Post Numéro: 2 de Nicolas Bernard 28 Oct 2008, 15:49
Le fait acquis est que le P.C.I. voulait la peau de Mussolini, et l'a obtenue, sachant que tout semble s'être déroulé comme si les autorités gouvernementales italiennes se dessaisissaient du dossier.
Sa mise à mort expéditive, qui s'accompagnera d'une sinistre profanation de son cadavre, amenènera en effet bien des dirigeants italiens à pousser un soupir de soulagement. Un procès aurait ramené à la surface bien des secrets enfouis par les uns et par les autres depuis 1922, comme l'a affirmé le général Cadorna : "le procès de Mussolini aurait été le procès de la politique italienne depuis vingt ans", et d'ajouter qu'"il eût été très difficile de séparer la responsabilité d'un peuple de celle de son chef".
Au regard des réalités politiques italiennes de 1945, l'exécution sommaire du Duce, de même que les circonstances lamentables de son arrestation (déguisé en Allemand !) et de l'exhibition de son cadavre, constituent un puissant symbole d'un genre de "bond en avant". En fusillant le dictateur, l'Italie n'a pas à regarder son passé en face, et peut se féliciter d'avoir fait, d'une certaine manière, justice.
Par la suite, Churchill, comme vous le signalez, a été suspecté. Le Duce en fuite transportait avec lui des documents confidentiels, et de mémoire il me semble bien que Churchill ait pris des "vacances" en Italie du Nord après la guerre pour retrouver ces documents. De là à accuser l'ex-Premier britannique d'avoir commandité l'assassinat, il n'y a qu'un pas... que certains, contre toute prudence, ont allègrement franchi.
Dans les années 90 en effet, un historien italien prestigieux, Renzo de Felice, grand spécialiste du fascisme mussolinien, a annoncé la parution de documents en provenance des archives "soviétiques". Ces pièces, à l'en croire, allaient "établir" que Mussolini avait été victime des Britanniques, Churchill tenant à supprimer un témoin gênant, s'agissant des relations anglo-italiennes de 1922 à 1945. Il est vrai que le Vieux Lion avait surtout cherché à pacifier la Méditerranée dans les années vingt, et dissocier le Duce du Führer, dans les années trente, le second étant considéré comme bien plus dangereux que le premier. D'où quelques yeux doux à l'égard du dictateur italien, au nom de cette Realpolitik qui le conduira, pendant la Deuxième Guerre Mondiale, à courtiser un autre tyran, en l'occurrence Staline, toujours pour éliminer le plus grave péril de l'heure.
Malheureusement, ces documents n'ont jamais vu le jour. Et pour cause, puisqu'ils n'existaient pas. Dommage pour l'historien italien, dont l'imprudence a porté un coup assez net à sa réputation d'excellence, même si je vois là davantage un impair de sa part qu'un véritable signe d'incompétence, compte tenu de ses remarquables travaux sur l'ère fasciste en Italie.
Bref, malgré quelques questions qui portent sur deux ou trois détails, l'exécution de Mussolini est bel et bien à mettre au "crédit" des communistes, lesquels ont sans doute bénéficié d'une approbation tacite des autres forces politiques italiennes de l'époque. Et comme s'agissant de Coventry, de Pearl Harbor, du suicide de Himmler et j'en passe, on a encore beaucoup "prêté" à ce pauvre Churchill...
« Choisir la victime, préparer soigneusement le coup, assouvir une vengeance implacable, puis aller dormir… Il n'y a rien de plus doux au monde » (Staline).