Toute explication insoucieuse des buts de Hitler dans cette campagne laisse sur sa faim le lecteur soucieux de vérité.
Si l'on considère qu'il s'agit d'une simple décision opérationnelle dont les conséquences stratégiques à long terme ne pouvaient probablement pas se mesurer sur le moment puisque ce n'est qu'après coup, lorsque l'ampleur du rembarquement sera connu et exploité par la propagande anglaise, que l'on en viendra à se demander si cette décision était la bonne, il n'y a aucune raison de vouloir en chercher des causes qui ne résultent que des conséquences.
Ton approche est purement téléologique, basée sur la connaissance de faits a posteriori. Sans cette connaissance, il n'y a aucune raison de penser que cette décision a été prise en contradiction avec les buts de la campagne tels que définis dans toutes les directives pour l'offensive à l'ouest. Ton opinion reste ce qu'elle est : ton opinion ; en aucun cas cela s'appelle "la vérité".
De ce point de vue il n'y a que deux solutions.
Ce point de vue est méthodologiquement erronné : tu n'es pas en mesure d'expliquer quoi que ce soit sans recourir à un enchaînement de spéculations aussi improbables les unes que les autres. Rien ne montre en réalité que les acteurs de la crise OKW-OKH se posent ce genre de questions depuis le début de l'offensive, et à plus forte raison les 23 et 24 mai, lorsqu'il s'agit de prendre des décisions purement opérationnelles pouvant impacter la réussite globale de cette campagne.
Soit Hitler a changé de point de vue sur la nécessité absolue d'une alliance "aryenne" pour dominer très durablement qui les mers, qui le continent européen. Il cherche à taper le plus fort possible sur l'Angleterre et à la mettre à genoux.
On peut très fortement douter du carractère de
nécessité absolue de cette alliance (par ailleurs indubitablement souhaitée par Hitler) en raison des plans de réarmement conduits depuis 1933, en particulier ceux de la marine et de l'aviation ; de façon encore plus évidente, par le simple fait que Hitler a bien courru le risque à plusieurs reprises de se retrouver en guerre avec la Grande-Bretagne. Si Hitler avait été aussi clairvoyant que tu l'affirmes dans toutes tes spéculations, il n'aurait certainement rien entrepris sans avoir au préalable sécurisé cette alliance si elle revêtait à ses yeux le caractère de
"nécessité absolue" que tu affirmes.
Resterait à démontrer quand il a changé et quel est son nouveau but. Une domination du monde par l'Allemagne, comme tant d'auteurs l'ont dit, situant là sa folie ?
Ce n'est absolument pas nécessaire dans le cadre d'une décision opérationnelle prise en dehors du cadre totalement spéculatif que tu t'es fixé toi-même.
Soit il n'a pas changé, et ne s'est fait déclarer la guerre par Londres et Paris que pour avoir l'occasion d'écraser la France. Dans ce cas il serait fort embêté d'avoir le BEF sur les bras, surtout avec un Churchill au pouvoir à Londres.
Le fait est que la guerre lui a pourtant bien été déclarée le 3 septembre 1939 par les "appeasers" de Munich : Chamberlain, Halifax, Daladier & Co.
Après bien des hésitations, lorsque le démarrage de l'offensive à l'ouest est fixé au 10 mai, Churchill n'est même pas arrivé au pouvoir et Hitler sait parfaitement bien qu'il va trouver le BEF sur sa route. Pourquoi diable en serait-il tout à coup
"fort embêté" le 23 ou le 24 mai... mystère !
Hitler serait en tout cas un bien piètre stratège si cela lui posait tout à coup un problème insurmontable du fait que Churchill et le "parti dur" soient arrivés au pouvoir entre-temps... se déciderait-il tout d'un coup le 24, comme l'a suggéré après guerre Liddell Hart, de laisser volontairement les soldats du BEF s'échapper pour préserver toutes ses chances de convaincre ses ennemis anglais qu'il est en réalité un parfait gentleman (aryen de surcroît) en qui on peut avoir toute confiance ?
(Encore une fois, je diverge TOTALEMENT, contrairement à ce que clame Vanwelkenhuyzen qui en l'occurrence n'a pas l'air de savoir lire, de la thèse de Liddell Hart selon laquelle il stoppe pour laisser le BEF s'échapper, puisque celui-ci n'est pas en route vers les ports et, sans Haltbefehl, est fait comme un rat.)
Je n'ai pas vu sur ce fil le post de Vanwelkenhuyzen
"qui ne sait pas lire" mais tu devrais a priori pouvoir régler cette querelle en PM avec lui :)
Paradoxalement pour un avant-gardiste, tu affirmes pourtant bien la même chose que Liddell Hart car tes nuances n'en font pas une thèse différente. Je ne suis pas non plus convaincu par cette affirmation simplement parce que tu le dis :
le BEF (...) sans Haltbefehl, est fait comme un rat.Il s'agit d'une affirmation récurrente, comme si ça allait de soi et qu'il suffisait d'ordonner le 24, mais j'attends toujours de voir une analyse sérieuse qui serait capable de le démontrer en tenant compte de tous les facteurs qui entrent en jeu avant la diffusion du Halt-Befehl.
Certains de mes contradicteurs ont ici opté pour la première solution... sans dire ce que Hitler vise désormais exactement et comment il entend terminer la guerre. Pas tous.
N'est-il pas temps que chacun expose ce qu'il a dans sa manche sur ce problème ?
Je n'ai pas lu un seul de tes "contradicteurs" soutenir ce que tu imagines dans tes rêves les plus doux :)
Il ne suffit pas de vouloir pour pouvoir (nous faire dire n'importe quoi... ou obtenir l'
alliance aryenne absolument nécessaire).