Judex écrit :
[...]les français prendront le titre de Waffen-Grenadier der SS, titre réservé au volontaires considérès comme de sang non germanique.
Oui, et ces Waffen-Divisionen der SS "ethniques" seront aussi considérées comme de "second ordre" par rapport aux SS-Divisionen "germaniques"...
Pour Jean-Luc Leleu (
op.cit. supra), si les
Waffen-SS se sont montrés, à l’Ouest en tout cas, plus brutaux que les soldats de la Wehrmacht, parfois également brutaux et coupables de crimes de guerre, ce n’est pas uniquement dû à l’idéologie nazie dont ils étaient imprégnés au premier chef (même si l’« éducation idéologique » laissait de plus en plus à désirer selon Himmler).
En effet, à l’Ouest, les exactions perpétrées par les troupes SS ont toujours été commises par une petite minorité de l’effectif engagé et, si toutes les grandes unités de la Waffen-SS se sont rendues coupables de crimes de guerre, elles y ont été impliquées dans des proportions très variables. Trois exemples entre autres :
1) Fin 1943, la 10e division de la Waffen-SS, restée longtemps au repos en France, a subi plusieurs attentats mortels sur ses personnels sans qu’elle réplique le moins du monde ou se venge sur la population civile ;
2) Au printemps 1944, malgré le décret Sperrle ordonnant à la troupe de prendre des mesures répressives draconiennes en cas d’attentat, la 17e division de la Waffen-SS, stationnée en France, n’a pas perpétré d’exaction connue jusqu’au débarquement ;
3) En été 1944, les 49e et 51e brigades de la Waffen-SS, de composition sociologique semblable, engagées en même temps en France, se sont comportées de manière très différente, l’une massacrant des civils, l’autre ne se rendant coupable d’aucun acte répréhensible.
Quant à la débauche de violence de la 12e division SS, elle serait liée à sa formation particulière : issue de la Hitlerjugend, elle ne devait absolument pas décevoir le Führer…
Selon J.-L. Leleu, « les exactions commises [par la Waffen-SS] en Europe occidentale ne sont pas foncièrement liées à l’idéologie raciale de la SS [sauf les exécutions de soldats coloniaux français en 1940, de GI noirs ou juifs en 1944]. Pour la plupart, elles lui sont même étrangères ». D’après cet auteur, la première cause des crimes de guerre dès la campagne à l’Ouest en 1940 se trouve « dans l’ambition de la SS en armes de s’affirmer en tant qu’élite militaire » face à la Wehrmacht. En effet, pour J.-L. Leleu, « exécuter des civils ou des soldats ennemis permettait d’expliquer un échec en rejetant la responsabilité sur un tiers [les fameux « francs-tireurs » accusés] d’avoir usé de moyens déloyaux […] ».
Je dois dire que, si j’apprécie par ailleurs l’analyse de J.-L. Leleu, je ne suis pas du tout d’accord avec ce point de vue, car, de toute évidence, les élites militaires des armées de pays démocratiques cherchent à s’affirmer, de façon brutale certes, mais sans exécuter des prisonniers ou des civils en masse ! A mon humble avis, cette manière de s’affirmer relève éminemment de l’idéologie nazie.En revanche, je le suis davantage lorsqu’il explique que les crimes de guerre commis par la Waffen-SS à l’Ouest en 1944 sont dus, sur la base de « l’obligation de dureté » nazie, à l’« expérience » acquise à l’Est en vertu de la politique de répression contre les partisans mise en œuvre par l’OKW dès mai 1941, laquelle prônait expressément des mesures de représailles collectives.
En effet, si la 2e division Das Reich a exécuté la moitié des individus fusillés comme « francs-tireurs » en France du 6 juin au 4 juillet 1944, c’est que, d’une part, elle avait reçu l’ordre formel du haut commandement à l’Ouest de prendre impitoyablement les mesures les plus brutales (ordre, daté du 8 juin 1944, du maréchal von Rundstedt, cf. KTB/Ob. West, XIII-f Anl. 159 et XIV-f) et que, d’autre part, elle était commandée par le général de brigade SS Lammerding qui avait été, durant plusieurs mois, chef d’état-major du général de corps d’armée SS von dem Bach-Zelewski, plénipotentiaire du Reichsführer-SS Himmler pour la lutte contre les partisans à l’Est.
L’exigence d’obéissance inconditionnelle, la pression de la hiérarchie et des pairs, l’« obligation de dureté » nazie (
complet renversement des valeurs morales : « devenait fort celui qui était capable de transgresser ses propres inhibitions mentales pour exécuter un ordre qu’il pouvait considérer comme criminel »), l’idée, pour les récalcitrants, de n’obéir ou de ne participer que partiellement à un crime de guerre ont fait le reste…
En définitive, la différence de comportement entre la Waffen-SS et la Wehrmacht, également coupable de crimes de guerre et contre l’humanité, a été loin d’être aussi grande qu’on le croit habituellement…