Dog Red a écrit:Nous nous égarons en mai 1940...
Bien loin des motivations hitlériennes au printemps 1939.
Hitler programme un coup que personne ne voit venir, pas même un Churchill ou un de Gaulle qui, après l'exécution, voudront continuer plus par un refus de se rendre à un barbare que par un calcul rationnel.
Tout le monde adhère à l'idée qu'à Munich la complaisance anglaise l'a frustré d'une guerre locale et persuadé qu'il pouvait encore prendre le risque , modéré, d'en déclencher une. Et de fait, après avoir dit que l'entrée en Pologne sans accord (le contraire d'un remain !) serait un casus belli, Londres et Paris tergiversent encore deux jours en espérant une conférence.
Voilà qui nous ramène à notre sujet au grand galop. Hitler apparaît non comme le gourmand qui a annoncé quinze ans plus tôt un KO contre la France pour pouvoir s'approprier à loisir la Pologne, la Biélorussie et l'Ukraine, encore moins comme un Guillaume II qui lance un potentiel accumulé pendant trois générations en vue de limer les griffes françaises puis russes, mais comme un gamin querelleur qui cherche les limites.
On le menace d'ailleurs non pas d'une guerre mais d'une déclaration et, prenant le pouls de ses voisins avec un service de renseignement performant, au moins en ce qui concerne l'opinion publique, il est aux premières loges pour le mesurer : ces gens ne mobilisent pas pour m'arrêter, ils croient que je ne prends pas au sérieux leur menace de guerre, étant donné les fruits abondants, sans coup férir, de mon culot précédent.
De ce point de vue, le pacte germano-soviétique, lui aussi préparé à loisir et obtenu dans un tempo parfait, joue un rôle qu'il faut mesurer. Il ajoute à la déclaration de guerre occidentale un nouveau mobile inattendu, l'anticommunisme, de nature à diviser notamment les Français, et inversement il renforce l'idée que Hitler secoue trop sa propre opinion publique, et qu'une déclaration de guerre londono-parisienne va lui créer un front intérieur difficilement gérable.
On en viendra non seulement à espérer vaincre l'Allemagne à la régulière, sans prendre en compte l'hypothèse d'un jeu subtil de sa part qui prenne à contre-pied toute la défense, mais à craindre que cette victoire y crée des troubles qui la jettent, par désespoir; dans les bras des Soviétiques.
Du grand art, vous dis-je, et surtout insoupçonné : là gît le principal de son efficience.