.... Toujours pour essayer de comprendre la situation en 1942 pendant leur entrainement à Kruszyna; qui étaient ces légionnaires ayant refusé de prêter serment ?. Quelle a été leur influence dans la bonne marche de l'I.R. 638 ?
Le 4 juin 1942, à Kruszyna, a lieu une cérémonie de prestation de serment. Les volontaires français, apres avoir endossé le "Vert de Gris", se doivent d'assurer leur fidélité au Reich allemand en prononçant "Je le jure" apres lecture du serment : "Je fais le serment solennel devant Dieu d'obéir strictement au chef des armées allemandes et alliées, Adolf Hitler, dans sa lutte contre le bolchévisme et d'être prêt à tout instant à faire en brave soldat le sacrifice de ma vie"
Ce jour là, 16 légionnaires ne léveront pas le bras. S'enclenche alors une procédure interne à la LVF qui transmettra aux autorités judiciaires allemandes à Breslau des rapports circonstanciers.
1° étape : le 8 juin 1942, un rapport de cinq pages est transmis, sans commentaire, répondant, pour chaque légionnaire à :
- son identité (zur Person)
- ses dires (zur Sache) à la question : pourquoi avez vous refusé de prêter serment ?
On note que :
- zur Person :
.... 3 affectations (1°, 2° et compagnie de commandement)
.... les noms sont, pour certains, tres farfelus (manifestement des pseudos)
.... ils sont nés entre 1910 et 1921 (dont 5 en 1918)
.... ils avaient tous des métiers dans le civil (dont un professeur et 3 militaires de carriére)
.... ils sont en majorité célibataires ( 3 sont chargés de famille)
.... 14 sont français (2 sont de nationalités étrangéres), dont 2 fréres.
.... ils se sont engagés à la LVF entre novembre 1941 et avril 1942 (la majorité en fin 1941)
- zur Sache : (parfois plusieurs motifs pour un cas)
.... 5 X manque de camaraderie
.... 4 X inapte physique (cardiaque, entrainement trop dur)
.... 3 X punitions
.... 2 X politique (prestation de serment pas signalée dans les conditions d'engagement en France)
.... mal du pays
.... absence de permissions
.... injustice
.... pas envoyé au front
.... affectation (veut rejoindre une autre compagnie)
.... soutient de famille (pére décédé)
.... nourriture insuffisante
2° étape : le 9 juin, autre rapport de deux pages fournissant une analyse générale et des appéciations sur les 16 légionnaires :
- 11 reviennent sur leur décisions en signant un formulaire, véritable lettre d'intention, assurant une volonté de prêter serment ultérieurement. Le rapport demande qu'il ne faut pas "mettre la pression" sur ces hommes.
- 5 persistent à ne pas prêter serment . Ces 5 hommes, individuellement, sont l'objet d'une évaluation tres poussée, dont :
.. 4 tres critiques : "Dickkopf", pas d'idéal, simulateur (syphilis), pas courageux, manipulateur, mauvaise volonté, intentions critiques vis à vis de la LVF, pas de morale.
.. 1 compréhensive : bon caractére mais "politiquement" inadapté (le légionnaire explique que, s'il prête serment, peut être un jour, il sera obligé de combattre, apres les bolchéviques, les communistes français, )
En conclusion , ce rapport demande au Président du Tribunal Militaire allemand de ne pas laisser ces 5 hommes quitter la LVF sans être sanctionnés (1 doit même être rendu inoffensif)
3° étape : une succession de courts rapports donnant l'évolution, cas par cas, des signatures des lettres d'intention (formulaire)
Le 16 juin 1942, un rapport final fournissant les noms des 3 (trois) légionnaires réfractaires définitifs à la prestation de serment
Notes :
- je n'ai pas trouvé les jugements allemands concernant ces 3 hommes
- je ne veux pas divulguer les identités des légionnaires "réfractaires" et rédacteurs des rapports
Commentaires :
- En définitive, lors de la cérémonie du 4 juin 1942, 3 légionnaires seront réfractaires à la prestation de serment. 3 , cela représente moins de 1% des prestataires. Bien sûr, il est impossible de généraliser cet acte aux 4 années de présence de la LVF (ou Légion Tricolore) à l'est. Toutefois, ce 1% représente que quelques dizaines de légionnaires sur toute cette durée, loin des centaines de cas annoncés dans les livres références en France . On peut se demander sur quoi les auteurs ont basé leurs calculs.
- Ces "contestataires" :
... sont restés longtemps, plusieurs mois, au dépôt et leur influence sur le moral des "arrivants" est incontestable ("Radio Kruszyna"). La LVF aurait du les exclure immédiatement.
... si il y bien eu "autovidange" en décembre 1941 (des centaines de rapatriés sanitaires, vrais ou faux, pour seulement une quarantaine de KIA); en juin 1942, la LVF accepte dans ses rangs le "Tout venant", possédant même des critéres douteux, morale ou honnêteté. Cela peut en partie expliquer le comportement criminel de la LVF en Pologne et en Bielorussie. Ces "salopes" (terme de l'époque) seront une des causes de la médiocrité de l'IR 638. Le manque de cadres, la politique sont certainement des éléments à prendre en compte, mais, dés leur arrivée au camp d'entrainement, les "bleus" seront confrontés et conditionnés à ces "rats de dépôt". La suite ne pouvait être que médiocre.
... ces Français n'étaient pas aptes à supporter la discipline allemande. Plusieurs réfractaires se plaignent des punitions (2 jours d'arrêt pour un appel manqué, 8 jours pour une arme pas nettoyée, bastonnade pendant les arrêts de rigueur). Si ces plaintes ne peuvent être un motif de desobéissance, ne pas prêter serment, elles en disent long sur l'adaptation des légionnaires au réglement militaire en vigueur dans la Wehrmacht. Les livres références en France "politisent" au maximum le phénoméne des refus, mais, ne peut-on pas dire que, en réalité, c'est le caractére "français" , éternel raleur et contestataire, qui est insoluble dans la mentalité prussienne ? . Alors, avec un "tirage" faussé en France (propagande), un "grattage" à Krsuzyna (forcé, en plusieurs étapes) l'historique de la LVF à l'est ne pouvait qu'être désastreux.
Cordialement
(on peut débattre de ces refus avec des stats solides, les "Mabire" ou autres tocards, s'abstenir)