Post Numéro: 5 de Prosper Vandenbroucke 04 Déc 2020, 19:26
Bonsoir,
Récit poignant certes, seulement il est un fait que la propagande en a fait des héros, mais ces pilotes-suicides étaient-ils vraiment des volontaires prêts à mourir pour leur pays?
Après une grave série de défaites, le Japon est au bord de l’épuisement en été 1944. Il ne lui reste que quelques miettes de son aéronavale, qui en 1941 était l’une des meilleures du monde. Devant ce constat, plusieurs officiers, ont l’idée qu’il serait possible de maximiser l’impact des appareils et des hommes restants en les transformant en bombes humaines. Mais c’est le vice-amiral Ônishi qui, en octobre 1941, donne pour la première fois l’ordre à une escadrille de s’écraser sur des cibles. Avec le peu de moyens qui lui reste, il est chargé de bloquer les forces du général MacArthur qui veut alors reprendre les Philippines. Pour tous, il s’agit à ce moment-là d’une mission ponctuelle: la tactique n’est pas destinée à être pérennisée.
A partir des années 1930, avec la montée du militarisme, on commence à glorifier celui qui attaque au mépris de sa propre vie. Mais il faut comprendre le comportement au combat des troupes japonaises comme le résultat d’une préparation idéologique de grande ampleur et non le produit d’un quelconque atavisme culturel.
Ce sont surtout de très jeunes pilotes, parmi les dernières recrues, puisqu’il serait illogique de sacrifier un pilote chevronné à une telle mission. Une grande partie d’entre eux sont des étudiants.
Les textes écrits par les kamikazes ne les montrent pas comme des fanatiques. Au contraire, beaucoup font preuve de réflexion et de sang-froid. Confrontés à des ordres cruels, ils essayent de trouver un sens à leur propre mort et font part de leurs regrets. On est bien loin de l’image des ‘’Dieux de la guerre’’ propagée par la propagande.
Nous savons que certains kamikazes étaient convaincus de la futilité de leur geste. Mais la pression du groupe et de l’endoctrinement faisait que peu osaient se rebeller ouvertement. On ne possède pas d’exemple avéré de kamikazes quittant leur formation pour tenter un atterrissage, par exemple. On sait qu’ils oubliaient parfois d’armer leur bombe, ce qui rendait leur sacrifice inutile: même lancé à pleine vitesse, un avion seul fait peu de dégât à un porte-avions… Certains de ces oublis étaient-ils volontaires? Il est difficile de l’affirmer, comme il est difficile de savoir si certaines erreurs de pilotages étaient volontaires ou le résultat du stress psychologique extrême des pilotes.
Avant leur mission, les kamikazes étaient tenus de rédiger une lettre ou un testament à leurs parents pour prouver qu’ils agissaient de leur plein gré. ‘’Vous pouvez me féliciter. On m’a offert la chance d’avoir une mort superbe. Aujourd’hui est mon dernier jour. Le destin de notre patrie dépend de cette bataille décisive dans les mers du Sud où je vais tomber, tels les pétales d’un cerisier radieux’’, écrit Matsuo Isao, 23 ans, en octobre 1944.
En fait, leur courrier, destiné à être exposé publiquement à des fins de propagande, était soumis à une censure sévère. Des jeunes arrivent toutefois à transmettre à leur famille ce qu’ils ont sur le cœur.
Otsuka Akio, mort comme kamikaze au large d’Okinawa en avril 1945 à l’âge de 23 ans n’a-t-il pas écrit : ‘’Je le dis clairement: je ne meurs pas parce que j’en ai envie. Et je ne meurs pas sans regret. Je suis extrêmement inquiet du futur de notre pays’’, confie dans une lettre qui échappe à la censure
L’étudiant Hayashi Toshimasa, 25 ans, qui meurt en août 1945 lors d’une mission-suicide déclare même ‘’Je ne me bats absolument pas, pour la Marine impériale. Si je vis et je meurs, c’est pour ma patrie, et même, si je dois être franc, par fierté personnelle. Je n’ai que de l’antipathie pour la Marine impériale, pas le moindre sentiment positif. Nous autres, les pilotes de la 13e classe d’étudiants mobilisés, nous avons été trop opprimés’’
L’étudiant Uehara Ryoji, âgé de 22 ans, s’en prend même directement au régime: ‘’Quel que puisse être son succès momentané, une nation autoritaire et totalitaire sera toujours finalement vaincue.’’
Je ne sais si l’Empereur lui-même, était au courant mais les écrits de ces ‘’Kamikaze’’ lui étaient certainement inconnues.
Sources : "Kamikazes" par Constance SERENI et Pierre-François SOUYRI
et un ancien livre de la collection ‘’Marabout’’ traduit en langue néerlandaise.