui les voit utiliser les kamikazes tandis que leurs grandes villes sont ravagées l'une après l'autre : ils ne savent plus raisonner autrement.

Quand on a longtemps tenu pour vrai un paradigme qui vous a apporté le succès, il est très difficile d'en changer.

C'est ce que le colonel Goya appelle "parcourir le même sentier en le creusant, ce qui rend chaque jour plus difficile l'effort pour en sortir."

(Ce ne sont pas les exemples qui manquent : la France submergée en 6 semaines en 1940 pour avoir conservé les méthodes victorieuses de 1918 est le premier qui me vient à l'esprit.)

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Re: La bataille de Saipan, la perte de l'île et les suites japonaises de la conduite de la guerre

Nouveau message Post Numéro: 14  Nouveau message de kfranc01  Nouveau message 06 Sep 2021, 18:04

C'est assez incroyable de penser que les Japonais aient pu se lancer en guerre en imaginant pouvoir limiter les opérations sur le plan stratégique tout en économisant le matériel, et en même temps prêcher une guerre totale sur le plan politique !
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Re: La bataille de Saipan, la perte de l'île et les suites japonaises de la conduite de la guerre

Nouveau message Post Numéro: 15  Nouveau message de kfranc01  Nouveau message 06 Sep 2021, 21:07

Prosper Vandenbroucke a écrit:La bataille de Saipan, qui a duré trois semaines (15 juin au 9 juillet 1944) à coûté plus de 3 000 morts aux Américains et plus de 13 000 blessés. Pour leur part, les Japonais ont perdu au moins 27 000 soldats, selon certaines estimations. Le 9 juillet, lorsque les Américains ont déclaré la fin de la bataille, des milliers de civils de l’île de Saipan, terrifiés par la propagande japonaise qui les avertissait qu'ils seraient tués par les troupes américaines, ont sauté vers la mort depuis les hautes falaises à l'extrémité nord de l'île.
La perte de Saipan fut apprise par la politique à Tokyo, avec stupéfaction.
Les dirigeants politiques ont fini par comprendre la puissance dévastatrice des bombardiers américains à longue portée. En outre, de nombreux citoyens de Saipan étaient japonais, et la perte de Saipan à marqué la première défaite en territoire japonais depuis l'expansion agressive du Japon en 1941 et 1942. Pire encore, le général Hideki Tojo (1884-1948), le premier ministre militariste, avait promis publiquement que les États-Unis ne prendraient jamais Saipan.
Il a été contraint de démissionner une semaine après la conquête américaine de l'île.
Les avions bombardier américain étaient désormais capables de bombarder le territoire japonais depuis leurs bases de Saipan et de Tinian et en outre, la démission de Tojo mis également fin, je pense, à la suprématie militaire japonaise de la conduite de la guerre.
Qu’en pensez-vous


Dans le Pacifique central, les Américains ont détruit la principale base navale japonaise de Truk lors d'un raid aérien le 18 février 1944, forçant la marine impériale à retourner dans les Mariannes (le pétrole pour alimenter les navires et les avions opérant dans les îles Marshall, Caroline et Gilbert partit en fumée à Truk). Cette brèche de la « ligne de défense absolue », a conduit Tojo à licencier l'amiral Osami Nagano en tant que chef d'état-major de la Marine, pour renforcer sa position face aux critiques sur le déroulement de la guerre. Le 21 février 1944, Tojo assume le poste de chef d' état-major de l'armée impériale japonaise , arguant qu'il doit prendre personnellement en charge l'armée.

Tojo a décidé de prendre l'offensive stratégique pour 1944 avec ses plans pour gagner la guerre en 1944 étant les suivants :
• L'opération Ichigo mettrait fin à la guerre avec la Chine, libérant quelque 2 millions de soldats japonais.
• L'opération U-Go prendrait l'Inde.
• Lorsque les Américains lancent l'offensive attendue dans les Mariannes, la flotte combinée de la marine impériale devra livrer une bataille décisive d'anéantissement contre la 5e flotte américaine et stopper la poussée américaine dans le Pacifique central.
• Dans le Pacifique Sud-Ouest, les forces japonaises en Nouvelle-Guinée et aux îles Salomon resteraient sur la défensive et tenteraient de ralentir les forces américaines, australiennes et néo-zélandaises le plus longtemps possible. Connaissant l'obsession personnelle du général MacArthur de retourner aux Philippines, Tojo s'attendait à ce que MacArthur se dirige vers les Philippines plutôt que les Indes orientales néerlandaises occupées par les Japonais, ce qui était un soulagement du point de vue japonais; les Indes néerlandaises étaient riches en pétrole alors que les Philippines ne l'étaient pas.

Tojo s'attendait à ce qu'une défaite américaine majeure dans les Mariannes, combinée à la conquête de la Chine et de l'Inde, assommerait tellement les Américains qu'ils demanderaient la paix. À ce stade, Tojo ne croyait plus que les objectifs de guerre de 1942 pouvaient être atteints, mais il croyait que ses plans de victoire en 1944 conduiraient à une paix de compromis qu'il pourrait présenter comme une victoire au peuple japonais.

En servant de Premier ministre, de ministre de l'Armée et de Chef d'état-major de l'Armée, Tojo a assumé presque toute la responsabilité; si les plans de victoire en 1944 échouaient, il n'aurait pas de bouc émissaire.

Le 12 mars 1944, les Japonais lancent l' offensive U-Go et envahissent l'Inde. Malgré la rhétorique panasiatique japonaise et la prétention de libérer l'Inde, le peuple indien ne s'est pas révolté et les soldats indiens de la 14e armée sont restés fidèles à leurs officiers britanniques. L'invasion de l'Inde s'est terminée par un désastre complet. Les Japonais ont été vaincus par la 14e armée anglo-indienne aux batailles d'Imphal et de Kohima .

Parallèlement à l'invasion de l'Inde, en avril 1944, Tojo lance l' opération Ichigo , la plus grande offensive japonaise de toute la guerre, dans le but de prendre le sud de la Chine. C'est un victoire japonaise, souvent oublié, mais qui se traduisit par des gains stratégiques relatifs. Les buts de l'armée japonaise étaient d'ouvrir une route vers l'Indochine française et de s'emparer des bases du sud-est de la Chine, qui servaient à l'Armée de l'air américaine pour lancer des attaques contre leurs lignes. Bien qu'ayant atteint leur objectif en rejoignant l'Indochine, les Japonais ne parvinrent cependant pas à stopper les frappes aériennes américaines. La 14th USAAF abandonna simplement les bases côtières menacées, pour se déplacer vers l'intérieur du pays, tout en continuant ses attaques contre les troupes japonaises. La 20thUSAAF déplaça ses bases aux îles Mariannes récemment libérées lors de l'opération Forager. Le bénéfice en matière de sécurité était donc très médiocre, malgré des gains territoriaux importants. L'augmentation des territoires occupés en Chine obligea de surcroît les Japonais à disperser davantage leurs troupes au lieu d'en libérer comme initialement escompté.

Lors de la bataille de Saipan , environ 70 000 soldats, marins et civils japonais ont été tués en juin-juillet 1944 et lors de la bataille de la mer des Philippines, la marine impériale a subi une défaite écrasante. Le premier jour de la bataille de la mer des Philippines, le 19 juin 1944, a été surnommé par les Américains « le Great Marianas Turkey Shoot », car au cours des combats aériens, l'US Navy a perdu 30 avions tandis le japon perd environ 350 avions, dans l'une des défaites les plus humiliantes de la marine impériale.

Les Japonais croyaient que l'endoctrinement au bushido ("la voie du guerrier") leur donnerait l'avantage car les Japonais aspiraient à mourir pour l'Empereur, tandis que les Américains avaient peur de mourir, mais la formation supérieure des pilotes américains et les avions surclassaient les Japonais.

Avec Saipan aux mains des Américains, les Américains pourraient prendre d'autres îles des Mariannes pour y construire des bases aériennes. L'établissement de bases américaines dans les Mariannes signifiait que les villes du Japon étaient à portée des bombardiers B-29 Superfortress et l'historien britannique HP Willmott a noté que « même le plus têtu des militaristes japonais pouvait vaguement percevoir que le Japon serait à bout de forces dans ce cas".

Alors que la nouvelle de la défaite désastreuse subie à Saipan atteignait le Japon, l'opinion de l'élite s'est retournée contre le gouvernement Tojo.
Il était clair pour au moins une partie de l'élite japonaise que la guerre était perdue et que le Japon devait faire la paix avant que le kokutai et peut-être même le trône impérial lui -même ne soient détruits. Tojo avait tellement diabolisé aux États-Unis pendant la guerre que, pour le peuple américain, Tojo était le visage du militarisme japonais, et il était inconcevable que les États-Unis fassent la paix avec un gouvernement dirigé par Tojo. Toutefois, Tojo était une incarnation de l' opinion dominante au sein de la nation, les services armés et en particulier l'armée. Tojo avait un soutien puissant, mais selon les normes japonaises, il était pas extrême. Il était plus un adepte qu'un leader et il représentait l'opinion dominante dans l'armée, et donc sa destitution ne signifierait pas la fin des ambitions politiques d'une armée encore fanatiquement engagée dans la victoire ou la mort.

En remplacement de Tojo, le jushin a conseillé à l'empereur de nommer un ancien Premier ministre, l'amiral Mitsumasa Yonai , car il était populaire parmi la marine, le corps diplomatique, la bureaucratie et proche de la « faction de la paix ». Cependant, Yonai a refusé de servir, sachant très bien qu'un Premier ministre qui tentait de faire la paix avec les Américains serait très vraisemblablement assassiné, car de nombreux officiers de l'armée étaient toujours attachés à la victoire ou à la mort et considéraient tout discours de paix comme une trahison.

Une ouverture vers de possibles négociations de paix fut perdu par ce fait.

Le pouvoir tombe entre les mains de Kuniaki Koiso, général de l'armée et gouverneur de Corée, un pur et dur militariste, d'une famille de Samouraï. Principal propagandistes du Koshitsu Shinto, la religion d'état qui fut instrumentalisé pour justifier l'expansionnisme et la militarisation auprès de la population japonaise. Il va créer les unités kamikaze pour s'opposer aux américains.

Malgré qu'avec Tojo, de nombreuses personnalités "du partie de la guerre" soient tombés, malgré les bombardements dévastateurs et les désastres militaires, le "partie de la paix" n'obtient pas le soutien de la population du Japon, qui reste endoctrinée par les pur et dur et le "partie de la paix" doit agir dans l'ombre.

Pire, la proclamation de Postdam de juillet 1945, qui exige la capitulation sans condition du Japon, donne un revers mortel au "partie de la paix", c'est la preuve que les alliées veulent la fin de l'Empire nippon, et c'est inacceptable.

Sources: un peu de wiki & Histoire pour tous 'la Capitulation du Japon'.
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Re: La bataille de Saipan, la perte de l'île et les suites japonaises de la conduite de la guerre

Nouveau message Post Numéro: 16  Nouveau message de kfranc01  Nouveau message 10 Sep 2021, 00:18

Pas de contradicteur pour débattre de ce passionnant sujet ?
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