Post Numéro: 44 de Dog Red 25 Mar 2015, 00:19
Pour revenir à l'état d'esprit des Allemands à dater du 7 juin 1944, Antony BEEVOR apporte d'intéressantes réflexions dans son "D-Day".
Ainsi, une semaine après le débarquement : "Les craintes de DEMPSEY que le front s'enlisât se vérifièrent".
Le commandant de la 2nd British Army se trouve donc dans une impasse alors mêmes que les forces blindées allemandes sont seulement en route et qu'il n'a devant lui que les 3 divisions Panzer déjà citées pour avoir rejoint le front les 6 et 7 juin ! Proprement paradoxale de la part de l'agresseur sensément bien préparé.
"La première étude du comportement au feu avait été réalisée en Sicile en 1943. Un MONTGOMERY consterné avait interdit la diffusion du rapport, craignant ses effets sur le moral des troupes, et le carrière de l'officier qui l'avait rédigé en pâtit. [...] Même les officiers de l'Armée rouge étaient certains que six soldats sur dix ne tiraient jamais au combat, ce qui incita l'un de leurs commandants à suggérer que l'on inspectât les armes après coup et que quiconque trouvé avec un canon propre fût traité en déserteur."
Pour en venir aux Allemands en Normandie :
"Ce profil se retrouvait certainement dans les divisions allemandes lambda mais certainement pas dans les unités d'élite de panzergrenadiers et de parachutistes, et encore moins dans la Waffen-SS fanatisée. Celles-ci étaient convaincues de la légitime domination de l'Allemagne et de la 'victoire finale' [...] Cependant le moral du Landser allemand en Normandie était fragile. Le ministère de la Propagande et ses propres officiers lui avaient tant promis. Beaucoup avaient accueilli le débarquement comme une occasion de régler les comptes avec les bombardements alliés et, en écrasant l'ennemi, de mettre la fin à la guerre."
[A propos d'un sous-officier de la Hohenstaufen écrivant le 6 juin] Quand j'ai entendu la nouvelle à la radio aujourd'hui à midi, je m'en suis franchement réjoui par ce que cette invasion nous rapproche considérablement de la conclusion de la guerre. [Quatre jours plus tard, le même sous-officier écrit] Si l'invasion n'est pas repoussée aussi rapidement que certains le croient, nous pouvons tout de même garder un espoir, car les choses évoluent. Et nous avons toujours les frappes de représailles."
Toujours selon BEEVOR, à une mauvaise nouvelle succédait toujours un nouvel espoir, le mensonge grossissant d'autant :
- le mur de l'Atlantique est imprenable ;
- la Luftwaffe et les U-Boote écraseront la flotte d'invasion ;
- une contre-offensive massive rejettera les Alliés à la mer ;
- les armes de représailles forceront l'Angleterre à la paix ;
- les nouveaux chasseurs à réaction anéantiront l'aviation alliée.
Et encore : "Les mystifications incessantes de GOEBBELS agissaient comme une drogue sur le moral du soldat de première ligne mais, quand leur effet cessait, il se retrouvait véritablement épuisé. Pour les soldats SS en particulier, la foi se rapprochait fortement d'une forme d'addiction. Mais pour bien des soldats et des officiers allemands, la Normandie allait confirmer de manière douloureuse les doutes qu'ils nourrissaient peut être sur l'issue du conflit."
Hommage à l'Ardenne de Philippe JARBINET