Post Numéro: 32 de Chef Chaudart 13 Avr 2012, 17:08
Je vais parler un peu "stratégie", si cela ne vous ennuie pas.
La Bombe de 1945 est une arme psychologique. C'est à dire que pour avoir des effets réels sur l'effort militaire Japonais, il aurait fallu en larguer des dizaines. On compte donc que l'horreur qu'elle va générer va convaincre le gouvernement Japonais de déposer les armes.
A la différence des bombardements stratégiques "classiques", dont on espère le même résultat, mais qui resteront sans effet autre que de faire inutilement de plus grands dégâts et de plus nombreuses victimes innocentes encore, c'est la brutalité même de l'attaque dont on espère l'efficacité: un unique appareil, larguant une unique bombe, capable de raser une ville entière. De quoi amener le plus fanatique des militaristes Nippons à se poser des questions sur l'utilité de persister dans une résistance devenue inutile.
Une Commission est donc réunie dont la mission est claire: définir comment utiliser au mieux la Bombe afin de mettre fin à la guerre.
Ses membres ne sont pas des animaux à sang froid dépourvus d'humanité: ils savent pertinement qu'ils peuvent aller jusqu'à faire des milliers de victimes et cherchent à l'éviter. Il est donc proposé des alternatives au bombardement de villes. Essais dans un endroit désert (mais si les Japonais croient à une mystification? Si la propagande cache l'affaire à la population et la prépare au pire?), prévenir les populations avant (mais que se passe-t-il si la bombe - encore un prototype - n'explose pas? On passe pour des imbéciles!), etc... Chacune de ces initiatives induirait une diminution de la terreur, du choc psychologique, que la Bombe est sensée produire, donc de son efficacité.
De la même manière, plusieurs cibles sont examinées. Certaines sont écartées (Kyoto est jugé trop chargé d'Histoire, bombarder le Palais de l'Empereur pourrait s'avérer contre productif, car s'il était absent ou en réchappait, le gouvernement crierait au miracle, Tokyo est déjà trop endommagée, etc...). Il est décidé de bombarder des villes jusque là peu touchées par les bombardements "classiques", mais qui comportent des industries ou installations à vocation militaire.
La Commission décide donc de maximiser les dégâts potentiels, tant humains que matériels, de conserver l'effet de surprise propre à stupéfier les décideurs ennemis, de rendre l'évènement impossible à dissimuler à la population... et à lancer la seconde Bombe rapidement afin de convaincre l'ennemi que d'autres sont disponibles et suivront s'il ne s'incline pas. Elle décide de diminuer le risque d'échec, au prix de la vie des populations civiles, afin de maximiser les chances de remplir sa mission: mettre fin à la guerre. Cette décision n'est pas facile à prendre, mais elle va s'avérer payante: le Japon va capituler.
Reste une question à laquelle quelqu'un pourra peut-être répondre ici: aurait-on pu obtenir le même résultat en n'insistant pas sur la clause qui exigeait du Japon une "capitulation sans conditions"? Il ne semble pas, selon ce que j'ai lu...
http://www.dannen.com/decision/index.html...never give in, never give in, never, never, never, never-in nothing, great or small, large or petty - never give in except to convictions of honour and good sense. Never yield to force; never yield to the apparently overwhelming might of the enemy.