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L'évasion de Toulon du sous-marin Casabianca

Histoire et recherches portant sur les Marines de guerre de tous les belligérants, incluant les grandes batailles comme celles de l'Atlantique, de la mer corail, Mers el Kébir, la destruction du Bismark etc.
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L'évasion de Toulon du sous-marin Casabianca

Nouveau message Post Numéro: 1  Nouveau message de alberto  Nouveau message 16 Juil 2011, 10:04

Rappels :

1- A l’origine, ce bâtiment lancé en 1935 devait s’appeler le « Casablanca », mais le ministre de la marine d’alors, un certain Piétri d’origine corse, demanda à ce qu’il s’appela « Casabianca » en référence à une grande famille corse dont de nombreux représentants avaient servi les couleurs de la France et notamment le capitaine de vaisseau Luc-Julien-Joseph Casabianca alors commandant le vaisseau « l’Orient » à Aboukir qui devait mourir le 1er août 1798 lors de l’explosion de ce navire qu’il défendait. C’était à lui que le nom de ce sous-marin était dédié.
2- Le contexte : Après l’armistice conclut le 22 Juin 1940 entre Pétain et Hitler,et la partition de la France en deux zones, la convention concernant la flotte française de combat stipulait que : « La flotte de guerre française - à l'exception de la partie qui est laissée à la disposition du Gouvernement français pour la sauvegarde des intérêts français dans son empire colonial - sera rassemblée dans ses ports d’attache et devra être démobilisée et désarmée sous le contrôle respectivement de l'Allemagne ou de l'Italie. » En outre, le gouvernement allemand s’engageait solennellement à renoncer à toute revendication ou utilisation de cette flotte…Mais on sait ce que valent de telles déclarations !
Mais la puissance de cette flotte inquiétait aussi les Anglais, qui sans en référer à De Gaulle, décidèrent d’en neutraliser une partie importante, mouillée dans le port algérien de Mers El-Kébir, soit par la négociation, soit par la force. Sans possibilité d’entente, les forces navales britanniques ouvrirent le feu sur les navires français au mouillage qui étaient dans l’impossibilité de manœuvrer et de se défendre. S’ensuivit un carnage de bateaux et de marins français qui devait laisser des cicatrices que les dirigeants des deux nations eurent bien des peines à faire oublier par la suite !
Toujours sans en référer à De Gaulle, bien tenu à l’écart des grandes décisions par ses « alliés » anglo-américains, ceux-ci débarquèrent militairement sur les côtes d’Afrique du Nord le 8 novembre 1942.
Cet évènement servira de prétexte à Hitler d’ordonner le 11 novembre (date symbole ?) l’invasion de la zone dite libre et de tout faire pour s’emparer de la flotte française au mouillage à Toulon. (Et quasi désarmée en vertu de la convention d’armistice).

C’est dans ce cadre que se situe l’aventure du « Casabianca ».
C’est ainsi que le 26 novembre au soir, le commandement allemand diffuse vers ses troupes les derniers détails de son opération « Lila » ayant pour objectif de s’emparer de la flotte française immobilisée à Toulon. Sans perdre un instant, le 27 novembre, dès 1 heure du matin, deux groupes de panzedivisions quittent Aix en Provence et Géménos et foncent vers Toulon afin de surprendre les quelques garnisons françaises de faction à l’Arsenal pour tenter de s’emparer des navires. Cependant les nouvelles de la rupture des conditions d’armistice étaient connues des responsables de la flotte. Dès 1941 des dispositions avaient été prises par les responsables de la marine, dont l’amiral Darlan, pour que chaque navire soit à même d’exécuter un éventuel sabordage afin de parer aux tentatives de saisies par les allemands.
Alors que des tirs sont déjà échangés dans l’Arsenal entre les allemands qui vers 4h30 du matin commencent à envahir celui-ci par les portes nord et ouest et les défenseurs et marins français, malgré les ordres donnés à ces derniers « d’éviter tout incident », les équipages s’emploient à ouvrir les trappes de soutes pour couler leurs navires et allumer les mèches des soutes à munitions achevant leurs destructions.
Mais tous n'étaient cependant pas résignés à se saborder sans tenter de s'en sortir plus dignement...
Du côté de la darse des Morillons, à l’est de l’Arsenal les équipages des sous-marins mouillés à cet endroit, s’activent pour tenter, eux, de s’échapper à la faveur de la nuit et de la confusion. Il y a là bord à bord : "Vénus", "Casabianca", "Iris", "Glorieux", "Marsouin", "Diamant", "Pascal", "Redoutable", "Henri Poincaré".
A bord du « Casa », le quartier-maître torpilleur Lionnais de faction à la « baignoire » actionne le klaxon dès qu’il eut entendu les premières détonations.
Tandis que les mitrailleuses crépitent à l’approche des allemands, le commandant L’Herminier, pacha du bord, ordonne de suite : « Larguer partout !» : Il est 5h.05.
A cet instant, les allemands sont à cent mètres et tirent sur le navire !
Les aussières claquent et s’immergent dûment lestées, suit l’ordre : « en avant quatre ! ». De son côté, la « Vénus », sous-main de 600 tonnes qui avait précédé le « Casa » de quelques secondes demande au Cdt L’Herminier de lui laisser le passage car sa vitesse est déjà importante vu son faible tonnage : ce qui est fait. Ça sera donc à la « Vénus » que reviendra la charge de couper le filet barrant l’accès du port des Morillons. Cependant que la « Vénus » réussi à se défaire d’un câble pris dans sa barre de plongée, le « Casa » repasse en tête à exactement 5h.10 , filant 12 nœuds au milieu de la rade, cap sur le grand filet barrant l’entrée de la rade. Il faut entre-temps franchir la passage entre les deux jetées fermant le port des Morillons : si les allemands sont déjà arrivés là : ça risque de chauffer ! Mais rien ne se passe !
Le grand filet doit être manœuvré à l’aide d’un petit remorqueur dont le responsable ne veut rien savoir pour ouvrir le passage sans consignes express de son supérieur : le second du bord alors lui transmet ses propres consignes au bout du canon de son revolver. Il est 5h.25 à cet instant.
Côté ciel, ça se gâte également : des appareils allemands larguent bombes et mines magnétiques ainsi que chapelets de chenilles éclairantes.
Un avion pique et lance une bombe qui tombe non loin à l’arrière à proximité du torpilleur « Mars » amarré à la jetée du Lazaret.
Cette bombe achève de convaincre le chef du remorqueur du filet qu’il lui faut se remuer les fesses : il se décide enfin à ouvrir la passe que le bâtiment s’empresse de franchir. Ouf, il est 5h.30 !
Il faut cependant faire vite et ne pas rester plus longtemps en surface car les bombes continuent de pleuvoir et qu’il reste à franchir la dernière passe de l’estacade contre les vedettes. Des gerbes jaillissent très près sur bâbord. Tant pis, l’ordre arrive : « en avant six » ! (Vitesse max). Puis vient le coup de Klaxon de plongée : les purges sifflent et le « Casa » s’enfonce…Le pacha gouverne à raser la jetée droite pour éviter le milieu de la passe, là où les mines tombent plus denses.
Les ordres se succèdent : « à gauche cinq, quinze mètres, assiette zéro ! ». Ce tout petit angle de barre pour éviter la jetée tout en restant à distance des mines. Quinze mètres seulement, car il y a encore peu de profondeur à cet endroit…Ensuite contournement du cap Cepet à la sonde cependant que les mines sautent dans le sillage par l’arrière. A 5h.37, route au 100, la longue poutre du « Casabianca » est secouée violemment : le compas gyroscopique « décroche » et son sinistre gong d’alarme résonne. Les fiches de TSF jaillissent de leurs logements…Des tuyaux de combustible fuient et le liquide noir se répand dans la cale. Tous espèrent que les soutes extérieures ne fuient pas car la couleur noire du sillage les ferait repérer des avions !
Le sondeur à ultrason est cependant en état et permet de mesurer la profondeur des fonds qui augmente tandis que de nombreuses bombes secouent le navire en fuite.
Durant la traversée de la rade, l’équipage a eu le temps de constater avec joie que leurs collègues de la « Vénus » et du « Marsouin », suivis de « l’Iris » et du « Glorieux » ont pu se défaire de leurs amarres et ont su résister in-extrémis aux tentatives d’invasions pour gagner le large à leur suite malgré les bombes et les mines !
Ainsi que le « Casa » ils peuvent finalement atteindre le large et plonger dans des eaux plus profondes à l’abri des bombardements.
Le « Casabianca » poursuit sa route l’assiette parfaitement horizontale ainsi que l’exige la faible profondeur des fonds marins.
Vers 7h.00, le jour se lève tandis que le sous-marin navigue par quarante mètres d’immersion , route au sud, revenant périodiquement prendre une vue périscopique et tenter de capter les émissions en ondes très longues dédiées aux vacations radios des sous-marins : nul ordre et/ou instruction ne viennent.
Le « Casabianca » restera quelque temps au large de Toulon espérant attaquer quelques navires ennemis ou venir en aide à certains navires amis en détresse : là encore ce n’est que le grand calme de la mer pour toute réponse !
Après en avoir délibéré avec ses officiers et son équipage, le commandant L’Herminier donne l’ordre de faire cap au sud, vers Alger, pour mettre son navire au service de la lutte contre ceux qui ont tenté de le détruire.
C’est donc seul que le « Casabianca » atteindra Alger sain et sauf. Là, n'ayant pu s'identifier, il se heurte aux patrouilleurs anglais, qui menacent de l'envoyer par le fond. L'équipage ne devra son salut qu'à un message en morse envoyé grâce au projecteur situé à l'avant du submersible : « Casabianca. Sous-marin français. Casabianca… » (Lorsque l'officier de liaison britannique demandera à l'Herminier pourquoi il n’a pas répondu aux mots de passe alliés, celui-ci lui répondra « qu'il ne les connaissait tout simplement pas... » Et pour cause !)
Finalement, les alliés réservent un accueil triomphal aux « Free Frenchies ». Le « Casabianca » sera rejoint peu après par leurs deux autres collègues de la darse des Morillons, le « Marsouin » et le « Glorieux ».
Par la suite, le « Casabianca » et son capitaine courageux effectueront d’autres importantes et périlleuses missions, notamment en vu de la libération de la Corse mais cela est une autre histoire…

Source: Ce texte a été écrit sur la base d’un article de journal « l’évadé » retrouvé dans les archives de mon père. Cet article fait référence à un livre dont le titre est CASABIANCA et dont l’auteur est le CV L’Herminier, édité initialement (en 1951, je crois) par les éditions « France Empire », 68 rue J.J. Rousseau à Paris.
J’ai par ailleurs glané quelques infos complémentaires sur Wikipédia et sur un excellent site : http://courrierhl.free.fr/index.htm. sur lequel on peut lire une biographie succincte de cet assez extraordinaire personnage qu’était le CV L’Herminier.

Espérant vous avoir intéressé et dans l’attente de vos critiques et commentaires toujours bienvenus : merci de m’avoir lu et bien a vous ! :)

alberto.
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Re: L'évasion de Toulon du sous-marin Casabianca

Nouveau message Post Numéro: 2  Nouveau message de dynamo  Nouveau message 16 Juil 2011, 22:07

Merci alberto, post intéressant.
Le kiosque du Casabianca est exposé à Bastia.
voici quelques photos :
Fichiers joints
corse bastia casabianca.jpg
corse bastia casabianca.jpg (82.79 Kio) Vu 3141 fois
casabianca.jpg
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bastia casabianca.jpg
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Re: L'évasion de Toulon du sous-marin Casabianca

Nouveau message Post Numéro: 3  Nouveau message de Jumbo  Nouveau message 17 Juil 2011, 10:41

Patrick, je ne vois pas tes photos :shock:
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Re: L'évasion de Toulon du sous-marin Casabianca

Nouveau message Post Numéro: 4  Nouveau message de omega.067  Nouveau message 17 Juil 2011, 11:02

Jumbo a écrit:Patrick, je ne vois pas tes photos :shock:

moi, bien , c'est local surement


 

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Re: L'évasion de Toulon du sous-marin Casabianca

Nouveau message Post Numéro: 5  Nouveau message de Prosper Vandenbroucke  Nouveau message 17 Juil 2011, 11:29

Pas de soucis en ce qui me concerne
Tente une actualisation de la page.
Prosper ;)
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Re: L'évasion de Toulon du sous-marin Casabianca

Nouveau message Post Numéro: 6  Nouveau message de alberto  Nouveau message 17 Juil 2011, 15:18

@ dynamo : bravo pour ces photos très réussies ! :bravo:

Mais j'ai lu quelque part que la baignoire exposée à Bastia comportait peu de pièces d'origine du Casabianca ! ::dubitatif::

Mais l'essentiel n'est-il qu'il y ait écrit "Casabianca" dessus pour témoigner la part prise par ce sous-marin et son équipage pour la libération de la Corse ? lol

Bien à vous tous. :)
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Re: L'évasion de Toulon du sous-marin Casabianca

Nouveau message Post Numéro: 7  Nouveau message de Barbu  Nouveau message 26 Juil 2011, 20:43

bonsoir. L'avantage, en France, c'est que les reliques de guerre ne foisonnent pas, comme ça, on n'est pas embarrasé pour les visiter :tir: . Heureusement que quelques passionnés se sont battus pour que le gouvernement de l'époque conserve un morceau de ce glorieux vaisseau, mais le conserver en entier, pourquoi faire? grossecolere Merci pour les photos et l'article. Amitiés. Bernard


 

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