pierma a écrit:Faire passer les armées à la queu-leu-leu diminue la largeur de l'attaque, qui devient frontale. C'est la seule solution que laissait l'espace disponible en 1914 si les Allemands n'entraient pas en Belgique, et c'est précisément ce que Schlieffen voulait éviter. De fait la largeur du front de l'offensive allemande est assez impressionnante.
Oui le but est d'éviter une attaque frontale, et d'ailleurs les Allemands n'attaquent pas en Alsace-Lorraine, ils y laissent d'abord l'initiative aux Français avant de contre-attaquer, ce qui est d'ailleurs souvent reproché à Moltke qui aurait perverti l'esprit initial du plan Schlieffen en laissant deux armées au lieu d'une face à la frontière française. De fait, initialement 5 armées participent à l'offensive, comme pour les Français. L'attaque par la Belgique et le Luxembourg, en excluant le Limbourg hollandais, n'est pas beaucoup plus large qu'une attaque directe contre la France.
Intéressant ce que vous dites sur le fait que le 2ème bureau ait pris en compte - en 40 - une éventuelle attaque sur la Lorraine. Curieux que dans cette hypothèse personne n'ait pensé aux Ardennes. Je me demande jusqu'à quand le 2ème bureau a conservé cette hypothèse lorraine...
Assez longtemps malheureusement, durant plusieurs mois... le 2e bureau produit un dernier rapport peu avant l'offensive, qui est assez juste sur les concentrations allemandes, mais il est trop tard et c'est en contradiction avec toutes les informations précédemment perçues, avec ce que du coup le haut commandement pense savoir du plan allemand, et il n'en est pas tenu compte, ou si peu, et trop tard.
En revanche une offensive contre la Lorraine rencontre un terrain favorable, le plateau lorrain, un bon charodrôme (mais il faut prendre d'assaut la ligne Maginot). Contrairement au massif ardennais, qui est considéré comme pratiquement imampénétrable avec la Meuse derrière...
Bruno Roy-Henry a écrit: L'intérêt des Belges, c'était de favoriser en sous-main une étroite collaboration avec les alliés au cas où la neutralité serait violée.
On peut regretter qu'il n'y ait pas eu une véritable « collaboration en sous-main » mais ça peut se comprendre, si les Allemands l'apprenaient c'était provoquer immédiatement une invasion que les Belges cherchent désespérément à éviter. Et puis, comme de toute façon les Alliés vont gagner la guerre (
), la Belgique n'a pas d'intérêt à le faire.
La défense des Ardennes -notamment- aurait dû soigneusement être réglée entre l'état-major français et le roi. Ils se sont contentés de se mettre d'accord sur le plan Dyle : et encore, le roi n'en était pas très satisfait...
L'état-major français n'avait pas l'intention de défendre l'Ardenne. Lorsqu'il y avait encore coopération, et que les Belges ont décidé en 1934 qu'en cas d'attaque ils replieront de ce territoire excentré et peu peuplé leurs unités, et ce sans coopération avec les Français, ceux-ci n'ont pas protestés. Si auparavant ils, avec Weygand, craignaient une attaque brusquée à travers l'Ardennes, ce n'est alors plus le cas : la menace principale, qui est vue comme quasi-unique, est celle d'une attaque dans la plaine belge, à cause du fait de l'augmentation des forces et de la motorisation de l'armée allemande qui aurait plus de faciliter à y manoeuvrer. Conséquence, là où le plan D (1933) prévoyait de défendre l'Ardenne sur une ligne Arlon-Huy avec couverture en avant de la cavalerie, dans le plan D bis de 1935 la défense de l'Ardenne est abandonnée, uniquement de la cavalerie y sera envoyée en couverture (comme en mai 40).
(source : Bruno Chaix, Fallait-il entrer en Belgique, 2000)la variante "Breda" était une pure folie ! La VIIème armée de Giraud a été précipitée dans une aventure alors qu'elle devait servir de réserve ! Gamelin a totalement ignoré les enseignements de Napoléon, savoir que l'on doit toujours se ménager une réserve centrale pour pallier à toute surprise !!!
On est bien d'accord !
pili a écrit:Lebrun et le Conseil ont-ils eu des contacts avec Léopold III et son personnel politique ? Avec la reine des Pays-Bas ?
Avec les Pays-Bas je ne sais plus, la question est plus secondaire, mais avec la Belgique, ils (avec les militaires) ont désespérément essayé de le faire tout au long de la drôle de guerre, sans succès. Quelques échanges bien faibles en « sous main » ont lieu entre les Français et les Belges (un lien existe mais me rappelle plus exactement des noms et des fonctions), chacun s'informant des grandes lignes des plans, les exécutants sont laissés dans une certaine ignorance et rien n'a été décidé pour la subordination des armées belges etc., tout ça ne sera pas sans poser de problèmes...