Contre-attaques japonaisesLe Hiryu, le seul porte-avions japonais survivant, lança immédiatement ses appareils. La première vague japonaise de bombardiers en piqué, 18 Aichi D3A1 escortés par six chasseurs Mitsubishi A6M2 Zéro, endommagea lourdement l'USS Yorktown avec trois bombes qui détruisirent ses chaudières et l'immobilisèrent. Cependant, les réparations furent tellement efficaces que les pilotes de la seconde vague japonaise composée de dix bombardiers-torpilleurs Nakajima B5N2nb 5, escortés par six chasseurs A6M2 (zero), crurent qu'ils attaquaient un autre navire de la même classe. Les Japonais pensèrent égaler les scores en éliminant deux porte-avions en deux frappes, mais l'USS Yorktown subit les deux attaques japonaises. En effet, la seconde vague pensa que l'USS Yorktown avait déjà coulé et qu'elle attaquait l'USS Enterprise. Après avoir reçu deux torpilles, l'USS Yorktown fut incapable de poursuivre la bataille car il commença à giter selon un angle de 26° à bâbord et cela força l'amiral Fletcher à déplacer son pavillon à bord du croiseur lourd USS Astoria. Les deux autres porte-avions américains n'avaient pas été endommagés.
Du reste, les défenses américaines furent plutôt efficaces : des Dauntless en vol furent pris à partie par l'escorte des six Zéro lors de la première vague mais les bombardiers américains mirent en échec les chasseurs, dont un seul parviendra à rentrer. Privés de couverture, les D3A1 subirent de lourdes pertes et seulement cinq d'entre eux purent rentrer. Lors du second assaut, les cinq premiers B5N2 furent abattus ainsi que deux Zéro d'escorte.
Toutefois, la nouvelle des deux attaques et le fait que chacune ait coulé un porte-avions américain améliora considérablement le moral japonais. Les appareils rescapés furent récupérés par le Hiryu, où ils furent préparés pour une attaque contre ce qui semblait être le dernier porte-avions américain.
Contre-attaque américaine
À la fin de l'après-midi, un appareil de reconnaissance de l'USS Yorktown avait localisé le dernier porte-avions de Nagumo, l’Hiryu. L'USS Enterprise lança une vague d'attaques composée de 25 bombardiers en piqué SBD Dauntless. Bien que le Hiryu ait été protégé par quatorze chasseurs Mitsubishi A6M Zéros provenant des quatre porte-avions, quatre ou cinq bombes lancées par les appareils américains touchèrent mortellement le porte-avions japonais. Le souffle des explosions fut si puissant que la plateforme de l'ascenseur avant fut projetée sur l'ilot du navire. Les avions de l'USS Hornet, seize bombardiers en piqué SBD Dauntless, lancés avec retard à la suite d'une erreur de communication, attaquèrent sans résultat les autres navires japonais. Après des efforts désespérés pour éteindre l'incendie, la majorité de l'équipage du Hiryu fut évacuée et le reste de la flotte s'orienta vers le nord-est pour tenter d'intercepter les porte-avions américains. Le Hiryu resta à flot durant plusieurs heures et lorsqu'il fut repéré le lendemain matin par un appareil du porte-avions Hosho, les Japonais pensèrent qu'ils pourraient le remorquer jusqu'au Japon pour le réparer. Cependant, le navire coula peu après avoir été repéré. Le contre-amiral Yamaguchi choisit de sombrer avec son navire.
Avec la tombée de la nuit, les deux camps firent le point et préparèrent des plans pour la suite de la bataille. L'amiral Fletcher, obligé d'abandonner l'USS Yorktown et pensant qu'il ne pourrait pas commander de manière efficace depuis un croiseur, céda le commandement opérationnel à Spruance. Ce dernier savait que les États-Unis avaient remporté une grande victoire mais il n'était pas certain de la situation des forces japonaises et était déterminé à protéger Midway et ses porte-avions. Pour aider ses aviateurs, qui avaient été lancés à la limite de leur rayon d'action, Spruance s'était rapproché de la flotte de Nagumo durant la journée et continua pendant la soirée. La dernière vague de l'après-midi manqua de repérer la flotte principale de Yamamoto et comme les appareils revinrent pendant la nuit, Spruance fit allumer les feux de ses porte-avions pour faciliter les atterrissages, prenant le risque d'être repéré et attaqué par les sous-marins ennemis. Finalement, craignant une possible rencontre avec les forces de surface japonaises, Spruance fit mettre le cap à l'est avant de faire demi-tour à l'ouest vers minuit. De son côté, Yamamoto décida initialement de poursuivre l'engagement et d'envoyer ses navires vers l'est pour attaquer les porte-avions américains. Simultanément, un groupe de croiseurs fut détaché pour bombarder l'île. La flotte de surface japonaise ne parvint pas à repérer les navires américains du fait de la décision de Spruance de mettre momentanément le cap à l'est et Yamamoto ordonna un repli général à l'ouest
À 2 h 15 dans la nuit du 5 au 6 juin, le sous-marin USS Tambor, qui se trouvait à environ 170 km à l'ouest de Midway, repéra plusieurs navires. Comme il ne parvint pas à les identifier, le commandant du submersible ne tira pas mais il rapporta leur position à ses supérieurs. Après avoir reçu le rapport, Nimitz le transmit à Spruance. Ne sachant pas où se trouvait la principale flotte de Yamamoto, Spruance supposa que le sous-marin avait repéré la force d'invasion et il entreprit de l'intercepter
Les navires repérés par l'USS Tambor étaient les quatre croiseurs lourds Kumano, Suzuya, Mogami, Mikuma et les deux destroyers Arashio et Asashio, que Yamamoto avait envoyés pour bombarder Midway. À 2 h 55, les navires japonais reçurent l'ordre de se replier et ils firent demi-tour. À peu près au même moment, l'USS Tambor fut repéré et lors des manœuvres pour éviter une attaque sous-marine, les croiseurs Mogami et Mikuma entrèrent en collision. La proue du Mogami fut sévèrement endommagée et le Mikuma, ayant subi moins de dégâts, dut ralentir à la vitesse de 22 noeuds/h pour ne pas distancer le Mogami. À 04 h 12, le sous-marin américain confirma que les navires étaient japonais et il plongea pour passer à l’attaque.
Celle ci fut infructueuse et vers 6 h, il rapporta la présence de deux croiseurs japonais de la classe Mogami se trouvant à l'ouest.
Les jours suivants, les appareils américains de Midway puis ceux des porte-avions de Spruance menèrent plusieurs attaques contre les croiseurs japonais à la traîne. Le Mikuma fut coulé le 7 juin et le Mogami fut touché à plusieurs reprises mais parvint à rentrer au Japon. Les destroyers Arashio et Asashio furent également bombardés et mitraillés par les appareils américains de la dernière vague.
Au même moment, les opérations de sauvetage de l'USS Yorktown se poursuivaient et il fut remorqué par le dragueur de mines USS Vireo . Dans l'après-midi du 6 juin, le porte-avions américain fut touché par deux torpilles lancées par le sous-marin japonais I-168. Les pertes furent légères car l'équipage avait déjà été en grande partie évacué, mais une troisième torpille coupa en deux le destroyer USS Hammann, tuant 80 marins. L'USS Yorktown ne coula que vers 5 h le 7 juin, marquant la fin de la bataille. Les Américains n'avaient donc perdu qu'un seul de leurs porte-avions, contre quatre pour les Japonais (l'Akagi, le Kaga, le Soryu et le Hiryu).
Les raisons de l'échec japonais
Plusieurs facteurs peuvent expliquer la défaite de la marine japonaise à Midway. D'un point de vue stratégique, la trop grande dispersion de sa flotte et donc, l'incapacité pour ses navires à se soutenir mutuellement a constitué un facteur essentiel de la défaite japonaise ; ensuite les échecs de ses moyens de reconnaissance ; enfin, le décryptage par les Américains du code et donc du plan des Japonais.
Lors de la bataille en elle-même, les aviateurs US firent pourtant preuve d'une bien moins bonne maîtrise dans leurs attaques que leurs homologues japonais. Les cinquante appareils qui décollèrent de Midway n'obtinrent aucun résultat significatif tout comme les 41 avions-torpilleurs partis des trois porte-avions américains.
À l'inverse, les deux frappes menées à partir de l'Hiryu sur le Yorktown (soit 28 bombardiers seulement) eurent pour résultat plusieurs coups au but à chaque fois.
Toutefois, les opérations de ravitaillement à bord des navires américains se faisaient sur le pont et les canalisations étaient purgées au CO2 en cas d'attaque. L'équipage pouvait ainsi balancer par-dessus bord tout objet inflammable et circonscrire les incendies rapidement. Le USS Yorktown fut frappé à cinq reprises mais ne coula pas, tant les opérations de lutte incendie et de réparations furent efficaces. C'est le sous-marin I-168 qui eut finalement raison de lui.
Coté japonais en revanche, les mécaniciens réarmaient les appareils à l'intérieur des hangars, totalement clos afin de les protéger des intempéries. Cette conception augmenta l'effet de souffle des bombes américaines et favorisa les incendies. Ainsi, le lourd Akagi ne reçut qu'un seul projectile, mais suffisant pour déclencher des feux incontrôlables.
Enfin, le facteur chance joua un rôle non négligeable lors de cette bataille, lorsque les Dauntless se retrouvèrent sans opposition aérienne pendant que les Japonais effectuaient leurs opérations de ravitaillement en carburant et en munitions.
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Après avoir remporté une victoire sans appel et jugeant la poursuite trop dangereuse, les forces américaines se replièrent vers l'est.
Le rapport détaillé sur la bataille rédigé par Nagumo fut transmis au haut-commandement militaire le 15 juin. Il n'était destiné qu'aux plus hauts échelons de la marine impériale et du gouvernement et fut gardé secret tout au long de la guerre. Le public japonais fut gardé dans l'ignorance de la défaite tout comme l'essentiel de la structure de commandement. Seul l'empereur Hirohito et les officiers supérieurs de l'armée furent informés de l'étendue des pertes en navires et en pilotes. Aussi les planificateurs de l'armée continuèrent-ils de considérer, au moins durant une brève période, que la marine japonaise conservait sa supériorité.
Au retour de la flotte japonaise à Hashirajima près d'Hiroshima le 14 juin, les blessés furent immédiatement transférés dans des hôpitaux militaires où ils furent placés à l'isolement pour qu'ils ne révèlent pas l'étendue de la défaite. Les officiers et les marins furent dispersés dans d'autres unités de la marine et furent déployés dans le Pacifique Sud où beaucoup périrent. Par contre, les officiers de l'état-major du groupe aéronaval ne furent pas sanctionnés et Nagumo fut placé à la tête de la force aéronavale reconstituée après la bataille.
Les Japonais tirèrent quelques leçons de la bataille de Midway : de nouvelles procédures furent adoptées pour permettre le ravitaillement en carburant et le réarmement d'un plus grand nombre d'appareils sur le pont d'envol plutôt que dans les hangars pour limiter les dégâts infligés par une bombe parvenant à perforer le pont ; la purge de tous les tuyaux d'alimentation en carburant après usage fut généralisée. Les nouveaux porte-avions en cours de construction furent modifiés pour intégrer de nouveaux équipements de lutte contre l'incendie et pour limiter à deux le nombre d'ascenseurs. Pour combler rapidement les effectifs, la durée de formation des nouveaux pilotes de l'aéronavale fut raccourcie au détriment de la qualité de l'entraînement. Les pilotes vétérans japonais de Midway et de la campagne des îles Salomon furent obligés de rester sur le front alors que les vétérans américains étaient progressivement assignés à la formation des nouveaux pilotes. Par conséquent, l'efficacité de l'aéronavale japonaise se dégrada de manière continue jusqu'à la fin de la guerre.
Conséquences
Entre le 4 et le 7 juin 1942, six mois après l'attaque de Pearl Harbor par les Japonais et un mois après la bataille de la mer de Corail, l'United States Navy avait donc infligé une défaite décisive à la marine impériale japonaise , causant des pertes irremplaçables à sa flotte.
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La bataille a souvent été qualifiée de « tournant de la guerre du Pacifique ». Cependant les Japonais continuèrent d'essayer de progresser dans le Pacifique Sud et plusieurs mois passeront avant que l’équilibre des forces navales ne se transforme en une claire suprématie américaine. En revanche, la destruction de la puissance aéronavale japonaise à Midway, associée à l'indécise bataille de la mer de Corail, réduisit la capacité du Japon à entreprendre de grandes offensives. La victoire américaine ouvrit la voie aux débarquements de Guadalcanal et à la longue guerre d'attrition de la campagne des îles Salomon, qui permit aux Alliés de reprendre l'initiative dans la guerre du Pacifique.
Voici heure par heure le détail des opérations
Le 4 juin • • 04h30 : Premier décollage japonais contre les îles Midway
• 04h30 10 avions du Yorktown commencent à rechercher les navires japonais
• 05:34 Les navires japonais sont détectés par un PBY depuis Midway
• 07h10 6 TBF Avengers et 4 B-26 venus de Midway attaquent
• 07h40 : la force navale américaine est repérée
• 07h50 : 67 bombardiers en piqué, 29 bombardiers torpilleurs, 20 Wildcats décollent
• • 07h55 : 16 bombardiers en piqué de l'US Navy venus de Midway attaquent
• 08h10 :17 B-17 venus de Midway passent à l’attaque
• 08h20 : 11 bombardiers de la marine américaine venant de Midway attaquent
• 09h06 12 bombardiers torpilleurs, 17 bombardiers en piqué, 6 Wildcats décollent duYorktown
• 09h10 La force de frappe de Tomonaga s’est posée en toute sécurité
• 09h18 Nagumo passe au nord-est
• 09h25 : 15 bombardiers torpilleurs du Hornet attaquent
• 09h30 14 bombardiers torpilleurs de l’Enterprise passent à l’ attaque
• 10h00 Attaque de 12 bombardiers torpilleurs partis du Yorktown
• 10h25 30 bombardiers en piqué venant de l’Enterprise attaquent l’Akagi et le Kaga
• 10h25 17 bombardiers en piqué du Yorktown attaquent le Soryū
• 11h 00 18 Vals et 6 Zekes décollent du Hiryū
• 11h30 10 avions du Yorktown décollent pour rechercher les navires japonais restants
• 12h05 Première attaque sur le Yorktown
• 13h30 Le Hiryū est repéré par un avion duYorktown ; 24 bombardiers en piqué décollent contre le Hiryū
• • 13h31 10 Kates et 6 Zekes décollent du Hiryū
• 13h40 Le Yorktown est de nouveau en service, à 18 nœuds
• 14h30 Deuxième attaque sur le Yorktown
• 15 h 00 Le Yorktown est abandonné
• 16:10 Le Soryū est coulé
• 17h 00 Des bombardiers en piqué attaquent le Hiryū
• 19h25 Le Kaga est coulé
Le 5 Juin • 05:00 L'Akagi est coulé
• 09:00 Le Hiryū est coulé
Victimes japonaises et américaines
À la fin de la bataille, 3 057 Japonais avaient péri. Les pertes à bord des quatre portes avions étaient les suivantes : Akagi : 267 ; Kaga : 811 ; Hiryū : 392 (y compris le contre-amiral Tamon Yamaguchi qui a choisi de couler avec son navire) ; Soryū : 711 (dont le capitaine Yanagimoto, qui a choisi de rester à bord) soit un total de 2181 hommes. Pour les croiseurs lourds Mikuma (coulé ; 700 victimes) et Mogami (gravement endommagé ; 92) soit un total de 792 morts supplémentaires.
Il y a lieu d’ajouter les destroyers Arashio (bombardé; 35) et Asashio (mitraillé par les avions; 21) qui ont tous deux été endommagés lors des attaques aériennes qui ont coulé le Mikuma et causé d'autres dommages au Mogami. Des hydravions ont été perdus des croiseurs Chikuma (3) et Tone (2). Les morts à bord des destroyers Tanikaze (11), Arashi (1), Kazagumo (1) et le pétrolier de la flotte Akebono Maru (10) représentaient les 23 victimes restantes.
À la fin de cette bataille, les États-Unis avaient perdu le porte-avions Yorktown ainsi qu’un destroyer, le Hammann. 307 Américains ont été tués, dont le général de division Clarence L. Tinker, commandant de la 7ème Air Force, qui avait personnellement dirigé une frappe de bombardiers depuis Hawaï contre les forces japonaises en retraite le 7 juin. Il a été tué lorsque son avion a percuté près de l'île de Midway.
Que penser du résultat de cette bataille navale qui, au final, fut remportée par l’aviation embarquée ?
Le Japon venait de subir un cuisant échec alors que dans le même temps, les Américains voyaient leur moral sérieusement reprendre des couleurs ! Le désastre de Pearl Harbour 6 mois plus tôt était vengé ! Midway marquera cette guerre américano-japonaise de façon certaine mais la route sera encore très longue avant la victoire finale.
Sources
http://ww2fighters.e-monsite.com/pages/ ... cat-1.htmlDocavia n°11
La Bataille de Midway- Thaddeus V. Tuleja- Arthaud 1961
Laissons la place à Alain, ( NIALA ) nous présenter les belligérants coté 'marine' cette fois !