Voici ce qu’écrit Jean-Luc Leleu (La Waffen-SS…, Perrin, 2007) sur la part prise par les formations SS de campagne dans la répression à l’ouest en 44 (pages 625 et suiv.) :
En définitive, la participation des troupes SS aux grandes opérations de répression du printemps et de l’été 1944 n’a pas été extrêmement importante. Elle a proportionnellement correspondu peu ou prou aux effectifs de campagne de la Waffen-SS présents à l’ouest par rapport à ceux de l’armée de terre. […]
De toutes les opérations de répression menées à l’ouest, c’est l’action de la division « Das Reich » dans le Limousin qui est la plus connue, car la plus sanglante. Tout d’abord, il s’est bien agi d’une opération répressive spécifique. Ordonnée par l’OKW le 7 juin, elle s’est officiellement achevée le 11 juin à midi, toujours sur un ordre de l’OKW donné au matin du 9 juin.
La division n’a donc pas été « retardée » par la Résistance dans sa progression de la région de Montauban vers la Normandie. Sa présence pendant quelques jours dans le Limousin répondait à l’ordre exprès d’en découdre avec les « bandes » et d’y reprendre le contrôle de la situation.
En ce sens, il convient de ne pas se leurrer sur la contribution des mouvements de résistance limousins. Cette contribution a été effective dans le sens où leurs activités ont conduit à détourner une grande unité blindée de sa mission principale. En revanche, les harcèlements subis par la division « Das Reich » le long de ses itinéraires de progression n’ont pas pu la freiner, puisque, fondamentalement, celle-ci avait ordre de rechercher le contact et de combattre le mouvement insurrectionnel.
N.B. En fait, seuls quelques éléments de la Das Reich sont intervenus dans le Limousin et, de toute façon, une grande partie de la division est longtemps restée dans le Sud-Ouest faute de moyens de locomotion…
Ce n’est pas ici vouloir faire injure à l’action passée de Georges Guingouin que de le contredire lorsqu’il affirme que le maquis limousin a fait à lui seul basculer la Seconde Guerre mondiale en retardant la division « Das Reich », ce qui aurait fait perdre, selon lui, la bataille de Normandie aux Allemands, et donc la bataille décisive de la guerre !
Cela, on le savait depuis l’étude de l’historien allemand Eberhard Jäckel (Frankreich in Hitlers Europa, Deutsche Verlags-Anstalg Gmb H Stuttgart, 1966 – traduction française, vite épuisée et non rééditée, chez Fayard en 1968 : La France dans l’Europe de Hitler), mais il est toujours agréable de voir cette thèse reprise par un historien universitaire français, même plus de quarante ans après !
Jean-Luc Leleu ajoute cependant :
Au demeurant, la division « Das Reich » a été placée en réserve à l’arrière du front dès son arrivée en Normandie le 16 juin. Dix jours se sont ensuite écoulés avant que l’un de ses détachements soit engagé. En fait, les délais d’intervention des réserves motorisées allemandes, leur manque de mobilité autant que les stratèges de l’OKW […] ont davantage contribué à retarder les renforts allemands que l’aviation alliée et la Résistance française réunies. La chronologie des ordres d’engagement des divisions blindées allemandes est à cet égard édifiante […].
Une fois établie la participation des formations de campagne SS aux opérations de répression de 1944, deux remarques s’imposent.
Tout d’abord, aucune formation de la Waffen-SS ne s’est trouvée engagée isolément dans une importante action de répression. […]
Ensuite, un grand nombre d’opérations [de répression ont été] menées sans qu’aucune force de la Waffen-SS y soit engagée. Ce point est d’autant plus important que l’on relève une remarquable et constante tendance dans la mémoire sociale française à voir partout l’ombre des soldats SS dans toute action répressive.
N.B. Par exemple, aux Glières ou dans le Vercors, etc.