bltedouard a écrit:Bonjour à tous,
Régulièrement sur le net, je vois des individus descendants autoproclamés de tirailleurs sénégalais, algériens etc… , venir cracher sur la France et d’une certaine manière sur leurs propres ancêtres en affirmant de manière très stéréotypée qu’ils étaient utilisés comme chair à canon en première ligne parfois même sans armes avec bien évidemment un racisme et une hostilité permanente de la part de la France. Pour clôturer le tout, l’argument final est le massacre de Thiaroye qui démontre l’éternel mépris de la France et qu’il est donc justifié de porter atteinte à la France par vengeance, en 2023….. ; oui, nous en sommes là…..
Au-delà de la misère intellectuelle de certains, j’aimerais beaucoup obtenir des renseignements sur les fameux pécules impayés, le problème a-t-il été résolu et sinon, pourquoi l’administration n’a pas versé les sommes dues ? Est-ce que ce problème était généralisé à l’ensemble de l’armée d’Afrique ?
Merci d’avance pour votre aide
Bonjour,
Il n'y a pas de pécules impayés.
Ce qui s'est produit c'est qu'au fur et à mesure que les "colonies" accédaient à leur indépendance, la France a introduit dans ses lois de Finance (qui définissent le budget de l'Etat), des dispositions figeant les indices des pensions civiles et militaires versées à ses anciens "nationaux" à ce qu'ils étaient (les indices) au moment de l'indépendance en considérant qu'il était du ressort des gouvernements des nouveaux pays de faire éventuellement évoluer ensuite les pensions de leurs citoyens en rajoutant de leur propre budget pour tenir compte de l'évolution locale du coût de la vie.
Il y a une expression pour définir cette situation : "la cristallisation".
Cela concerne les pensions des anciens fonctionnaires, les pensions militaires de retraite (PMR), les pensions militaires d'invalidité (PMI) et les retraites du combattant (RC).
Le problème c'est qu'alors que la France a fait régulièrement évoluer les indices de ces différentes prestations au profit de ses nationaux, les autres pays ne l'ont pas fait.
Par exemple pour des services identiques ouvrant droit initialement à des pensions identiques, le Conseil d'Etat a calculé que pour 100€ perçus par un français, la cristallisation se traduit par 12 € perçus par un marocain puisque le Maroc ne se considère pas comme concerné par les droits à une pension obtenue au service de la France (le Maroc n'est qu'un exemple et cela est valable pour l'ensemble des autres pays).
Constatant qu'ils ne pouvaient attendre de leur propre pays une évolution favorable du montant des pensions, des ayants droit se sont tournés vers des associations comme par exemple l' "Association des combattants de l'Union française" pour ester en justice contre la France et en 2001 le Conseil d'Etat leur a donné raison en considérant que la "cristallisation" était contraire à la Convention Européenne des Droits de l'Homme.
Désormais les indices applicables aux pensions des anciens fonctionnaires, aux PMR, aux PMI et à la RC sont identiques pour les nationaux français et les ayants droit aujourd'hui étrangers mais ayant appartenu à l'Union française ou à la Communauté française.
Aujourd'hui ce qui nourrit la polémique ce sont des dispositions propres à la Loi française, à l'Administration française ainsi qu'à son système de prestations sociales :
- en France
la Loi n'a pas d'effet rétroactif, cela se traduit par l'impossibilité de constituer un quelconque pécule pour compenser une perte de revenu ayant existé entre les pensions des français et celles des étrangers ;
- en France l'ouverture d'un droit ne se traduit pas automatiquement par l'attribution d'une ressource,
il faut en faire la demande ce qui signifie que les ayants droit qui ne font pas de demande restent dans le système qui leur est appliqué ;
- en ce qui concerne les pensions civiles, les caisses de retraite sont en droit de réclamer
chaque année une preuve de vie (comme pour les français installés à l'étranger) ce qui oblige beaucoup de gens à se rendre au Consulat de France chaque année ;
- pour relever le niveau des petites pensions il existe des dispositions comme l'Allocation de Solidarité au Personnes Âgées (ASPA) mais elles sont soumises à une
obligation de résidence en France ce qui implique donc de vivre au moins six mois par an sur le territoire national...
Et comme la plupart des gens qui parlent de ces sujets n'en maîtrisent pas vraiment les subtilités on en vient vite à crier à l'injustice et à la discrimination pour peu que les esprits s'échauffent.
Quand j'étais au Cambodge j'ai aidé un colonel khmer à payer son voyage au Vietnam pour qu'il puisse aller prouver au Consulat de France qu'il était toujours en vie et toucher sa pension.
Quand j'étais au Cameroun j'ai rappelé à un ancien combattant (chevalier LH) qu'il fallait que lui-même et ses camarades fassent les démarches pour mettre fin à la cristallisation de leurs pensions.
Avec la fin de la cristallisation certains anciens combattants qui vivaient isolés de leur famille pendant six mois en France (surtout des sénégalais) pour avoir droit à l'ASPA ont vu leur pension de retraite atteindre un niveau suffisant pour ne plus avoir droit à cette allocation et sont retournés vivre définitivement au pays.
Quant au problème de répartition de la pension de réversion quand un ancien militaire décédé a eut plusieurs épouses...
Il reste un point qui pose problème c'est que l'Etat ne demande pas de preuve de vie pour les PMR, les PMI et les RC qu'il verse à la différence des caisses de retraite.
On constate donc qu'il y a un nombre considérable de "centenaires" pensionnés au Sud de la Méditerranée...