Dans l’imaginaire collectif, la conférence de Yalta, ce sont les « 3 grands » : CHURCHILL, ROOSVELT et STALINE qui se partagent le monde sur les cendres du III Reich. Et malgré cela, en février dernier, le 70e anniversaire de cette important sommet… est passé quasiment inaperçu. Même sur notre forum, Yalta ne suscite que peu d’intérêt malgré les perches tendues par Fred BONNUS et Jumbo en son temps (
viewtopic.php?f=135&t=33838 et
viewtopic.php?f=135&t=33917).
Le dernier GéoHISTOIRE revient sur l’évènement (
viewtopic.php?f=60&t=41456) sous forme d’un entretien avec Maurice VAÏSSE, Professeur émérite d’histoire des relations internationales à l’Institut d’études politiques de Paris. L’historien en profite pour relever certains malentendus que le huis-clos du sommet et 45 ans de guerre froide n’ont fait qu’alimenter.
« A Yalta, il n’y a pas eu de partage du monde »Dès lors qu’en février 1945, il devient de plus en plus évident que le III Reich est sur le point de perdre la guerre de manière imminente, il est important que les Alliés se rencontrent directement afin de s’accorder sur la fin de la guerre et notamment le «
sort réservé au vaincu ».
Alors que du 9 au 18 octobre 1944, à Moscou, CHURCHILL et STALINE se sont déjà accordés sur certains «
partages » du continent européen (à l’URSS la Roumanie, à la Grande-Bretagne la Grèce par exemple), ROOSVELT s’insurge contre ces arrangements. Selon Maurice VAÏSSE : «
Mais en février 1945, il n’est pas question de partage. C’est dans le contexte ultérieur de la guerre froide que s’est bâti ce mythe d’une division du monde effectuée à Yalta. »
La maladie de ROOSVELT a-t-elle eu des conséquences sur le sommet ?Maurice VAÏSSE cite Frank ROBERTS (un diplomate britannique présent à Yalta) pour formellement rejeter cette idée reçue. Même si ROOSVELT est diminué et qu’il a des difficultés à se déplacer, ROBERTS insiste sur le fait que le président américain a été lucide en permanence. Et il a notamment fait bonne figure lors des toasts des banquets auxquels il a participé alors qu’il fallait avaler des verres et des verres de vodka.
Ce sont en particulier les républicains, aux Etats-Unis, qui se sont emparés de l’état de santé de ROOSVELT pour l’accuser d’avoir été trop concilient avec STALINE.
Absente à Yalta, la France… tire cependant les marrons du feu !Humiliée en 1940 et occupée durant 4 ans, la France apparaît finalement comme l’un des vainqueurs de la guerre. «
Même si cet habit de puissance est taillé un peu trop grand pour elle… » estime Maurice VAÏSSE.
Avec le soutien de ROOSVELT et par l’entremise de CHURCHILL qui se cherche un allié continental pour contrebalancer la seule puissance soviétique, la France obtient une zone d’occupation en Allemagne (au détriment des Anglais et des Américains comme il sera concédé à STALINE), le statut de membre permanent à l’ONU et une participation à toutes les instances qui décideront du sort de l’après-guerre.
Paradoxalement, vexé de ne pas avoir participé aux discussions, DE GAULLE va «
instrumentaliser l’Histoire » et tenter à démontrer, dès 1947, que si l’après-guerre ne se passe pas aussi bien qu’on l’avait souhaité, c’est par ce que la France n’était pas à Yalta. DE GAULLE voit dans la conférence l’origine de l’antagonisme entre les Etats-Unis et l’URSS, antagonisme que seule la France aurait pu tempérer. Jusqu’en 1969, ce sera son leitmotiv : le monde va mal car les deux grandes puissances se sont partagé le monde.
Source ou extraits choisis : GéoHISTOIRE Avril-mai 2015
Et vous… quels sont vos points de vue sur ces « malentendus » ?