Post Numéro: 49 de Luzien 31 Aoû 2012, 19:49
Le soldat ivre
- Après notre macabre découverte dans les rochers nous ne quitâmes pas la maison de quelques jours, mais la mer nous manqua vite et vint le jour où nous nous trouvâmes à nouveau sur le chemin de la plage. Cette fois Françoise décida de nous accompagner. Après une bonne baignade, nous nous amusâmes sur le sable pendant qu'à l'écart Françoise avait le nez plongé dans un livre, une de ces éternelles histoire d'amour dont elle était friande. Puis vint le moment de prendre le chemin du retour.
Comme nous passions devant les barraques du camp allemand quelques soldats s'approchèrent de l'enceinte et se mirent à interpeler Françoise: "Mamoiselle! Joulie mamoiselle! Oh la la!"
Françoise regardait obstinément devant elle, trop intimidée et effrayée pour tourner la tête vers tous ses admirateurs.
De retour à Clo-Mi-Gi, Françoise entreprit de faire un peu de lessive pendant que nous étions occupés à sarcler les mauvaises herbes qui poussaient le long de l'allée de gravier, cela faisait un moment que notre père nous avait demander de le faire.
Soudain, nous entendîmes Françoise crier, elle se précipita sur Gilbert, le saisit par la main et nous cria: "Vite, à la maison"! Claude et moi étions interloqués, nous nous approchâmes et à ce moment-là nous apperçûmes un soldat qui tentait d'ouvrir le portillon par lequel nous étions entré un moment plus tôt. Ne pouvant manoeuvrer le loquet qui le fermait de l'intérieur, le soldat entreprit d'enjamber le portillon! Il était vêtu d'une tenue de camp blanche plutôt maculée, la baïonnette pendue à son ceinturon. L'obstacle franchi, le soldat se redressa en titubant et nous réalisâmes qu'il était ivre. Il cria à l'intention de Françoise qui courait vers la maison tirant Gilbert par la main: "Mamoiselle, attendre, bitter!"
Françoise s'engouffra dans la cuisine avec Gilbert, je la suivis, Claude derrière moi. La porte de la cuisine ne se fermait pas à clef, seul le grand battant extérieur était muni d'un crochet de sécurité, mais le battant était à ce moment-là maintenu au mur par un loquet, pour le libérer il nous fallait à nouveau sortir, mais le soldat était déjà au pied de l'escalier. Panique!
Françoise se précipita dans le vestibule, ouvrit la porte de l'entrée principale et toujours tirant Gilbert, se rua à l'extérieur et je fis de même. Nous traversâmes la cour de devant, ouvrîmes le portillon, traversâmes la route et sautâmes dans le fossé!
C'est alors que je m'apperçus que Claude n'était plus avec nous.
Pendant que nous nous enfuyons de la cuisine, mon frère tentait désespérément d'en interdire l'accès au soldat ivre, mais ce dernier, d'une solide bourrade ouvrit la porte et avant que Claude puisse s'enfuir le soldat le saisit par le collet et voulu lui faire dire "où mamoiselle était cachée"!
N'obtenant aucune réponse il entreprit d'explorer la maison et voyant la porte d'entrée grande ouvert il comprit aussitôt que "mamoiselle" s'était envolée. Il se saisit alors de Claude, le secoua comme un prunier, puis sortant la baïonnette de son fourreau il lui en appliqua la poine sur la gorge. Evidemment Claude était plus mort que vif!
Pendant ce temps nous étions toujours cachés dans le fossé de l'autre côté de la route. Je ne sais combien de temps nous demeurâmes là mais cela me paru interminable. Toujours sous le coup de la peur Françoise tremblait comme une feuille, quant à moi je me demandais où pouvait bien être Claude?
Le temps passait et nous n'osions sortir de notre cachette. Nous entendîmes alors la voix de Madame Jean qui nous appelait. Je sortais la tête de ma cachette et je l'aperçus devant le portillon de l'entée et qui nous faisait signe de venir. Nous quittâmes aussitôt le fossé et après avoir retraversé la route nous la rejoignîmes. Elle nous dit alors qu'il n'y avait plus de danger.
Que c'était-il donc passé et que faisait Madame Jean là?
(à suivre)