Levy a écrit:Il me semble bien, en effet, que le sujet du "Jour le plus long" a déjà été débattu à plusieurs reprises, mais, comme nous aimons tous ce film culte pour l'époque, vous ne vous ferez pas taper sur les doigts. C'est l'occasion de revoir John Wayne, ou Bourvil, Curd Jurgens dans ses fameux rôles de grands méchants. Pour les erreurs, j'en ai retenu deux. Le casino de Ouistreham était en forme de pavillon et pas d'un immeuble, et les plages d'Omaha, notamment, étaient celles de Corse. Néanmoins, je reverrai peut etre ce film avec grand respect pour nos libérateurs, quels qu'ils soient et quels que soient leurs actes de courage.
Je suis à 120% d'accord avec Jumbo et c'est bien ce film qui m'a donné envie de m'intéresser à WW2 parce qu'il m'a subjuguée la première fois que je l'ai vu (et la 2e aussi et la 3e aussi et la 4e, etc., etc.) et parce qu'il m'a fait prendre conscience du sens du sacrifice qu'il avait fallu à des types de 20 ans venant du fin fond de l'Oklahoma, de la campagne britannique ou de la forêt canadienne pour venir mourir sur des plages à des milliers de kilomètres de chez eux. C'est aussi ce film qui m'a permis d'appréhender l'absurdité de la guerre via des scènes telles que celle où un soldat allemand se rend en implorant "Bitte, bitte" et se fait tuer immédiatement par un soldat qui dit qu'il se demande ce que ça veut dire ou cette autre où un soldat mort a mis ses bottes à l'envers, etc.
Bref, j'arrête là mais pour moi ce film est avant tout un choc salutaire doublé d'une émotion pure.
Quant aux "erreurs" relevées par Levy, pour moi elles n'en sont pas. Qu'est-ce qu'on en a à faire concrètement de la forme du casino de Ouistreham ? qu'est-ce que ça ajoute sur le plan historique, que le bâtiment soit rond, carré, peint en vert avec des volets roses ou l'inverse ? A mon avis, strictement rien. C'est un peu comme si tu reprochais à Mitchum de ne pas ressembler physiquement au personnage qu'il incarne ou, dans un autre registre, à la tirade du nez de Cyrano de Bergerac de Rappeneau d'être tournée sur le parvis de la cathédrale du Mans ou, dans le même film, que le départ à la guerre des cadets soit tournée dans les rues du vieux Mans et pas là où Edmond Rostand avait situé son action.
On s'en fiche que la plage du film soit en Corse, en Normandie ou même au Maroc. La plage du film est un décor !!! Bien évidemment qu'on ne peut pas tourner toujours dans les lieux précis où se sont déroulés les faits... mais quelle importance ? Si on poussait cet étrange souci de l'authenticité jusqu'au bout, faudrait-il deterrer les morts pour tourner avec les vrais protagonistes ? Le cinéma historique est sensé relater, retracer le plus fidèlement possible la réalité des faits mais il est clair qu'à certains moments, il peut voire il doit s'en détacher.
A propos du film "un long dimanche de fiançailles" de Jeunet, je me souviens d'un point très intéressant lors d'une interview du décorateur je crois. Il expliquait comment il avait travaillé pour reconstituer les décors de l'époque (eh non, le film n'a pas été tourné dans les "vraies tranchées") avec un souci de coller au juste à l'esprit du roman de Japrisot d'une part et aussi, évidemment, à la réalité de l'époque. Toutefois expliquait-il, un film a une durée réduite (entre 1h30 et 2h30 en général, certes beaucoup plus dans le cas du Jour le plus long) et, de ce fait, on est parfois obligé de faire des raccourcis et de prendre des libertés pour les besoins du film et parce que telle situation passe mieux à l'écran que telle autre. Ainsi, dans "un long dimanche de fiançailles", on voit Audrey Tautout téléphoner depuis une cabine téléphonique dans une gare. Or, à l'époque, ça n'existait pas mais pour le scenario c'était nettement plus simple et rapide de la faire téléphoner "là" que de la faire sortir de la gare et chercher un téléphone ou de la faire envoyer un télégramme ou une lettre...
Les puristes pourront crier au scandale mais sur le fond, quelle importance ? où est la trahison ?
Bien sûr, mon exemple est imparfait et on peut m'objecter que "un long dimanche de fiançailles" est de toute façon une oeuvre de fiction. Certes, mais celle-ci s'inscrit dans un contexte historique bien précis qu'il lui faut respecter dans l'esprit plutôt qu'à la lettre... et c'est bien de "vraissemblance" plus que "d'exactitude" dont il est question dans ce film puisque, par définition, les personnages et les situations précises évoquées n'ont pas existé.
Dans "le jour le plus long", le souci du réalisme et du détail historique était sans doute poussé beaucoup plus loin, mais ne cherchons pas la petite bête et ne nous arrêtons pas à la forme d'une plage ou d'un bâtiment...
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Cécile