Salut,
Je ne sais trop où poser la prose que j'ai écrite sur un forum de jeu d'histoire par ailleurs.
Celle-ci est purement personnelle et donc empreinte d'une approche d'amateur dans tous les sens du terme.
Si nécessaire, je déplacerais le texte dans un sujet plus approprié.
Je lance un fil sur le sujet suite à la lecture d'un article d'Hugues Wenkin sur l'armée de 1940 dans un "batailles et blindées" du mois de mai.
L'article parle bien du décalage de nos forces avec celles de la Wehrmacht et insiste à juste raison sur l'inadaptation de nos modèles de blindés (et non leur "infériorité", la nuance est importante), ainsi que l'insuffisance des moyens radios qui pèsera très lourd dans la lourdeur de la manœuvre française (mais y a pas que ça!).
Par contre, et c'est pourquoi je prends le clavier, aucune explication des choix français n'est réellement donné (à part la sempiternelle pensée de la guerre d'avant, ce qui n'est pas inexact, mais incomplet). Pire, on passe sous silence l'artillerie française en fustigeant, comble du contre-sens, la légèreté du canon AC de 25mm.
Commençons donc par cela: l'artoche!
On oublie bien souvent de préciser que l'artillerie française, contrairement à la guerre de 14, est supérieure ou égale à son homologue allemande sauf dans le domaine des pièces d'infanterie (particularité très teutonne!) et, bien évidemment, de la DCA.
La puissance et la portée des pièces d'artillerie françaises est souvent égale ou supérieure aux allemandes. La motorisation n'est pas plus parcellaire que celle de notre adversaire, mais elle est organisée bien différemment.
En fait, là où le système divisionnaire est poussé à fond par la Whermacht avec une complémentarité interarmes organiques au sein même des divisions, et tout spécialement aux Pz Div. La division n'est qu'une brique d'un plus grand ensemble dans le schéma français.
Ainsi les groupes d'artillerie, lourdes surtout, viennent renforcer telle ou telle unité en fonction des besoins pour obtenir une suprématie de feu sur un point donné du front, c'est même l'un des principes fondamentaux de la ligne Maginot et encore plus des lignes de Maisons Fortes (sic) d'intervalles.
Le rythme imposé par la Whermacht ne va pas laisser le temps au commandement français pour organiser son bel ensemble et les unités (y compris celle de la ligne Maginot qui auront souvent perdu leurs unités d'appui d'artillerie entre-temps!) devront souvent se débrouiller par elle-même.
Cela ne veut pas dire que les divsions françaises sont dépourvues d'artillerie organique, mais qu'elles ne sont pas vouées à s'appuyer uniquement sur celle-ci dans la durée, elles doivent recevoir des unités plus lourdes en appui si nécessaire (en attaque ou en défense). Dans l'armée allemande, ce rôle est plutôt dévolu à l'artillerie volante, l'appui tactique revenant tout spécialement aux pièces d'infanterie alors que ce rôle est tenu par l'artllerie divisionnaire dans l'armée française.
Cette organisation aura aussi d'autres conséquences, mais j'y reviendrai.
L'autre artillerie, l'antichar, est par contre des plus performantes. On oublie bien souvent que l'armée française distingue 2 types d'artillerie antichar contrairement aux autres armées: les pièces dites d'infanterie et versées dans les régiments d'infanterie, ce sont les 25mm qui remplacent les 37mm de la guerre précédente dans ce rôle, a contrario, on ne trouve pas de fusils antichars. Le premier avantage de ces pièces est leur légèreté qui doit permettre de les déplacer facilement à bras d'homme et améliorer leur camouflage. Il ne faut pas oublier que le premier problème d'ue pièce antichar est sa mobilité et la possibilité de la déplacer à la force des bras peut permettre d'éviter de perdre bêtement des pièces par absence de tracteur disponible. Il est à noter que les allemands ont la même approche via leur pièce de 37mm et que le retard d'entrée en service du PaK38 est surtout dû au poids de la pièce qui la rend nettement moins manoeuvrable.
Cela peut paraître étonnant a posteriori, mais le manque de puissance des pièces antichars n'est vraiment révélé qu'à l'entrée en guerre, et encore, le 25mm sera suffisant face aux blindés allemands trop faiblement blindés.
Pour autant, et peut-être du fait de disposer de chars plus fortement carapaçonnés, l'armée française à lancer la production d'une superbe pièce antichar: le 47mm APX tracté, auquel aucun blindé ne peut résister.
Par contre, celui ci présente plusieurs caractéristiques le rendant difficile à déployer au sein des régiments d'infanterie. Il est tout d'abord plus lourd (1070kg vs 480kg pour le 25mm), ce qui le rend bien trop peu mobile, surtout en l'absence de moyen de traction. Ensuite il fait appel à des munitions spéciales ce qui le réserve à l'arme savante. De ce fait les pièces de 47mm sont rattachées à l'EDAC (Escadron Divisionnaire Antichar), lui-même rattaché organiquement au régiment d'artillerie divisionnaire.
En 1940, ces pièces sont trop rares et, là encore, le plus souvent emportées dans la tourmente de combats au rythme trop élevé pour nos couleurs.
Pour finir, la grande absente reste la DCA, est-ce par méconnaissance du risque aérien? Peut-être, mais je tablerai plus sur une sous-estimation de celui-ci que d'une réelle ignorance. L'appui aérien tactique est très compliqué à mettre en oeuvre et n'est apparu que très récemment lors de l'entrée en guerre. Il faut bien se rendre compte que la Whermacht tatonnera encore en Pologne pour bien organiser celui-ci. De même, la puissance des avions s'est littéralement décuplée qu'à partir de 1936, soit 3 ans à peine avant l'entrée en guerre. L'Armée de l'Air doit normalement gagnée la bataille dans les airs, la DCA n'apparaît alors pas comme une priorité, surtout la DCA légère d'armes automatiques, et la France dispose de nombre de 75mm contre-avions du conflit précédent qui sont loins d'être ridicules contre des bombardements horizontaux, même si ils sont peu mobiles.
L'autre point à se rappeler est la disette budgétaire des années 30 qui poussent à des choix drastiques dans le développement des armements, la DCA légère n'est alors pas une priorité et on compte encore beaucoup sur les mitrailleuses AA de 13.2mm Hotchkiss pourtant insuffisantes (je me rappelle le témoignage d'un ancien combattant il y a plus de 20 ans qui me narrait le ridicule pissou des mitrailleuses françaises lors de l'attaque de son aérodrome, les jolies paraboles des rafales retombant bien avant de toucher les avions allemands!). Le 25mm AA de 1939 est une excellente pièce, mais développée trop tard et en bien trop faible nombre pour pouvoir faire quoique ce soit de correct.
De même il n'y a pas franchement de culture DCA parmi les officiers de l'Armée de Terre et les pièces de DCA sont surtout dévolues à la protection des aérodromes à la base. Le rattachement de la Flak à la Luftwaffe a eu un effet décisif dans le développement de celle-ci avec notamment des officiers rompus totalement à son emploi, ce qui expliqe les hécatombes des Fairey Battle et autre Bréguet 693/695 dans les assauts désespérés sur les ponts de la Meuse.
A suivre