Post Numéro: 6 de mescal 22 Aoû 2009, 21:16
Bon, j'me lance ...
Début 1944, les Etats-Unis sont à l'offensive selon deux axes dans le Pacifique.
Le premier, dit Pacifique-Sud (ou, en termes de nom de code, Cartwheel) est la remontée des iles Salomons qui a commencé à Guadalcanal en août 1942, et dont la dernière étape est Bougainville, sur laquelle ils ont débarqué en novembre 1943. Son objectif défini au départ, la prise de Rabaul, a évolué à cette date vers une simple neutralisation de cette base.
Le second axe, plus récent, dit Pacifique Centre, a été ouvert en novembre 1943 par les débarquements aux iles Gilbert (Tarawa). La seconde étape a vu la prise de Kwajalein. Il a vocation a se prolonger vers les Mariannes.
A ce moment, le périmètre extérieur de défense du Japon est donc bien entamé, mais il lui reste néanmoins deux bases majeures sous son contrôle : Rabaul, maintenant en première ligne, et Truk.
Si Rabaul est une "prise de guerre", occupée début 42, Truk est sous contrôle japonais depuis que les possessions allemandes du Pacifique, dont les Carolines, sont passées au Japon en 1918 (officiellement sous mandat de la SDN). C'est progressivement devenu une base majeure de la Marine Impériale, son lagon étant bien protégé des éléments et des flottes adverses (canons de marine) et les ilots permettant de créer des aéroports. Elle a toujours été percue comme un point fort du périmètre de défense (cf. les instances du Plan Orange qui en faisaient un objectif intermédiaire majeur de toute attaque vers le Japon). Il faut cependant noter que si le lagon permet le mouillage d'une flotte nombreuse et de ses auxiliaires, Truk ne dispose que de très peu d'infrastructures navales, contrairement par exemple à Pearl Harbor. Ainsi pour les réparations, des navires-ateliers sont présents, mais toute réparation d'importance nécessitant une cale sèche doit etre faite en métropole. Elle sert de base arrière aux différentes nouvelles implantations prises lors du début de la guerre, et abrite le gros de la flotte combinée et le commandement jusqu'au début 1944. Cependant, elle se trouve à ce moment en première ligne, meme si elle reste hors de portée de l'aviation lourde alliée.
Pour les Américains, le problème consistait à neutraliser ces deux grandes bases, chacune capables d'abriter une flotte conséquente et capable de faire opérer plus de 300 avions et de menacer les opérations à venir (en particulier les assauts sur Eniwetok et les Mariannes).
Un point important à noter est que Truk était la base arrière de Rabaul: tout le ravitaillement de cette dernière en provenance du Japon passait par Truk. Donc neutraliser Truk revenait du coup à neutraliser Rabaul.
Il avait longtemps été admis que l'attaque directe de la base navale de Truk était sinon impossible, du moins très difficile. Cependant en 1944, la "nouvelle" US Navy, malgré les pertes du début de la guerre, commencait à toucher les dividendes du Two Oceans Navy Act de juillet 1940, recevant suffisamment de nouveaux navires pour envisager de nouvelles opérations.
De plus les prises des Gilbert et de Kwajalein avaient ouvert une brèche dans le périmètre de défense, et la Marine Impériale avait déja souffert de nombreuses pertes -- et avait refusé le combat lors de la prise des Gilbert.
La Task Force 58 recut donc la mission d'executer un raid sur Truk, pour y détruire les navires de guerre japonais et les installations au sol (aérodromes). Cette force se composait de cinq porte avions lourds (Enterprise, Yorktown II, Essex, Intrepid, Bunker Hill), trois porte-avions légers (Cabot, Cowpens, Belleau Wood), six cuirassés (Iowa, New Jersey, Washington, South Dakota, Massachusetts, Alabama), cinq croiseurs lourds (Baltimore, Wichita, San Francisco, Minneapolis et New Orleans), cinq croiseurs légers (San Diego, Santa Fe, Mobile, Biloxi, Oakland) et environ 25 destroyers.
L'attaque fut anticipée par le commandement japonais par suite d'analyse d'interceptions radios, et la flotte japonaise évacua le lagon vers les Palau et le Japon.
Lorsque la flotte US lança ses avions le matin du 17/02, il ne restait donc quasiment plus de navires de guerre au mouillage. Mais plus de trente cargos se trouvaient toujours là, ainsi qu'environ 300 avions sur les pistes.
Les chasseurs japonais se trouvèrent dépassés par le nouveau F6F Hellcat américain et ne purent opposer une véritable résistance. 270 avions japonais furent détruits, tant au sol qu'en l'air, pour seulement 20 américains. Pendant ce temps, les avions d'assaut attaquaient tout ce qui flottait. Ces attaques furent répétées le lendemain. Au total, 32 navires marchands furent coulés, plus une petite dizaine de navires militaires auxiliaires.
Pendant les attaques aériennes, anticipant une sortie de la part des navires japonais, les cuirassés Iowa et New Jersey, accompagnés de trois croiseurs lourds et quelques destroyers, effectuaient un ratissage au nord de l'atoll. Il y coulèrent trois croiseurs (dont un préalablement avarié) et quatre destroyers qui tentaient de s'enfuir. Seul le destroyer Nowaki parvint à s'échapper.
Cependant, pendant une contre-attaque aérienne dans la nuit du 17 au 18, un avion japonais parvint à torpiller le USS Intrepid et lui infligea des dégats relativement importants (il sera de retour au combat en juin, après réparation sur la côte Ouest).
Au total, c'était une victoire écrasante pour la Marine US. Même si la Flotte Combinée n'avait pu être surprise, elle avait battu en retraite sur des milliers de km, ouvrant la voie pour les débarquements à Eniwetok, aux Mariannes, à Manaus et Hollandia.
De même, le sort de Rabaul, désormais incapable de recevoir des approvisionnements, était réglé.