Attaquer Auschwitz ?
Tim Larribau
L’absence de réaction des Alliés face à ce terrible drame humain que fut la solution finale peut être difficilement comprise par des personnes peu au fait de la situation militaire de l’époque. Attaquer Auschwitz était-il une solution ?
Toute opération nécessite avant tout du renseignement. Il est nécessaire d’identifier le commandement et la chaîne de commandement, recenser les sites concernés, de se documenter sur les effectifs (gardes, personnel technique et administratif, prisonniers, etc…) , les dispositions géographiques, les réseaux de communication électriques et terrestres. Il faut disposer de plans à l’échelle, de photographies aériennes et de renseignement humain Tout ceci vise à comprendre le système concentrationnaire dans son ensemble et dans ses rouages. Il sera ensuite possible d’identifier les faiblesses du système et de les exploiter. Cette recherche de renseignement est en soi un travail colossal, qui viendrait s’ajouter au travail de renseignement habituel sur les forces armées allemandes.
Une fois le renseignement obtenu, il faut envisager les modes d’action. Avant septembre 1943, date du débarquement allié en Italie, il n’y a pas de troupes alliées sur le sol européen. Il faudra donc agir par voie aérienne.
Deux modes d’actions sont, en théorie, envisageables.
1/ Le bombardement:
Les camps étant situés profondément en Allemagne et en Pologne, il faut envisager des vols très longs au-dessus du territoire ennemi, sous la menace permanente de la défense anti-aérienne et de la chasse allemandes. Il faut d’ailleurs attendre le mois de février 1944 pour que l’aviation allemande commence à faiblir. Jusque là et même plusieurs mois après, la liberté d’action dans le ciel allemand n’est absolument pas acquise et toute incursion est très dangereuse. En octobre 1943, les américains perdent 60 bombardiers lors du raid sur Schweinfurt. En mars 1944, les britanniques perdent 108 appareils lors d’une frappe sur Nuremberg.
La précision des bombardiers est un vrai problème. La méthode de bombardement préconisée à l’époque est le « carpet bombing », un bombardement à haute altitude sur une vaste zone avec une probabilité de coup au but très réduite. Schématiquement, pour avoir une chance d’atteindre un objectif précis et avec la meilleur précision possible, il faut « arroser » une zone d’au moins 2000 mètres carrés, autrement dit, l’intégralité du camp de concentration.
Enfin et surtout, le bombardement ne résout rien et peut même aggraver la situation. Bombarder les chemins de fer qui mènent aux camps bloquerait les trains de déportés mais aussi le ravitaillement en vivres et en eau. Comme nous l’avons vu, il n’est techniquement pas possible de détruire les chambres à gaz sans massacrer le camp entier.
Bref, le bombardement n’est pas une option.
2/ Des opérations aéroportées :
Les opérations aéroportées sont une nouveauté très peu expérimentée. Les allemands ont eu quelques succès en 1940 mais ils ont eu de sérieux revers en 1941 en Crète. On le verra par la suite en 1944, les opérations aéroportées sont très hasardeuses. Les parachutistes peuvent être éparpillés, et incapables d’action concertée. L’armement des parachutistes est très léger, peu de mitrailleuses, pas d’artillerie. Le ravitaillement est crucial. Pas question d’envoyer des parachutistes sans une logistique viable pour assurer leur survie.
Inversement, les camps sont assez lourdement armés. Un camp comme Auschwitz compte entre 2000 et 3000 gardes disposant de mitrailleuses sur de nombreux miradors.
Pour envisager une action viable, il faut une division aéroportée entière (10 000 hommes) pour venir à bout d’une seule garnison. Même si l'opération initiale réussit, avec de très lourdes pertes du côté allié, il faut anticiper la situation sanitaire dans le camp qui va très rapidement (2-3 jours) tourner à la catastrophe, sans compter une éventuelle contre-attaque allemande. Il faut rappeler qu’en comptant les camps et leurs annexes, on parle d’une centaine de sites distincts, répartis sur toute l’Allemagne et la Pologne. Les moyens nécessaires pour traiter l’ensemble des camps sont très loin d’être disponibles. Bref, l’opération aéroportée qui, en théorie, est la meilleure, n’est pas non plus une option viable.
En définitive, tout officier d’état-major sérieux aurait préconisé de ne pas agir sur ces objectifs et de se concentrer sur la racine première de la solution finale, l’Allemagne Nazie. Aujourd’hui même, face à un drame similaire dans un contexte similaire, les états-majors modernes, même avec la technologie moderne, feraient sans doute le même choix.
Pierre.S a écrit:Sur le premier lien, la photo du 21.12.44, en bas à gauche: "bombs craters", c'est la même photo que celle postée le 5.1 à 07.16UTC
Sur le 2ème lien, la photo du 13.09.44, en haut à gauche: "US 500Ib HE bombs", la même photo que celle postée Le 4.1 à 21.09UTC
Pierre.S a écrit:Est-ce à dire que les bombes visibles sur la 1ère photo postée sont un montage?
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