Le Journal de Montréal
29 septembre 2013
Texte de Dominique LaHaye
Le Royal 22e Régiment est le seul régiment francophone d'infanterie régulier de l'armée canadienne.
`` Ottawa- La création il y a un siècle d'un bataillon permettant pour la toute première fois aux francophones de servir leur pays à l'étranger dans leur langue, au même titre que les anglophones, marque le début d'un temps nouveau au sein de l'armée et de la société.
``Là, tout à coup, on avait une unité ou l'aumônier était un catholique canadien-français et non pas un protestant, ou le commandant était un Canadien-français et ou tous les officiers étaient des Canadiens français. C'était vraiment une révolution. Pas seulement une révolution dans l'armée, mais ça n'existait nulle part dans la société canadienne``, souligne le major-général à la retraite, Terry Liston.
M.Liston, un anglophone originaire de Montréal, raconte qu'il a d'ailleurs dû apprendre rapidement le français lorsqu'il s'est joint au 22e Régiment dans les années 50.
``Je voulais entrer dans ce que je considérais être le meilleur régiment de l'armée canadienne, et le fait que ça parlait français, je ne faisais pas beaucoup de cas de cela. Mais, en arrivant, j'ai eu un choc. Les officiers du 22e étaient gentils avec moi, mais c'était très clair que si je voulais devenir un officier du régiment, il fallait que j'apprenne le français`, se souvient le major-général, qui compte 12 ans de service comme officier de l'infanterie du Royal 22e Régiment.
L'arrivée de ce bataillon canadien-français aura aussi permis à plusieurs francophones de gravir les échelons au sein de l'armée. Sont issu du 22e Régiment le gouverneur général Georges Vanier, les chefs d'état-major de la Défense nationale Jean-Victor Allard, Jacques Dextraze et Maurice Baril et plusieurs chefs de l'Armée canadienne, dont le lieutenant-général Marquis Hainse, qui occupe cette fonction depuis juillet dernier.
Trois québécois du ``22`` font parti du club sélect des lauréats de la Croix de Victoria- la plus haute décoration accordée pour un acte de bravoure et dévouement extrême à son devoir en présence de l'ennemi.
Le bataillon a aussi servi de modèle à la Commission royale d'enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme (1963-1971), qui, dans l'élaboration de ses recommandations touchant la fonction publique fédérale et le secteur privé, cite en exemple le 22e Régiment.
Institution importante
Pour le brigadier-général Richard Giguère, le Royal 22e dont il est issu constitue une ``institution extrêmement importante``, étant le seul régiment francophone d'infanterie régulier de l'armée canadienne.
``Le régiment a grossi. On est parti de ce bataillon initial pour arriver aux effectifs qu'on a aujourd'hui, indique-t-il. On forme un réseau de plus de 6500 personnes. On a des ``22`` qui font parti de l'unité de la force régulière, des bataillons, dont trois à Valcartier, des réservistes qui portent le castor et 3500 membres retraités``, explique l'ex-commandant du secteur du Québec de la Force terrestre et de la Force opérationnelle interarmées.
La participation du 22e Régiment à la Première Guerre mondiale lui a valu 18 honneurs, puis 25 autres lors de la Seconde Guerre mondiale, ainsi que l'honneur de bataille de la guerre de Corée. Les efforts du régiment ont aussi été mis à contribution durant la guerre froide à partir de l'Allemagne, ainsi qu'en ex-Yougoslavie, en Bosnie-Herzégovine, en Croatie de 1992 à 2002 et, plus récemment, de 2004 à 2013, en Afghanistan.
``Depuis notre création, le régiment a participé à toutes les campagnes des Forces armées. Que ce soit lors des guerres, lors des missions de paix, des missions humanitaires et tout dernièrement en Afghanistan``, fait valoir M. Guiguère.
Un honneur à défendre
L'ancien directeur d'histoire et du patrimoine à la Défense nationale Serge Bernier fait remarquer combien, dès le départ, les membres du bataillon étaient sensibilisés au fait qu'ils devaient défendre à l'étranger l'honneur de tous les Canadiens français.
Avant le combat et la prise de Courcelette, en septembre 1916, raconte-t-il, le commandant du 22e Bataillon alors en poste, Thomas-Louis Tremblay, écrit dans son journal: ``Même si nous allons à la boucherie... le moral est extraordinaire, et nous sommes déterminés à prouver que les ``Canayens`` ne sont pas des ``lâcheux``.``
Figures marquantes du 22e R
Major-Général Thomas-Louis Tremblay
Commandant du 22e Bataillon de 1916-1918 durant la Première Guerre. Membre original du 22e Bataillon du corps expéditionnaire canadien (22e Régiment). Promu lieutenant-colonel en 1924. Premier francophone à occuper les fonctions de gouverneur général du Canada (1957-1969). Sa dépouille repose à La Citadelle de Québec.
Trois Lauréats de la Croix de Victoria
Caporal Joseph-Thomas Kaeble 8 juin 1918- Seul survivant de sa compagnie, il enraie une attaque à Mercatel et Neuville-Vitasse, en France. Il décède à la suite de ses blessures.
Lieutenant Jean Brillant 8 aout et 9 aout 1918- Il dirige l'attaque de sa compagnie lors de la bataille d'Amiens, en France. Il mène des assauts avec ses hommes et effectue des actes individuels importants contre l'ennemi.
Brigadier-Général Paul Triquet 14 décembre 1943- Sa compagnie assaille un point fortifié de Casa Berardie en Sicile, Triquet, alors capitaine, isolé du Régiment, avec 15 hommes et trois chars, repousse plusieurs contre-attaque avant l'arrivé des renforts.
Trois chefs d'état-major de la Défense nationale
Général Jean-Victor Allard (1966-1969)
Général Jacques Dextaze (1972-1977)
Général Maurice Baril (1997-2001)
Colonel actuel du Royal 22e Régiment
Major-Général à la retraite Alain Forand
Actuel chef de l'armée canadienne
Le Lieutenant-Général Marquis Hainse
Des célébrations royales
`` Ottawa- Le coup d'envoi des festivités entourant le 100e anniversaire du Royal 22e Régiment sera lancé demain le 30 septembre 2013 à La Citadelle de Québec en présence du premier ministre Stephen Harper. Pour l'occasion, M. Harper se rendra à la maison mère du régiment, ou il sera intronisé à titre de membre honoraire du Royal 22e. C'est le premier chef de gouvernement à être décoré de ce titre au sein des ``Van Doos``. ``Il s'agit d'un grand honneur pour lui, a indiqué l'attaché de presse du premier ministre, Carl Vallée. Ce régiment occupe une place inestimable dans l'histoire militaire du Canada et du Québec``, a-t-il poursuivi.
L'anniversaire du Royal 22e se déroulera sous le thème ``Cent ans de patrimoine militaire francophone``. Les fêtes régimentaires seront organisées jusqu'en octobre 2014, culminant par une soirée de retrouvailles au Centre des congrès de Québec.
``On s'attend à plus de 3000 personnes faisant partie du grand réseau du 22e, donc des membres en service aussi bien que des membres retraités qui vont se rassembler à Québec pour clôturer le centenaire``, souligne le brigadier-général Richard Giguère.
Médias sociaux
Une vaste opération mettant à contribution les médias sociaux sera aussi lancée avec la création d'une page Facebook (Facebook.100r22er) visant à rassembler la grande famille Europe en juillet, des champs de bataille en France et en Belgique jusqu'au palais de Buckingham à Londres ou, en 1940, des membres du 22e Régiment avaient monté la garde et donné des ordres en français.``
Le Journal de Montréal. Montréal, dimanche le 29 septembre 2013. p.20-21.
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