L'article:
Ma grand-mère, Paulette Lemée
Paulette Lemée en 1942, 22 ans
Le 11 mai 1940, Paulette Stalin, 20 ans, se marie à Envermeu avec Emile Olivier, 24 ans, un homme gai, jovial, agréable, natif d’un petit village de l'Eure : Les Baux de Breteuil.
C’est la guerre, Emile est soldat, réquisitionné par les allemands à Evreux. Il a une permission de trois jours pour aller se marier à Envermeu. Une fois mariée Paulette Olivier séjourne chez ses beaux-parents.
En France, le pays est vaincu par l’ennemi et les soldats sont consignés dans les casernes.
Le 16 juin 1940, deux jours avant l’appel du général de Gaulle, Emile, amoureux fou de sa femme, fait une fugue de la caserne d’Evreux avec son cheval pour rejoindre Paulette quelques heures, les allemands s’aperçoivent de cette absence et arrivent à le localiser, sous les yeux horrifiés de paulette ils l' abattent froidement d’un coup de fusil à bout portant, sans sommation, en interdisant à Paulette de toucher le corps ensanglanté de son mari étendu sur le sol, à l’orée d’un petit bois …
La nuit venue, folle de douleur, Paulette avec la complicité et l’aide du curé des Baux de Breteuil creusent une fosse pour enterrer provisoirement Emile dans le petit bois à proximité.
Quelques jours après, avec l’accord des occupants allemands Emile Olivier est enfin enterré dignement dans le petit cimetière de son village natal, juste au pied de l’église à gauche en entrant. Il y repose pour l’éternité comme beaucoup de jeunes Français qui ont combattu l’ennemi pour sauver la France.
Emile Olivier avait six frères qui ont combattu également pendant cette seconde guerre mondiale. Ses six frères sont tous revenus plus ou moins éprouvés physiquement des durs combats. Emile, lui avec son éternelle bonne humeur a été fauché en pleine jeunesse et en plein bonheur.
A l’âge de 20 ans, la vie de Paulette bascule dans un immense chagrin. Après quatre semaines de mariage, elle est inconsolable de cette douloureuse disparition si injuste à 20 ans. C’est le curé des Baux de Breteuil qui assiste moralement Paulette. Il la voit chaque jour en pleurs au pied de la tombe.
Paulette Olivier habita ensuite quelques temps à Rouen. Le temps passa, trois ans de peur et de chagrin, sous l’occupation allemande. En octobre 1943, Paulette part pour le Nord de la France. Le 1er avril 1944 elle habite à Ecoust saint Mein dans le pas de calais, dans une ferme isolée, au regard de tous, elle travaille à la ferme.
Sa vie est cependant empreinte de clandestinité. En effet d’avril à septembre 1944, Paulette s’engage dans un réseau de résistance, la " Voix du Nord ". Elle fait alors parti des F.F.I (Forces Françaises de l’Intérieur), sous le nom de " Viennot " en qualité d'Agent de liaison. Elle s'investit au maximum pour crier vengeance.
Très intelligente, elle apprend à lire et à écrire couramment la langue Anglaise et acquiert de très bonne connaissance de la langue allemande, pour comprendre l'ennemi, tous cela en six mois seulement.
La perte cruelle de son jeune mari l'a rendu vengeresse à souhait…
Parfois pendant la nuit elle part ravitailler des soldats alliés cachés dans des tombes, dans les cimetières de la région. Elle prend part à de nombreux sabotages contre l'ennemi, voie ferrées, wagons et matériels ennemis.
Ainsi dans la nuit du 12 au 13 juin 1944, 32 Lancaster du 408 et 419 Squadrons ainsi que 60 Halifaxes du 420, 425, 426, 432 Squadrons partent du nord de l’Angleterre avec comme mission le bombardement de la gare de cambrai dans le Nord, 89 halifaxes du 424, 427, 429, 431, 433, 434 Squadrons ont pour mission le bombardement de la gare d'Arras dans le Pas de Calais. Après avoir fait face à une grosse résistance allemande, surtout lors du passage au-dessus des côtes, le nombre d’avion abattus par la FLAK (défense antiaérienne allemande) est importante, 6 Lancaster et 9 Halifaxes sont touché, environ 60 aviateurs tués, 14 fait prisonnier, 20 sont sauvés par la résistance, cette nuit la Paulette, recueillis directement ou indirectement 6 aviateurs alliés, australiens, anglais, canadiens, américains, Paulette cacha 2 aviateurs dans les tombes du cimetières d’Ecoust saint Mein. Les deux aviateurs s'appelaient Maurice Bemrose (R.A.F) et Daniel Muray (R.C.A.F) ils y restèrent cachés 7 jours et nuits. Durant ses 7 jours Paulette et son patron, chef de la résistance lui aussi, les nourri et leur fourni des habits civils, les quatre autres seront cachés dans la paille, dans un bâtiment de la ferme. Ils n'y restèrent qu'une journée ou deux. Durant son temps de résistance Paulette sauva la vie de seize aviateurs alliés et cacha plusieurs réfractaires au S.T.O.
Un jour Paulette au guidon de son vélo après une course folle de plusieurs kilomètres alla prévenir les soldats Américains qui arrivaient vers Bapaume dans le Pas de calais, qu'un fort noyau de forces allemandes les attendaient, ainsi les soldats Américains au lieu de se présenter avec insouciance, et ont pu envoyer des chars et ainsi évité une hécatombe.
Elle était très téméraire malgré son jeune âge.
Entre temps les allemands la soupçonne et la repère, Paulette est obligée de vivre cachée dans un souterrain proche de la ferme, pendant une semaine, pour échapper aux allemands.
Après cela en septembre 1944, elle revient à Rouen ou il y a de nombreux bombardements et Beaucoup de blessés. Elle loge chez des cousins. Elle rentre comme volontaire en qualité de soignante-panseuse à l'hospice général, maintenant Charles Nicolle, elle travaille avec des sœurs. Ils y a des blessés horriblement touchés dans leurs chairs par les bombardements, les amputations, éventrations sont choses quotidiennes, elle les réconforte, fait leurs pansements, quand cela se présente, elle ensevelit même les morts. Elle a vu des choses horribles, surtout un jour ou des soldats allemands, des SS, arrivèrent dans le service maternité et arrachèrent les bras des nouveaux nés et ensuite les tuèrent, tout cela devant les yeux horrifiés de leurs mères.
En 1945, Paulette abandonne l'hôpital trop éprouvant physiquement et psychologiquement, elle travaille ensuite à la caserne de Rouen comme copiste, elle à une belle écriture donc sa candidature est tout de suite retenue pour remplir des dossiers.
De temps en temps, pour oublier ses horribles souvenirs, elle jouait de la mandoline (à la perfection).
A Rouen, Paulette souffre de la faim, il y a des cartes de rationnement pour la nourriture il faut donc acheter " au marché noir " pour manger décemment, mais quand on a peu d'argent ce n'est pas toujours facile.
En octobre 1945 Paulette se remarie, avec Joseph Lemée, prisonnier en Allemagne lui aussi, six mois après, Paulette et joseph viennent s'installer à Envermeu. Ils eurent 2 enfants (Claude et Nelly).
En souvenir de son premier mari tué en 1940 dans l'Eure où elle ne peut se rendre facilement. Elle fleurit régulièrement au cimetière d’Envermeu la tombe de l'aviateur Stanley Findley, dont l’avion un Lancaster fut abattu par la FLAK (défense antiaérienne allemande) le 8 juillet 1944 et s'écrasa tout près d’Envermeu.
Paulette recevait la famille de ce jeune soldat lorsqu'elle venait en France se recueillir sur la tombe, et elle correspondait régulièrement avec cette famille.
Paulette Lemée a fleuri cette tombe et c'est tout un symbole pour elle, de 1946 à 1994 année où elle est tombée gravement malade, sa fille Nelly prit la continuité de ce symbole.
Paulette lemée est décédée le 19 septembre 2002.
Nelly Brument, ma mère, est décédée le 18 juillet 2007, c'est donc moi qui reprend l'entretien de la tombe du soldat Stanley Findley.
En collaboration avec un ami Australien, et de diverses personnes dont certains aviateur cités ci-dessus, un livre a été écrit sur l'histoire du couple Heller, chef de réseaux de ma grand-mère, le livre a été écrit par Barry McKeon d'Australie, le livre est en anglais (110 Mo), si le livre vous intéresses, il est téléchargeable ci-dessous. Mes documents page 38,41,57,95,169
The Heller Story: http://brumenta.free.fr/The-Heller-Story.pdf
Une copie de ce livre se trouve également au musée " The Mighty Eighth air force Museum " au Etats Unis: http://mightyeighth.org/
Par Brument Alexis.
(Connaissance de Dieppe et sa région N° 238)
Carte de " REFRACTAIRE "
Carte de combattant F.F.I
Paullete Lemée ( avec la croix) en compagnie de ses camarades résistants, jeep allemande kubelwagen
Source: http://brumenta.free.fr/paulette.htm
Cordialement.