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Re: ET si Pétain n'avait pas cédé ?

Nouveau messagePosté: 13 Oct 2009, 01:48
de dynamo
Il me semble intéressant dans le contexte d’un transfert d’une partie de l’armée en AFN de s’interroger sur le comportement des troupes à l’annonce de cet « exil ».
Le général De Gaulle en tant que militaire de carrière dispose des hommes comme dans un exercice de l’école de guerre et déclare urbi et orbi qu’il faut continuer le combat et partir en AFN.

Ok, nombreux sont ceux qui défendent cette idée et aujourd’hui assis dans mon confortable fauteuil j’adhère à celle-ci.

Cependant je me suis souvent demandé si le mobilisé de base, marié et père de famille aurait accepté de partir outre mer sans savoir pendant combien d’années il laissait ses parents, sa femme, ses enfants, la France.
(il est parti en stalag, mais il ne savait pas que ça durerait 5 ans) :evil:

Tant qu’il se bat en métropole, il fait son devoir.
Mais là, on lui donne l’ordre d’embarquer direction Dakar, Alger ou Tunis sans beaucoup d’espoir de revenir avant longtemps et peut-être jamais.
Je pense que de nombreux mobilisés n’auraient pas accepté ce dépaysement , ils acceptaient de se battre en France et cette aventure là était celle des soldats de métier ou des volontaires comme plus tard les Français libres.

Re: ET si Pétain n'avait pas cédé ?

Nouveau messagePosté: 13 Oct 2009, 08:04
de Marc_91
:D Bonjour,

Juste une annecdote dans un domaine que je connais bien, l'aviation, pour illustrer l'état du matériel replié en AFN :

Les chasseurs Curtiss H-75, d'origine américaine, avaient été construits pour être équipés de mitrailleuses également américaines : des Colt-Browning en .3 inches = 7,62mm. Or, la france ne possédait pas la license de fabrication de cette mitrailleuse ; par contre, la FN belge la possédait, elle. Les 4, puis 6 mitrailleuses qui équipèrent nos avions étaient donc des Colt-Browning fabriquées en Belgique, et spécialement modifiées pour tirer des cartouches françaises de 7,5mm ...
Image Or les maillons détachables, ces petites pièces en acier simplement estampé, qui en s'emboitant les uns dans les autres, permettaient de monter les cartouches en bandes de mitrailleuses, et tombaient sous l'avion avec les douilles vides lors du tir, faisaient elles aussi probablement partie de la license.
:mrgreen: Et bien il fallut attendre plusieurs mois pour que nos chasseurs H-75, repliés en AFN, et qui y équipaient plusieurs groupes de chasse, puissent recevoir de nouveaux maillons détachables, fabriqués "sous le manteau" ...

Une patrouille de Curtiss H-75 au-dessus de Casablanca (photo transmise par Pierre S. l'an dernier) :

Image

Re: ET si Pétain n'avait pas cédé ?

Nouveau messagePosté: 13 Oct 2009, 10:35
de Bruno Roy-Henry
dynamo a écrit:Tant qu’il se bat en métropole, il fait son devoir.
Mais là, on lui donne l’ordre d’embarquer direction Dakar, Alger ou Tunis sans beaucoup d’espoir de revenir avant longtemps et peut-être jamais.
Je pense que de nombreux mobilisés n’auraient pas accepté ce dépaysement , ils acceptaient de se battre en France et cette aventure là était celle des soldats de métier ou des volontaires comme plus tard les Français libres.


Il semble bien -dans l'esprit du général de Gaulle- que lesdits mobilisés n'étaient pas destinés à s'embarquer pour l'AFN. En effet, dans les 870 000 hommes qu'il prévoit de transporter en AFN, il y a avant tout la classe 1940 qui commence seulement à être incorporée; ensuite, les personnels de carrière et les spécialistes.

Maintenant, ces mobilisés, une fois acculés dans des poches "littorales", quel aurait été leur choix ? Ou bien demeurer en métropole et donc devenir prisonniers, ou bien s'embarquer pour l'aventure... Moralement, psychologiquement, l'état d'esprit ne peut pas être le même en fonction de l'appel du 17 juin !

Cet appel -qu'il émane d'un Pétain combatif ou d'un autre- n'est pas le même que le véritable. Il n'appelle pas à cesser le combat, bien au contraire. Il est forcément proche de celui qui sera prononcé le lendemain 18 juin... Il demande à l'armée de couvrir le plus longtemps possible le coeur du pays en vue de permettre le transfert d'une nouvelle armée en AFN, hors de portée des serres de l'aigle nazie !

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Re: ET si Pétain n'avait pas cédé ?

Nouveau messagePosté: 13 Oct 2009, 10:40
de Bruno Roy-Henry
Marc_91 a écrit: :mrgreen: Et bien il fallut attendre plusieurs mois pour que nos chasseurs H-75, repliés en AFN, et qui y équipaient plusieurs groupes de chasse, puissent recevoir de nouveaux maillons détachables, fabriqués "sous le manteau" ...


Je ne comprends pas très bien... :oops:

Nos curtiss qui se sont battus en mai-juin 40, n'avaient pas les mitrailleuse idoines ? Quels sont ces H-75, repliés en AFN ? Ce sont bien ceux qui étaient en métropole jusqu'au 15 juin ? A ma connaissance, ils ne se sont pas envolés vers Alger parce qu'ils manquaient de munitions. Merci d'avance pour vos éclaircissements.

Re: ET si Pétain n'avait pas cédé ?

Nouveau messagePosté: 13 Oct 2009, 10:51
de JARDIN DAVID
Un exemple entre autres pour montrer la parfaite cohésion nationale:
Bruno Roy-Henry a écrit:"L'arrivée sur la terre de France n'est pas réconfortante. A Marseille, les dockers ralentissent le déchargement. Ils ne consentent à décharger qu'un char à l'heure. Huit dans la journée est pour eux un record olympique."

Sans parler des sabotages chez Renault.
Voici une des différences majeures entre la France (d'alors ?) et les pays anglo-saxons.

Re: ET si Pétain n'avait pas cédé ?

Nouveau messagePosté: 13 Oct 2009, 10:54
de François Delpla
JARDIN DAVID a écrit:Un exemple entre autres pour montrer la parfaite cohésion nationale:
Bruno Roy-Henry a écrit:"L'arrivée sur la terre de France n'est pas réconfortante. A Marseille, les dockers ralentissent le déchargement. Ils ne consentent à décharger qu'un char à l'heure. Huit dans la journée est pour eux un record olympique."

Sans parler des sabotages chez Renault.
Voici une des différences majeures entre la France (d'alors ?) et les pays anglo-saxons.


Là j'ai l'impression qu'on sombre dans un légendaire de bas étage. Mais je ne demande qu'à être détrompé au moyen de sources fiables.

Re: ET si Pétain n'avait pas cédé ?

Nouveau messagePosté: 13 Oct 2009, 11:40
de Bruno Roy-Henry
Pour les dockers de Marseille, c'est dans le JMO du 67ème BCC.

Les sabotages ne sont pas légendaires. Crémieux-Brilhac en parle, même s'il entend dégonfler le mythe.

On a évoqué les usines Renault, mais surtout les chaînes de montage du Dewoitine; à Toulouse. Enfin, ce ne n'est pas le sujet à aborder ici...

Re: ET si Pétain n'avait pas cédé ?

Nouveau messagePosté: 13 Oct 2009, 11:50
de François Delpla
Justement, Crémieux ramène les choses à des proportions microscopiques, ce qui devrait tendre à les exclure d'un débat sur les grandes lignes de la situation.
Quant à un JMO de division, il peut dire tout bonnement et rituellement du mal des civils, et aurait un furieux besoin d'être recoupé par une source vraiment au fait du travail de déchargement et de son rythme possible. Après quoi, si les faits sont établis, il conviendrait d'en rechercher les causes.

Re: ET si Pétain n'avait pas cédé ?

Nouveau messagePosté: 13 Oct 2009, 11:50
de Marc_91
Bruno Roy-Henry a écrit:
Marc_91 a écrit: :mrgreen: Et bien il fallut attendre plusieurs mois pour que nos chasseurs H-75, repliés en AFN, et qui y équipaient plusieurs groupes de chasse, puissent recevoir de nouveaux maillons détachables, fabriqués "sous le manteau" ...
Je ne comprends pas très bien... :oops:

Nos curtiss qui se sont battus en mai-juin 40, n'avaient pas les mitrailleuse idoines ? Quels sont ces H-75, repliés en AFN ? Ce sont bien ceux qui étaient en métropole jusqu'au 15 juin ? A ma connaissance, ils ne se sont pas envolés vers Alger parce qu'ils manquaient de munitions. Merci d'avance pour vos éclaircissements.

:D Bonjour Bruno,

De mémoire, on se tutoyait sur un autre forum, plus "vert", même si nous n'étions pas systématiquement d'accord !!!

Les Curtiss H-75 survivants des GC III/2, I/4, II/4, I/5 et II/5, ainsi que les D.520 en état de vol des GC I/3, II/3, III/3 et III/6, se replièrent, sur ordre, en AFN.
Ils y rejoignirent les MS.406 des GC III/5, I/7, II/7 et I/9 déjà stationnés en Algérie ; ces appareils dépassés n'auraient pas eu l'autonomie suffisante, de même que les Bloch MB.152 d'autres Groupes de Chasse, pour traverser la Médittérannée d'un seul coup d'aile ...
Ces effectifs constituent une force de plusieurs centaines d'avions modernes (de l'ordre de 200, de mémoire).

Ce que je veux dire par mon message précédent, c'est qu'arrivés sur place, il n'était pas possible de les ravitailler en munitions sans ces "petits bouts de ferraille à 3 sous", et qu'il leur fallait donc utiliser "au mieux" les quelques secondes de feu dont ils disposaient dans leurs casiers internes à leur arrivée !!!

En passant, les 2 seules victoires revendiquées au-dessus de Mers-el-Kébir le furent par les Sergent/chefs André Legrand et Jean Gisclon (qui nous a quitté l'an dernier), qui abattirent chacun un Skua, respectivement les 3 et 6 Juillet 1940.
Or, de mémoire, les anglais avouèrent la perte d'au moins 4 avions, dont des Swordfishes.

:mrgreen: Probablement sommes-nous, à l'inverse des 500 chars revendiqués par Rüdel et les allemands au Nord d'Orel pendant la bataille de Koursk face aux 20 constatés par les soviétiques, ou des 1.700 appareils revendiqués par les japonais lors des incidents de la rivière Kalkhin-Gol alors que les soviets n'en comptabilisèrent que 170/190 de détruits, devant un des rares cas d'under-claim de la seconde guerre !!!

Comme disent les anglais : Guess why !!! ...

Re: ET si Pétain n'avait pas cédé ?

Nouveau messagePosté: 13 Oct 2009, 12:44
de Pierre.S
François Delpla a écrit:Justement, Crémieux ramène les choses à des proportions microscopiques, ce qui devrait tendre à les exclure d'un débat sur les grandes lignes de la situation.
Quant à un JMO de division, il peut dire tout bonnement et rituellement du mal des civils, et aurait un furieux besoin d'être recoupé par une source vraiment au fait du travail de déchargement et de son rythme possible. Après quoi, si les faits sont établis, il conviendrait d'en rechercher les causes.


Pour le depart de Bizerte la grue est en panne et l'embarquement se poursuit avec les grues de la Marine à Sidi Abdallah...
Le JMO du 67 eme BCC fait état d'un retard du "La Mayenne" et d'un ralentissement dans le déchargement et rien d'autre...Autant d'impondérables qui ne seraient pas gommés dans une opération de plus grande envergure...
Cette exemple permet de donner la mesure des moyens et du temps necessaire aux transfert en AFN d'unités aptes au combat.
La carte de la position des 84 et 85 éme DIA m'indique qu'elles sont en retrait sur le front mais ne donne pas d'informations sur leurs effectifs et leur aptitude à combattre.
A+,
Pierre