Forum Le Monde en Guerre

Bonjour à toutes et à tous,
Je lance cette discussion car je me rends compte que beaucoup de personnes de mon entourage (D'un certain age) ne parlent que rarement de ce que fut leur jeunesse, mais quand ils le font, c'est une véritable mine d'or et d'informations qui nous plongent dans le passé.

Ma grand-mère ne m'a jamais parlé du Débarquement. Il faut dire que le quotidien du brestois était de rester en vie. Les bombes alliées volaient allégrement et sans but précis au-dessus de la ville.

Mon dernier instituteur (7ème), avare de discussions hormis le programme scolaire, nous raconta cependant que, jeune maquisard de 16 ans, il alla couper le 5 juin les fils téléphoniques avec son groupe dans la région Sud-Finistère ou Nord-Morbihan.

Il est bien dommage que nos anciens aient été aussi avares de détails même si l'on peut comprendre que vu les terribles et douloureux événements vécus ils n'aient pas eu à cœur de les raconter ... Pour autant pour la mémoire de l'Histoire c'est très important surtout de nos jours !

La vie de tous les jours n'avait rien de bien extraordinaire,c'était le règne de la pénurie,de la pauvreté,nous récupérions tous les déchets pour tenter d'en tirer quelque chose...Nous avions faim,même dans la campagne d'Eure et Loir où nous vivions,les fermiers locaux préféraient vendre aux Allemands:"Quelque soit le prix que vous y mettriez ma p'tite dame,ces Messieurs les Allemands mettront le double" disaient-ils à ma mère,c'était pour l'enfant que j'étais un outrage,une insulte,une humiliation...Je comprends parfaitement qu'il y ait eu des règlements de comptes,ici et là lors de la libération,je suis seulement étonné qu'il n'y en ait pas eu cent fois plus.....
Nous écoutions la BBC..."Ici Londres" tous les jours en prenant soin l'émission terminée de remettre la longueur d'ondes sur "Ici Paris" ou "Breslau"....J'avais des consignes à suivre en cas d'arrestations de mes parents......Me sauver,me cacher et aller chez "Melle Jeanne",une vieille fille ,secrétaire de Mairie.....

Bonsoir à tous, j'ai lancé le sujet mais n'ai pus répondre et je vous prie de m'en excuser. Merci de partager vos témoignages en tous cas.

Bonsoir,

Mes grands-parents ont vécu dans une ferme familiale dans la Manche, à Saint-Pois au sud-est de Villedieu-les-Poeles. La ferme dépendait initialement du domaine du manoir qui se trouvait un peu plus haut. D'une manière logique, des soldats allemands ont élu domicile dans ce manoir.

Peu de temps avant le débarquement , mes grands-parents ont senti les bombes tomber très près (visiblement, l'objectif n'était pas loin). Mon arrière grand-père, un vétéran de Verdun et du Chemin des Dames et qui a été démobilisé en 1919 (!!!), a organisé le creusement d'une tranchée ainsi qu'il l'avait appris à la Première Guerre : en zig-zags. Lors du bombardement, tout le monde est donc parti se terrer dans la tranchée. Le vétéran avait une telle expérience des bombes qu'il savait, au son, si elles allaient tomber près de la tranchée ou non.

Autre anecdote : les allemands, cherchant des Résistants, ont voulu effermer une partie de la famille dans la grange, et la brûler. Mais je ne sais pour quelle raison, cela ne s'est pas produit. C'est pour cela que mes grands-parents n'ont pas porté la Résistance dans leur coeur.

Bonjour ,

Je viens - enfin - d'ouvrir un petit agenda de l'époque 1944 de feu mon beau-père .

C'est écrit tout minuscule surtout un peu avant le débarquement du 06/06 et jusqu'à la fin du mois d'août .

Quelques infos de la situation entre Bayeux où il travaillait et était " coincé " ne pouvant rejoindre Caen où il résidait avec son épouse .

Avec une loupe je vais essayer de lire et transmettre ses notes ....

Merci .
arlou

ma mère, dans le nord, n'avait pas encore 17 ans elle se souvient juste de la pénurie , de la pauvreté, mon grand père était sans emploi, et de la faim , la préoccupation numéro un était de trouver à manger pour une famille de 7, alors ce débarquement.... on en parlait depuis si longtemps....c’était l'arlésienne.

Hiver 43/44,il fait froid,notre petite maisonn'est chauffée que par la cuisinière à bois et charbon( boulets) mais cette matière est très rare,alors mon père déniche un poële à tourbe,c'est à peine si, le feu allumé,l'on peut en sentir la chaleur...Je commence à me trouver réveillé chaque fin de nuit par le bruit des bombardiers anglais qui reviennent de leurs raids massifs.....Je trouve tout cela bien étrange du haut de mes bientôt cinq ans : les Anglais dont mon père me parle passent dans leurs avions,au dessus de moi,pas très loin finalement et pfft! ils s'en vont.Quand je me lève,le matin,je questionne mon père je lui demande si enfin aujourd'hui ils n'ont pas sauté en parachute pour nous libérer,parfois il me dit si ils sont passés et m'ont donné un cadeau pour toi et il me tend en avion en carton avec de belles cocardes . J 'accompagne mes parents pour les courses ; seulement deux commerces dans ce village d'environ 300 habitants : une boulangerie et une épicerie bistrot bazar.Chaque pain est pesé,quand le poids n'y est pas une grosse tranche est ajoutée et pesée aussi pour l'appoint.Il faut amener son litre pour le vin servi au tonneau chez l'épicière.Pour l'huile de colza,il faut aussi venir avec son litre :bien sûr en hiver l'huile est figée et la mesure n' est pas correcte.....Pour le lait,il faut aller,dans une ferme .Mes parent me font avaler chaque matin du calcium en poudre dissout dans un verre d'eau...beurk !!Pour la viande et le beurre c'est la pénurie la plus totale un peu de margarine,quand mes parents parviennent à se procurer du lard,il faut pouvoir le conserver,nous avons une grosse jarre de terre cuite vernissée remplie de sel.....

Une anecdote que mes parents rappelait souvent d'un souvenir d'un qui leur était resté en travers de la gorge : après la Libération la pénurie de denrées alimentaires pénalisait le plus grand nombre et mes parents au cours d'une virée en vélo à la campagne se sont arrêté dans une ferme dans l'espoir d'y acheter des œufs.
Réponse de la fermière : à c't'heure, tous les œufs sont réservés jusqu'à la prochaine guerre !