Tyrex a écrit:modifier ma vision de ce personnage abject et opportuniste que fut Hiro Hito.
Je vais VOLONTAIREMENT me faire l'avocat du diable. Il est facile de juger a posteriori des actes d'une personne. Mais Hiro Hito avait il le choix? Avait il le pouvoir necessaire pour empecher ses ministres ou ses generaux de lui dicter des ordres? A-t-il signer de sa propre volonté ou sous la contrainte? Il faut bien voir que l'assassinat politique est monnaie courante au Japon à l'epoque (Yamamoto faillit en etre victime d'ailleurs pour ne pas avoir approuver les vues expansionistes de l'armée). Alors Hiro Hito tout empereur qu'il etait n'etait peut etre pas si intouchable que celà (comme le montre la revolte de jeunes officiers en aout 1945 quand il devient evident qu'Hiro Hito allait capituler).
Je vais faire un parallele osé mais neanmoins historique. En URSS en 1936 le president Boulganine censé etre le premier personnage de l'Etat dut signer la condamnation à mort de son epouse, de sa belle soeur et de son frere. Il le fit les larmes aux yeux car Staline lui avait fait comprendre que c'etait comme celà et pas autrement.
Bref Boulganine avait l'apparence du pouvoir mais en fait n'en avait aucun..sauf celui d'apposer sa signature pour enteriner officiliement les decisions prises par d'autres.
Hiro Hito n'etait peut etre pas tout blanc..mais je pense aussi qu'il ne devait pas etre tout noir dans l'affaire.
Votre argument est intéressant et je m'attendais à y répondre bien avant aujourd'hui. Je vais débuter par une considération. La différence fondamentale entre
Hiro Hito,
Staline et
Hitler est que ces derniers sont des
arrivistes qui ont du initier des actions pour parvenir à leurs fins alors que l'empereur est un
opportuniste. Né héritier d'un empire,
Hiro Hito aurait très bien se contenter de marcher dans les traces de ses ancêtres et se contenter de regner au Japon, à la tête d'un état fort et stable. Il s'est toutefois laissé tenter par le "côté obscur de la force" et a en conséquence porté une oreille très attentive aux voix qui s'élevaient autour de lui pour réclamer une politique extérieure agressive et expansionniste.
En ce qui a trait à l'exercice du pouvoir réel, vous citez la révolte de 1945. Le fait qu'elle ait été rapidement matée sur ordre de
Hiro Hito alors que la moitié du conseil des ministres et la majorité des militaires s'opposait encore à la reddition est un facteur qui penche en faveur de l'exercice réel du pouvoir par l'empereur.
Il y aurait une pléthore d'autres exemples à vous donner mais j'en retiens seulement ici deux qui m'apparaissent probants :
1) Le 26 février 1936, 22 officiers millitaires commandant 1400 soldats et une unité de gardes impériaux se mutinent contre le gouvernement. Ces officiers accusent ce dernier de maintenir les pouvoirs de l'empereur dans un "carcan juridique" et ont pour objectif avoué de renverser le premier ministre et de "restaurer la pleine puissance impériale". Ils assasinent le garde des sceaux Saitô, le ministre des finances Takahashi et le général Watanabe en plus de blesser le chambellan Suzuki. Ils prennent aussi possession du ministère de l'armée et du quartier général de la police.
Les mutins peuvent notamment compter sur la sympathie du commandant de la police, le général Kashii, de l'oncle de Hiro Hito, le prince Asaka, de l'aide-de-camp en chef de l'empereur, le général Honjo, du ministre de l'armée Kawashima et du prince Chichibu, le frère de Hiro Hito.
Lorsque Kawashima et le chef de cabinet de la marine Fushimi se présentent à l'empereur trois heures après le début de la rébellion, ils demandent à Hiro Hito de former un nouveau gouvernement et de clarifier la politique nationale (kokutai). Furieux, ce dernier ordonne plutôt de faire cesser la mutinerie immédiatement par tous les moyens. Kawashima rencontre alors le conseil millitaire suprême, dont la majorité des membres (Asaka, Higashikuni, Araki et Yamashita) sont sympathiques aux mutins. Le conseil tente alors de négocier avec les rebelles,
en dépit de l'ordre impérial.
Hiro Hito refuse ensuite la résignation du premier ministre Okada et proclame la loi martiale le 27. Le 28, voyant que la mutinerie a toujours cours, il convoque Honjo, l'invective et menace de prendre
lui-même la tête de la garde impériale si rien n'est fait. Constatant que l'empereur est intraitable, les dirigeants millitaires lui obéissent alors et le 29, les mutins sont alors arrêtés et traduits en cour en avril. 17 d'entre eux seront fusillés en juillet.
2) Le 16 octobre 1941, Hiro Hito accepte la démission de Konoye. Ce dernier, partisan de la négociation avec les E-U pour la cessation de l'embargo sur les matières premières, n'a plus la confiance de l'empereur. Lors de sa démission Konoye recommande officiellement comme son successeur le prince Higashikuni, oncle de l'impératrice. Cette recommandation était partagée par la majorité des membres du gouvernement et des millitaires, y compris l'amiral Okada, qui voyaient en Higashikuni la seule personne pour mettre un frein aux dissensions entre la marine et l'armée. Soucieux de ne pas impliquer directement la famille impériale dans la direction de l'état, l'empereur rejette cet avis et, se rangeant plutôt à celui de Kido, choisit Hideki Tojo, voyant en lui le meilleur artisan de la guerre. Dans son journal personnel, le frère de l'empereur, le prince Takamatsu, dénonce ce choix et accuse son frère de vouloir lancer le pays dans la guerre. Tojo, déjà haï par une bonne part des millitaires se verra confier de plus en plus de responsabilités jusqu'au moment où l'empereur le laissera tomber. (Il est à noter que Hiro Hito n'hésitera toutefois pas à nommer Higashikuni premier ministre le 17 août 45 quand viendra le temps de signer la reddition et de donner l'image d'un empereur bienveillant...)
Ces deux exemples plus notamment la manière dont Hiro Hito était renseigné sur toutes les activités de son armée ainsi que son contrôle de l'emploi des armes chimiques et bactériologiques démontrent que l'empereur détenait le pouvoir
réel et pouvait l'utiliser
contre l'avis des millitaires quant il le voulait. Quand à savoir s'il n'était pas "tout noir", même le fuhrer ne l'était pas...
Dernière édition par romualdtaillon le 18 Jan 2006, 02:39, édité 1 fois.