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La Phalange africaine.

Pétain, Laval, le régime de Vichy et tous ceux qui furent acteurs de cette période sombre de notre histoire. La collaboration, les collaborateurs, la vie quotidienne sous la botte de l'occupant, les privations, le marché noir...
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Nouveau message Post Numéro: 21  Nouveau message de tietie007  Nouveau message 07 Juil 2007, 10:19

Selon le fort convainquant "Montoire" de Francois Delpla, (Ca, c'est du papier, tu vas aimer, Tietie) c'est bien une co-belligerance contre l'Angleterre en Afrique que Laval d'abord puis Petain ensuite sont alles proposer a Hitler !
Ils se sont fait ramasser par un Fuhrer qui se fichait de l'Afrique comme d'une guigne, mais ils ont tente le coup...


C'est la thèse de Delpla ! Pas de Ferro ni de Cointet que je reviens de parcourir ! D'ailleurs Du Moulin de Labarthète questionnant le Maréchal, après Montoire, relate que Pétain lui dit qu'il en est resté à une discussion de principe, très générale, sans avoir pris aucun engagement ! Mais bon, ce n'est pas le sujet du topic, et ce serait vraiment trop long à développer !


Ce fut d'ailleurs le cause, aussi, pour la LVF. Les allemands allaient dans ce sens, pour éviter la renaissance de l'armée française.).
Les Allemands, oui. Pas Vichy.

Bernicle !
L'association loi 1901 fut reconnue et le message dithyrambique de Petain, lisible par tous ceux qui prennent la peine de cliquer sur mon lien Histoquiz, est loin, tres loin d'etre "du bout des levres".
Sans parler des fiancements discrets...


Message dithyrambique ? Tu dois parler du fameux texte de novembre 41.
Ferro, Cointet et Giolitto sont très partagés sur ce message qui a été écrit par De Brinon, et signé par le Maréchal. Ce discours est tellement à contre-courant de la circonspection de Pétain envers la LVF, que les historiens ont pensé que De Brinon avait abusé le Maréchal.
En même temps Pétain a traité les légionnaires de "braves gens" et a reçu Doriot avec son uniforme de légionnaire. Je pense que la vérité est entre les deux.
Mais certainement pas d'un enthousiasme délirant, ce que lui reprocheront, très vite, les collabos de Paris, notamment Déat qui dans L'Oeuvre, le 10 août 1941, stigmatisera l'attitude de Vichy qui ne veut pas financer la LVF .

D'ailleurs ce même mois, dans une lettre destinée à Darlan, Pétain nous livre sa vraie pensée sur la LVF:

"La Légion Française des Combattants représente, bien que les autorités occupantes se refusent encore de la reconnaître, un Idéal et des traditions entièrement à l'image du sentiment national dans son unanimité. La Légion Française antibolchevique est un groupement nouveau, constitué en accord avec les autorités occupantes et, qui, peut-être à cause de ceci, ne rencontre pas encore chez nous une grande faveur ...Il est inopportun et impolitique, de chercher à confondre ces mouvements contraires (...)".

Il me semble que cette missive, qui assassine, dans un langage prudent, la LVF, création de l'occupant et impopulaire, montre bien la vraie disposition de Pétain envers la LVF !

D'ailleurs, et c'est moi qui fait ici l'hypothèse, peut-on, peut être lier, la surprenante déclaration publique de Pétain de novembre 41, pleine de "gentillesse" feinte pour la LVF, à la future rencontre du 1er décembre à Saint Florentin, avec Goering. Le maréchal aurait-il voulu donner des gages de bonne volonté en vue de cette future entrevue ?

En tout cas la dithyrambie s'est vite arrêtée ...
Une note relative à la LVF, du 11 février 1942 (ANF 60 235), précise que si le pouvoir avait décidé d'accorder son appui à la naissance de la LVF, c'était :
"sans donner de publicité aux mesures prises en sa faveur et sans patronner officiellement la propagande faite pour susciter les engagements" (P.17, Giolitto)
On ne peut pas être plus clair sur les sentiments de Vichy envers cette LVF !


Et pour le financement, "macash bono" comme dirait l'autre !! Vichy ne prendra en charge la LVF qu'un an plus tard, en juin 42, avec le retour de Laval. Jusque là, c'est l'ambassade d'Allemagne qui "raque" pour éviter le dépôt de bilan de l'unité, qui a du mal à remplir les caisses ! D'ailleurs, Giolitto précise que tout est bon pour financer l'unité, notamment quelques opérations d'intox.
Ainsi les délégués chargés de recueillir des fonds présentent-ils des cartes, agrémentées du texte suivant :
"Sous l'égide du Maréchal de France, chef de l'Etat, la France antibolchevique vous prie, quelque soit votre opinion, de bien vouloir ...".
N'appréciant guère le procédé, le maréchal Pétain exige "qu'il soit mis fin sans délai à cette équivoque".

Avouons que pour quelqu'un de "dithyrambique", son comportement est plutôt paradoxal !

De plus légalement, la LVF ne sera reconnu qu'en 1943 ...pour un soutien sans faille de Vichy, c'est un peu curieux !



Non, Jacques Doriot n'a plus rien controle du tout des fin 1941, lorsque ses lieutenants ont ete elimines de la LVF qui fut refondee sur des bases moins politiques.
Tietie, j'ai la furieuse impression que tu critiques mon article Histoquiz sans l'avoir lu.
Legerement frustrant.


Source : Jacques Doriot, de Jean Paul Brunet, Balland 1986, p.371.

Doriot, l'ancien bolchevique, n'avait pas oublié les principes fondamentaux du noyautage. A la caserne de Versailles, il s'était arrangé pour que fût distribué gratuitement au réfectoire, Le Cri du Peuple, à l'exclusion de tout autre journal. Au camp d'instruction, il organisa des cellules PPF dans les différentes compagnies, et comme beaucoup de légionnaires n'avaient pas d'appartenance politique précise, il les recruta en leur faisant signer des fiches d'adhésion antidatées ...ce qui lui permit de dire aux allemands que 70% des légionnaires étaient PPF et que la proportion des tués et blessés de son Parti atteignait 90% ! Les dirigeants du PPF annonçaient à Paris des proportions analogues. Bien que Deloncle fût absent, l'influence de son MSR se fit sentir fortement, au début du moins, et dans cette LVF hautement politisée, les tensions furent vives. Le premier bataillon était plutôt PPF, le second MSR ; il y avait des "chambrées Doriot" des "chambrées Deloncle", entre lesquelles les querelles tournaient parfois à la bagarre. Mais bientôt, après l'éclatement du MSR et le ralliement de Deloncle à Doriot, la LVF allait devenir presque une Milice du PPF !

D'ailleurs Giolitto confirme la politisation de l'unité, ce qui ne plaît ni à Laval, qui craint pour son leadership, ni aux allemands qui y voient la cause de l'inefficience militaire de cette Légion !


 

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la Phalange et la LVF

Nouveau message Post Numéro: 22  Nouveau message de lebel  Nouveau message 07 Juil 2007, 18:16

Sur l'attitude de Vichy en général , il n'y a pas de position nette , elle évoluera au gré des circonstances , des personnages et du cours de la guerre . Collaborationniste sans faille (ou presque ) jusqu'en 42 :
Ainsi la LVF est à ses débuts " l'honneur militaire de la France " ........
Tout comme la Milice , exaltée , et desavouée quand "les carottes étaient cuites" ( cf la célèbre réplique de Darnand au Maréchal )

-Tiraillé entre des ultras jusqu'auboutistes et des attentistes prudents-
Voila Vichy , qui restera , avec ses crimes , ses compromissions et ses louvoiements , une tache dans l'histoire de la France


 

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Re: la Phalange et la LVF

Nouveau message Post Numéro: 23  Nouveau message de tietie007  Nouveau message 11 Juil 2007, 20:37

lebel a écrit:Sur l'attitude de Vichy en général , il n'y a pas de position nette , elle évoluera au gré des circonstances , des personnages et du cours de la guerre . Collaborationniste sans faille (ou presque ) jusqu'en 42 :
Ainsi la LVF est à ses débuts " l'honneur militaire de la France " ........
Tout comme la Milice , exaltée , et desavouée quand "les carottes étaient cuites" ( cf la célèbre réplique de Darnand au Maréchal )

-Tiraillé entre des ultras jusqu'auboutistes et des attentistes prudents-
Voila Vichy , qui restera , avec ses crimes , ses compromissions et ses louvoiements , une tache dans l'histoire de la France


Revoyez mon intervention, juste au-dessus de la votre, pour bien voir que la LVF n'a jamais été soutenue, dans les faits, par Vichy ...
Des déclarations, de bonnes intentions (notamment le "fameux" discours curieux de Pétain, en novembre 41), qui n'ont pas été suivies dans les faits et les actes !

D'ailleurs, dans sa biographie de Simon Sabiani (Olivier Orban, 1991), p 250, Jean-Baptiste Nicolaï écrit à propos de la LVF :

"Alors que le gouvernement de Vichy interdit, au printemps, une réunion pour le recrutement de la LVF à Marseille, il s'oppose à la publication d'un message d'encouragement adressé par le général Von Gablentz aux volontaires français."

D'ailleurs je me demande qui était ce Von Gablentz ...à ne pas confondre avec Otto Heinrich von der Gablentz, un membre du cercle de Kreisau, opposé à la politique d'Hitler et officier dans l'armée allemande d'occupation en Norvège.


 

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Nouveau message Post Numéro: 24  Nouveau message de François Delpla  Nouveau message 12 Juil 2007, 08:22

tietie007 a écrit:Selon le fort convainquant "Montoire" de Francois Delpla, (Ca, c'est du papier, tu vas aimer, Tietie) c'est bien une co-belligerance contre l'Angleterre en Afrique que Laval d'abord puis Petain ensuite sont alles proposer a Hitler !
Ils se sont fait ramasser par un Fuhrer qui se fichait de l'Afrique comme d'une guigne, mais ils ont tente le coup...


C'est la thèse de Delpla ! Pas de Ferro ni de Cointet que je reviens de parcourir ! D'ailleurs Du Moulin de Labarthète questionnant le Maréchal, après Montoire, relate que Pétain lui dit qu'il en est resté à une discussion de principe, très générale, sans avoir pris aucun engagement ! Mais bon, ce n'est pas le sujet du topic, et ce serait vraiment trop long à développer !


alors merci de lancer un fil pour le ferrailleur !

Vous donnez dans l'inversion chronologique en opposant à des auteurs récents d'autres plus anciens... pour terminer par du Moulin, 1946.

Sauf à considérer les plus récents comme des amateurs totaux, ils ont intégré et dépassé les plus anciens ! Il faut donc, pour les réfuter, les lire de près et dire où ça cloche.

.

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Nouveau message Post Numéro: 25  Nouveau message de tietie007  Nouveau message 12 Juil 2007, 10:51

François Delpla a écrit:
tietie007 a écrit:Selon le fort convainquant "Montoire" de Francois Delpla, (Ca, c'est du papier, tu vas aimer, Tietie) c'est bien une co-belligerance contre l'Angleterre en Afrique que Laval d'abord puis Petain ensuite sont alles proposer a Hitler !
Ils se sont fait ramasser par un Fuhrer qui se fichait de l'Afrique comme d'une guigne, mais ils ont tente le coup...


C'est la thèse de Delpla ! Pas de Ferro ni de Cointet que je reviens de parcourir ! D'ailleurs Du Moulin de Labarthète questionnant le Maréchal, après Montoire, relate que Pétain lui dit qu'il en est resté à une discussion de principe, très générale, sans avoir pris aucun engagement ! Mais bon, ce n'est pas le sujet du topic, et ce serait vraiment trop long à développer !


alors merci de lancer un fil pour le ferrailleur !

Vous donnez dans l'inversion chronologique en opposant à des auteurs récents d'autres plus anciens... pour terminer par du Moulin, 1946.

Sauf à considérer les plus récents comme des amateurs totaux, ils ont intégré et dépassé les plus anciens ! Il faut donc, pour les réfuter, les lire de près et dire où ça cloche.

.


Il faudrait créer un autre topic sur Montoire ...mais il me semble fort peu probable que Pétain ait voulu entrer en guerre contre l'angleterre, même pour reprendre les colonies perdues (a-t-on la retranscription précise de l'entrevue ? ). Le contexte était pourtant propice, avec Mers el Kébir et l'affaire de Dakar, mais je vois mal Pétain très offensif auprès d'Hitler, à Montoire ...D'ailleurs, certains éléments postérieurs confirment le peu d'entrain du Maréchal à l'idée d'une quelconque co-belligérance. Que ce soit lors des Protocoles de Paris, en mai 41 ou l'attitude de Vichy envers la formation de la LVF en juin-juillet 41.


 

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Nouveau message Post Numéro: 26  Nouveau message de François Delpla  Nouveau message 12 Juil 2007, 11:17

Oui. Le texte de la conversation a été retrouvé dans les archives allemandes, publié en 1961, traduit en français assez mal (notamment le passage concerné par notre discussion) en 1968, puis, correctement, en annexe de mon livre, en 1996.

Il dit ce que je vous dis qu'il dit. Tout le reste est caduc. Ce reste vient généralement des mémoires de l'interprète Schmidt (1950), écrits en fonction des intérêts politiques de l'époque (enrôlement des vichystes propres ou supposés tels dans la guerre froide). Il est temps d'en sortir, mon cher !

Ce que je montre aussi, c'est (bis repetita) que la politique de Vichy prend un tournant radical vers le 9 novembre : rejet de la collaboration militaire, mensonge disant qu'à Montoire on n'en a pas envisagé d'autre qu'économique. A rapprocher de ce que vous dites sur 1941.

Toutefois je me permets de faire observer que la France est occupée, sous les ordres d'un dictateur qui est tout sauf idiot, et qu'en conséquence le gouvernement, c'est lui (d'abord et essentiellement).

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Nouveau message Post Numéro: 27  Nouveau message de Daniel Laurent  Nouveau message 12 Juil 2007, 11:29

Bonjour,
Tout cela est absolument interessant mais c'est le bazar entre la Phalange, la LVF et Montoire.

Un gentil Modo pourrait-il faire un ou des nouveaux fils pour qu'on s'y retrouve ? Merci d'avance.

Tietie, es-tu sur que Henri du Moulin de Labarthete soit une source sure ? Voir son pedigree...


 

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Nouveau message Post Numéro: 28  Nouveau message de Audie Murphy  Nouveau message 12 Juil 2007, 15:34

Mais c'est à vous chers forumeurs d'ouvrir de nouveaux sujets pour chaque débat spécifique. Vous vous êtes rendus compte du hors-sujet, pas besoin de modérateur, remédiez messieurs !


 

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Nouveau message Post Numéro: 29  Nouveau message de Daniel Laurent  Nouveau message 12 Juil 2007, 16:09

Audie Murphy a écrit:Vous vous êtes rendus compte du hors-sujet, pas besoin de modérateur

Bon, partez a la plage, les Modos, on s'occupe de tout.
Ca va degommer
:mrgreen:
:arrow:
Je vais creer un fil Montoire.
Mais demain, il est tard ici


 

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Re: La Phalange africaine.

Nouveau message Post Numéro: 30  Nouveau message de lebel  Nouveau message 14 Sep 2009, 23:59

]Bonsoir
Il y peu de documents " collabo "sur cette unité , à part la relation qu'en a fait l'ex volontaire et milicien Charbonneau dans " Les mémoires de Porthos "
Je viens de retrouver ( DL devinera !) cet extrait d'un livre de R Pellegrin , que P. Ory avait qualifié de " chantre énamouré de la Phalange Africaine "
Il vaut son pesant de cacahuètes comme plaidoyer pour Vichy et la Collaboration '
( mensonges et contre vérités incluses )

Bonne lecture :D




La Phalange africaine (par René Pellegrin)



Un épisode peu connu du front tunisien en 1942 : La LVF en Tunisie 1942-1943, La Phalange Africaine, par René Pellegrin.


Lors du débarquement anglo-américain du 8 novembre 1942 sur les côtes d’Afrique du Nord, les troupes françaises de « l’armée Weygand » s’opposèrent par les armes aux envahisseurs. Les combats durèrent trois jours et trois nuits jusqu’à la signature – le 11 novembre – d’un armistice puis d’un accord conclus entre l’amiral Darlan – présent à Alger – et les autorités américaines.
En Tunisie le général Barré choisit cette date du 11 novembre 1942 pour se retirer avec ses troupes sur la dorsale tunisienne, à plus de 50 kms des côtes, abandonnant ainsi Bizerte, Tunis et les grands ports du sud aux troupes italo-allemandes qui débarquèrent dans le même temps.
L’amiral Esteva, résident général de France en Tunisie, investissait aussitôt le Service d’Ordre légionnaire comme force du maintien de l’ordre dans toute la partie de la Régence abandonnée par les troupes du général Barré. Son rôle consiste en la surveillance des casernes et des installations militaires, la protection des fermes et domaines menacés par des bandes de pillards, le fonctionnement ou la surveillance des centrales électriques, téléphoniques, réservoirs et barrages, routes et ponts.

Le 15 novembre 1942, soit une semaine après le débarquement, les troupes de l’armée d’Afrique passaient tout entières sous contrôle anglo-américain. Il n’était pas exclu toutefois – des témoignages le prouvent – que parmi les forces françaises de nombreux officiers et hommes de troupes conservaient leur fidélité à la Révolution Nationale et à son cher le maréchal Pétain. Dans la population de l’Algérie et du Maroc cet esprit s’exprimait ouvertement et, malgré leur mobilisation – mesure abusive – les maréchalistes gardaient l’espoir d’un renversement immédiat de la situation militaire (outre les unités allemandes et les unités italiennes venant d’Italie et occupant le territoire de la Tunisie du nord, les éléments intacts de l’armée Rommel refluant de Tripolitaine prenaient position dans les territoires du sud tunisien) et, à la faveur de celui-ci, reprendra ce qu’ils estimaient être le véritable bon combat. Des maquis même – avant que le mot ne connût la fortune qui devint la sienne par la suite – s’étaient constitués en Oranie, au Maroc, dans l’Algérois et le Constantinois, ce qui eut pour effet l’arrestation de toutes les vedettes maréchalistes : chefs légionnaires, S. O. L. et militants endurcis du Parti Populaire Français, par les services spéciaux de police de l’armée giraudiste.
Sur la dorsale tunisienne, le général Barré, en accord avec les généraux Juin et Giraud et l’amiral Darlan, déclarait la guerre aux troupes de l’Axe le 20 novembre 1942. Cette décision était prise contre la volonté du maréchal Pétain, chef de l’Etat, qui avait ordonné dès le 8 novembre de résister contre l’envahisseur anglo-saxon en se rangeant aux côtés des troupes de l’Axe. Les jours suivants, par la voie radiophonique, par des messages à l’amiral Esteva, résident général et à l’amiral Derrien, commandant la place de Bizerte, enfin par l’envoi à Tunis même et sur le front – où les troupes du général Barré cantonnaient – de son ministre d’Etat l’amiral Platon, il réitérait formellement cette consigne.

A Paris, le 9 novembre 1942, à l’issue de son « Congrès du Pouvoir » le Parti populaire français par la voix de son chef Jacques Doriot, combattant du front de l’Est et l’un des fondateurs de la Légion des Volontaires français contre le bolchevisme en 1941, réclame l’ouverture des hostilités contre les Anglo-Américains. Ses militants doivent désormais se considérer comme mobilisés.

A Vichy, le 22 novembre 1942, le Président Lavai annonce la création d’une Légion Impériale ouverte à tous les volontaires pour combattre l’envahisseur anglo-saxon en Afrique du Nord. Dans toute la zone libre – qui ne l’est plus en fait depuis le 11 novembre : les troupes allemandes ayant franchi en force la ligne de démarcation et gagné les Pyrénées et les côtes de Provence ainsi que la Corse – des bureaux d’enrôlement sont ouvert et rapidement enregistrent trois milliers de signatures de contrat d’engagement. Mais des problèmes d’acheminement par la Wehrmacht sur le théâtre d’opération : transport des unités, protection maritime et aérienne des convois, interdiront la venue en Tunisie de ce corps de volontaires.

Après l’échec de la mission Platon (retour du général Barré dans le camp loyaliste), le président Laval déléguait à Tunis, fin novembre 1942, Georges Guilbaud, du ministère de l’Information et de la Propagande avec mission de soutenir le Résident général dans l’esprit de résistance à la dissidence, tandis que le général Bridoux, secrétaire d’Etat à la Guerre, détachait dans la Régence, le 28 décembre 1942, une Mission Militaire française composée d’officiers d’active. Cette mission était chargée : 1° de prendre en main les éléments de l’armée Barré abandonnés dans les casernements à la suite du retrait de ce général. 2° de ramener à l’obéissance et à la fidélité aux pouvoirs légitimes de l’Etat français les troupes emmenées de force en dissidence. 3° de constituer sur place des unités françaises volontaires pour se battre aux côtés des troupes de l’Axe. Du succès de cette mission dépendait le maintien des droits de souveraineté de la France en Tunisie.
« Maquis » algériens et marocains, et soldats et officiers dissidents malgré eux ne furent pas totalement oubliés par les maréchalistes de la Métropole puisque, une bonne centaine de volontaires : officiers de la L.V.F., militants du P.P.F., armés et équipés de matériel de combat, de radio et de propagande furent parachutés ou débarqués au Maroc et en Algérie, certains (comme le fils du colonel commandant la gendarmerie à Alger, parachuté depuis Tunis) dans le Constantinois, derrière les lignes secondaires du front durant la campagne de Tunisie, et même au-delà puisque en juin et juillet 1944, des parachutages de jeunes P.P.F. avaient encore lieu sur l’Algérie !.

La fondation du Comité d’Unité d’Action Révolutionnaire (C.U.A.R.) par le délégué du ministère de l’Information Georges Guilbaud, fut la plus belle réussite « Révolution nationale » de toute la guerre. L’action du C.U.A.R. s’exerça dans tous les domaines : politique, social, économique, culturel, militaire. Elle s’étendit sur six mois jusqu’au mois de mai 1943 et mit à son actif, outre la résolution des problèmes vitaux du ravitaillement, de l’éclairage électrique, des transports, de la défense passive et le fonctionnement de l’administration en général, sur le plan culturel : la refonte du quotidien Tunis-Journal, la reprise des émissions de Radio-Tunis, l’institution d’une Ecole des Cadres révolutionnaires sur le plan de la sécurité et de l’ordre, la mobilisation effective du S.O.L. et la création. du C.O.S.I. ou Comité ouvrier de secours immédiat qui renforçait l’action du Secours national, et l’attribution de pouvoirs étendus aux compagnons et aux scouts ainsi qu’aux légionnaires anciens combattants pour la surveillance et la sauvegarde des fermes et des récoltes, l’accueil des réfugiés des zones bombardées, les déblaiements, évacuations, premiers soins, regroupements. etc. enfin sur le plan militaire, le parrainage de la Phalange africaine – premier maillon de la future Légion Impériale.
Au mois de janvier 1943 ; la détermination des milieux gouvernementaux et révolutionnaires français qui se traduisait par des actes concrets sur le sol tunisien : création du C.U.A.R., organisation de la Phalange, eut une conséquence des plus heureuses : les unités de « malgré eux »faites prisonnières par les Allemands sur le front tunisien : plusieurs centaines d’hommes, furent traités sur ordre du Führer, non en francs-tireurs (il y avait rupture des clauses de l’armistice franco-allemand, ne l’oublions pas), mais comme des victimes des envahisseurs anglo-américains et rapatriées sur la France à Montauban par la Wehrmacht. Les prisonniers originaires de Tunisie colons ou citadins de même que les « pieds-noirs » d’Algérie et du Maroc, restant dans la Régence avec leur accord.
Le 5 janvier 1943, le lieutenant-colonel Sarton du Jonchay, chef de la Mission Militaire était nommé directeur du cabinet du Résident général, assurant ainsi la liaison, d’une part avec le secrétariat d’Etat à la Guerre et le gouvernement du Maréchal, par l’entremise de l’amiral Esteva, d’autre part avec la délégation militaire par le truchement du lieutenant-colonel Cristofini qu’assiste le commandant Curnier. En outre Sarton du Jonchay devait assumer un rôle diplomatique important tant auprès du bey de Tunis, Mohamed el-Moncef, qu’auprès du ministre allemand Rahn et du ministre italien Bombieri.

Le 8 janvier 1943, enfin, soit moins de deux semaines après l’arrivée à Tunis de la Mission française, la Phalange africaine voit le jour. Elle comprendra un peu plus de trois cents volontaires français qu’épauleront près de cent cinquante autres volontaires musulmans. Cette formation aurait pu sans peine compter dix fois plus d’éléments mais les membres actifs des organismes politiques et paramilitaires et policiers de la Régence : Légion française des Combattants, Compagnons de France, Scouts de France, Défense passive, Parti populaire français, Brigade de Surveillance du Territoire, marins et officiers de la place de Bizerte et de son arsenal Ferryville, Chantiers de Jeunesse, administrations et services divers ne pouvaient en faire partie sans du même coup compromettre la souveraineté française en Tunisie ; souveraineté liée à une politique de collaboration active avec les Allemands en guerre et depuis le 8 novembre 1942 fortement menacée et par les musulmans souriant à l’indépendance et par les Italiens ne renonçant pas à leurs visées expansionnistes.

Le recrutement des combattants de la Phalange africaine s’effectua donc surtout parmi les SOL et les militaires du P.P.F. Aux côtés de militaires de carrière et d’anciens combattants on trouve de jeunes employés et ouvriers, des étudiants et même des lycéens. Le fils d’un contrôleur civil côtoie le bibliothécaires en chef de la ville de Tunis ; un professeur de latin, le fils d’un général ; des instituteurs, un banquier, et un employé des contributions directes le propre fils du chef de la Légion des Combattants. Des pères de famille nombreuse partagent le sort de leurs enfants volontaires et des cadets le sort de leur frère aîné.

Ils sont tous ardents maréchalistes et l’appel de l’amiral Esteva (création d’une première Phalange, noyau de la future Légion Impériale) a une résonance patriotique indiscutable pour eux. Les éléments intellectuels quant à eux, sont pour la plupart d’anciens militants des partis ou ligues nationalistes : ils sont maurrassiens, Croix de feu, doriotistes, céliniens. Monarchistes ou fascistes, dès le 8 novembre 1942, ils souhaitaient, avec le capitaine Dupuis (désigné comme commandant de la première Phalange), bouter l’ennemi américain et l’ennemi anglais hors du territoire nord-africain. Les Anglo-Saxons sont devenus les alliés des Soviétiques et leur victoire verrait le retour de la démocratie, c’est-à-dire des Juifs, des francs-maçons, au plus grand bénéfice des communistes, seuls vainqueurs en dernière analyse. Et cela ils le refusent calmement, résolument. C’est pourquoi ils font le don de leur personne. Le Maréchal l’a fait pour la France en 1940. En ce début de l’année 1943 eux le font pour la France et l’Occident tout entier…

La Mission militaire a ses bureaux avenue de Paris, au cœur de la ville. La caserne de Forgemol dans la banlieue, à Franceville, sert de garnison à la Phalange africaine. Le camp d’entraînement des volontaires est à Bir el-Bey, charmante station sous les pins près de la résidence beylicale d’été d’Hamman-Lif et non loin du Chantier de Jeunesse reconstitué dans le même temps.

Le lieutenant-colonel Cristofini est blessé sérieusement à un œil par un éclat de grenade au cours d’un exercice de destruction d’un char en première ligne. Il est évacué sur un navire-hôpital en Sicile et sera rapatrié sur Guéret d’abord puis sur la Corse. Il est remplacé à la tête de la Mission par le commandant Curnier que supplée le Capitaine Eu.

Le capitaine Dupuis reçoit le commandement de la première Phalange. Il est ancien combattant de la Grande Guerre, il a participé à la libération de la Pologne en 1921, repris du service en 1939 et combattu vaillamment jusqu’à l’armistice.

Deux mois d’instruction intense les trois dernières semaines de janvier consacrées au recrutement, à l’équipement, à l’armement, aux installations. Culture physique, marches, exercices de tir alternent avec les manœuvres diverses de combat effectuées sous la direction de deux officiers allemands, de quatre sous-officiers et d’un interprète, tous combattants de Russie.

Les légionnaires cantonnent sous des tentes-marabout fournies par les Chantiers de Jeunesse, leurs voisins.
Ils disposent d’un terrain de manœuvre excellent délimité par un front de mer de deux kilomètres et d’autant en profondeur jusqu’aux contreforts du Bou Kornine et du Kanguet, superficie correspondant à peu près à celle du secteur du front qui leur sera imparti.

Ils apprennent à évoluer, se déplacer rapidement et efficacement. A gagner un endroit ou retraiter vers un autre sans se découvrir ni s’exposer. A creuser leur trou individuel suivant la nature du terrain et compte tenu de l’offensive présumée : artillerie, infanterie, aviation, chars. A désarmer un adversaire. A parer une attaque ou l’esquiver ; à contre-attaquer, riposter, à suppléer, à distraire, ruser, rechercher, couvrir etc.
Les méthodes et conseils de leurs instructeurs allemands se révèlent payantes. Les légionnaires acquièrent en très peu de temps l’automatisme et les réflexes du soldat en campagne, la connaissance et l’expérience des armes et de l’utilisation du terrain.

Une chaude ambiance issue de la fraternité des armes et sous le signe de la communauté d’idéal préside tout au long de ces deux mois d’instruction (veillées, chants, débats, saynètes, occupent les soirées des légionnaires) lesquels seront sanctionnés début avril par la visite d’inspection du général Weber, commandant la division à laquelle appartient la compagnie. Une manœuvre effectuée sous les tirs à balles réelles par les légionnaires emportera l’adhésion et les félicitations de l’officier général entouré des membres de son cabinet et accompagné du ministre Rahn a passé en revue les volontaires, félicité leurs officiers harangué les hommes. Ceux-ci devront faire honneur au serment qu’ils ont prêté à la suite de leur engagement solennel :

« Fidèle au maréchal Pétain et à son Gouvernement, je prête serment au führer Adolf Hitler, chef des armées allemandes et européennes.
Je m’engage à servir au sacrifice de ma vie pour la victoire commune de la France et des puissances de l’Axe. »

(La formule du serment a été reproduite sur chaque livret individuel, signée par chaque légionnaire et paraphée par le chef de la Mission française.)
Les phalangistes ne vont pas tarder à monter en ligne. En quoi consiste leur équipement, quel est leur armement ?
Ils portent l’uniforme français des fantassins : vareuse, pantalon « sarouel » avec chevillères, bourguignotte, brodequins. La Phalange africaine étant une pure création gouvernementale française, l’insigne de l’unité combattante choisi fut la francisque du Maréchal. Les phalangistes portèrent donc sur la poitrine, sur la poche droite de leur vêtements, un écusson de tissu bleu noir orné d’une francisque à double tranchant, de métal doré. (Dimensions hors tout, 70 x 80 mm.)
La veille de leur montée en ligne, les phalangistes furent équipés d’une capote allemande, d’un casque allemand, de brodequins allemands. Le casque était orné de la cocarde tricolore. La vareuse, la capote portaient sur le côté droit la francisque du Maréchal. Les officiers garderont en ligne leur même tenue française, avec la francisque.
Les phalangistes sont armés de fusils allemands les officiers portent au ceinturon leur revolver français.
A l’exception des cent-soixante fusils allemands et leurs quelque vingt mille cartouches dont sont pourvus les combattants de première ligne, l’armement et le train sont français.
Le « train des équipages » comprend, outre une douzaine de véhicules allant du tracteur à six roues à la cuisine roulante, vingt-six chevaux – de selle, de trait —, et mulets.
Les six sections de l’unité se partagent dix-huit mitrailleurs français, quatre mitrailleuses Hotchkiss. Son artillerie est riche de deux mortiers de 60 et de trois canons de 47, qu’alimenteront trois milliers d’obus. Les fantassins disposent enfin de deux mille grenades offensives et défensives. Le stock de fusées et fumigènes de toutes couleurs est appréciables : un bon millier.
Dans la journée du 8 avril 1943 le camp se vide de ses légionnaires à l’exception d’une section qui instruira les nouvelles recrues en dépôt à Forgemol. Par camions, tracteurs chenillés, motos et side-cars les volontaires sont acheminés vers le secteur du front où ils relèveront une unité allemande sur la brèche, elle, depuis juste cinq mois. Ils sont en face de Medjez el-Bab, le point chaud du front nord. Leur adversaire ? des Anglais, des Australiens, des Néo-Zélandais. L’Américain avec son aviation et ses chars n’est pas loin, à Pichon, au Goubellat.

Les phalangistes prennent position. Sur les éminences dominant au nord-est la ville de Medjez el-Bab à environ cinq kilomètres de distance, et le long de la Medjerda, fleuve important, le long duquel courent la voie de chemin de fer et une route à grande circulation.
La compagnie compte 160 combattants en contact avec l’ennemi. Elle est divisée en cinq sections dont une de commandement avec chacune un lieutenant à sa tête. Elles disposent de mitrailleuses et l’une d’elles d’un groupe de mortiers. Le train de combat est en retrait, à 5 km des positions, à la ferme Klioua.
Dès la relève des Allemands l’activité est intense. Les sections essuient des tirs d’artillerie le jour, elles comptent des blessés et un mort – le légionnaire Le Bloa – dans leurs rangs, ce qui ne les empêche point la nuit d’entreprendre des patrouilles entre les secteurs et faire des incursions dans les lignes ennemies. Quelques coups de main se révèlent fructueux : renseignements, armes abandonnées, repérage des positions ennemies destruction de mines. Huit jours durant les différentes sections subissent les tirs de harcèlement de l’ennemi et de violents bombardements par obus fumigènes. Le terrain est constamment labouré par ces obus mais les phalangistes ont creusé leurs abris et s’accrochent à leurs positions. Les liaisons restent bien établies, le contact permanent la symbiose franco-allemande des unités en ce point du front, parfaite.

Le 16 avril une patrouille composée de 8 hommes, des sergents-chefs Picot et Laurent de la 1ère section entre en contact vers la cote de Fguira Mermah avec une forte reconnaissance anglaise (plus de 50 hommes). La patrouille, divisée en deux demi-groupes, avec intervalle régulier, se heurte à des inconnus. Le sergent-chef Picot lance le mot d’ordre. En écho le mot de passe anglais. Picot a à peine le temps de crier à son fusil-mitrailleur « Tire ce sont les Anglais » qu’il tombe fusillé à bout portant par une mitraillette. Le sergent-chef Laurent bondit en hurlant au milieu de l’ennemi faisant cracher son fusil-mitrailleur. Des silhouettes s’effondrent, d’autres fuient ou se terrent. Tandis que son groupe arrose de grenades les blés ou les arbustes formant écran devant lui, le reste du groupe Picot sous le commandement du caporal Périnne se replie en combattant vers la compagnie allemande la plus proche. Celle-ci apporte immédiatement son secours par un groupe et, en compagnie du caporal Périnne, retourne sur le terrain de combat. Parvenus au terrain de combat ils trouveront 7 morts et 3 blessés ennemis et un matériel de combat important : 1 mitrailleuse, 5 mitraillettes, 2 pistolets, des lance-flammes, des appareils spéciaux pour l’enlèvement des mines. Butin et tableau de chasse du groupe du sergent-chef Laurent. Les Allemands décident d’évacuer les trois blessés anglais et le matériel abandonné. Le corps du sergent-chef Picot (trouvé décapité) sera enlevé plus tard.

Trois jours après, sur la route menant à Bordj Frendj, au PC du régiment, les légionnaires de la 1ère section en tenue de campagne, en chandail avec courroies de musette et de bidon, chantent l’hymne de leur « armée».

En présence du colonel du Jonchay, du commandant Curnier et du colonel Audorf, commandant le 754e régiment de Panzer Grenadier, ils reçoivent des mains du général Weber, Kommandeur de la 334e division d’infanterie, les Croix de Fer récompensant leur acte de bravoure. Les services des actualités opèrent. Allocution du général célébrant la fraternité d’armes franco-allemande sous le ciel africain, (pour la petite histoire disons que le général Weber, qui s'attendait à passer le ruban dans une boutonnière, faute d’épingle, attacha les rubans à la courroie symbolique du bidon ! O bienheureuse armée française !…)
Le 20 avril un groupe franc est constitué au sein de la compagnie. Sous la conduite de l’aspirant Goussaux, gardien du fanion de la Phalange africaine, l’assaut est donné à une ferme puissamment tenue par les Anglais. La position est enlevée et occupée par la 3e section qui nettoie le terrain une journée et une nuit durant. Des canons anti-tanks allemands sont placés en renfort entre les différents secteurs tenus par les phalangistes car on s’attend à une offensive anglaise. Une patrouille retrouve le corps du sergent-chef Picot, dépouillé cette fois de ses chaussures, à proximité des corps des 7 Anglais mitraillés par le sergent-chef Laurent et ses hommes.

Les bombardements se font de plus en plus violents. Les positions phalangistes sont copieusement arrosées. Puis dans la nuit du 22 avril, à 21 heures, le ciel s’enflamme : les batteries ennemies tirent à une cadence accélérée sur le 3e bataillon allemand tenant le djebel Ahmera qui surplombe la Medjerda.
A 3 heures du matin l’offensive anglaise se déchaîne contre ce 3e bataillon et une heure plus tard contre les positions phalangistes. La mêlée devient générale dans la fumée des obus fumigènes. Les mitrailleuses des sections recevant le choc des Anglais tirent sans arrêt. Des groupes entiers sont fauchés, les hommes tombent leurs armes à la main. D’autres s’égarent en portant secours à des camarades encerclés. Certains parviennent à se dégager et refluent vers des secteurs moins exposés. La 3e section est enveloppée de brouillard et se fait massacrer non sans tirer jusqu’à la fin. Alain Graignic – le fils de l’ancien contrôleur civil —tire sans discontinuer avec son FM sur les Anglais qui progressent au milieu des fumigènes. Soudain il lâche son arme, hurle le nom de sa mère et s’écroule. Son chargeur, Georges Goloubmetz ramasse le FM et tire, tire tant qu’il peut. L’arme s’enraye Deux tommies baïonnette au canon bondissent à ses côtés, le font prisonnier. Avec lui, 60 hommes sont morts ou ont été faits prisonniers au cours de ces douze heures de combat.

La section de commandement et le reste du groupe de reconnaissance, en marche vers la cote 133, voient arriver sur eux des chars. Ce sont les Américains qui appuient l’offensive anglaise en direction des côtes 104 et 130 qui seront occupés aussitôt. Des rescapés des compagnies allemandes tenant le fleuve Medjerda rendent compte de la progression anglaise et de l’investissement des positions dans ce secteur à 18 heures.

La section de réserve du lieutenant Clergeot ayant fait route depuis la Medjerda, s’intègre à la section de commandement du capitaine Dupuis et prend position sur la côte 119. A 20 heures, les 70 survivants de la bataille se replient non sans que l’aspirant Vintmil, professeur de latin dans le civil, anéantisse avec sa mitrailleuse les servants d’un canon-revolver tirant non loin de là. Il venge ainsi la mort de son jeune frère, un lycéen de 16 ans.
Depuis l’entrée dans la bataille des chars américains, le train de combat a reçu l’ordre du commandant de bataillon de se replier sur Tébourba. Le rassemblement des phalangistes s’effectue au P.C. du bataillon, L’effectif de la compagnie comprend un peu plus de 100 hommes dont de nombreux blessés.
L’offensive anglo-américaine est stoppée. Des canons multitubes allemands (réplique des fameuses « orgues de Staline ») ont pris position sur toutes les crêtes et le front se « stabilise ». Pour quelques jours seulement. La Phalange africaine panse ses blessures, se ravitaille, se ré-équipe, reprend ses activités : patrouilles, reconnaissances, liaisons. La petite unité enregistre à nouveau des morts mais elle inscrit à son actif de nouveaux succès, harcelant les positions fluides de l’ennemi plus ou moins isolé de ses arrières.

Le 27 avril 1943, à 3 heures du matin, la relève de la compagnie a lieu, La première Phalange passe en réserve de bataillon. Elle cantonne à 3 kms de là à la ferme Mahfoura. A midi elle essuie un double bombardement aérien, vers 17 heures un bombardement d’artillerie, d’intensité égale à celle du 22 avril. Le légionnaire Dominique Berg, Croix de Fer, infirmier, sauve d’une mort certaine la femme du fermier qui a la cuisse ouverte profondément par un éclat. C’est à nouveau l’offensive ennemie. Les unités allemandes sont encerclées. Le commandant du bataillon ordonne au capitaine Dupuis de faire route sur Massicaut. Il est accordé à ses hommes dix jours de repos. A l’entrée nord de cette ville, le colonel du Jonchay, qui n’a pas cessé depuis la montée en ligne des volontaires, le 8 avril, de rendre visite aux combattants, vient communiquer aux phalangistes remerciements et félicitations de l’amiral Esteva, résident général.
Sur le front des troupes, le chef de bataillon Burgmeister remet au nom du Führer la Croix de Fer de 2ème classe au capitaine Dupuis.
La compagnie se déplacera de nouvelles fois, se repliant toujours plus au nord et à l’est installant ses quartiers dans des fermes, ou des ravins, des bois ou dans les champs, essuyant des bombardements de l’aviation anglo-américaine. Des équipes de travailleurs juifs, italiens, musulmans, français aussi – des Chantiers de Jeunesse – creusent des retranchements sur les derniers contreforts devant Tunis. Les obus pleuvent.

Le 1er mai 1943, les phalangistes sont cantonnés à la ferme Fontaine au nord de Massicault. Les blessés et les malades sont évacués sur le dépôt Faidherbe à Tunis. L’effective est de 89 hommes dont 64 en ligne. Les munitions françaises surtout des mitrailleuses Hotchkiss font défaut Les aspirants Goussaux et Vintmil sont nommés sous-lieutenants et chefs de section. Le capitaine Peltier, chef adjoint de la Mission Militaire rend compte de la mission à Vichy du commandant Curnier. Ce dernier a reçu du président Laval confirmation de l’intégration de la Phalange africaine à la Légion Tricolore.
Le 6 mai l’armée allemande se replie sur Tunis. La première Phalange quitte la ferme Fontaine pour gagner Tunis vers 20 heures non sans avoir subi un violent bombardement à La Mornaghia.
Le 7 mai le capitaine Dupuis reçoit de l’état major allemand l’ordre de démobiliser la compagnie. Les hommes ne seront pas évacués sur l’Italie le rembarquement n’étant plus possible. L’amiral Esteva lui, a été rapatrié (contre son gré) sur Paris.
Le lieutenant Charbonneau de la Mission Militaire entreprend dans la nuit une démarche auprès de Mgr Gounot, archevêque de Carthage, pour mettre sous sa protection les quelque cent vingt phalangistes démobilisés. Le primat d’Afrique lui accorde ce qui est demandé. Les phalangistes seront rassemblés à Carthage dans la propriété de l’archevêché. Ils n’auront pas d’armes. Leurs familles pourront les accompagner. On peut espérer pour eux un sort identique à celui des troupes françaises de Syrie demeurées loyalistes et rapatriées sur Marseille en 1941…

EPILOGUE

La centaine de phalangistes réfugiés à Carthage et partageant leur refuge avec des Anglais furent arrêtés par les autorités militaires giraudistes – au grand ébahissement des Anglais qui « auraient bien voulu les garder » et, passant de prison en prison, incarcérés finalement à Alger où ils retrouvaient des éléments portés disparus lors de l’attaque du 23 avril. Là, l’épuration décidée par Charles de Gaulle quelques mois plus tard, les frappa dans les personnes de leur chef le colonel Cristofini (arrêté en Corse), fusillé sur une civière : il s’était suicidé au moment de son départ pour le supplice, et de leurs officiers condamnés à la peine de mort – avec un adjudant-chef, un sergent-chef et un légionnaire. Ces derniers virent leur peine commuée en celle des travaux forcés à perpétuité et furent transférés au bagne de Lambèse dans le sud constantinois où la plupart des phalangistes purgeaient de lourdes peines de travaux forcés.
De tous jeunes phalangistes, après une brève incarcération, furent versés dans des régiments de corps d’armée en campagne en Italie, en Provence ou en Alsace.
Enfin une minorité de leurs camarades – une vingtaine, une trentaine ? – ayant choisi la clandestinité ou l’anonymat, échapperont à toute répression.
Mais du côté « loyaliste », un autre jeune phalangiste, Folacier, ayant réussi à quitter Tunis par avion au milieu des Anglais et des Américains, rejoignait la Métropole et, après un séjour à Montargis, dépôt de la L.V.F., montait sur le front russe sous l’uniforme à tête de mort. Accompagné de son jeune frère, âgé à peine de 15 ans, il disparaissait sur l’Oder…
En 1953, soit dix années après leur engagement dans la dernière unité française gardienne de l’Empire, les derniers phalangistes incarcérés sortaient du bagne de Lambèse.

René PELLEGRIN.
p22


 

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