Daniel Laurent a écrit:
Mais la question est : Qui savait quoi de la Solution Finale, du massacre industriel, en dehors des frontieres du Reich ?
Je pense que les dirigeants occidentaux etaient au courant, mais Francois Delpla semble nous donner un autre point de vue.
Je verse un élément au débat : les ouvrages sur le sujet qui fleurissent depuis deux ou trois ans présentent un tic fâcheux. Ils citent volontiers des télégrammes saisis et décryptés par les Anglais ou les Américains, par exemple sur les activités des Einsatzgruppen, ils montrent qu'avec un peu de jugeote on pouvait comprendre d'après ces textes qu'un massacre de masse était en cours et ils en déduisent directement que les gouvernements concernés ont enterré l'information. Or la rigueur la plus élémentaire voudrait qu'on poursuive le travail au niveau des ministères puis des conseils gouvernementaux et comités divers, pour voir si vraiment les responsables ont reçu des synthèses adéquates et s'ils ont réellement décidé de les négliger.
L'absence même de cet échelon d'analyse est un indice que ces synthèses n'ont pas été faites ou sont restées éparses et vagues. Il y a eu des informations, elles ont donné lieu à certaines réactions comme la déclaration de Noël 42, mais il n'y a pas eu un véritable suivi de l'affaire. Pour deux excellentes raisons : 1) Hitler était considéré comme le maître des territoires qu'il occupait, et dans lesquels on pouvait tout au plus envoyer des missions de renseignement ou de sabotage ponctuel; 2) plus ses crimes étaient énormes, plus le remède unique envisageable était de lui faire perdre la guerre.
Une troisième raison, du moins aux yeux de Churchill, était le chantage même, dont j'ai parlé précédemment, par lequel le nazisme quémandait sa survie : on négocie, on s'entend contre les Rouges et naturellement j'arrête le massacre.