Page 1 sur 1

Lucien Janssoone Resistance

Nouveau messagePosté: 30 Avr 2013, 17:19
de dominord
Bonjour à tous, nouvelle bouteille à la mer.. ?
Quelqu'un aurait il une ou des infos sur Lucien Janssoone de Caudry.
autre que la page wiki !
Cela rejoint un autre post dans lequel je demandais si quelqu'un avait des infos sur le Cdt Richez de Le Cateau. (ils ont été arrêtés à peu près en même temps et à priori parceque dans le même réseau...)
cordialement
Domi

Re: Lucien Janssoone Resistance

Nouveau messagePosté: 30 Avr 2013, 17:57
de Prosper Vandenbroucke
Bonjour Dominique,
A-tu connaissance de ceci?:

lucien_janssoone.pdf
(50.52 Kio) Téléchargé 43 fois


Amicalement
Prosper ;)

Re: Lucien Janssoone Resistance

Nouveau messagePosté: 30 Avr 2013, 18:03
de dominord
Hélàs oui, :roll: :roll:

c'est exactement le même que la page wiki, sauf que c'est écrit en Belge, j'ai réussi à traduire, ::victoire::

et il y a quelques guirlandes déco ::ok je sors::

Lucien Janssoone Resistance

Nouveau messagePosté: 03 Mai 2013, 11:44
de dominord
Bonjour
Je viens d'obtenir un récit de témoignage d'un Caudrésien sur ce sujet précis. comme il ne figure pas sur le net à ce jour, je le porte à votre connaissance afin qu'il puisse aider d'autres personnes. Bien entendu tout n'est pas intéressant au 1er chef pour notre sujet, mais je ne fais pas de coupure... un admin saura peut-être présenter le document différemment.
d'avance merci
Domi
-----------------EXTRAIT DU BULLETIN MEMOR N° 29-30 ---------

AUGUSTE LEMAIRE
SUBSISTANCE ET RESISTANCE 1939-1945

Avec l'âge, les souvenirs les plus lointains reviennent à la surface de la mémoire. Après une vie professionnelle accaparante et tourmentée, le loisir de la retraite fait ressurgir le passé et le désir de témoigner devient progressivement une préoccupation de devoir, une contribution modeste qui est un fragment d'héritage pour mes enfants, mes petits-enfants et tous ceux qui s'intéressent à cette sombre période.
A la réflexion, mon parcours sous l'Occupation est étroitement lié au vécu de mon enfance et d'une jeunesse qui a soudainement basculé dans le monde adulte.
Autant commencer par le commencement. Je suis né le 27 mars 1920 à Caudry, rue J. Clément puis, à l'âge de sept ans, je suis venu habiter au 17 rue Osbert. Parmi mes premiers souvenirs d'enfance, une boite de conserve faisant office de ballon et dans laquelle mon copain Lucien GRENIER et moi-même tapions pendant des heures. A six ans, j'étais rentré à l'école primaire de la rue E-Zola où je me révélais assez doué pour les études. J'obtins le certificat d'études avec la mention bien puis le concours des boursiers avec, à la clé, une allocation de 275 F. Ma mère avait contacté le curé pour avancer d'un an ma communion solennelle, à seule fin de m'éviter trois épreuves dans la même année. Après avoir essuyé un refus, en femme de caractère, elle décide purement et simplement que je ne la ferai pas.
Le football était ma passion. A dix ans, je jouais déjà sur l'ancien stade du Bassin des Eaux. Mon instituteur Jules HURET ne parlait que foot avec l'un de ses élèves prénommé Philippe et je me jurais qu'un jour c'est moi qu'il viendrait voir jouer.
Après le certificat d'études, je "sautais" la classe du cours supérieur pour me retrouver au cours complémentaire à quatorze ans. C'est là que je fis connaissance de mon nouveau directeur, M Janssoone qui eut par la suite une grande influence sur moi.
Puis mon père mourut et mon tuteur me plaça à l'Institution Notre Dame à Valenciennes, un établissement réputé en son temps pour la qualité de ses études secondaires et .... sa sévérité. N'ayant pas fait ma communion, inutile de dire que je ne faisais pas partie des élèves les mieux vus. Après les études, le sport était ma principale occupation et je devins capitaine de l'équipe de foot. En même temps durant mes deux années de présence dans l'institution, j'en profitais pour rafler, en escrime, les épées d'honneur. Je passais mon brevet supérieur avec la mention bien et mon cycle primaire étant terminé, je quittais sans beaucoup de regret cette pension qui pourtant m'avait permis de faire connaissance avec "mon pote" Jean Lefebvre le futur acteur avec lequel je liais une solide amitié.

Puis mon tuteur me fit entrer en 1936 à HEC-Lille, rue Nicolas Leblanc où je disposais certes d'une chambre, mais pas d'argent ou du moins juste assez pour payer mon train. Aucune sortie n'était financièrement possible dans Lille, j'avais bricolé un poste à galène pour meubler mes moments de détente.

A seize ans et trois mois, un dimanche de Pentecôte, je faisais mon entrée au Star Club de Caudry en équipe professionnelle de 3° division. Le Racing Club de Paris nous envoyait des joueurs en renfort, tels Bohé, Falise. Cette expérience dura un an puis le Star Club quitta le professionnalisme et mon ami Lucien GRENIER vint me rejoindre au poste d'arrière-droit, moi-même jouant arrière-gauche, pour former cette fameuse "ligne Maginot chère au Président SERVIN et au Docteur DROMBRY le dirigeant pour lequel j'avais un profond respect. C'est à cette époque que Louis Sandras - dont le stade de Caudry porte aujourd'hui le nom - me proposa de partir avec lui au Racing Club de Paris. Malheureusement, je dus refuser car je devais aider ma mère à élever mes trois frères.

Mon tuteur qui possédait une usine textile à Honnechy m'embaucha en qualité d'employé de bureau. Pour simplifier les transports il m'avait loué une chambre dans une auberge du Cateau-Cambrésis située à environ 5 km de la gare ou je me rendais tous les matins à 5h30. Arrivé à Maurois, je gagnais Honnechy à pied. Le coût de ma chambre et de ma pension du soir était supporté par mon employeur qui le prélevait sur mon salaire. Il me restait environ 1.000 F auxquels venaient s'ajouter quelques petites primes de foot dominicales, le tout destiné à ma mère.

Je rappellerai qu'en 1936, la crise économique sévissait durement et qu'il était difficile, malgré mes diplômes de trouver du travail. Je ne pouvais donc guère espérer mieux en matière d'emploi. Mais je n'abandonnais pas l'espoir de me rapprocher de Caudry et une opportunité se présenta à la fin de l'année 1939 : une usine textile de Fontaine-au-pire, les Etablissements Waxin offrait un poste de travail précédemment occupé par un "mobilisé". Ma candidature fut retenue. Je me souviens de ce terrible hiver 39-40 où le thermomètre descendait à moins 20°C et la hauteur de neige atteignait 50 cm. Près de chez nous, stationnait une division motorisée et dans les popotes, on y distribuait le vin par bloc ! Jusqu'en avril 1940, ma vie était réglée par l'horloge : je partais à pied le matin à 6h30 avec la gamelle pour le midi et je rentrais le soir à 20h30.

Puis vint le mois de mais 1940. Le jeudi 15, le docteur TREMBLIN me demanda si je voulais bien conduire, avec sa voiture, sa femme et son fils dans le département de l'Eure. Cette mission accomplie, j'étais de retour à Caudry le 17 mai vers 11 heures du matin. L'expédition avait été assez pénible, la nuit surtout car il avait fallu rouler avec les phares occultés et se faufiler parmi tous les évacués et les soldats qui se repliaient dans une pagaille indescriptible.

Enfin et traversant la place de Caudry je vis, entre la mairie et le café Griffart, les effets de la première - et probablement la seule - bombe tombée : un corps éventré allongé sur le parquet du bistrot. Je conseillai immédiatement à ma mère de quitter la ville avec mon frère René, les deux autres enfants ayant déjà été évacués par mon tuteur.
Je venais de prendre connaissance de ma feuille de route. J'étais mobilisé, avec Rennes pour affectation .En pleine débâcle ! Il me fallait obtempérer, sans illusion peut-être mais avec la détermination de répondre à l'appel de la Nation. Mon tuteur avait laissé à ma disposition une petite camionnette que je décidais d'aller récupérer à Maurois avec mon ami Maurice TELLIER. Naïvement je pensais encore que ce véhicule, un bien particulièrement précieux dans le contexte que nous vivions, me permettrait de rejoindre mon unité à Rennes.

Nous fûmes une première fois mitraillés par les stukas à la sortie de Caudry. C'était plus qu'impressionnant car nous ne connaissons pas ce type d'appareil ni les dégâts qu'il pouvait occasionner avec une grande précision. A la Chaussée Brunehaut, un spectacle effroyable s'offrait à nos yeux : toute une colonne hippomobile avait été anéantie ; avec la chaleur le ventre des chevaux avait doublé de volume. Nous comprîmes vite qu'il était inutile de persévérer dans nos projets. Les stukas ratissaient toujours, plongeaient sur tout ce qui bougeait et après avoir abandonné la camionnette, nous avons fui à travers les pâtures.
Rentré à Caudry, je retrouvais ma mère, mon frère et trois copains demeurant dans ma rue. Nous décidâmes de partir sans savoir que nous n'irions pas très loin. A l'angle de la rue Osbert et la rue H.Barbusse, quatre soldats allemands entourèrent notre groupe, nous paraissant assez féroces, mais surtout ivres. Ils nous ordonnèrent de nous placer contre un mur, les bras en l'air après avoir laissé de coté ma mère et mon frère en spectateurs. Trois soldats nous tenaient en joue tandis que le quatrième entreprit de nous fouiller. Par malchance, l'un des frères Paringaux possédait un énorme couteau de boucher, ce qui n'incitait pas à l'optimisme. Cet épisode dura environ un quart d'heure et après maints palabres, ils décidèrent de nous conduire à la Kommandantur le lendemain et nous enfermèrent dans une cave de personnes évacuées. Un soldat fut chargé de nous surveiller pour cette nuit là, particulièrement longue. Je guettais ce qui se passait à l'extérieur par un soupirail et à 6 heures du matin je ne vis plus les bottes de notre gardien. Immédiatement je fracturai le cadenas et nous rentrâmes tout simplement chez nous.
A Caudry, il restait environ 500 habitants sur les 15.000 que comptait la ville : plus de boulanger, plus de boucher, nous n'avions plus de réserves et la faim commençait à nous tenailler. Je vis passer devant chez moi des personnes qui avaient les bras chargés après avoir pillé des magasins : ces scènes étaient filmées par des caméras allemandes, des images destinées à la propagande allemande sans doute pour prouver en Allemagne que le peuple français était affamé.
Et pourtant, il fallait bien s'approvisionner et recueillir quelques nouvelles pour juger de l'évolution de la situation. Je décidais donc de descendre jusqu'à la place de Caudry. Arrivé rue Centrale, je vis une quinzaine de soldats français provenant d'une batterie de DCA de Feignies. Ils entourèrent la mairie en courant et allèrent se réfugier dans une cour du commissariat, plus précisément sur le côté gauche, dans la deuxième cave exactement. C'est alors qu'un tank allemand qui avait pris position au coin de la rue d'Alsace et de la place tira un obus qui atteignit le refuge des soldats français. Aucun survivant ! Il ne me restait plus qu'à poursuivre mon chemin.
En remontant la rue de St-Quentin, mon attention fut attirée par ce qui se passait au café de la Victoire : deux soldats allemands pillaient la cave. Il faisait chaud, ils avaient pas mal consommé et avaient ôté leur casque. J'étais comme enragé et je fus envahi par une soudaine pulsion de vengeance. Je profitais de leur ivresse pour les assommer. Ce n'est qu'après que je réalisais combien cet acte était futile mais combien il m'avait soulagé. Je n''avais pu résister à l'envie de leur casser la figure surtout après avoir vu, devant le café leur side-car et à proximité les corps de quatre soldats français.
Après avoir remonté la rue de St-Quentin, je me rendis à la Bourse du Travail où je rencontrais quelques personnes qui n'avaient pas évacué. C'est là que nous décidâmes d'installer des dépôts de pain dans différents secteurs de la ville et c'est ainsi que je devins chef de dépôt, justement dans la maison ou j'avais été enfermé lors de ma première nuit d'occupation. L'armée allemande en gérait l'approvisionnement. Chaque ration de 240 g de pain noir que nous appelions "brout" provenait de la COOP de la rue de Ligny, réquisitionnée pour fabriquer tout le pain de troupes d'occupation.
Puis les réfugiés commencèrent à rentrer dont mon ancien directeur d'école M. JANSOONE qui fut chargé de réorganiser l'Education Nationale dans le secteur. Connaissant mon parcours scolaire et les diplômes que j'avais obtenus, il me proposa un poste d'instituteur à Béthencourt, le titulaire étant prisonnier. Le 27 juin 1940. Je faisais mes premiers pas dans le monde enseignant. Le salaire n'y était pas élevé mais je pus néanmoins m'acheter un vélo d'occasion pour me déplacer.
Lucien JANSSOONE avait eu connaissance de mes démêlés avec les allemands lors de l'invasion. A ses yeux j'avais sans doute acquis un brevet de patriotisme et j'étais pourvu d'un capital de confiance. Dès 1940, il me demande de participer à l'un des premiers réseaux assurant l'évasion des aviateurs anglais abattus. J'appris bien plus tard que ce réseau s'appelait SHELBURN et que ses activités furent par la suite reprises au sein de l' OCM lorsque le mouvement fut créé.

Au sein de l'OCM, Lucien JANSSOONE commandait sous le nom de Capitaine Jean. Je devins son adjoint à Caudry sans en savoir beaucoup plus sur l'organisation de résistance car tout était bien cloisonné. Mon rôle consistait à accueillir les aviateurs qui étaient cachés en divers endroits. Le soir, dans Caudry, nous les faisions même sortir pour leur faire prendre l'air.
En dehors de mes fonctions d'instituteur, les activités ne manquaient pas. Pour nourrir ma famille, j'utilisais le système D. C'est ainsi que tous les jeudis, j'entassais dans les sacoches de mon vélo une quarantaine de kilos de tissu, parfois des corsages et je me rendais à Ronchin au magasin "Le petit Louvre" où j'échangeais cette marchandise contre 40 kg de conserves.
Le marché noir sévissait à Caudry, peut-être plus qu'ailleurs, en raison du trafic de tulle. Pour survivre et améliorer l'ordinaire, il m'arrivait de faire comme tout le monde. Le tulle était conditionné dans des ballots assez volumineux, emballés dans du papier ; cette marchandise était destinée à l'Afrikakorps. Je me rendais donc chez mon oncle qui était négociant et me remettait des pièces de tulle d'un mètre. Je confectionnais des paquets dans lesquels je plaçais des briques pour augmenter le poids. Fraude pour fraude ... je portais les colis rue d'Alsace à Caudry, chez Blairon, un négociant. J'ai appris par la suite que Blairon avait lui aussi résisté. Il y avait à l'époque, à l'emplacement de l'actuelle salle des fêtes de Caudry, l'atelier de mécanique KNECHT qui faisait de la réparation sur les moteurs de la Luftwaffe dont les avions étaient basés sur le terrain d'Epinoy-Cambrai. Peu avant la libération, l'équipe de Blairon a mis le feu à cet atelier.
Je dû rapidement cesser le marché noir du tulle car j'avais entendu que la supercherie était découverte.

En Juin 1942, je mis fin à mes activités d'instituteur et j'acceptais l'emploi de directeur commercial que M Alcide LAIGLE m'avait proposé. Il tenait un commerce de détail, 35 rue de la Paix à Caudry. C'est là que je fis connaissance de sa fille qui allait devenir ma femme et qui, de son côté ravitaillait des clandestins réfugiés dans la ferme d'Haulicourt.
Au fil des mois, ma situation devenait de plus en plus inconfortable : Du début de la guerre à Août 1943, j'ai échappé à huit rafles de réquisition de main-d'œuvre.
Par la force des choses, je dus restreindre mes contacts avec M Janssoone, tout en continuant d'ailleurs de lui apporter une aide pour les aviateurs alliés.
Parmi mes meilleurs souvenirs, l'organisation d'une kermesse à Caudry, afin de recueillir des fonds pour les prisonniers de guerre. C'était une initiative de M Janssoone. Il m'avait demandé de prendre contact avec mon copain de football, Peter OWZARZACK qui était interprète à la Kommandantur . Nous avions "emprunté" un camion allemand et nous nous sommes rendus à Vervins dans l'Aisne dans une ferme où nous avions "réquisitionné" 21 sacs de blé, une denrée plutôt rare avec laquelle nous avons fabriqué du pain blanc pour la kermesse. En complément, j'avais fait le tour des fermes environnantes afin de récupérer de quoi organiser une "foire aux volailles" toujours pour cette fameuse kermesse qui eut un succès fou au stade Louis Sandras.
Tout s'effondra en septembre 1943, M. JANSSOONE m'informa qu'il avait appris d'un officier allemand, l'arrestation du Commandant RICHEZ, responsable du réseau OCM à Le Cateau. On lui avait vivement conseillé de quitter la région. L'origine de l'information provenait sans doute du Capitaine KARNOP , d'origine alsacienne, affecté à Cambrai. Mais j'ai su tout cela bien après. J'étais connu des services allemands mais je ne connaissais pratiquement rien des activités multiples de M. Janssoone. Ma seule mission consistait à aider les aviateurs anglais à Caudry mais je ne les escortais pas vers d'autres destinations. Je savais simplement qu'ils étaient dirigés vers Compiègne chez Madame Balési, ancienne résistante de la guerre 14-18 qui tenait un dancing avant-guerre à Caudry et était partie vivre dans l'Oise.
Le commandant RICHEZ avait été arrêté le 3 septembre 1943. Dès le lendemain nous avions été mis au courant et il nous fallait prendre une décision. Mon futur beau-père possédait un château du coté de Gisors, près d'Hérouval et proposa à M.Janssoone d'aller s'y réfugier mais ce dernier refusa, ne voulant pas quitter sa femme et son fils, eux aussi impliqués dans l'action clandestine.
Non seulement, j'étais repéré mais j'avais eu un accrochage avec un soldat allemand qui s'était montré entreprenant avec ma mère. Entretemps, mes futurs beaux-parents, plus fortunés que ne l'était ma famille, étaient venus demander ma main à ma mère ! Ma décision était prise : je partirai avec ma futur épouse dans l'Indre à Mézière-en-Brenne. C'est là qu'un copain, instituteur, avait rejoint les Chantier de Jeunesses. C'est là que je devais rester neuf mois.

A mon arrivée, je fus pris en charge par le chef CASY, un homme de confiance qui partageait nos idées et pouvais gérer le problème. Il m'emmena tout d'abord à Chatelguyon pour régulariser ma situation. C'est ainsi que j'obtins une vraie-fausse carte de travail au titre du STO. La date de mon arrivée aux Chantiers avait été anticipée. En réalité, j'y étais arrivé le 13 septembre 1943 après un voyage bien mouvementé et un contrôle allemand à Tours qui avait failli tourner mal.
Affecté au Groupe 34 des Chantiers à Mézières-en-Brenne, j'étais commis et je m'occupais de la paye. J'étais au PC, dans un bureau, en tant que trésorier payeur et tout autour, dans la nature il y avait différentes cabanes qui abritaient des jeunes appelés par Vichy pour y faire un service militaire sans armes et fabriquaient ... du charbon de bois !
J'avais une chambre à Mézières située à coté de celle où étaient logés les quatre soldats allemands chargés de la surveillance du chantier. Ils buvaient beaucoup et j'aurais pu m'en débarrasser facilement. Seule la crainte de représailles sur le village pouvait m'en empêcher.

Après le débarquement allié, les gars des Chantiers se dispersèrent, la plupart dans les maquis. Je réussis à regagner Caudry vers la fin juin. L'atmosphère était tendue. Tout le réseau était tombé, M. Janssoone avait été arrêté le 14 décembre 1943 après Laure RICHEZ et Josiane THURU au début novembre. Condamnations et déportations avaient suivi.
De retour dans le Nord, je me retrouvais en situation irrégulière. L'ami Peter OWZARZACK qui, par sa connaissance de la langue allemande circulait facilement dans les organismes ennemis, me conduisit à La Bauvoisienne, service de recrutement de main-d'oeuvre situé à Beauvois-en-Cambrésis ; nous parvînmes à subtiliser un cachet allemand pour tamponner ma carte de travail. Je devenais ainsi un employé modèle.
Le jour de la libération de Caudry, je me retrouvais dans le bureau de Monsieur JANSSOONE, rue Zola, dans son école. S'il avait su, je pense qu'il aurait été fier de moi. J'étais FFI, chef de groupe de huit hommes, désigné à ce poste par le Commandant MAILLET qui avait eu bien des frictions avec les résistants FTP. Il nous donna l'ordre de ratisser Caudry et les environs pour ramasser tous les soldats allemands qui erraient, sachant que pour eux tout était fini. Nous en avons rassemblé plus de trois cents dans l'école de la rue Zola. L'opération prit plusieurs jours. Je me souviens aussi que, dans cet établissement scolaire, une salle de classe avait été réservée aux femmes qui avaient été tondues en place publique.
Huit ou dix jours plus tard, le Commandant MAILLET décida le transfert des prisonniers sur Cambrai. Nous les fîmes montés dans le "Cambrésis", le petit train qui faisait la ligne Caudry-Awoingt. Arrivés à Awoingt nous avons conduit toute cette troupe à la prison de Cambrai.
Nous ne savions pas encore que Lucien JANSSOONE avait été fusillé par les nazis à Diez-sur-Lahn en Allemagne le 31 août 1944, pour motif : hébergement et convoyage d'aviateurs alliés.
C'était fini. J'avais souffert mais aussi beaucoup appris. J'étais surtout fier de ne pas avoir été un résistant de la 25° heure. J'avais ma conscience, mon honneur et nullement besoin de certificats pour justifier de mon activité. J'étais devenu un adulte responsable. Une vie familiale et professionnelle s'offrait à mes vingt-cinq ans. Mon beau-père m'envoya à son établissement de Lille qui avait été réquisitionné pendant l'Occupation par la Gestapo. C'est là que se tenaient les interrogatoires. D'ailleurs, nous y avons retrouvé des baignoires et de très grosses lampes. C'est en face, nous a-t-on-dit, dans l'immeuble Motte-Cordonnier qu'avaient lieu les supplices.
Il a fallu travailler dur pour relancer cette affaire et bien épauler par mon épouse, nous avons été récompensés de nos efforts : au bout de quelques années, nous avions six magasins, Caudry, Lille, Roubaix, Valenciennes, Arras et le dernier en 1950, Dunkerque qui nous plaçait en tête des grossistes de notre profession d'accessoires automobiles.
Le travail m'accaparait jour et nuit car j'avais l'entière responsabilité de cette affaire. Par la suite, des événements familiaux changèrent le cours des choses et à quarante six ans, il me fallut repartir à nouveau, mais ceci est une autre histoire.
(Témoignage recueilli et retranscrit par Patrick Odoone)

Re: Lucien Janssoone Resistance

Nouveau messagePosté: 03 Mai 2013, 17:55
de dominord
trouvé sur Cambrésis terre d'histoire :

Caudry .  Mr L.Janssoone avec Colonel Buffon et Sergeant Crampton , aviateurs RAF.jpg
Caudry . Mr L.Janssoone avec Colonel Buffon et Sergeant Crampton , aviateurs RAF.jpg (95.65 Kio) Vu 1377 fois