Je ne suis pas certain que "
l'enfer des haies" était très supérieur aux conditions de combat endurées sur la ligne de front, à l'Est, sauf que le "témoin" n'y avait pas été, lui-même, sérieusement engagé. Si l'aviation russe n'avait, effectivement, pas une action aussi prépondérante et aussi intense que celle des alliés en Normandie, l'artillerie de l'Armée Rouge, elle, était omniprésente.
Le secteur de Saint-Lô était "à l'abri" des pièces de marine, alors que dans le secteur de Caen, leurs tirs de gros calibres venaient s'ajouter à la pluie de projectiles, par contre, tous les témoignages confirment que le séjour sur le front de Normandie était "malsain".
Les témoignages allemands confirment que l'activité "principale" consistait, alors, à se terrer au fond des caves des fermes normandes et y jouer aux cartes en espérant un bref répit dans le déluge de pélots, pour aller pisser ou poser culotte! Sauf que ces "répits" correspondaient, souvent, à des attaques terrestres alliées et que bon nombre de troufions allemands s'étaient retrouvés les "fesses à l'air", cernés par l'infanterie ennemie! C'était arrivé à un ami, sorti pour pisser, qui passera les deux années suivantes dans un camp de prisonniers, au Texas!
Le même m'avait raconté une anecdote. Les survivants de sa compagnie, dont lui, avaient eu droit, peu avant, à une distribution de Croix de Fer de 2ème classe, l'officier d'état-major chargé de les remettre avait tout juste trouvé le temps, entre deux rafales de pélots alliés, de descendre de sa Kubel pour leur serrer la paluche et leur filer la breloque - que tous les récipiendaires - des Waffen-SS (!) -, s'étaient empressés de fourrer dans une poche de leur tenue, avant de foncer vers l'abri de leur cave, largement dotée en calva et en cidre (boisson fortement déconseillée pour ses effets sur le transit intestinal!
).
Même les missions de reconnaissance étaient compliquées!
Quelques jours plus tard, débarque un officier subalterne SS, avec un superbe palmarès de planqué, qui n'avait jamais foutu les pieds à moins de 1000 bornes de la moindre ligne de front. A peine arrivé, il traite les débris de la compagnie - ils étaient, encore, entre 30 et 40 pinpins! - comme d'infâmes "sous-merdes", couardes & lâches!...
Vous allez voir, avec moi, çà va changer! ...
Allez, hop, mission de reconnaissance, vite fait, en première ligne (dans le bocage)!
... Euh, Herr Leutnant, ce n'est pas pour vous décourager, mais çà pète grave dès qu'on s'approche un peu trop! ... Nouvelle rafale de qualificatifs dévalorisants, menaces de falot (Conseil de guerre) et les gars, résignés, s'équipent et partent en expédition! Arrivés près de la zone "chaude", ils réitèrent leurs conseils de prudence, se font, encore, une fois, insulter par leur nouveau supérieur, qui, dès lors, prend la tête de la "colonne" pour leur montrer comment se conçoit le "courage", qualité militaire essentielle! Cà n'avait pas raté, l'imbécile inexpérimenté, parvenu, en rampant en haut d'une petite élévation, s'était pris une rafale de mitrailleuse, qui lui avait découpé la nuque de son casque, sa vareuse, son ceinturon et son fute, quasiment selon l'axe des coutures! Fin de la mission de reconnaissance, retour de l'officier, brutalement silencieux, tenant, piteusement, à deux mains ses deux morceaux de bénard, avec des blessures physiques légères mais une très grosse blessure morale ! Ils ne le reverront plus jamais!
On leur avait, aussi, expédié une petite troupe de jeunes Hitlerjugend, de 14-15 ans d'âge, qui, en guise de récompense, avaient décroché l'honneur de "vivre", quelques heures, comme les "fiers" combattants du front. La séance "d'immersion" avait très vite virée, pour les pôvres gamins impréparés, à la panique générale, à la crise de nerfs collective, au mouillage de culotte , à la chiasse incontrôlable, avant qu'on ne vienne les récupérer, pour les rapatrier, dans l'urgence, vers la gare la plus proche, à destination de l'Allemagne!