Post Numéro: 124 de Igor 13 Mar 2007, 20:06
J’aimerais réagir aux propos de Daniel concernant l’opportunité (ou non) de comparer l’Allemagne nazie avec l’URSS de Lénine et Staline. Ce débat, qui n’est pas récent, a été relancé il y a quelques années avec la publication du Livre noir du communisme.
Je vous donne donc mon point de vue qui n’est qu’un simple point de vue. Ce n’est en aucun cas parole d’évangile.
D’abord je pense qu’il n’y a rien d’anormal, de choquant à comparer deux types de régimes politiques. Comparer ne veut pas dire assimiler. Cela consiste à voir quelles sont les ressemblances et quelles sont les différences. C’est une démarche parfaitement légitime en histoire et en science politique. Le but n’étant pas de porter un jugement moral mais de mieux comprendre à la fois l’Allemagne nazie et l’URSS d’avant 1953. Ces deux régimes ont existé durant la même période, sur le même espace et ont entretenu des relations (à la fois amicales et conflictuelles). Ils sont donc liés par une histoire commune. Il n’y a pas de raison de ne pas étudier cette histoire.
Daniel estime que comparer ces deux régimes, c’est renvoyer dos à dos Hitler et Staline. Pour ma part, j’estime que l’objectif n’est pas de savoir qui était le plus méchant ou qui a accumulé le plus de cadavres. La seule chose qui m’intéresse, c’est de savoir ce qui rassemblait et ce qui séparait ces deux hommes et leurs états respectifs.
Daniel écrit ensuite que Staline a dévoyé l’idéal communiste. Là encore, il s’agit d’un débat qui n’a rien d’historique. Premièrement parce qu’il n’y a pas UN idéal universel, mais autant d’idéaux que de communistes. Il y avait différentes raisons de croire au communisme : justice sociale, pacifisme, patriotisme etc. Deuxièmement, Staline s’est toujours réclamé du communisme, je ne vois donc pas pourquoi on mettrait en doute sa sincérité.
Il est incontestable que des régimes se réclamant (à tort ou à raison) du communisme ont utilisé la terreur et le crime comme moyens de gouvernement. Il est incontestable également que ces régimes sont responsables de la mort de dizaines de millions d’êtres humains.
A partir de la, certains ont en conclu que le communisme était, comme le nazisme, une idéologie foncièrement criminelle. Je ne rentrerais pas dans ce débat qui est à mon avis faussé. D’une part parce que, comme je l’ai écrit, il y a diverses façons d’être communiste. D’autre part car l’histoire du communisme n’est pas monolithique. Une distinction doit être faite entre :
- les pays où des partis communistes ont pris et exercé seul le pouvoir (Russie, Europe de l’Est, Chine et Indochine, Cuba, Ethiopie etc.)
- les pays où d’autres partis communistes ont été intégrés à la vie démocratique et ont (globalement) respecté ses règles (Europe de l’Ouest)
Si des crimes considérables ont été commis au nom du communisme, ce n’est pas pour autant que tous les communistes étaient des criminels. Des millions de gens ont cru au communisme sans pour autant recourir à la violence. Certains ont fait preuve d’aveuglement envers ces crimes, pour autant on ne saurait les tenir pour responsables ou pour complices.
En clair : attention à ne pas mettre dans le même sac le Khmer rouge fanatique avec le militant français qui va vendre l’Huma sur la place du marché. Là on sombrerait effectivement dans l’anti-communisme primaire.
Enfin, il est exact que des personnes utilisent, instrumentalisent l’histoire des régimes communistes pour minimiser voire nier les crimes commis par les nazis. C’est hélas inévitable. Mais ce n’est pas une raison pour relativiser, ou trouver des circonstances atténuantes, aux crimes des régimes communistes.
Pour terminer, j’aimerais faire deux remarques. La mémoire du communisme n’est pas le même selon le pays dans lequel on vit. En Europe de l’Ouest, les partis communistes ont respecté les règles de la démocratie, lutté pour la justice sociale, combattu le nazisme (même si des nuances sont à apporter). En Europe de l’Est, les partis communistes ont bafoué les libertés, monopolisé le pouvoir et recouru aux pires méthodes pour imposer leurs projets. Même si les dirigeants communistes n’étaient pas tous des Staline en puissance.
La France, elle, est un cas à part. Le PCF a un long passé et a joué un rôle considérable dans l’histoire de notre pays. Débattre du communisme, en France, suscite inévitablement les passions.
Merci de m’avoir lu.