Bonjour tout le monde,
Je vais ici vous informer de mes avancées concernant mon grand-père, Georges Marie Pottier. Né en 1919, il a été résistant à Paris puis s'est engagé dans le bataillon Janson de Sailly, futur 2ème bataillon de choc.
Tout d’abord la raison pour laquelle les informations m’arrivent au compte goutte, c’est que mon grand-père ne parlait pas de cette période à sa famille. Aucune de ses 3 filles n’étaient intéressées par son récit. En revanche, il parlait à ses collègues de boulot, à la Nationale (ex « La Royale » et futur « Gan ») ou il était expert comptable. C’est une source d’informations, mais ce n’est pas la seule. J’exposerais plus tard l’ensemble des sources que j’ai pu contacter.
Il commença donc à travailler à La Nationale. Son supérieur a été mobilisé, et comme il était le seul à avoir les compétences nécessaires, il a dû prendre sa place, faisant ainsi de lui le plus jeune cadre de France.
La guerre de 1940 le surprend. Mobilisé, il part le 8 juin 1940. Il part alors à Limoges pour être habillé et armé. Mais le désordre est tel que rien ne se produisit. Il est embarqué dans les camps de jeunesses dirigés par des officiers désarmés. Les Allemands sont à Paris le 10, l'armistice est signé le 17.
Il rentre en zone occupée par ses propres moyens (à vélo d’après certains recoupements) pour éviter d’être accusé de désertion. Il retourne habiter chez ses parents, rue du Faubourg saint Honoré, et prends contact avec la Résistance. Il appliquera le principe « une main » : chaque résistant connaît au maximum 5 autres résistants, afin de ne pas pouvoir donner trop de noms même sous la torture. Il ne fallait également pas prendre le métro ou il y avait des rafles.
« Papou » faisait de la défense passive (c'est à dire de vérification des fermetures des rideaux contre la lumière des immeubles dans la nuit pour éviter les attaques aériennes) et était chargé, avec un brassard, de surveiller le black-out de l'immeuble de la Luftwaffe. L’uniforme, qui en imposait toujours aux allemands, lui permettait de rentrer à partir du couvre feu quasi librement partout dans l'immeuble, et il ne s'en privait pas semble t il. Il allait prendre des empreintes de tampon qu’il transmettait pour qu'on les reproduise en pomme de terre ou pate modelée, pour faire des faux.
Il cachait des armes dans l'escalier de l'entrée, sur lequel montait le personnel de la Luftwaffe, en cantonnement dans son immeuble.
Il parlait de longues virées à vélo qu’il faisait avec un cageot à moitié rempli d’armes, avec des légumes par-dessus.
Il réussi à éviter le Service du Travail Obligatoire (STO) en étant qualifié de personnel indispensable par le Gan.
Il fut également affecté avec une fausse carte d'identité au centre d'armurerie de la police nationale, avec d’autres résistants, et ont réussi à la déménager sans se faire prendre.
Puis vint la libération de Paris. Il a eu vent d’un recrutement officieux par l’armée au lycée Janson de Sailly. Je fais ici un rapide descriptif car il y a tant à dire sur le 2ème choc.. C’était une nouvelle unité, formée par la Résistance Parisienne. Il fallait s'inscrire au lycée Janson de Sailly dans le XVIème, où l’on su – bien que ce ne soit pas officiel - que l’armée recrutait. Ce sont des officiers qui, sans mandat des chefs de la Résistance parisienne, engagent d’autres officiers et les jeunes résistants de Paris pour continuer le combat. Les FFL ne voulaient pas se transformer en milice, ils voulaient entrer dans l’armée, libérer l’Alsace-Lorraine, poursuivre en Allemagne. Deux officiers audacieux ont réussi à voir le général de Lattre de Tassigny, chef de la 1ère Armée française qui approche de l’Alsace. Il était d’accord pour l’« amalgame ». C’est ainsi que se forme le deuxième bataillon de choc, composé de six compagnies dans lesquelles il y a une majorité d’étudiants. Cinq cents hommes qui vont quitter Paris secrètement, à bord d’une quarantaine de camions et de voitures dans la nuit du 25 au 26 septembre 1944.
Le général de Lattre de Tassigny dit qu’il fallait porter l’effectif à 1000 hommes. Quelques hommes sont retournés à Paris chercher ceux qui étaient restés dans le lycée. Mon grand-père faisait partie du 2ème « départ » environ un mois plus tard. Mais comme le premier avait failli merder (ils ont traversés Paris en camion, mais n’ont pas pu s’empêcher de chanter et se sont fait repérer. Ça ne les a pas aidés dans leur fuite), les éléments souhaitant partir ont dû rejoindre la porte de Charenton, puis jusqu’à Bonneuil sur Marne pour enfin trouver des camions qui les attendaient.
Ce sera ensuite le camp du Valdahon - deux mois de dure formation –. Georges est incorporé dans la Compagnie d’Appui. Le baptême du feu se fait avec la percée nocturne dans les lignes allemandes pour libérer Masevaux (26-28 novembre) au prix de nombreuses pertes et avec le soutien remarquable de la population. Par ailleurs, et ça ce n’est pas écrit dans le livre d’Antoine Béchaux, les éléments du 2ème choc étant des jeunes hommes de bonne famille, ils avaient des parents ayant le bras long. Ces parents ne se sont pas privés d’aller engueuler le général de Lattre.
Le sergent de la section était surnommé « papa » et avait participé à la guerre du Rif.
Georges est grièvement blessé par un tir d’obus allemand, et est laissé pour mort. Une infirmière le récupère, le médecin lui conseille d’appeler un prêtre. Il sera finalement soigné à Marseille « chez les sœurs ». Il y perd une omoplate et conservera toute sa vie des fragments d’obus dans la jambe. Il sonnait aux portiques de sécurité et ça le faisait bien marrer.
Pour le reste du bataillon, c’est l’Allemagne, Karlsruhe, jusqu’au lac de Constance. Il remonte le 2 mai à Paris, sous la neige, puis participe aux festivités de la Victoire le 8 mai (avec du rembourrage sur sa blessure qui lui donnait l'allure de Quasimodo). Il repart avec les copains en voiture, retrouver son régiment base en Allemagne au lac de Constance. Puis c’est le retour a paris dans la caserne de la pépinière, démobilisé, et obtient sa carte d'invalidité. Le 2ème Choc reformera ses rangs pour défiler à Masevaux le 5 août 1945. "De Lattre de Tassigny, ainsi que les généraux Béthouart, de Montsabert et du Vigier, ainsi que le sous préfet du Haut Rhin viendront participer aux festivités. Cette présence en ce jour de tant d'officiels de haut rang dans la ville de Masevaux, à peine 3 jours après la dissolution de la 1ère armée, confirme les privilège du 2ème Choc." (Le 2e Choc, éditions france-empire). Effectivement, faire le déplacement pour ces 1.000 hommes sur les 400.000 environ de la 1ère armée confirme un certain privilège..
De retour à la Nationale, il fait embaucher une infirmière rencontrée pendant ces péripéties, qui deviendra ma grand-mère.
D’après les personnes que j’ai rencontrées, il était qualifié ainsi : « Il n'était pas très grand, mais tiré toujours à 4 épingles, très fin et cultivé, écrivant et dessinant joliment, il en imposait. C’était un sacré personnage!! »
Merci de m'avoir lu, c'est pas fini, j'attends pas mal de retour d'associations / anciens combattants / musées...
Et ci dessous, quelques photos de l'interessé
Première photo : la compagnie d'accompagnement à Masevaux le 5 aout 1945. En commentaire, le "FB d'Harembure" signifie que mon "Papou" a fait ses classes avec lui, aux Francs Bourgeois dans le 75004.. Le lieutenant François d'Harambure, blessé à Masevaux en Alsace 5 décembre ira ensuite en indochine.
Deuxième, photo portrait avec le bérêt qui est parvenu jusqu'à moi. Je prendrais en photo l'intérieur qui me surprends particulièrement.
Et la dernière, 1ère sortie de l'hopital après avoir perdu une homoplate suite à un tir d'obus.