J'arrive un peu tard dans cette discussion...
Je voudrais simplement dire que je suis parfaitement d'accord avec Daniel Laurent qui a écrit :
Et les cretins qui tondaient en 1944 n'etaient pas, a mon avis des membres de la Resistance. L'essentiel, sinon la totalite de l'epuration sauvage a ete le fait de gugusses qui, depuis 1940, etaient gentiment planques. Les Resistants, les vrais, etaient beaucoup trop occupes a se battre contre les allemands et a guider les troupes Alliees pour avoir le temps de se livrer a ce genre de sevices inutiles. Il y eu quelques cas, certes, comme au Grand-Bornand en Savoie, mais ce ne sont la que des exceptions pour confirmer la regle.
Toutefois, pour ce qui est de l'exécution des 77 miliciens au Grand-Bornand fin août 44, il s'agissait certes d'une justice expéditive, mais ce n'était déjà plus de l'épuration sauvage, puisque les condamnations furent prononcées par une cour martiale tout à fait officielle. Ce fut le chef départemental des FFI, Lambroschini (dit Nizier), qui, à la préfecture de la Haute-Savoie à Annecy, en plein accord avec le Comité départemental de libération, désigna ses membres afin d'apaiser la foule qui avait commencé à infliger des sévices aux miliciens prisonniers et criait vengeance.
La cour martiale était présidée par le commandant Augagneur (dit Grand), le chef départemental des FTP, secondé par quatre officiers : Poirson, Morel (Louis), Clément et André. Ces cinq juges étaient eux-mêmes assistés par le commissaire de police Massendès faisant office de procureur et par le greffier Comet. Trois avocats commis d'office disposaient de cinq minutes pour défendre chacun de leurs "clients". L'audience fut publique et même des journalistes suisses avaient été convoqués par le CDL. Elle s'ouvrit à dix heures du matin et fut levée à trois heures dans la nuit suivante. Les plaidoiries des avocats prirent une heure et demie environ et la délibération de la cour dura environ trente minutes. 76 miliciens, déclarés coupables du "crime de trahison", furent condamnés à mort pour "avoir participé à des opérations armées de répression dirigées contre les patriotes (...) et avoir eu des relations suivies avec les autorités allemandes" (référence à l'article 75 du code pénal). Un milicien relaxé ayant demandé à partager le sort de ses camarades porta le nombre des exécutions à 77 sur 97 accusés (le greffier avait commandé 75 cercueils : il fallut, en toute hâte, fabriquer deux cercueils supplémentaires). Parmi les 20 miliciens libérés en uniforme, beaucoup furent repris par les FFI (FTP ?) et jetés en prison ou, pour certains, traduits de nouveau en justice...
Au sujet de ce procès expéditif, un historien local écrivit :
Ce jugement a été un facteur d'ordre public. Une détente s'est sentie dans la population, sans pour autant apaiser les passions, et ils sont encore nombreux à réclamer une épuration plus sévère encore.