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Un second front devenait-il nécessaire????

Cette rubrique renferme tout ce qui concerne le front ouest du conflit, y compris la bataille des Ardennes ainsi que les sujets communs à tous les fronts tels, les enfants et les femmes dans la guerre, les services secrets, espionnage...
MODÉRATEUR: gherla

Re: Un second front devenait-il nécessaire????

Nouveau message Post Numéro: 11  Nouveau message de Prosper Vandenbroucke  Nouveau message 23 Déc 2017, 20:21

dynamo a écrit:je suis dubitatif sur la réussite d'opération aéroportée massive, niveau armée.
En Normandie, c'est limite, Market garden c'est plus que limite.
Je n'imagine pas l'acheminement en 44 d'une armée en territoire hostile.
Le COSSAC a bien fait de décider OVERLORD, opération combinée, avec les paras.
Pour moi, les paras, c'est une utilisation rapide, chirurgicale à haute valeur ajoutée. (Eben Emael)


Tu fais bien de rester dubitatif, car moi non plus je ne pense qu'un opération aéroportée, fusse-telle été massive aurait pu changer quoi que ce soit, sauf en ce qui concerne l'aspect politique de la chose, mais là nous ne sommes plus dans le contexte militaire.
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Re: Un second front devenait-il nécessaire????

Nouveau message Post Numéro: 12  Nouveau message de alain adam  Nouveau message 25 Fév 2018, 22:49

Bonsoir ,
Je crois qu'on revient encore sur la dualité de l'aspect commando ( Eben Emaël ) et pré positionnement de forces défensives , ou prise d'ouvrages indispensables a l'avancée rapide d'une armée ( market garden ) .
Ce second aspect est rarement rappelé , mais le groupe "Koch" , n'avait pas que la mission de réduire les potentialités offensives du fort belge d'Eben Emaël , que j'ai eu le grand plaisir de visiter .
Ainsi d'autres équipes du meme groupe devaient s'emparer du pont de kanne ( ou canne ) , du pont de Veltwezelt et du pont de Vroenhoven .
L'opération , dans son ensemble , ne visait pas a détruire un fort , mais bien a faciliter l'invasion en prenant des ouvrages de ponts .
Ce que n'a retenu l'histoire c'est uniquement la reddition du fort devant une poignée de parachutistes , pendant que de l'autre coté , en hollande les "Tante Ju" ( Ju-52 ) , avec les Fallschrimjäger Rgt 1 et 2 , se faisaient éliminer comme a la parade avant de larguer leurs champignons .
Tout cela est approximatif , et en rien déterminant d'une action militaire parachutée a portée stratégique .
Du coup , bien souvent on se reporte aux échecs ( crête ) pour indiquer que de telles opérations ne sont pas crédibles durant la seconde guerre mondiale .
Le gros soucis , a l'époque , c'est qu'on ne dirige pas son champignon , donc on va ou on va , avec des résultats assez pittoresques comme un parachutiste accroché a un
clocher . Mais il faut bien avouer que sans les parachutistes colmatant les abords des zones de débarquement le 6 juin 44 , la sauce aurait pu être différente .

Amicalement ,
Alain
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Re: Un second front devenait-il nécessaire????

Nouveau message Post Numéro: 13  Nouveau message de pierma  Nouveau message 25 Fév 2018, 22:57

alain adam a écrit:Le gros soucis , a l'époque , c'est qu'on ne dirige pas son champignon , donc on va ou on va , avec des résultats assez pittoresques comme un parachutiste accroché a un
clocher . Mais il faut bien avouer que sans les parachutistes colmatant les abords des zones de débarquement le 6 juin 44 , la sauce aurait pu être différente .

Hé oui, malgré les difficultés que vous soulignez sur les parachutes de l'époque, les alliés ont largué pas moins de 4 divisions parachutistes sur le Cotentin - 2 américaines et 2 anglaises, sauf erreur - et donc on pouvait en attendre des résultats sensibles, malgré un taux de pertes qu'on prévoyait très élevé.

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Re: Un second front devenait-il nécessaire????

Nouveau message Post Numéro: 14  Nouveau message de alain adam  Nouveau message 25 Fév 2018, 22:58

pierma a écrit:
alain adam a écrit:Le gros soucis , a l'époque , c'est qu'on ne dirige pas son champignon , donc on va ou on va , avec des résultats assez pittoresques comme un parachutiste accroché a un
clocher . Mais il faut bien avouer que sans les parachutistes colmatant les abords des zones de débarquement le 6 juin 44 , la sauce aurait pu être différente .

Hé oui, malgré les difficultés que vous soulignez sur les parachutes de l'époque, les alliés ont largué pas moins de 4 divisions parachutistes sur le Cotentin - 2 américaines et 2 anglaises, sauf erreur - et donc on pouvait en attendre des résultats sensibles, malgré un taux de pertes qu'on prévoyait très élevé.


erreur :
101e et 82e US , 6e britannique .
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Re: Un second front devenait-il nécessaire????

Nouveau message Post Numéro: 15  Nouveau message de Tomcat  Nouveau message 26 Fév 2018, 16:22

Ci-dessous une analyse très intéressante de Benoît Rondeau sur l'importance et l'impact du second front sur le front de l'est extrait de son excellent blog :

http://www.benoitrondeau.com/?s=OSTFRON ... C3%89TIQUE

Sans un Second Front en Afrique, on ne peut imaginer un Second Front viable en Europe, ce qui ne serait en aucune manière en faveur de l’Union Soviétique qui a cruellement besoin d’être soulagée en cette année 1942. Ce faisant, le Second Front est bien ouvert en Méditerranée bien avant le 6 juin 1944.

Il est en effet intéressant que noter que le rêve africain a coûté des pertes considérables aux forces de l’Axe : d’après Churchill, dont les chiffres sont à prendre avec caution mais donne une idée du désastre infligé aux forces de l’Axe, la Wehrmacht et l’Italie ont perdu 975 000 hommes, dont 200 000 Allemands, en Afrique du Nord et en Afrique Orientale, 7 600 avions, 2 550 chars, 6 200 canons, 70 000 véhicules motorisés et pas moins de 624 navires, la plupart coulés par la RAF et la Royal Navy dans leur lutte contre les lignes de ravitaillement de l’armée de Rommel. En tout état de cause, plus de 800 000 hommes ont été perdus, si on inclut l’Afrique Orientale. Les pertes en troupes d’élite sont conséquentes pour la Wehrmacht avec la reddition en Tunisie, ce ne sont pas moins de 3 divisions de Panzer et 1 de Panzergrenadier qui sont perdues, sans compter les unités de Tiger, de Fallschirmjäger. Ces pertes allemandes et italiennes en Tunisie ne sont pas négligeables et l’impact est d’autant plus grand que cette défaite survient en même temps que celle de Stalingrad, alors que le front de l’Est est traversé par une crise d’effectifs. En 1942, la Wehrmacht, à l’aube de la décisive offensive vers Stalingrad et le Caucase, va rééquiper la Panzerarmee de Rommel avant son assaut sur la ligne de Gazala et Tobrouk et une seconde fois au cours de l’été, à El Alamein. Des centaines de Panzer et de pièces d’artillerie sont donc détournés vers l’Afrique, sans parler des efforts logistiques considérables pour le maintien opérationnel l’armée de Rommel. En Tunisie, Hitler envoie des renforts conséquents alors que Manstein fait face au même moment à une situation dramatique à Stalingrad dont il ne pourra briser l’encerclement faute de moyens suffisants. Si 400 appareils sont redéployés de la Russie vers la Méditerranée dès le mois de novembre, c’est le quart du potentiel aérien allemand qui est concentré dans la région, contre 1/12ème un an et demi plus tôt. Le 10 novembre, le Fliegerkorps II compte 445 avions de combat et 673 appareils de transport. Début décembre, la Luftwaffe aligne 1 350 appareils opérationnels en Méditerranée, dont 480 avions de transports Ju-52 et 22 Me 323 et Ju 90, et ce alors même que Stalingrad, qui vient d’être encerclée doit également être ravitaillée par un pont aérien. Toutes les troupes germano-italiennes impliquées dans la campagne nord-africaine sont autant d’unités qui n’ont pu être employées contre les Soviétiques, et ce dès 1941 (imaginons la 8ème armée italienne en Russie renforcée par les unités finalement expédiées en Afrique…). Leur perte va se traduire par une absence de troupes en nombre suffisant pour assurer l’inviolabilité de la « Forteresse Europe » par le sud.


La campagne d’Italie et ses incidences sur la guerre à l’Est avant le DDay

Au printemps 1943, Sir Alan Brooke affirme qu’un effondrement italien placerait l’Axe à 54 divisions et 2 200 avions en-dessous du minimum nécessaire pour tenir un front cohérent à l’Est. Un débarquement en France reste toujours prématuré et de toute façon impossible en raison des délais que supposerait le redéploiement des forces engagées en Méditerranée vers le Royaume-Uni. Le seul moyen pour soutenir les Soviétiques est de poursuivre les opérations en Méditerranée. Les Alliés portent une nouvelle estocade au pouvoir du Duce en envahissant la Sicile le 10 juillet 1943 (opération « Husky »). Conséquence directe, Hitler décide de mettre fin à l’opération « Citadelle », la bataille pour la réduction du saillant de Koursk, pourtant jugée essentielle aux yeux du Führer qui n’a eu de cesse de la repousser. L’impact direct des opérations menées par les Alliés sur le front de l’Est est donc à nouveau flagrant. Il est cependant honnête de rappeler également que la concentration exceptionnelle de forces allemandes en Ukraine n’a été possible que parce que l’OKW a compris que l’intervention américaine en Afrique du Nord signifie que le débarquement allié ne pourra avoir lieu en France en 1943. Si l’US Army avait encore disposé de ses troupes au Royaume-Uni, la Wehrmacht aurait dû maintenir des forces conséquentes en France, ce qui est une façon d’ouvrir un Second Front ou, pour le moins, de limiter considérablement les options stratégiques pour l’Axe à l’Est pour l’année 1943. La Luftwaffe est toujours très sollicitée puisque, à la veille de l’opération « Husky », 1 750 avions de l’Axe (ce qui inclut donc la Regia Aeronautica) sont à portée de la Sicile. D’ailleurs, une partie des escadrilles basées en Norvège est détournée en Méditerranée, ce qui affaiblit la puissance de frappe du Reich contre les convois alliés de l’Arctique vers Mourmansk alors que les meilleurs succès dans ce secteur sont toujours à mettre au crédit de la Luftwaffe.

La lutte pour la défense de l’Italie va cependant drainer de plus en plus de troupes allemandes, au détriment de fronts autrement plus importants stratégiquement parlant. En 1943, les divisions envoyées en Sicile et dans la péninsule vont faire cruellement défaut alors que le sort de la guerre à l’Est se joue notamment dans les steppes ukrainiennes. Les troupes manquent en effet à l’Est pour tenir un front gigantesque et constituer des réserves. D’autres unités sont détournées vers les Balkans avant « Husky » : 5 nouvelles divisions, dont l’excellente 1. Panzer, sont ainsi envoyées en Grèce suite à l’opération d’intoxication britannique « Animals » menée depuis Le Caire. Le 9 juillet, 14 divisions allemandes sont en Italie, sans compter celles qui sont déployées dans les Balkans, en Grèce et en mer Egée, plus pour se prémunir d’un offensive amphibie que pour mener des opérations anti-partisans. Pas moins d‘une cinquantaine de divisions allemandes serviront ainsi en Méditerranée, au détriment des autres fronts, ce qui, il est vrai, ne dessert pas que l’unique front de l’Est. En mai 1944, le Heeresgruppe C, qui regroupe l’ensemble des unités allemandes combattant en Italie, aligne 26 divisions allemandes et 6 divisions italiennes fascistes.

Autre intérêt de première importance résultant de l’intervention des Alliés en Méditerranée, les usines du sud du Reich et les puits de pétrole de Ploesti en Roumanie sont désormais à portée des bombardiers stratégiques de la 15th US Air Force basés en Méditerranée. Ces opérations aériennes participent de l’effort de guerre commun et les Soviétiques en retirent bien entendu également les dividendes.



L’impact stratégique des bombardements sur l’Allemagne, un autre Second Front ouvert dès 1942

Restons dans le domaine de la guerre aérienne en nous éloignant de la Méditerranée. En juin 1941, les deux tiers de la Luftwaffe sont engagés à l’Est. Comme l’armée de terre, la Luftwaffe a également beaucoup souffert en 1941, puisque ses pertes atteignent 5 000 appareils tous fronts confondus, dont 60% sur le front de l’Est. Les pertes subies sur les autres théâtres d’opérations ne sont donc pas négligeables puisqu’elles atteignent 40%. Le tiers de la Luftwaffe est en effet resté mobilisé contre l’Angleterre dès juin 1941. C’est une première étape pour un Second Front dans les airs. Dernier effort toutefois, en 1942, au moment du Fall Blau, les trois quarts de la Luftwaffe – 3 000 appareils- sont concentrés à l’Est pour l’offensive décisive.

C’est pourtant au cours de cette même année 1942 que les opérations aériennes menées à l’Ouest vont commencer à peser sur la répartition stratégique de la Lufwaffe. La préparation du retour des armées alliées sur le contient passe en effet par une intense guerre aérienne. En dépit de leur ampleur et des moyens engagés, les raids aériens alliés n’empêcheront jamais un accroissement sensible de la production en armement de l’Allemagne, particulièrement après sa reprise en main par Albert Speer suite à la défaite de Stalingrad. Mais on ne peut donc que conjecturer de l’ampleur de la production de guerre allemande sans ces bombardements qui poussent à la déconcentration industrielle et causent tout de même indéniablement retards et pertes, sans parler de l’épuisement et du stress qui frappe les employés des industries du Reich. Les effets sur les transports et sur l’économie allemands sont loin d’être négligeables. En février 1945, la Reichsbahn fait l’amer constat qu’elle ne dispose plus que de 28 000 wagons utilisables contre 136 000 six mois plus tôt. L’Oil Plan, l’ensemble des opérations visant à dénier aux Allemands l’usage de leurs industries d’essence de synthèse et le pétrole venant de Ploesti en Roumanie est un succès aux répercussions considérables sur tous les fronts. Ainsi, à terme, le Reich manque de carburant pour ses blindés et ses avions, quand bien même son industrie marque des records de production en 1944. Ainsi, 125 000 avions de guerre sortent des chaînes de montage allemandes entre 1938 et 1945, dont 40 000 en 1944. Mais la Luftwaffe ne sera pourtant désormais plus jamais en mesure de rivaliser avec ses adversaires. L’Allemagne est contrainte de concentrer l’essentiel de sa chasse sur le territoire du Reich dès 1943 et près de 30 000 canons de la Flak à l’automne 1944. Tout ceci représente une débauche de moyens considérables. Des centaines de milliers d’Allemands sont mobilisés dans la Flak (peut-être jusqu’à deux millions en 1944), manient les radars ou participent au déblaiement et aux réparations des dégâts occasionnés. La production de munitions pour la Flak finit par absorber 20% du total des munitions produites par l’Allemagne ! Celle des canons de DCA atteint le tiers de l’artillerie sortant des chaînes de montages. Assurer la défense des cieux du Reich, la mise au point de nouveaux matériels efficients, techniques et coûteux (comme le Me 262) a orienté l’effort de guerre allemand contre les Alliés occidentaux. Passée sur la défensive, le Reich est contraint de produire toujours plus de chasseurs au détriment d’une force de frappe de bombardiers qui ne cesse de s’amoindrir.

Les bombardements stratégiques ont contribué à la victoire et ont soulagé de façon notable les forces soviétiques qui n’ont alors qu’à affronter une Luftwaffe aux moyens sévèrement amputés par la nécessité de la défense du Vaterland. Le 30 juin 1944, la répartition des 1 375 monomoteurs de la chasse allemande est de 425 à l’Ouest, 475 à l’Est et dans les Balkans, 370 dans le Reich, 40 en Norvège et 65 en Italie. Le 1er janvier 1945, le constat est similaire : les escadrilles allemandes comptent 2 998 chasseurs de jour et de nuit à l’Ouest contre 567 à l’Est. Les Soviétiques auraient eu de sérieuses difficultés sans ce Second Front aérien si on songe au milliers de tubes de 88 mm (en 1944, la Flak aligne 17 500 canons de 88 à 120 mm) qui auraient été ainsi disponibles pour frapper les T 34 dans la Steppe sous le couvert d’une Luftwaffe nettement plus conséquente et en soutien d’unités terrestres sans doute renforcées par des rampants de l’armée de l’air d’unités qui n’auraient eu aucune utilité en Allemagne.


La bataille de l’Atlantique : peut-être le front le plus crucial avant 1944

La Luftwaffe ne combat pas les formations aériennes alliées uniquement sur les fronts terrestres ou au-dessus du Reich. Elle intervient activement dans la bataille de l’Atlantique, notamment dans ce qu’il est convenu d’appeler la bataille des convois vers Mourmansk. L’essentiel du poids de la guerre sur mer, dans l’Atlantique Nord comme ailleurs, repose avant tout sur la Kriegsmarine, ce qui ne saurait surprendre.

En quoi cette bataille peut-elle influer sur la guerre à l’Est ? En premier lieu, on peut noter les convois alliés en direction de Mourmansk apportant un matériel contribuant à l’effort de guerre russe. Il y a surtout la nécessité de maintenir le Royaume-Uni dans la guerre, or tout doit être importé dans cette île : armes, matériel, denrées… Pour les Britanniques, une perte de contrôle des voies maritimes menant à la Grande Bretagne signifierait l’asphyxie. D’autre part, l’ouverture d’un Second Front en France suppose la mise en œuvre du plan « Bolero », à savoir le transfert depuis Etats-Unis vers le Royaume-Uni des forces terrestres et aériennes américaines indispensables à la libération du continent européen. Il s’agit ni plus ni moins du sort de la guerre. Si l’US Army n’est pas en mesure de se déployer au Royaume-Uni et si les liaisons maritimes sont coupées par les U-Boote, il n’y aura pas débarquement, pas de Second Front en France et la guerre est peut-être perdue. Cependant, si les exploits des sous-mariniers allemands sont nombreux, particulièrement en 1940-42, ils ne sont pas en mesure de l’emporter quoique, un temps, les pertes en navires marchands britanniques dépassent le tonnage des nouveaux cargos mis à la mer.

Pourtant, l’effort industriel allemand semble à la mesure de l’importance accordée à la bataille de l’Atlantique. 1 170 U-Boote sont construits. Mais lorsque l’amiral Dönitz, le patron de l’arme sous-marine allemande puis de l’ensemble de la Kriegsmarine, peut compter sur 429 U-Boote en avril 1943, il est trop tard. En mai de la même année, la bataille de l’Atlantique est gagnée par les Alliés, alors que les premiers mois de l’année 1943 ont vu les scores des sous-mariniers allemands atteindre des records. Tout ceci suppose donc la mobilisation de main d’œuvre, d’acier et de chercheurs pour que les chantiers navals du Reich produisent une telle quantité de submersibles alors que la Heer manque désespérément de matériel sur le front Est. Imaginons la quantité de véhicules, de canons et de Panzer que représentent plus de 1 100 U-Boote ! Les 40 000 sous-mariniers allemands ne pèsent pas lourds en comparaison des millions de soldats de l’Ostheer, mais, comme pour l’Afrique, l’importance stratégique d’un théâtre d’opération ne se limite pas à des tableaux d’effectifs. Cette poignée de combattants pouvait donner la victoire au Reich, ou du moins un avantage certain, un gain de temps précieux pour concentrer toutes ses ressources à l’Est. Toutefois, il n’est pas raisonnable de pousser les conjectures trop loin : si l’Allemagne avait accentué son effort de guerre dans l’Atlantique, chose tout à fait imaginable, il faut en revanche évidemment imaginer une réaction en conséquence des Américains, que ce soit au détriment des ressources allouées à la lutte contre le Japon ou dans les choix industriels.

Les Alliés l’ont pourtant emporté dans l’Atlantique. Non sans mal. Les Allemands ont consacré d’immense ressources –U-Boote et bases sous-marines, escadrilles de la Luftwaffe, recherche et mobilisation industrielle en faveur de la Kriegsmarine– en s’investissant dans ce front. Mais avaient-ils le choix ? On ne peut sérieusement imaginer un abandon pur et simple des océans à la navigation alliée. En ce sens, les Soviétiques ont mésestimé une fois encore un soutien militaire concret à leur cause bien avant le DDay. Ce DDay en Normandie est, on l’a dit, d’ailleurs rendu possible grâce à la victoire remportée dans l’Atlantique. Le front de l’Ouest peut être ouvert.

L’aide occidentale fournie à l’Union Soviétique : un Second Front industriel

L’histoire officielle a souvent minimisée à tort l’aide considérable apportée par les Alliés occidentaux à l’effort de guerre soviétique. Le matériel militaire et les matières premières accordées à l’URSS notamment dans le cadre de la loi « Prêt-Bail » représentent des quantités considérables. Cette aide a transité essentiellement par l’Iran, via ensuite Astrakhan, et, dans une moindre mesure, par le biais des convois de l’Arctique, via Mourmansk. L’URSS a ainsi reçu 700 000 t de métaux non ferreux, 4,5 millions de tonnes de denrées alimentaires, 190 000 téléphones de campagne, 12 000 wagons et locomotives, 34 millions d’uniformes et 5 millions de paires de bottes. Sur toute la durée de la guerre, le Royaume-Uni a fourni 5 218 chars, 7 411 avions, 4 932 canons antichars, 473 millions de tonnes de munitions, 4 300 radios, 1 800 radars, 10 destroyers, 1 cuirassé. Les USA ont fourni 7 537 chars, 14 795 avions, 51 503 jeeps, 375 883 camions, 1 981 locomotives, 11 155 wagons, 2,6 millions de tonnes de pétrole, 3,7 millions de roues, 345 000 tonnes d’explosifs. Pour les seuls Etats-Unis, cette aide se chiffre alors à 10 milliards de dollars. Toute cette aide n’arrive pas avant 1944, mais elle joue un rôle économique considérable, permet une motorisation partielle de l’Armée Rouge et favorise la reconversion militaire soviétique dont les usines peuvent se concentrer sur la production d’armement.

Le front de l’Ouest : priorité de Hitler à partir de l’automne 1943 et au-delà

La bataille de l’Atlantique perdue, le débarquement des Alliés à l’Ouest devient inévitable à plus ou moins long terme. Conscient de l’importance de la partie décisive qui va se jouer à l’Ouest, Hitler accorde la priorité à ce front à partir de l’automne 1943. Il faut absolument que ses armées rejettent l’invasion alliée attendue pour le printemps 1944. Ce succès lui permettrait ainsi de se retourner avec toutes ses forces sur le front de l’Est et accorderait également au Reich le temps nécessaire à la mise au point d’armes qui, pense-t-il, assureraient la victoire : sous-marins de la nouvelle génération, avion à réaction Messerschmitt 262, bombe volante V1, fusée supersonique V2…(ces derniers programmes-très coûteux- sont d’ailleurs destinés à la lutte contre les Occidentaux, pas contre les Soviétiques…). Pour s’opposer efficacement à l’invasion, Hitler concentre à l’Ouest un nombre conséquent de divisions d’élites de la Wehrmacht et de la Waffen SS : 10 divisions blindées et motorisées et 2 divisions de parachutistes. Les effectifs de l’armée allemande à l’Ouest le 1er mars 1944 représentent 1 400 000 hommes. A ce moment là, le front de l’Ouest n’est en aucun cas négligé par rapport au front russe. L’effort conséquent fourni pour édifier le Mur de l’Atlantique –béton, armement, équipement, mines, barbelés…- abonde en ce sens. Alors que von Rundstedt a 58 divisions à sa disposition pour affronter les Alliés occidentaux dans la bataille décisive, la Wehrmacht et la Waffen SS alignent 187 divisions en URSS et en Finlande. L’Italie, la Scandinavie et les Balkans en absorbent 64 autres. On compte donc un total de 122 divisions réparties sur des fronts autres que le front de l’Est en juin 1944, ce qui est considérable. Avant que le moindre coup de feu ne soit tiré, le Second Front existe déjà…

Le front de l’Ouest devient une réalité en France le 6 juin 1944. L’opération « Overlord » est la plus complexe et la plus importante opération de la guerre, dépassant même « Barbarossa ». Le succès allié en Normandie décide du sort de la guerre et constitue la bataille décisive. La guerre à l’Est ne peut décider à elle seule du sort du conflit. Le Second Front est donc ouvert. Il garde ensuite la priorité que lui accordé le Führer depuis sa directive n°51 de novembre 1943. En dépit des désastres subis contre les Soviétiques au cours de l’été 1944, des renforts sont partis de l’Est vers l’Ouest (le 2. SS Panzerkorps) et non l’inverse. Hitler et ses généraux sont parvenus à surmonter la crise de la fin de l’été 1944 à l’Ouest en y envoyant nombre d’unités, et ce au détriment du front de l’Est, où les pertes ont été pourtant encore plus lourdes en nombre de combattants (environ 800 000 contre 400 000). La priorité accordée à la lutte contre les Anglo-Américains est une évidence. 18 des 23 Volksgrenadier-Divisionen créées rejoignent ainsi le front de l’Ouest. Les unités de Panzer sont rééquipées, grâce à une production record, les meilleurs chars, Panther et Tiger, étant réservé au front de l’Ouest, qui bénéficie toujours de toutes les priorités, au grand dam de Guderian. C’est ainsi que près de 1 000 blindés, beaucoup encore en rodage, vont être envoyés sur le front Ouest en septembre 1944. 2 299 Panzer et Sturmgeschütze neufs ou réparés sont également fournis aux troupes allemandes engagées à l’Ouest en novembre et décembre 1944, sur un front d’environ 400 kilomètres, tandis que les troupes opposées aux Soviétiques n’en reçoivent que 921 pour un front qui dépasse les 3 000 kilomètres ! En outre, alors que le Reich est aux abois et que la Wehrmacht manque de tout, de grandes réserves de carburant et de munitions sont constituées en vue de l’offensive dans les Ardennes, ce qui ne peut que s’effectue qu’en défaveur des unités de la Wehrmacht sur le front de l’Est.

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Re: Un second front devenait-il nécessaire????

Nouveau message Post Numéro: 16  Nouveau message de pierma  Nouveau message 26 Fév 2018, 17:37

Une analyse très complète et passionnante.

Autant pour les récriminations permanentes de Staline pour l'ouverture d'un second front, en particulier pour sa déception spectaculaire de 1943.

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