L'usine Schneider était une usine française qui produisait de l'acier, des rails, des locomotives, de l'artillerie et d'autres armements. Elle était considérée comme l'équivalent français des usines Krupp en Allemagne et était situé au Creusot, dans le département de Saône & Loire . Pour l'atteindre, il faudrait voler presque 500 kms au-dessus du territoire occupé.
Le Bomber Command avait retiré ses avions des attaques de jour après avoir subi de lourdes pertes. Dès lors, les opérations du Bomber Command contre l'industrie allemande ont été presque exclusivement menées de nuit. Cependant, l'effort de guerre allemand était également soutenu par des usines dans les pays occupés. Ces cibles présentaient un problème, car les bombarder la nuit entraînerait nécessairement des pertes importantes parmi les civils, dont le désir de résister aux occupants était entretenu par la Grande-Bretagne. Pour frapper de telles cibles, le Bomber Command devait tenter des attaques en plein jour. Le raid sur Le Creusot en est un exemple.
Planification de l’opérationPour Arthur Harris, chef du Bomber Command, l'usine Schneider était une cible prioritaire en France. Pour minimiser les pertes en vies humaines des civils, toute attaque contre l'usine devrait être effectuée de jour. Il disposait d’un nouveau bombardier en service qui était à présent livré en grand nombre. Avion quadrimoteur, l'Avro Lancaster avait une excellente autonomie, une énorme capacité d’emport et était rapide. On espérait que cela suffirait à faire pencher la balance en faveur des équipages britanniques
Voler sur une route directe était hors de question. Les bases de chasse allemandes étaient concentrées dans le nord de la France, en Belgique et en Allemagne, et sans escorte de chasse disponible après les 300 premiers kilomètres, la chasse allemande décimeraient les attaquants. Le plan était de profiter de la portée du Lancaster et d'envoyer la formation au-dessus de la mer, en les amenant vers la cible par l'ouest. Les avions voleraient à basse altitude pour éviter la détection radar. La formation décollerait dans l'après-midi, effectuerait son attaque alors que la lumière s'estomperait, puis effectuerait un retour direct sous le couvert de l'obscurité.
Les Lancaster en vol à très basse altitudeLe Lancaster pouvait emporter une tonne de carburant en plus de son chargement en bombes.
Harris chargea l'ensemble du groupe 5 soient, neuf squadron d'attaquer la cible. Au début du mois d'octobre 1942, le Groupe commença à s'entraîner pour le vol d'attaque en formation et à basse altitude.
Le 17 octobre 1942, la météo s'est déclarée favorable. L'opération Robinson était lançée !
Le raid 94 Lancaster ont décollé en milieu d'après-midi et se sont regroupés avant de se diriger vers le sud et au-dessus de l'océan. 88 des avions étaient engagés vers la cible principale, tandis que 6 devaient voler, cap sur Montchanin à proximité pour anéantir la station de qui alimentait en électricité la centrale.
Avro Lancaster du Squadron 44 Le groupe était dirigé par le Wing Commander L.C. Slee, le commandant du Squadron 49 .
A sa suite, au-dessus de l'Atlantique, il y avait les Squadron 9,44, 50, 61,97, 106 et enfin le 207. À la tête du Squadron 106 se trouvait Guy Gibson, qui deviendra célèbre avec le Suadron 617 (les Dambuster!) Le groupe vola cap au sud au dessus du golfe de Gascogne à 300 mètres d’altitude puis vira de 90 degrés tout en réduisant encore un peu son altitude d’une trentaine de mètres et se dirigea vers les côtes françaises. Le Groupe survola l'île d'Yeu, alertant potentiellement les Allemands de leur approche. Le groupe de chasse allemand le plus proche était basé à Lorient, protégeant les U-Boats de la base sous marine. Le rais atteingnit la côte, finalement sans rencontrer d’opposition. Les Lancaster ont continuèrent leur vol vers leur cible sur la campagne française à hauteur de la cime des arbres. Quatre avions ont subi quelques dommages mineurs à la suite d'impacts d'oiseaux mais le vol à basse altitude n'entraina aucun accident grave. Le navigateur du Groupe mis le cap jusqu'à Nevers, au confluent de l'Allier et de la Loire. Là, après une légère correction de cap, les plaçant sur la voie du Creusot. Au cours des derniers 100 kilomètres, ils grimpèrent, échelonnant les différents Squadron entre 750 et 2200 mètres pour le largage des bombes. Ils atteignirent Le Creusot au crépuscule, avec suffisamment de lumière pour voir la cible, mais l'obscurité couvrira bientôt leur retraite. Ils n'ont trouvé pratiquement aucune Flak au-dessus du Creusot. La visibilité était excellente et la cible facilement identifiée. Le gros de la formation largua ses bombes en 7 minutes pendant que six Lancaster continuaient avec leurs charges vers Montchanin. Les bombes larguées, les équipages se dirigèrent cap au nord direction leur base. Lors du débriefing, la plupart des équipages ont déclaré que leur bombardement avait été précis. Aucun avion n'a été perdu lors de l'attaque contre les usines Schneider. À Montchanin, un Lancaster qui volait trop bas, a accroché le toit d'un immeuble et s'est écrasé .
Quel fut le bilanLes équipages de retour ont signalé une attaque réussie et le rapport officiel de Guy Gibson le lendemain, et son récit ultérieur de «l'un des plus grands raids de jour à basse altitude de la guerre», étaient enthousiaste, mais un des commandants d'escadrille de Gibson, le squadron leader John Searby, écrivit plus tard que "Le Creusot était une profonde erreur et en dit autant à son retour". Pendant plusieurs jours, le temps n'était pas propice. Puis, le 21 octobre, le Spitfire de reconnaissance photo est abattu au-dessus de la cible. Le pilote, Tony Hill, est décédé des suites de ses blessures. Finalement, un autre Spitfire a réussi à photographier le site. Les images montraient que les appréhensions de Searby étaient justifiées et qu'une grande partie des bombardements n'avait pas touché les logements des personnels. Malgré cela, il y a eu des dommages considérables aux ateliers d'usinage généraux et aux ateliers d'usinage de locomotives, aux usines de tôles et de barres d'acier et à un entrepôt de 200 mètres qui a été complètement détruit. La production à l'usine Schneider a été interrompue pendant trois semaines et les réparations se sont poursuivies dans l'usine pendant huit mois.
Le raid avait été bien exécuté à bien des égards. La navigation avait été parfaite. Cependant, la précision des bombardements avait finalement été plutôt médiocre. Le Bomber Command a pensé que cela était en partie attribuable à la faible luminosité ainsi qu’à la fumée qui a rapidement commencé à recouvrir la cible, mais ils ont également pensé que la tactique adoptée avait été inappropriée et que les viseurs de bombardement n'avaient pas été correctement utilisés car il
nécessitait une course longue, droite et horizontale vers la cible afin de calculer la dérive et ne pouvait pas s'adapter à l'attitude de l'avion. Même à une altitude assez basse, les bombes devaient être larguées à plus de 1500 mètres de la cible, et de plus, les calculs étaient complexes.
De plus, les bombardiers étaient sous-armés, transportant moins de 2 tonnes de bombes chacun, car la capacité de charge exceptionnelle du Lancaster n'était pas encore pleinement reconnue. Le mois suivant, le poids total maximum au décollage est passé de 27 tonnes à 28,5 et après le mi-1943, lorsque la limite a été portée à presque 30 tonnes , les Lancaster transportaient rarement moins de 4 tonnes de bombe,
A l'issue des huit mois de travaux de réparation de l'usine Schneider du Creusot, les 19/20 juin 1943, le Bomber Command frappa à nouveau, cette fois en plus grand nombre et de nuit : 290 bombardiers, principalement des Halifax et des Stirling, bombardèrent , 20 % des bombes touchèrent l'usine Schneider. Les zones résidentielles ont subi de lourds dommages !