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Auteur: Pigoreau [ 04 Juin 2021, 09:28 ]
Sujet du blog: Sanglante... (JM Berlière)

Sur le site : https://hsco-asso.fr

Nos lectures
13 mai 2021

Olivier PIGOREAU, Sanglante randonnée. La 8e compagnie ‘Brandebourg’ contre la résistance. Nouvelle édition augmentée, Paris, Konfident, 2021, 446 pages, 24€

De la réédition très enrichie du livre d’Olivier Pigoreau sur le 8e Cie du 3e régiment de la division Brandebourg… Par Jean-Marc Berlière

L’histoire est forcément – comme les autres – une science révisionniste et cumulative.

De nouvelles découvertes archivistiques, de nouveaux témoignages, permettent et imposent de remettre son ouvrage sur le métier, pour préciser, corriger, enrichir une recherche qui semble infinie !

Ce livre en est une magnifique illustration.

J’avais parlé lors de la sortie de la 1ere édition (Nouveau Monde, 2013) du travail méticuleux, rigoureux de ce chercheur qui, le premier, a mis au jour les méfaits commis par la 8e compagnie du 3e régiment de la division Brandebourg, une formation que la mémoire locale confond encore avec des SS, voire des miliciens.

Encadrés par des officiers et sous-officiers allemands, les quelque 200 volontaires français de cette formation ont laissé sur leur passage, des Pyrénées et de la région bordelaise à la Provence et au midi méditerranéen, une trace sanglante semée de crimes, d’exécutions, de vols et de destructions (on peut leur attribuer entre 350 et 500 victimes dans une vingtaine de départements).

Grâce aux témoignages suscités par la première édition, aux archives que lui ont confiées les acteurs ou leurs descendants, à plusieurs cartons mis au jour à Vincennes, au dépouillement des Archives de la Justice militaire et des cours de justice, Olivier Pigoreau — qui est devenu lui-même éditeur – produit un livre très enrichi, notamment des destins qu’il a pu retracer de ces volontaires, essentiellement français (même si on compte quelques Espagnols et Italiens parmi eux), jeunes pour la plupart voire très jeunes, venus de diverses formations collaborationnistes mais essentiellement du PPF et de la LVF.

Ils sont originaires de Paris, de Bordeaux, des Landes, du milieu marseillais. Attirés par le meurtre, le vol, la violence, se battant sans espoir de pardon, ils n’attendent rien de l’avenir et laissent libre cours à leurs instincts. Dans un pays en quasi guerre civile, ils ont des armes, le droit de s’en servir et l’impunité assurée. Issus de tous les milieux – fils de bonne famille, ouvriers, truands, souteneurs – on trouve parmi eux d’anciens communistes, voire des maquisards retournés. Combattant sans merci maquisards et résistants, se faisant passer pour des réfractaires, des résistants recherchés, ils infiltrent les maquis et à l’aide des renseignements de leurs informateurs, des dénonciations et délations, mais aussi des aveux obtenus sous la torture, ils ont fait des ravages dans la résistance du midi

Après leurs dernières exactions commises dans la vallée du Rhône, le Lubéron, les monts de Vaucluse, ils gagnent l’Allemagne et la région de Fribourg. On les retrouve dans le Streifkorps Sudfrankreich puis dans les Jagdverbände, les formations de chasse SS, engagés dans des missions de renseignement, sabotages derrière les lignes avant de rejoindre le Werwolf…

L’auteur piste quelques-uns de ces hommes qu’on retrouve en Amérique Latine ou …Italie impliqués dans les attentats montés par l’extrême droite à l’époque de la stratégie de la tension.

Si j’ajoute que le style et le récit sont remarquablement conduits, on comprendra qu’il s’agit d’un livre à acquérir par tous les passionnés de cette période.

Jean-Marc Berlière.

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