Post Numéro: 5 de fbonnus 02 Avr 2016, 07:44
Voici l'avis de François Delpla, qui, une fois n'est pas coutume, nous a fait une infidélité en préférant poster son avis sur face de bouc ....
POISON D'AVRIL !
Ce n'est pas parce qu'on s'est allègrement trompé pendant près d'un siècle en refusant de prendre au sérieux le discours nazi et de le lire attentivement qu'il faut sombrer maintenant dans l'agnosticisme et prétendre que le brouillard est total, qu'on n'y comprendra jamais rien.
Nous sommes justement dans une période de transition, avec des ouvrages qui comportent des avancées mais hésitent à basculer franchement du bon côté. Trois exemples :
-Jean-Paul Bled (fils unique du fameux couple d'instits qui nous apprend l'orthographe), abordant sur le tard le nazisme après une carrière de germaniste centrée sur le XIXème siècle, écrit excellemment dans l'intro de son dernier livre (
http://www.editions-perrin.fr/livre/les ... 2262039677 ) qu'on s'est trop focalisé sur les querelles des lieutenants en oubliant qu'ils étaient dominés par un patron puis, dans son chapitre sur Hess, reprend sans une esquisse de doute la thèse parfaitement invraisemblable que Hitler n'était pas préalablement au courant de son vol vers l'Ecosse.
-Johann Chapoutot et sa
Loi du sang (Gallimard 2014) : il explique éloquemment qu'il faut "prendre les nazis au sérieux" mais limite volontairement, obstinément, son attention aux petites mains, si j'ose dire, intellectuelles, en refusant de voir qu'il y a un maître et inspirateur et en finissant par lui dénier toute importance, dans le débat actuel sur la réédition de Mein Kampf ! Car à faire connaître ce document on ne risque pas moins qu'une "régression historiographique" !!
http://www.delpla.org-Corinne Chaponnière elle-même, au-dessus de tout éloge dans son avancée sur la genèse du geste meurtrier de Grynspan, offre un tableau bien flou des rapports de forces dans la direction nazie, allant jusqu'à accorder au pauvre Goebbels, perpétuellement en retard d'un métro, un rôle déterminant, au détriment du levier direct de Hitler qu'est le SD.
Tout cela pour dire que le nazisme est au contraire un régime assez transparent, dans les grandes lignes sinon dans tous les détails, pour peu qu'on pose les bonnes questions... et qu'on se détourne des pistes vers lesquelles il a lui-même orienté les enquêtes.
L'arrêt devant Dunkerque est de ce point de vue un cas d'école : il suffit souvent de prendre le contrepied de ce que Hitler raconte sur le moment à Halder, Brauchitsch, Mussolini, Jodl, etc., pour y voir clair, comme quand on met au point une lentille.
http://www.delpla.org/article.php3?id_article=95« Alors mon petit Robert, écoutez bien le conseil d'un père !
Nous devons bâtir notre vie de façon à éviter les obstacles en toutes circonstances.
Et dites-vous bien dans la vie, ne pas reconnaître son talent, c'est favoriser la réussite des médiocres. »
_________________________________________________
Michel Audiard