Post Numéro: 34 de Ballon-Balma 29 Oct 2023, 15:43
Décidément, on na pas fini de parler de ce fameux combat du 6 novembre 1939 ! À l'époque, toute la presse française et même britannique en fait ses gros titres, dont " Paris-Match " ("L'allumette de Paris", sic).
La source publiée la plus sûre est probablement le volume 2 de la gigantesque série allemande dont le titre est abrégé en JFV, série créée et dirigée par M. Jochen Prien (Hamburg). Les couvertures cartonnées sont mauves, grand format. Ce volume JFV 2 a été publié vers l'an 2000 (à plus ou moins un an près). Les dates de parution de ces dizaines de volumes ne sont pas indiquées, ce qui est surprenant, et encore plus pour des ouvrages qui ont malgré tout un caractère historique indéniable même si les opinons de M. Prien tendent à le démentir (citations : " La prétendue "Bataille d'Angleterre" n'a jamais existé. Il s'agit de combats. (...) ". M. Prien et ses co-auteurs ont travaillé avec de nombreux anciens membres des unités de chasse allemandes (pilotes ou non), avec l'association des anciens pilotes de chasse, etc.; et ils ont pu étudier de nombreux documents pertinents comme les carnets de vol et autres. Les renseignements concernant le côté allemand de la guerre aérienne sont évidemment assez sûrs (types d'avions perdus, noms des pilotes, lieux, etc.) mais les listes de victoires sont très sujettes à caution aussi bien pour les types d'avions ennemis abattus que pour leurs nombres, souvent très exagérés, spécialement pour les chasseurs les plus "optimistes", que j'ai repérés facilement : Helmut Wick et Wilhelm Balthasar (pour mémoire : le W allemand se prononce comme le V français).
Ce volume JFV 2 indique donc à la page 526,, pour les pertes du Jagdgruppe 102 le 6 novembre 1939, 5 Me 109 D-1 détruits et 3 endommagés à 10 % (pas "à moins de 10 %"), donc 8 avions touchés par les tirs français dont 5 détruits (sans la mention d'un à 70 % ; à partir de 60 %, l'avion était considéré comme détruit). Pas de Me 109 B, C ni E (les E étant très supérieurs à tous les précédents). Deux commandants d'escadrille ont été tués, deux autres pilotes capturés et un blessé.
Le nombre de 27 participants allemands, bien que proclamé depuis et adopté même par J. Prien, me semble très douteux car il ressemble beaucoup à un effectif français souvent utilisé : " trois patrouilles triples ", donc 27, mais c'est vraiment du chinois pour ceux qui n'ont pas l'habitude de jongler avec les formations d'avions françaises. Formation de base, élémentaire : la "patrouille" de 3. Une patr. triple = 3 x 3, donc 9. Trois patr. triples = 3 x 9, soit 27 (3 x 3 x 3). On avait une tendance naturelle à "voir" des formations ennemies correspondant à celles de l'AA, mais l'élément de base allemand était plutôt le "Schwarm" de 4 (même remarque pour le W) et, normalement, les formations de combat de la Luftwaffe comptaient des multiples de 4, dans ce cas 6 x 4 = 24 ou 7 x 4 = 28. Comme chez les Français, ces nombres pouvaient être réduits de 1 ou 2 par des ennuis techniques forçant les pilotes en cause à faire demi-tour. Il n'est pas impossible que les "Frisés" aient vraiment été 28 - 1 = 27, mais je n'y crois guère. Peu importe. Selon Prien & Co, les chasseurs français étaient des P-36, ce qui n'est pas complètement faux, mais c'étaient quand même des Curtiss H-75 (la version d'exportation du P-36 américain).
Dans son énorme livre (TBFTN, paru en 208) consacré à la guerre aérienne du 3 septembre 1939 au 24 juin 1940, le britannique Peter Cornwell (pas Anglais mais Gallois !) indique les mêmes pertes mais avec de nombreux détails (noms, lieux, etc.). Trois Curtiss ont été légèrement endommagés, donc réparables, dont celui du Sgt. Legrand, après un atterrissage forcé (sur le ventre ?) parce que tombé en panne d'essence, mais Legrand affirmait avoir abattu deux Me 109, ce qui est fort possible et peut expliquer un combat plus long et plus intensif ayant consommé trop d'essence. Cela valait la peine. Les deux autres Curtiss endommagé avaient été touchés.
La formation française était commandée par le lieutenant Houzé, qui a manœuvré magistralement malgré une situation tactique défavorable au début du combat.
Il serait intéressant d'avoir, par exemple, les ordres écrits ou le rapport de combat de la formation allemande, entre autres pour connaître son effectif réel. (Bien qu'il n'y ait que peu de différence entre 24, 27 et 28 Me 109 D-1.)