François Delpla a écrit:Voici le texte :
[...]
L'ordre du Führer du 23 mars sur la question des sabotages pratiqués devant la menace ennemie dans l'industrie, les chemins de fer et le ravitaillement a été ouvertement saboté par les employés du ministère de l'Approvisionnement et de la Production de guerre.
Au cours de ces derniers jours, des fonctionnaires du ministère de Speer se sont installés eux-mêmes, dans bien des cas, comme directeurs d'usines dans les régions menacées et ont ordonné que les ordres de démolition ne soient pas exécutés et qu'on tienne pour nuls les ordres du parti. Si les directeurs d'usines n'étaient pas d'accord, les fonctionnaires du ministère leur présentaient des contre-ordres écrits.
[...]
Quand une équipe de démolisseurs du parti arrivait, le directeur, le dr Carl Seyffert, lui montrait un ordre du ministre Speer à la commission locale de l'approvisionnement, stipulant que l'ordre du Führer ne devait pas s'appliquer dans ce cas.
Quand une équipe de démolisseurs du NSDAP arrivait, le directeur de l'usine lui montrait un ordre du ministre Speer à la commission locale de l'approvisionnement, stipulant que l'ordre du Führer ne devait pas s'appliquer.
Comment puis-je savoir si Hitler approuvait (secrètement) ce petit manège ? Quelles sont les preuves dont-on dispose ?
Jumbo a écrit:Hitler semblait au courant de sa manœuvre et a laissé faire. Mais à cette date était-il encore maître de son esprit et de ses décisions?
Les capacités physiques et mentales de Hitler semblent altérées. C'est du moins l'impression qui se dégage du livre de Fest.
Patrick.Fleuridas a écrit:Le personnage de Morell est complexe. [...] Il n'empêche que l'état physique d'Hitler était pitoyable dans les dernières semaines de la guerre, les témoignages sont convergeant là-dessus.
A ce sujet, lire Fest (2003) et Frank (2008).
V.B a écrit:une petite phrase significative m'a frappée lorsque, seul à seul avec Eva Braun, il s'entend dire entre deux confiseries et une gorgée de champagne : "Vous savez, c'est bien que vous soyez revenu. Le Führer supposait que vous travailliez contre lui. Mais votre visite lui a prouvé le contraire. N'est-ce pas ?".
Eva Braun donne l'écho de soupçons antérieurs. Cette citation fragilise la thèse d'une manoeuvre concertée entre Speer et Hitler.
Aldebert a écrit:Hitler n'avait plus confiance au peuple allemand dans le désir de se battre, ce peuple l'avait déçu. Hitler voulait l’entraîner avec lui dans un total anéantissement.
Il existe à cet égard une citation de Hitler qui est tout à la fois éloquente et prémonitoire.
François Delpla a écrit:Cher Albert, tu en restes aux classiques alors qu'ils en restent à la conception d'un Reich depuis toujours anarchique et d'un Hitler faisant n'importe quoi, sous-estimant en particulier son amour (certes dévoyé, et châtiant bien, mais certes pas meurtrier) de l'Allemagne.
L'amour de Hitler n'est-il pas destructeur ? La politique du tout ou rien prêchée par Hitler n'est-elle pas annonciatrice du désastre finale ?
Le scénariste du film "La chute", Bernd Eichinger, s'est inspiré du livre de Joachim Fest "Les derniers jours d'Hitler" et des mémoires de la secrétaire du dictateur "Jusqu'à la dernière heure : la dernière secrétaire d'Hitler".
Je remercie Chef Chaudart d'avoir communiqué le lien d'une interview de Fest.
Ce film a reçu les encouragements enthousiastes de tous ceux qui l’ont vu. [...] De fait, je ne suis pas du tout d’accord avec Wim Wenders quand il dit que ce film n’apporte rien de neuf.
[...] la prestation époustouflante d’un Bruno Ganz. Son travail d’acteur est inégalable. [...] Et puis, il parvient également à jouer formidablement la réserve extrême, la misanthropie et la haine d’Hitler.
La prestation de Ganz est époustouflante. Il joue formidablement la misanthropie et la haine d’Hitler. Reste à expliquer le contraste entre la prestation de Ganz et la décrépitude du dictateur allemand en 1945.
Chef Chaudart a écrit:Fest ne semble pas y renier "La chute", tout au contraire.
L'interview de Fest montre qu'il a beaucoup apprécié le film. C'est cela qui m'étonne même si j'admets que Fest n'avait probablement aucune raison de renier le scénario de Bernd Eichinger. Il l'a donc accepté allègrement. Mais comment Fest n'a-t-il pas vu le contraste entre la prestation de Ganz et le contenu du livre ?
Comme le dit François Delpla, le film montre
« un dictateur tenant bien en main et son monde, et son esprit ».
Joachim Fest, Les derniers jours d'Hitler, Perrin (trad. fr.), 2002
Mario Frank, Hitler, la chute, Presses de la Cité (trad. fr.), 2008