En réponse au message n°3199 d'Alias Marduk (accessible
ici):
alias marduk a écrit:Nicolas Bernard a écrit:Bref, vous ne vous contentez pas de manquer de preuves: vous faites dire aux sources que vous utilisez le contraire de ce qu'elles relatent. Il ne s'agit pas pour moi de vous dénoncer, mais de vous inviter à vous calmer, de prendre un peu de recul sur ce sujet (qui n'est qu'un sujet d'Histoire), ce qui vous amènerait à être davantage rigoureux, et surtout un peu plus ouvert aux autres hypothèses. Bref, je ne vous demande pas d'être convaincu par l'hypothèse "diplomatique" ou même de dédouaner l'hypothèse "militaire", mais d'abandonner une attitude fanatique (je cite F.D.) qui vous conduit à sombrer dans le n'importe quoi (je ne reviens pas sur vos injures) et à perdre toute crédibilité, au profit d'une démarche plus raisonnable - et, pour tout dire, historienne. Merci d'avance.
Si on part sur mon supposé manque d’ouverture aux autres thèses, j’écrivais ceci :
alias marduk a écrit:Vos seuls arguments consistent à bâtir une argumentation en proposant une grille de lecture ( ce que je ne conteste d’ailleurs pas comme méthodologie )
J’ai déjà souligné les faiblesses de cet argumentaire ( recours excessif à l’hypothèse, contre-sens, etc ) et je réponds à votre « argumentaire » en proposant [u]ma grille de lecture avec mes sources et mon argumentaire[/u].
Donc et
pour éviter toute équivoque : le fait que vous présentiez votre grille de lecture de la réunion
ne me pose aucun problème à partir du moment où ( en l’absence de preuves au moins égales à celles que vous demandez à vos interlocuteurs de produire )
vous acceptez que les autres intervenants fassent de même.
Justement à propos des preuves :
Nicolas Bernard a écrit: Vous n'avez jamais été en mesure de produire une preuve, une seule preuve que Von Rundstedt a imposé à/via Hitler l'ordre d'arrêt du 24 mai 1940.
Je comprends que vous considériez le journal du HGr A comme trop imprécis pour être une preuve définitive que l’ordre d’arrêt soit de Rundstedt et entièrement ainsi entièrement endossé par Hitler même si je ne partage en rien cette analyse.
Cependant, je vous fait remarquer que vous n’avez produit aucun document plus explicite qui :
- Etablit que l’ordre d’arrêt est de Hitler
- Etablit que cet ordre d’arrêt a une motivation politique et non militaire ( je parle ici exclusivement des motifs militaires invoqués par Hitler le 24 mai lors de la réunion )
- Etablit même l’existence de propositions diplomatiques hitlériennes les 24 ou 25 mai
Autres points méthodologiques qui me gênent :
a) Le fait qu’après avoir écarté le journal du Hgr A pour le 24 mai
Qui rappelons le disait ceci :
A 11H30, arrive le Führer, qui se fait renseigner sur la situation, par l’Oberbefehlshaber du groupe d'armée (v.Runstedt, H.Gr.A). Il (le Führer) est tout à fait d’accord avec la « conception » (de v.Runstedt), (à savoir) que l’Infanterie devrait attaquer à l’est d’Arras, (tandis que) les troupes rapides, au contraire, la ligne Lens-Béthune-Aire-Saint-Omer-Gravelines atteinte, peuvent être arrêtées, pour "saisir" l'ennemi pressé par le groupe d'armée de terre B. Il (le Führer) les souligne, en insistant sur la nécessité de ménager les forces blindées pour les opérations (futures) commandées (Opération Fall Rot), et qu'un autre rétrécissement de l’espace d’investissement (encerclement) entraînerait une restriction très indésirable de l'activité de la Luftwaffe [qui a besoin d’espace pour opérer, sans risquer de toucher les troupes allemandes].
Comme trop imprécis à votre goût pour établir la paternité de Rundstedt qui se trouve donc ici dans la lecture « classique » du document ( comme l’indique François pour qualifier mon attachement à ses thèses ) :
le Führer, qui se fait renseigner sur la situation, par l’Oberbefehlshaber du groupe d'armée (v.Runstedt, H.Gr.A). Il (le Führer) est tout à fait d’accord avec la « conception » (de v.Runstedt), (à savoir) que l’Infanterie devrait attaquer à l’est d’Arras, (tandis que) les troupes rapides, au contraire, la ligne Lens-Béthune-Aire-Saint-Omer-Gravelines atteinte, peuvent être arrêtées, pour "saisir" l'ennemi pressé par le groupe d'armée de terre B
OK c’est votre droit de proposer une autre lecture :
S'agit-il d'une approbation de l'ordre de "recollement" de la veille? D'une idée différente? Cette idée a-t-elle été proposée par Von Rundstedt après l'exposé de situation? Ou découle-t-elle de l'entretien avec le Führer, d'un genre de brainstorming qui aurait peu à peu, minute après minute, amené les parties à y parvenir? D'ailleurs, serait-on en présence d'une idée initiale (les blindés peuvent être stoppés) transformée, lors de la réunion, en une idée plus élargie (les blindés peuvent être stoppés pour cueillir les Alliés pressés par le Groupe d'Armées B)? Contrairement à ce que vous affirmez, le document ne permet pas trancher sur aucune de ces interrogations, et l'on en est réduit à des hypothèses.
Même si je ne la partage pas
Par contre je suis gêné que vous reveniez alors à une lecture littérale du document en opposant les termes « peuvent » cité dans la partie du document que vous contestez pour l’opposer au terme « doivent » puisque vous contestez la véracité du document par ailleurs : vous ne pouvez tout simplement pas utiliser le verbatim du document pour établir un argument après avoir contesté ce même verbatim pour rejeter l’argument d’un autre intervenant.
b)Autre point méthodologique : vous contestez donc le lien entre les propos de Rundstedt et l’ordre d’arrêt en notant que les termes « peuvent » et « doivent » ne sont pas identiques
OK ( même si je ne suis pas d’accord et ai fourni une explication sur ce point dans le passé )
Mais dans ce cas vous ne pouvez pas contester
méthodologiquement ma remarque sur le journal de Jodl à savoir que celui-ci indique une pensée et non une intention puisque la méthodologie est strictement similaire.
Comme certains intervenants ont proposé une synthèse de leur position, je proposerais la mienne plus tard ( une journée de taf de 6h30 à 19h30 n’étant pas propice à un long écrit )
Bonne nuit
Bon, j'aurais voulu répondre de manière plus approfondie, mais il me faut être concis (
"J't'expliquerai...").
A dire vrai, s'agissant des documents, je me fonde sur une analyse littérale pour l'ensemble de ceux cités, non sans les confronter aux faits connus:
-
L'extrait du journal de marche du Groupe d'Armées A: rédigé d'équivoque manière, il témoigne à mon sens d'un glissement, puisque l'on passe de
"les troupes rapides [...] peuvent être arrêtées", ce qui n'est pas absolument impératif, à quelque chose de plus ferme, un véritable ordre d'arrêt
sine die, comme en témoignent l'ajout de deux motifs par Hitler, et l'ordre d'arrêt émis vers 12h30.
-
L'extrait du journal de Jodl: là encore, je ne vois pas le problème, car je m'en tiens à une analyse littérale. J'avais d'ailleurs traduit cet extrait comme suit: Hitler
"se réjouit des mesures du Groupe d'Armées, qui coïncident exactement avec ses pensées". Or, un tel extrait va dans mon sens, me semble-t-il:
a) Tout d'abord parce que le journal de Jodl mentionne des
"mesures" et non une simple "idée", une "conception", de Von Rundstedt: or les seules et uniques mesures prises à cette date et à cette heure, ne sont autres que l'ordre de "recollement" de la veille. Il n'est pas impossible que Jodl ait mentionné des mesures envisagées par Von Rundstedt, mais cela ne reste qu'une hypothèse.
b) Quant à la formule
"die sich ganz mit seinen Gedanken decken", sans avoir à nous disputer sur le sens de
"Gedanken", elle prouve, à tout le moins, que Hitler s'était fait sa propre idée de la situation, ce en faveur d'une pause, indépendamment de Von Rundstedt, et donc avant la conférence.
c) La circonstance que le Führer soit ravi, enfin, achève d'établir qu'il n'est pas simplement convaincu par une plaidoirie de Von Rundstedt, mais qu'il est tout heureux de trouver un général qui, lui aussi, souhaite faire une pause.
Bref, en toute honnêteté, un tel extrait, lu littéralement et confronté aux autres éléments (dont le journal de marche du Groupe d'Armées A) me semble aller à l'encontre de la thèse selon laquelle Hitler se serait borné à entériner un ordre de Von Rundstedt, sans idée préconçue avant de rencontrer ce général en fin de matinée du 24 mai.
Je maintiens que rien n'établit que Von Rundstedt souhaitait aller plus loin que sa propre directive de "recollement" du 23 mai, laquelle n'avait vocation qu'à durer 24 heures. En toute transparence, je n'exclus pas catégoriquement qu'il ait effectivement proposé à Hitler, le lendemain, une idée de stopper les chars pour laisser le Groupe d'Armées B bousculer jusqu'à lui les Alliés en fuite. Mais outre que le journal de Jodl me semble le démentir, une telle hypothèse me semble on-ne-peut-plus fragilement étayée par le seul extrait de journal de marche du Groupe d'Armées A, au vu de sa rédaction, des plus ambiguës.
En d'autres termes? Von Rundstedt, par prudence, souhaite accorder aux blindés une pause de 24 heures et donne un ordre à cet effet le 23 mai en soirée. Il en fait part à Hitler le lendemain. Evoque-t-il le premier l'idée de stopper les chars pour cueillir les Alliés talonnés par son collègue Von Bock? On ne sait, mais j'en doute. Même dans l'affirmative, il n'en demeure pas moins que le
Führer est
ravi des
mesures (
Massnahmen) prises par Von Rundstedt, qui concordent totalement avec ses idées, ses pensées, ses intentions, ses projets, ses réflexions, bref ses
Gedanken - preuve qu'il souhaitait de lui-même interrompre l'avance des chars. Mais, pour citer feu Raymond Cartier (de mémoire), le dictateur
"surenchérit": il souhaite un arrêt
sine die, auquel il ajoute deux "motifs" (qui me paraissent insincères), si bien qu'en lieu et place d'un banal maintien d'une directive de "recollement" émise la veille, on passe à un nouvel ordre, cette fois issu du
Führer, et qui prescrit un arrêt pur et simple au-delà de 24 heures. Sans que le dictateur ne se prive de balancer, selon les interlocuteurs, d'autres explications...
Désolé si je me répète, mais je ne vois sincèrement pas ce qui, en l'état, remet en cause cette analyse.