La clé du plan "Fall Gelb" est d'attirer les alliés franco-britanniques profondément en Belgique pour les tourner par le sud en perçant à Sedan, les isoler et les détruire.
Dans cette manœuvre, le XVI.Armeekorps (mot.) va servir d'appât en pénétrant rapidement en Belgique, par les Pay-Bas et attirer à lui les Alliés "volant au secours" de la Belgique envahie.
Pour ce faire, les 3 et 4.Pz.-Div. devront franchir la Meuse (Pays-Bas) et le canal Albert (Belgique) sans coup férir.
On ne présente plus les opérations aéroportées allemandes sur le canal Albert et le fort d'Eben-Emael.
Il me semble que l'on connaît moins celles menant à la captures des ponts de la Meuse à Maastricht.
En voici une relation succincte.
Les ponts de Maastricht
Les ponts de Maastricht sont situés en ville et sont gardés en permanence depuis le 7 mai (imminence d'une attaque allemande).
Ces ponts sont au nombre de 3 :
- le Wilhelminabrug (pont routier) ;
- le Sint-Servaasbrug (pont routier) ;
- le pont ferroviaire.
Le dispositif hollandais autour de Maastricht est relativement léger et dispersé.
Pour les Allemands, il est inimaginable, comme sur le canal Albert, de s'emparer des ponts par un assaut aéroporté.
Un largage en dehors de la ville hypothéquerait l'indispensable effet de surprise.
Il faut donc se saisir des ponts par une opération spéciale.
Opération confiée à une unité de l'Abwehr (contre-espionnage allemand).
L' Infanterie-Bataillon Zur Besonderen Verwendung 100 (zbV.100)
Ce bataillon pour "missions spéciales" est commandé par le Hauptmann FLECK et organisé de la manière suivante :
- Compagnie état-major (peloton cycliste + peloton moto)
- Compagnie du génie
- Compagnie génie/infanterie
- Batterie Flak (4x8,8cm)
- 2 auto-blindées
Pour l'opération sur Maastricht, le bataillon est organisé en 4 équipes :
A : un sous-officier allemand secondé par 6 sympathisants hollandais (quartier du Wyck, rive droite) neutraliseront les sentinelles et le dispositif de sautage du pont Wilhelminabrug ;
B : trois groupes de 10 hommes franchiront la frontière (Herzogenrath) le soir du 9 mai, récupéreront des vélos (Bleierheide) puis des armes (Kerkrade) avant de rejoindre Maastricht ;
C : l'avant-garde de l'Oberleuntant HOCKE à la tête des pelotons cycliste et moto sous uniformes de la police militaire hollandaise franchiront la frontière à 3h20 et rejoindront les équipes A et B ;
D : le reste du bataillon, en uniformes allemands, franchiront la frontière en tête du IV.Armeekorps et rejoindront Maastricht.
Les équipes A et B portent des tenues civiles pour faciliter leur approche des ponts.
Les ponts de Maastricht sautent !
Il semblerait que l'équipe A soit sous l'emprise de l'alcool lorsqu'elle approche du Wilhelminabrug. Quoi qu'il en soit, le sous-officier abattu, les sympathisants hollandais s'égaient dans la nature.
L'équipe B n'a pas plus de réussite. Les 3 groupes sont interceptés par les Hollandais du côté d'Herzogenrath et obligés de se disperser.
L'équipe C traverse la frontière, franchit quelques postes mais se fait démasquer et doit faire le coup de feu pour progresser! La surprise est éventée.
L'équipe D rejoint Maastricht mais découvre que les quartiers qu'ils doivent traverser sont barrés. La progression est sérieusement entravée.
L'effet de surprise n'ayant pas joué, les Hollandais font sauter les ponts. A 6h45, l'arche orientale du Sint-Servaasbrug s'effondre dans la Meuse. A 6h52, c'est la chaussée qui relie le Wilhelminabrug au quartier de Wyck qui saute ! A 7 heures, l'arche occidentale du pont ferroviaire saute à son tour.
Mais les ouvrages ne sont que partiellement détruits. Par souci d'économie (les ponts sont à reconstruire un jour) les Hollandais ne dynamitent qu'une arche de leurs ponts et non la totalité des ouvrages. Voilà qui va singulièrement faciliter le travail des pionniers allemands.
Le franchissement de la Meuse
En tête du IV.Armeekorps, la 4.Pz.-Div. traverse la frontière hollandaise. A 7h30, lorsque ses éléments avancés arrivent à Maastricht, les ponts ont sauté. Les hommes du zbV.100 ont traversé sur les restes des ponts. Peu après 8 heures, es Schützen commencent à franchir le fleuve avec des canots d'assaut. Les Fallschirmjäger attendent sur les ponts du canal Albert, il est impératif de les relever au plus vite.
Il est déjà 10 heures quand la 4.Pz.-Div. demande au Korps l'intervention du Génie. Il est midi quand une première portière (8t.) est mise à l'eau. Deux portières de 4t. sont mises à l'eau dans la foulée. Vers 14 heures, le Pionier-Regiment.601 arrive enfin et commence la construction d'un pont au nord du viaduc ferroviaire (une passerelle pour les motocyclistes est installée). En milieu d'après-midi, un bataillon de Schützen a franchi la Meuse mais sans ses véhicules. En début de soirée plusieurs éléments divisionnaires ont franchi la Meuse et rejoint les paras mais le pont sur la Meuse ne sera pas opérationnel avant la matinée du 11 mai.
En conclusion, la prise des ponts de Maastricht est un fiasco mais les moyens du IV.AK. et de la 4.Pz.-Div. assureront malgré tout la relève des Fallschirmjäger sur le canal Albert et permettront de limiter les retards.
Source : Hubert LABY, "En Hesbaye... mai 40-Septembre 44"