Nicolas Bernard a écrit:alias marduk a écrit:Nicolas Bernard a écrit:alias marduk a écrit:[...]Donc oui le journal du HGr A est fiable
Je ne dis pas le contraire, je l'interprète différemment pour ma part...
Bonjour,
Je ne l’avais pas oublié mais en l’espèce, je répondais à François qui développe une hypothèse différente de la vôtre et de la mienne à savoir que le scribe ( Blumentritt ? ) du HGr A rédige correctement le journal de marche du groupe d’armée mais qu’il est victime ( ainsi que Jodl ) d’une sorte de pièce de théâtre préparée à l’avance entre Hitler et Rundstedt.
Donc dans l’hypothèse de François, le rédacteur transcrit bien ce qu’il voit ( mais pas évidemment ce qu’il n’a pas vu avant la réunion ).
Nicolas Bernard a écrit:A contrario, on a eu, depuis la publication de votre livre, la redécouverte et la publication des mémoires de Raoul Nordling :
« C’est donc le 10 mai que nous sommes arrivés à Berlin…
Le second jour de mon séjour, l’ingénieur Dalherus vint me trouver pour m’annoncer que le maréchal Goering désirait me voir ……. pour discuter de la possibilité d’un armistice avec la France.
Je fis observer que je n’étais qu’un simple particulier ………
Mais acceptes-tu de rencontrer Goering ? insista-t-il, et peut être cette nuit même ?
Si cela peut être d’une utilité quelconque, je suis à votre disposition
Je n’avais pas vu Goering. Mais le lendemain, Dahlerus m’apporta un message de sa part : il me remerciait de mon obligeance et comprenait fort bien qu’à l’heure présente il n’y avait aucune chance de décider les Français à engager des négociations séparées. Les conditions de l’Allemagne ne comportaient aucune clause déraisonnable. La France garderait ses frontières, sauf peut être l’Alsace-Lorraine. Les colonies feraient l’objet de négociations ultérieures. A la suite de cette paix séparées, s’ouvrirait l’ère d’une collaboration économique intime entre l’Allemagne et la France.
Mais les événements avaient été si vite, poursuivait le message du maréchal Goering, que ces conditions ne présentaient déjà plus d’intérêt à l’heure actuelle.
Goering comptait être à Calais sans onze jours et il entamerait alors des négociations directes avec la France, sur des bases plus sévères. Il terminait en disant que l’Allemagne possédait 30 000 avions, et la France pas un seul : l’issue du conflit était assurée.
Mon voyage de Berlin en Suisse a duré presque une semaine, et j’ai passé quatre nuits dans le train, allant et venant …..
Mon arrivée à Paris, tard dans la soirée du 18 mai……. »
Les mémoires de Nordling obligent à relire autrement le document de Coulondre :
En premier lieu, il apparaît que Goering n’a jamais mandaté Nordling pour une éventuelle mission diplomatique
Celui-ci n’a d’ailleurs jamais rencontré Goering ( ni le 11 , ni le 12 ni le 15 mai )
Le document Coulondre semble d’ailleurs être une sorte de synthèse entre 2 propos de Goering : une éventuelle proposition de paix « raisonnable » que Goering n’a finalement pas faîte et une possible et très vague proposition de paix sévère à venir plus tard.
Il ne retranscrit pas donc la réalité des propos tenus en laissant croire que l’Allemagne pourrait faire des propositions de paix raisonnables
Enfin, Hitler n’est jamais cité : Goering semble agir en son nom propre.
Mais l’essentiel, c’est le début du récit où Goering fait finalement faux bon à Nordling et après lui avoir fait croire qu’il le mandaterait pour une mission de paix lui indique ( via Dahlerus ) qu’il a renoncé à faire une proposition à la France
Pourquoi ?
Pour ma part, je reprends l’analyse de Kersaudy ( dans « Hermann Goering » ) qui estime que la proposition vient de Goering ( et non de Hitler ) et que le revirement tient à un véto impératif de Hitler finalement mis au courant par Goering de la diplomatie personnelle de celui-ci.
J'avais le bouquin de Nordling (acheté d'occase à l'extraordinaire librairie Pêle-Mêle à Bruxelles) mais depuis mon déménagement, il est introuvable... Bref, en relisant votre seul extrait, j'avoue ne guère voir en quoi les mémoires du diplomate vous conduisent à ces conclusions.
Tout d'abord, lesdits mémoires ne constituent pas un document d'époque, mais un écrit postérieur qui, pour intéressant qu'il soit, ne saurait être fiable en lui-même.
Tout à fait mais cela vaut aussi pour les 2 autres documents cités par François ( note Coulondre et encore plus pour le récit de Benoist-Méchin )
Par contre un complément sur les conclusions : elles sont de Kersaudy mais avec un choix de ma part de ne faire figurer qu’une des deux hypothèses
Les 2 hypothèses que présente Kersaudy sont :
- Un véto de Hitler finalement mis au courant par Goering d’une tentative diplomatique faite dans son dos
- Une lubie passagère de GoeringNicolas Bernard a écrit: Ne serait-ce que par son auteur peut tenter de redorer son rôle dans les événements qu'il relate - et Nordling s'efforce manifestement de dissimuler le plus possible tout contact avec l'odieux Göring, quitte à nier, de manière fort peu crédible, l'avoir rencontré...
Pas trop d’accord sur ce point là car Nordling admet :
- Avoir accepté de rencontrer Goering
- Et surtout avoir accepté de convoyer une offre diplomatique
On peut difficilement lui reprocher de dissimuler des contacts
Nicolas Bernard a écrit: Bref, cet extrait doit impérativement être confronté à d'autres éléments documentaires. F.D. s'y colle, d'ailleurs, sur son site, en y ajoutant une autre pièce révélée par l'"historien" ex-collabo Jacques Benoist-Méchin.
Il en ressort que
1/ plusieurs jours avant le Haltbefehl, Göring parle bien de conclure une paix "raisonnable" avec Paris (non sans un parfum de menace: Français, négociez vite, à défaut vous aggraverez votre cas);
2/ quoique ces conditions de paix évoluent vers une plus grande "sévérité", elles s'avèrent "généreuses" pour un pays dont on s'attend à ce qu'il subisse une déconfiture militaire telle que l'armée teutonne parade dans Calais sous dizaine (et, de fait, la "bataille de France" sera perdue en cinq jours, du 10 au 15 mai);
3/ Göring transmet cette information à un négociateur suédois, Dahlerus (or ce dernier est surtout en contact avec les Anglais), et, soit directement, soit par l'intermédiaire de Dahlerus, à Nordling qui la répercute au gouvernement français.
En d'autres termes, le N°2 du Reich (rien que ça!) informe les Français, via un diplomate suédois, qu'ils peuvent espérer, malgré leur déroute (imminente ou actuelle), une paix généreuse. Qu'il mentionne, selon les sources (mais pas toutes) que le Führer émettra de lui-même une offre de paix ne me paraît soulever aucune contradiction avec l'hypothèse "diplomatique" expliquant le Haltbefehl: le fait est que le gouvernement français sait vite à quoi s'en tenir, et, compte tenu des informations délivrées par Göring, peut de lui-même demander grâce, sans impérativement attendre des nouvelles de Hitler.
Cependant, la mention, dans le document "Coulondre", que "le Führer ferait une proposition de paix" prouve au moins une chose: Göring n'agissait pas à l'insu de Hitler. Car dans cette mention, c'est bien du Führer dont il s'agit, non de Göring. Et il en ressort expressément que Göring s'exprimait au nom du Führer. En toute hypothèse, au vu de l'ampleur des conditions "généreuses", il me paraît absolument inimaginable que le chef de la Luftwaffe se soit engagé sans l'accord du dictateur.
Dans cette logique, l'ordre d'arrêt sine die délivré par Hitler le 24 mai 1940 (sous couvert de Von Rundstedt, qui se limitait, lui, à une pause de 24h) ne peut se comprendre autrement que pour des considérations diplomatiques: Hitler retient ses dogues cuirassés avant qu'ils ne déchirent leurs victimes, pour donner du crédit à ses propositions de paix "généreuses" et éviter d'humilier l'Occident.
Le document N° 1 ( récit de Benoist-Méchin ) a le très grand désavantage de citer une source qui non seulement n’a jamais été retrouvée mais dont l’existence même est douteuse ( vanwelkenhuysen, miracle à dunkerque page 168 ).
Ajoutons que le récit de BM qui fait traverser 3 pays ( dont 2 en guerre ) et 2 frontières par Nordling en 48 heures me semble particulièrement douteux compte tenu des embouteillages de transports qu’il invoque au début de son récit pour justifier de la rencontre.
C’est par ailleurs le seul document qui indique que Nordling a rencontré Goering.
Bref un document impossible à recouper ( source disparue ou inventée ) par un auteur qui sent quand même le souffre : la crédibilité de Benoist-Méchin ne pouvant à mon sens pas être placée au même plan que celle de Nordling.
En tout cas, le document est totalement incompatible avec le récit des mémoires de Nordling puisqu’il situe la rencontre le 15 mai soit à une date où Nordling a déjà quitté Berlin selon ses mémoires : un des 2 documents est donc une invention pure et simple.
Le document Coulondre présente lui un certain nombre de similitudes avec les mémoires de Nordling notamment en identifiant l’interlocuteur de Goering comme étant Dahlerus et non pas Nordling, il indique aussi comme dans les mémoires de Nordling que Goering n’a pas fait de propositions de paix et que celles-ci seraient faites plus tard de façon « raisonnables »
C’est là la grande différence entre le texte Coulondre et celui des mémoires de Nordling puisque Nordling explique dans ses mémoires que la proposition raisonnable a été annulée par Goering et qu’une proposition plus vague et plus sévère serait faite plus tard.
Par ailleurs le document Coulondre présente une lourde inexactitude « M. Nordling, Consul Général de Suède à Paris, qui avait accompagné M. Coulondre et le général Mittelhauser lors de la mission accomplie en Scandinavie du 12 au 14 avril, est revenu 15 jours plus tard à Paris en traversant l’Allemagne. Il s’est joint à une mission suédoise qui comprenait M. Dahlerus, industriel connu pour ses relations avec le Maréchal Göring, le Directeur des Affaires Économiques au Ministère des Affaires étrangères suédois et le chef d’État-Major des forces navales suédoises. »
Puisqu’il fait revenir Nordling à Paris le 29 avril ( ou vers le 29 avril ) soit à une date où Nordling n’a pas encore quitté la Suède ( il arrivera le 18 mai soit 19 jours plus tard ).
Cela démontre que la personne qui a rédigé le document l’a fait avec une certaine légèreté et que le document Coulondre n’est pas nécessairement exact dans sa relation du trajet de Nordling en Allemagne.
Ce qui amène donc à mon analyse du texte et à aux conclusions que j’en tire ( en fait que j’emprunte à François Kersaudy ) : je ne reviens pas sur mon analyse puisqu’elle est présentée dans le post 3281 page 329
La question finale est donc de savoir si les mémoires de Nordling sont exactes ou fausses : à ce stade, il faut noter que Nordling est très précis sur son trajet ce qui indique seulement 2 possibilités à savoir soit il ment soit il dit la vérité mais avec autant de précisions dans ses propos, une erreur involontaire est à exclure.
Si il dit la vérité, c’est évidemment le document Coulondre qui est à remettre en cause ( et je ne parle même pas des révélations de Benoist-Méchin )
Comment déterminer si Nordling ment ou dit la vérité : soit en recoupant avec les mémoires de Dahlérus ( mais elles sont introuvables sur amazon et semblent porter essentiellement sur septembre 1939 ) soit en mettant la main sur le rapport « interne » qu’il a rédigé le 19 novembre 1944 et que Fabrice Virgili identifie sous la référence suivante :
UD Utrikes Departament, 1920 ars doss. HP , Frankrike 385
Si quelqu’un lit le suédois couramment et passe par Stochkolm ? ( je plaisante )
En espérant que ce rapport ne s'en tienne pas qu'aux événements de 1944
Pour revenir à ma réponse à François : le fait qu’un document sérieux ( même si sa véracité ne peut être confirmer ou infirmer ) présente une version alternative aux révélations de Goering à Nordling est une source de faiblesse du document Coulondre : celui-ci devenant douteux
Bonne soirée
J'entends bien que les documents sont incertains quant à la chronologie des déplacements de Nordling. Cependant, là n'est pas du tout l'essentiel, et ce n'est notamment pas ce qui intéresse le haut-fonctionnaire français qui rédige la note du 20 mai 1940, au regard de l'information hautement sensible qui s'en dégage: Hitler indique à la France, par l'intermédiaire de son adjoint le plus proche (déjà lourdement impliqué dans de précédentes négociations informelles avec l'Occident dans les années trente) qu'il est prêt à lui accorder une paix "généreuse", dans le fil d'une victoire militaire qui conduira ses armées jusqu'à Calais. L'importance d'une telle révélation éclate d'autant plus ce 20 mai, alors qu'à Paris on sombre dans la panique au point de brûler les archives dans les jardins des ministères.
Bonsoir,
Pour des raisons professionnelles, je dois faire très court comme réponse
J'entends bien le raisonnement mais c'est justement l'exactitude de la note Coulondre que les mémoires de Nordling amènent à remettre en cause.
Le document qui a été rédigé 10 jours après les propos tenus par Goering à Dahlerus et qui ont été rapportés à Coulondre par un intermédiaire ( Nordling ) oralement et sans note est-il exact ou a t'il pu faire l'objet d'imprécisions soit de la part de Nordling dans son exposé soit de la part de Coulondre dans sa note ?
Si on considère les mémoires de Nordling comme exactes, la réponse est oui ( le document est imprécis ) et il faut en tirer les conséquences
Si on considère que Nordling ment, la réponse est non
Chacun se fera bien sur son opinion et je ne prétends pas qu'il existe un document ( sauf peut être en Suède ) qui peut trancher
Par contre 3 points sont factuels à mon sens :
- les documents Coulondre et les mémoires de Nordling sont partiellement compatibles ( ils se recoupent partiellement ) même si le sens général des propos diffère entre les 2 document
- les mémoires de Benoist-Méchin ( qui fait référence à une réunion le 15 mai ) et de Nordling sont totalement incompatibles
- compte tenu de la précision des mémoires de Nordling pour cet épisode, soit il ment soit il dit la vérité mais une erreur involontaire est impossible quand on apporte autant de précisions
J'ai bien sur mon opinion ( donné plus haut dans la conversation ) mais chacun pourra se forger son opinion à partir des documents cités
Bonne soirée