J'ai continué à lire, sur le rapport de forces mais une phrase reprise de Frieser m'a interpellé :
« « Ainsi structurée, l'armée allemande ressemblait à une lance avec une pointe d'acier trempé, dont le manche, en bois, paraissait d'autant plus pourri qu'il était long...» et il ajoute fort justement: «...pourtant cette pointe d'acier porta un coup mortel aux Alliés. Le fait qu'elle se soit détachée du manche caractérise le déroulement des opérations. Les troupes d'élite avaient attaqué avec une telle fougue que - contrairement à toutes les prévisions - elles laissèrent sur place la masse non motorisée de l'armée de terre. Les divisions d'infanterie en furent réduites à un rôle de figurant » »
Je ne me rappelai pas que Frieser avait cette vision justement que les unités blindés ont fait tout le boulot et que celles d'infanterie n'ont fait que de la figuration…
Frieser dans sa thèse a pris l'exemple de divisions blindées (corps Guderian, 1re, 7e…), soit, mais voilà que sans avoir étudié l'infanterie il conclut qu'elle n'a rien fait !
Là encore on est dans la thèse du « raid autonome blindé » notamment de Liddell Hart ou de De Gaulle dont c'était les idées d'avant-guerre.
Si réellement c'était le cas, les renforts envoyés par le commandement français auraient simplement fermé la brèche derrière les Panzers et ceux-ci se seraient retrouvés à court de ravitaillement, encerclés…
Ce n'est pas ce qui s'est passé. Thèse de Frieser ? Le commandement français était paralysé et n'a rien fait… Ça a le mérite d'être simple comme explication. Pourtant dès le 17 (ou le 18) il n'aura cesse jusque vers le 24 d'ordonner d'attaquer les arrières des Panzer-Divisionen.
Il ne se passera que des épisodes isolés. Ça n'a jamais marché car d'une part l'infanterie allemande (3 armées au sud et une au nord) a suivi promptement derrière les unités blindées, celles-ci n'ont jamais laissé un grand espace derrière elle, la 5. Panzer-Division au nord et la 10. Panzer-Division au sud assurant presque la continuité — et a établi un front défensif avant que les Français aient eu le temps d'amasser suffisamment d'unités pour attaquer. L'exemple le plus connu, les combats de Stonne qui durent jusqu'au 24 si je me souviens bien. Les Français rameutent des unités au sud mais cela prend du temps — la faute au déploiement initial, pas de réserve ! — avec au sud un réseau ferré saturé et bombardé en priorité par l'aviation ennemie, lorsque l'infanterie Française arrive l'infanterie ennemie est déjà en place et en supériorité, à tel point que Halder veut le 17 changer le plan initial et passer simultanément à l'offensive au sud !
Ça c'est notre infanterie qui n'a jamais pu être là à temps donc, mais nos DCR ont pu passer à l'attaque plus rapidement. Ne tapant pas dans le vide car celui-ci n'existait pas vraiment, mais contre les 1. et 10. Panzer-Divisionen au sud et les 5. et 7. Panzer-Divisionen au nord. Elles tapent à cet endroit car derrière il y a déjà l'infanterie allemande qui est déjà installé donc on tape à l'endroit le plus faible. Il n'y a qu'à Abbeville (en cherchant pareillement un point faible où l'ennemi ne serait pas encore établi) où nos DCr se heurteront à de l'infanterie (déjà là ! donc partout sur le flanc sud). Cette division d'infanterie aura les pertes les plus sévères de la campagne… Le boulot de figurant c'est pas une planque apparemment…
Donc voilà le rôle de la défense du flanc sud, qui si en pratique n'a pas été très difficile, était en théorie particulièrement dangereux et était un des principaux frein (plus que la traversée de l'Ardenne !) dans le haut commandement au plan offensif qui a été appliqué, les Allemands n'ont pas oublié le « miracle de la Marne ». Bref ce n'est pas parce qu'elles n'ont pas combattu autant que prévu qu'elles ont eu un rôle mineur ! La défense est inséparable de l'offensive.
Passons maintenant au rôle de fixation qu'à eu l'infanterie. Le groupe d'armées B devait faire diversion dans la plaine belge et y fixer les Alliés (contrairement à 1914 par exemple où les Allemands n'ont pas fixé les Français en Alsace-Lorraine, permettant qu'ils partent se battre sur la Marne). Il a bien réussi sa mission car la 7e armée se désengage de « Breda » à partir du 12-13, mais ses éléments n'arrivent contre les panzerdivisions que plus de 5 jours plus tard… Le corps de cavalerie et la 1re armée ne sera jamais capable d'attaquer vers le sud car ses éléments sont accaparés par l'agressivité du groupe d'armées B… Seul les Anglais disposant de leur propre réserve et plus épargné mèneront le principal simulacre à Arras. Pourquoi Arras a-t-il eu autant d'effet ? Car sa voisine la 5. Panzer est complètement accaparé avec les unités de l'ex-7e armée et du fait en retard… Et oui l'infanterie n'a pas encore pu prendre le relais, elle est trop occupée elle même à réduire les restes de la 9e armée etc. Sur la ligne Maginot, l'infanterie fixa également des unités françaises en attaquant par exemple la position avancée de Longwy etc. Elle préparait ostensiblement des attaques pour obliger les Français à y rester, laissant le champs libre aux Panzer-Divisionen…
La poche du nord, qui l'a réduite ? Je ne souhaite pas discuter du Haltbefehl, mais celui-ci ayant existé, lorsque les panzerdivisions reprennent leur offensive certaines se cassent les dents sur un front qui a été rétabli, au final c'est bien l'infanterie, dont c'est le boulot, qui achève le travail. On ne doit pas se méprendre : les Panzer-Divisionen ont été mise en avant sur la Meuse uniquement parce que la rapidité était la clé de la surprise et que celle-ci donnait plus de chance de franchir le fleuve qu'une attaque méthodique et plus puissante par l'infanterie. Le rôle des Panzer-Divisionen est bien l'exploitation, le mouvement. Pareillement sur la ligne "Weygand" certains Panzer-Divisionen échoueront à percer et devront laisser l'infanterie leur ouvrir poliment le chemin.
Figurant l'infanterie… Tsss.
Un des problèmes de Stalingrad, c'est toute l'infanterie que l'Allemagne y laisse. Irremplaçable, contrairement aux chars.
Le binôme chars/avions très bien coordonnés par des moyens de communication modernes et performants offre à la Wehrmacht un avantage certain en matière de manoeuvrabilité
N'oubliez pas l'infanterie, l'artillerie et le génie, la reconnaissance. Frieser ne les a pas oubliés pour les Panzer-Division. Il a eu raison, c'est une des clés du succès allemand. Ce sont les Schützen et Pioniere qui traversent la Meuse, appuyés par les chars de l'autre coté, l'artillerie et l'aviation. En s'avançant dans les terres, les Schützen continuent seuls en attendant qu'un pont permettent aux renforts lourdes de passer. Et lorsqu'un pont est mis en service, ce n'est pas forcément les chars qu'on fait passer en premier mais de l'artillerie, etc. C'est un combat inter-arme. Il y a le contre-exemple de la journée du 15 à la 1. Panzer : les panzers attaquent de leur coté à la Horgne, les Schützen du leur à Bouvellemont. Les combats sont intenses et les Allemands ont bien du mal à enlever les deux positions. Contre-exemple aussi du coté français, les DCr ont été plutôt catastrophique comparé à leur nombre de chars. Dans leur composition elles n'ont que de faibles autres armes. Le manque d'entraînement (elles sont nouvelles) et la faiblesse des transmissions accroît encore ce phénomène. Le combat le plus caractéristique pour cela est Flavion (1re DCR contre XV. AK). Les DLM au contraire, plus équilibrés et plus anciennes, combattront bien et ne disparaîtront pas en un ou deux jours comme les DCr mais combattront presque jusqu'à la fin, piégés qu'elles sont dans le nord. Le commandement français, lucide, comptait en fait surtout sur elle. Mais elles seront fixés par l'infanterie ennemi du groupe d'armées B… mais je me répète là.