Chef Chaudart a écrit:Kesselring, à mon avis, brode. Quelles que soient les qualités de l'appareil, il ne pouvait être l'épouvantail qu'il agite. J'en conclus qu'il n'a probablement pas parlé du Spitfire à son chef et ne le cite dans ses Mémoires que pour rejeter l'erreur sur Hitler et Goering, mettre en avant sa clairvoyance et flatter le vainqueur dans un ouvrage destiné au marché anglo-saxon.
4/ Aucun écrit, à ma connaissance, n'atteste que Von Rundstedt n'ait protesté contre le transfert de la 4. Armee décidé entre-temps par l'O.K.H. (plus exactement le général Von Brauchitsch) au bénéfice de Von Bock ("pendant la nuit, rien à signaler"), ce qui est certes très difficile à croire si Von Rundstedt a vraiment les chocottes. Tout au plus Sodenstern a-t-il menacé l'O.K.H.... de pondre un rapport!
A minuit (24H00), arrive – lors d’une communication téléphonique de très mauvaise qualité du colonel v. Greiffenberg, annoncée plus tôt - un ordre de l’OKH subordonnant, pour le « dernier acte » de la bataille d’encerclement, la 4.Armee au H.Gr.B, et « traçant » une nouvelle délimitation de secteur (Grenze, frontière) entre A & B. La nouvelle organisation doit entrer en vigueur, le 24.05, à 20H00.
Le Chef de l’E.M. (Stab) du H.Gr. (A), lors de la communication téléphonique susmentionnée, avec le chef de l’Op.Abteilung, le colonel v. Greiffenberg, a indiqué qu’il n’était malheureusement pas possible de procéder, pour la date indiquée, aux modifications prévues par le (nouvel) ordre d’organisation. La réponse du colonel v. Greiffenberg, selon le Generalleutnant von Sodenstern, devenait difficilement audible – l’accord (de fréquence) était extraordinairement mauvais et souffrait de dérangements de longue durée – enregistrait l’avis (du H.Gr.A), cependant, un changement (dans les ordres de l’OKH) n’est pas à attendre (Un autre éclairage ultérieur ne sera pas effectué, puisque la question était (désormais) dépassée par le développement).
En conséquence, le chef de l’E.M. (H.Gr.A) indiquait que son analyse de la situation actuelle, qui devait servir de base de travail, pour l’OKH, le lendemain, serait confirmée par écrit et prescrivait qu’elle soit enregistrée dans les dossiers.
Les échanges téléphoniques ont (alors) cessé (à rapprocher avec le développement du 24.05)
Loïc Charpentier a écrit:Bonjour,
A force de vouloir assaisonner la sauce à votre goût, vous finissez par ne même pas prendre en compte les documents officiels!
Or, avant la mention "pendant la nuit, rien à signaler", qui ouvre, effectivement, le compte-rendu des évènements du 24 mai 1940, dans le KTB du Heresgruppe A (Roll T 311 R253), - cf. document ci-dessous (déjà posté par mes soins)-...
...Il est largement fait mention, en page précédente - 3ème et dernière du compte-rendu de la "journée" du 23 (au 24) mai -, de la controverse qui était survenue, dans la nuit, après minuit, entre l'OKH et le Heeresgruppe A, à propos de l'ordre, émanant de ce dernier, qui subordonnait la 4.Armee au H.Gr. B, à dater du 24 mai , 20H00.... controverse qui "occupe", quand même, plus des trois-quarts de ladite page !
... dont, sauf, erreur, j'avais, déjà, inséré la traduction, sachant que l'interlocuteur OKH/Opérations est, alors, le colonel v. Greiffenberg et celui du H.Gr.A, le Generalleutnant v. Sondenstern (Ia, chef opérations et N°2 du groupe d'armée)...A minuit (24H00), arrive – lors d’une communication téléphonique de très mauvaise qualité du colonel v. Greiffenberg, annoncée plus tôt - un ordre de l’OKH subordonnant, pour le « dernier acte » de la bataille d’encerclement, la 4.Armee au H.Gr.B, et « traçant » une nouvelle délimitation de secteur (Grenze, frontière) entre A & B. La nouvelle organisation doit entrer en vigueur, le 24.05, à 20H00.
Le Chef de l’E.M. (Stab) du H.Gr. (A), lors de la communication téléphonique susmentionnée, avec le chef de l’Op.Abteilung, le colonel v. Greiffenberg, a indiqué qu’il n’était malheureusement pas possible de procéder, pour la date indiquée, aux modifications prévues par le (nouvel) ordre d’organisation. La réponse du colonel v. Greiffenberg, selon le Generalleutnant von Sodenstern, devenait difficilement audible – l’accord (de fréquence) était extraordinairement mauvais et souffrait de dérangements de longue durée – enregistrait l’avis (du H.Gr.A), cependant, un changement (dans les ordres de l’OKH) n’est pas à attendre (Un autre éclairage ultérieur ne sera pas effectué, puisque la question était (désormais) dépassée par le développement).
En conséquence, le chef de l’E.M. (H.Gr.A) indiquait que son analyse de la situation actuelle, qui devait servir de base de travail, pour l’OKH, le lendemain, serait confirmée par écrit et prescrivait qu’elle soit enregistrée dans les dossiers.
Les échanges téléphoniques ont (alors) cessé (à rapprocher avec le développement du 24.05)
Lors de ces échanges téléphoniques de mauvaise qualité (ce détail est précisé), il est évident que le colonel v. Greiffenberg, "porte-parole" de permanence du service Ops, d'un grade inférieur à son interlocuteur direct (v.Sondenstern) se réfugie, prudemment, derrière la décision de sa propre hiérarchie, en affirmant (un peu trop vite) que l'ordre transmis n'est pas "négociable", d'où l'ultime sortie de v. Sondenstern, avant l'interruption de la communication téléphonique , qui précise qu'il n'est pas dans l'intention du H.Gr.A de "laisser tomber", que son analyse de la situation actuelle (ou réelle) - Anlage 31b (annexe) , archivée séparément du KTB - doit (impérativement) servir de base de travail, pour l'OKH; il s'agit, là, d'un ordre montant, très surement, formulé par v. Rundstedt (supérieur hiérarchique de v. Sondenstern) transmis aux services d'Halder (responsable Ops, auprès de l'OKH), ce dernier étant, lui-même, d'un grade et d'une fonction "inférieurs" à ceux de v. Rundstedt, ne pouvant s'y opposer.
La mention "serait confirmée par écrit et prescrivait qu’elle soit enregistrée dans les dossiers." n'est pas destinée à se faire plaisir mais bien pour préciser que les "coups de pieds au cul ne seraient pas perdus pour tout le monde", si, d'aventure, l'analyse de situation du H.Gr.A n'était pas soumise à l'OKH, le 24 mai.
Dans le fonctionnement décisionnaire de la Heer, il était d'usage de discuter les ordres jusqu'à l'échéance-butoir, dans le cas présent, le 24 mai 1940, à 20.00 heures; v. Rundstedt & Sondenstern le savaient très bien. Dépassé ce délai, c'est l'ultime décision prise, en haut lieu, qui faisait force de loi. Or, c'est bien le résultat d'analyse de situation du H.Gr.A, qui sera,finalement, le lendemain, avalisé par le Führer, à qui on en attribue la paternité (par simple logique hiérarchique).
Halder avait fait valoir sa "main" auprès de l'OKH, dans la soirée du 23 mai, mais, au final, c'est v.Rundstedt qui abattra son atout-maitre, raisonnable et justifié, en présence du Führer.
Chef Chaudart a écrit:Je reviens sur "l'usure de la Luftwaffe": sur les 810 appareils perdus définitivement mentionnés par Nicolas au post 3490, 200 environ sont des Ju52 détruits lors des opérations aux Pays-Bas. Cela relativise "l'usure", ces appareils de transport n'ayant aucune utilité dans les opérations se déroulant lors de la bataille de Dunkerque et aucune perte supplémentaire n'étant à redouter
Chef Chaudart a écrit:Plus qu'à un amoindrissement de sa flotte, la Luftwaffe est victime du tempo des opérations: les unités sont en cours de relocalisation sur des terrains proches du front en ce qui concerne les avions à faible rayon d'action (chasseurs et Stukas), alors que les bombardiers décollent toujours d'Allemagne, ce qui limite à la fois les charges emportées et le nombre de missions journalières.
A ce moment des opérations, l'Armée de l'Air est nettement amoindrie et, si la RAF va réagir avec force pour protéger le rembarquement, c'est semble-t-il une réelle surprise pour les Allemands.
Quant à "l'irréaslisme" de Goering, il est aussi à relativiser: la simple destruction du port est parfaitement dans les cordes de "sa" Luftwaffe, puisque, de fait, il est rapidement rendu inutilisable.
D'autre part, il a pu constater les dégâts causés par ses appareils lors des bombardements de Varsovie et Rotterdam. Dans le premier cas, cet acte terroriste est même parvenu à faire plier les autorités polonaises. Il est donc légitime de penser qu'il espère parvenir à un résultat similaire sur la poche de Dunkerque. En transformant Dunkerque en bain de sang, en rasant des zones entières, selon les théories de Giulio Douhet en vogue à l'époque, il pouvait penser pouvoir obtenir la capitulation des forces encerclées,
Chef Chaudart a écrit:Je reviens également sur la phrase suivante des Mémoires de Kesselring:
"I pointed out to Goering that the modern Spitfires had recently appeared, making our air operations difficult and costly and in the end it was the Spitfires which enabled the British and French to evacuate across the water."
Le Spitfire n'apparait au dessus du continent que le 13 mai, dans une opération d'escorte de chasseurs "Defiant". L'affrontement se solde par la perte de quatre Ju87 rencontrés par hasard, un Me109 lorsque les attaquants sont interceptés. Les Britanniques perdent un Spitfire et cinq Defiants.
Je ne vois pas à partir de quoi Kesselring aurait pu s'inquiéter de l'apparition du Spitfire: le Stuka était un appareil très vulnérable à la chasse, quelle qu'elle soit, Spitfire, Hurricane ou MS406. Le score final, plutôt équilibré, ne montre pas une supériorité du Spit sur le Me109, l'appareil n'étant de plus que marginalement supérieur au Hurricane dans les conditions tactiques usuelles et ne permettant pas par sa seule présence de faire basculer le sort d'une bataille.
Kesselring, à mon avis, brode. Quelles que soient les qualités de l'appareil, il ne pouvait être l'épouvantail qu'il agite. J'en conclus qu'il n'a probablement pas parlé du Spitfire à son chef et ne le cite dans ses Mémoires que pour rejeter l'erreur sur Hitler et Goering, mettre en avant sa clairvoyance et flatter le vainqueur dans un ouvrage destiné au marché anglo-saxon.
alias marduk a écrit:Hitler invoque indirectement l'état des blindés le 24 mai lors de sa visite au HGr A puisqu'il indique qu'il est absolument nécessaire de préserver les blindés ( ce qui signifie quand même qu'il y a un risque pour leur emploi pour Fall Rot si ils sont employés )
a votre deuxième question : Hitler vient au QG du HGr A pour discuter avec Runsdtedt de l'engagement futur des forces blindées
Nicolas Bernard a écrit:Mordal, cependant, révèle un fait curieux:Jacques Mordal a écrit:Remarquons, d'un autre côté, qu'en tenant le port sous son feu presque en permanence, elle a notablement ralenti les opérations, jusqu'à les interdire complètement pendant les heures du jour à partir du 1er juin. Mais ce qui reste inexplicable, c'est son abstention absolue sur Douvres et, d'une façon générale au-delà d'une bande de dix milles de largeur comptée de la côte française. Peut-être après tout les pilotes allemands ne se sentaient-ils pas à leur aise loin de terre. Ils perdirent en tous cas de belles occasions en épargnant la rade de Douvres où les bateaux chargés de troupes se pressaient comme harengs en caque pour le plus grand souci de l'amiral Ramsay.
L'explication avancée par Mordal est un peu courte. Le haut-commandement de la Luftwaffe redoutait-il de faire le jeu de la chasse britannique en bombardant Douvres, plus proche des terrains d'aviation du Fighter Command? Difficile à croire: il s'employait déjà à appliquer, avec les moyens du bord, l'absurde directive 13, quitte, déjà, à se heurter aux escadrilles de la R.A.F.... Le rayon d'action des appareils n'est pas davantage en cause.
On peut hasarder des motifs politiques à cette abstention de la Luftwaffe. Bombarder Douvres revenait, bien entendu, à bombarder le sol anglais. Or, Göring était, on le sait, impliqué dans les démarches de Hitler tendant à conclure une paix séparée avec les Anglo-Français: il n'est pas impossible, en l'état, qu'il ait strictement délimité la zone d'intervention de son aviation aux fins d'éviter de trop froisser la Grande-Bretagne.
Mais vu qu'on ne peut sans doute exclure d'autres explications de type militaire, je pose la question: quelqu'un en sait-il davantage sur cette étrange abstention de la Luftwaffe?
Nicolas Bernard a écrit:Et c'est vous qui m'accusez ne pas prendre en compte les "documents officiels" (sic)? Ce n'est pas Halder, mais Brauchitsch qui décide le transfert de la 4. Armee! Halder y est viscéralement opposé, dans la mesure où il souhaite, lui, reprendre le contrôle sur le Groupe d'Armées A par l'intermédiaire de ses officiers de liaison... Cette absence d'unité d'action au sein de l'O.K.H. n'a rien de négligeable, dans la mesure où elle facilite, pour Hitler, la mise en oeuvre du Haltbefehl. Il est stupéfiant que vous commettiez une bourde pareille.
Par ailleurs, votre allégation selon laquelle "le résultat d'analyse de situation du H.Gr.A, sera,finalement, le lendemain, avalisé par le Führer", n'est pas établie. Rien n'indique, en effet, que Von Rundstedt ne songeait, ni même n'indiquait, qu'il considérait que ses préoccupations (à les supposer établies, ce dont je doute de plus en plus) étaient susceptibles de justifier un ordre tel que celui édicté par Hitler, à savoir interdire aux blindés et à l'infanterie de franchir une ligne précise.
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