Christian27 a écrit:C'est un débat qui revient régulièrement, il y en eut un sur
Livres de guerre en mai 2008...
ici:
http://www.livresdeguerre.net/forum/min ... sujet=1182Ma conclusion est que la thèse du
Brise glace est correcte, à savoir que ça plaisait énormément à Staline qu'Hitler mette en pièce l'Europe démocratique et...capitaliste. Il s'est beaucoup réjouis d'ailleurs en été 40 lors de l'invasion de la France:
Radio Moscou émet depuis le 20 mai sur grandes ondes et concourt aussi à l’offensive de démoralisation, l’auditeur français est assiégé de voix hostiles. http://www.livresdeguerre.net/forum/con ... ndex=51370Seulement je ne crois pas que Staline, bien placé pour connaître la puissance de la Wehrmacht, ayant collaboré longuement ensemble pour la reconstruction, ait voulu attaquer directement cette Wehrmacht. Je crois qu'en fait il devait avoir un double sentiment face à Hitler, d'abord une admiration et ce n'est pas l'antisémitisme ni l'anti communisme nazi qui le gênaient particulièrement, je dirais au contraire pour ce qui concerne l'anti sémitisme. Par contre les propos anti Slaves...ça certainement.
Donc il voyait assez bien cette Europe s'affaiblir par la guerre pour ensuite essayer d'en tirer quelque chose mais à mon avis il n'a pas pensé à la montée fulgurante de la puissance américaine à ce moment là avec l'apogée de la bombe A.
Bonjour,
Je vois mal comment vous pouvez approuver la thèse du
Brise-Glace. En effet, cette thèse consiste à prétendre que Hitler aurait, en lançant l'opération
Barbarossa, devancé une invasion soviétique de l'Europe; or, vous indiquez ne pas être convaincu que Staline aurait souhaité se frotter à l'armée allemande.
Que Staline, en signant un pacte de non-agression avec Hitler, ait vu d'un bon oeil l'Europe se déchirer entre fascistes et capitalistes, relève du possible. Rezun n'a pas le monopole d'une telle allégation, partagée de longue date par des historiens sérieux, et qui ne prouve nullement qu'il se serait servi du Troisième Reich comme d'un bulldozer qui lui permettrait ultérieurement de faire fleurir le communisme sur les ruines de l'Europe.
Mes propres recherches pour
La Guerre germano-soviétique (pub gratuite) m'ont cependant permis d'établir que Staline a littéralement signé ledit pacte à la dernière minute, après avoir constamment donné leur chance aux Occidentaux et aux Polonais (non sans leur solliciter,des garanties d'ordre militaire, ce qui tombe sous le sens). Confronté à l'urgence (Staline savait que l'invasion de la Pologne était imminente), à la mauvaise volonté desdits Occidentaux (sans parler des Polonais), à un risque de guerre sur deux fronts (cf. le conflit frontalier qui donnera lieu à la bataille du Khalkin Gol) et mis au pied du mur par Hitler (qui avait fini par lui écrire personnellement, de dictateur à dictateur), il avait le choix entre s'opposer au gros de l'armée allemande sans être assuré d'être soutenu par les forces franco-britanniques, ou signer un pacte que le contexte lui interdisait de refuser: certes, le dictateur nazi était indigne de confiance, en attendant l'accord proposé lui permettait de gagner du temps, d'étendre l'influence soviétique en Europe orientale, et de neutraliser le Japon.
Par la suite, Staline reste sur la corde raide, cherchant à ne froisser durablement personne tout en étendant son glacis protecteur, ce qui l'amène à commettre diverses bévues lourdes de conséquence, telles que la guerre avec la Finlande, qui discrédite l'Armée rouge et ternit encore davantage l'image de l'U.R.S.S. dans le monde dit "libre".
Contrairement à ce que vous indiquez, Staline ne s'est pas réjoui de la débâcle française. Cette affirmation, à ma connaissance, repose exclusivement sur un télégramme de félicitations adressé à Hitler le 18 juin 1940, message diplomatique par excellence. A l'inverse, divers indices attestent en effet qu'à la mi-juin 1940, alors que Paris tombe aux mains des Allemands, il a plutôt ressenti une forme de panique: son ambassadrice en Suède encourage les puissances européennes à s'opposer à l'impérialisme allemand; la presse soviétique rend timidement hommage aux troupes alliées; après avoir, pendant des mois, vilipendé la
"guerre impérialiste", le
Komintern promeut, auprès du P.C.F., une rhétorique de mobilisation contre l'envahisseur fasciste (directive qui tombe trop tard, dans le chaos du moment, pour dissuader certains cadres supérieurs du Parti d'approcher les Allemands pour faire reparaître
L'Humanité); et puis, au cours de l'été, le rythme de l'aide commerciale soviétique à l'Allemagne s'emballe pour prendre des proportions gargantuesques, preuve que Staline a si peur qu'il cherche, à tout prix, à "corrompre" son homologue nazi.