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Nouveau messagePosté: 23 Juil 2007, 16:06
de Bruno Roy-Henry
Nicolas, je comprends votre position, assez bien argumentée, au reste...

Et j'ai bien noté que le point de vue de François rejoint indirectement bien que fortuitement celui de certains vichystes !

Cela dit, c'est assez artificiel comme débat puisque le Haltbefehl n'a pas abouti, même si nous savons que c'est grâce à l'obstination de Churchill...

Qui a peut-être mis le doigt là où ça faisait mal. Parce qu'après tout, si ce n'était pas très grave pour la France de perdre le Togo et le Cameroun (mais ça mettait quand même la puce à l'oreille du bouledogue british), la cession du bassin de Briey (donc de l'arrondissement voisin de Thionville) était quand même dure à avaliser.

On n'a pas grand chose sous la main pour cerner le champ du Haltbefehl diplomatique, sauf la communication de Nördling à Reynaud.

Et là, ces conditions sont bien indiquées. C'est peut-être ça qui a fait échouer la manoeuvre...

Nouveau messagePosté: 23 Juil 2007, 17:39
de Nicolas Bernard
Je pense que les propositions transmises par Göring à la France et l'Angleterre par l'intermédiaire de la Suède, et ce avant l'offensive du 10 mai 1940, traduisent une certaine clémence propre à la situation préexistante à ladite offensive. Deux semaines plus tard, l'armée française a été mise K.O. en Belgique et à Sedan, le Bénélux a été totalement envahi, l'armée britannique est sur le point d'être annihilée avec les restes épars du corps de bataille français. Paris ne peut pas refuser grand chose, dans un tel contexte.

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Hermann Göring. Ses émissaires suédois se verront
opposés une fin de non-recevoir par Churchill.


En principe, le scénario de Munich devait se reproduire. Sollicité par un émissaire suédois (l'homme d'affaires Birger Dalherus), le gouvernement britannique aurait eu à passer par l'entremise de Mussolini pour arracher la paix à Hitler. Ce dernier avait poussé le vice jusqu'à vouloir diviser ses adversaires : un autre émissaire suédois, le diplomate Raoul Nordling, sera envoyé par Göring à Paris pour solliciter le gouvernement français !

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Raoul Nordling. En 1940, il est un pion sur l'échiquier de Hitler...

La ténacité de Churchill, qui doit parer la "trahison" de Lord Halifax, son Ministre des Affaires étrangères (lequel sollicite auprès de l'ambassadeur italien à Londres une médiation entre Hitler et la Grande-Bretagne), et conjurer le pessimisme de ses généraux de la poche de Dunkerque, a été le facteur décisif de l'échec de cette magouille hitlérienne.

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Lord Halifax, l'homme qui aurait pu
détrôner Churchill et pactiser avec Hitler.


Mais il ne faudrait pas oublier... Mussolini, convaincu que l'heure est venue d'entrer en guerre puisque les Occidentaux ont mis genoux à terre : en fermant à Halifax la porte de sortie que lui offrait l'ambassadeur italien, il pousse Sir Neville Chamberlain, demeuré au Cabinet de Guerre, à rallier les positions de Churchill (non sans avoir tergiversé). Ce soutien apporté au Premier Ministre torpillera la tentative d'Halifax de conclure la paix avec l'Allemagne. Qui aurait cru que l'homme de Munich serait également celui qui contribuerait à mettre Hitler en échec à l'heure la plus cruciale ?

Nouveau messagePosté: 24 Juil 2007, 21:13
de Nicolas Bernard
Petit ajout sur la méthode, assorti d'un petit scoop...

François Delpla a écrit:Je voudrais attirer l'attention sur l'utilité, en histoire, de la chronologie dite fine.

Dans un débat comme le nôtre, qui porte sur le mois de mai 1940 et tente de cerner de quoi auraient été faites les semaines suivantes si la paix s'était produite, des citations de Mein Kampf peuvent être intéressantes, tout comme des citations de propos hitlériens à la veille de Barbarossa.

Mais elles ne sauraient être invoquées sur le même plan que des propos d'époque, et sans la moindre mention de ces différences chronologiques, propres à changer du tout au tout l'état d'esprit de l'auteur sur les sujets concernés.


Des citations de Mein Kampf sont davantage qu'intéressantes, puisque ce livre dévoile le programme territorial d'Adolf Hitler, programme auquel il ne cessera de se tenir. Il suffit de lire les extraits que j'ai cités pour s'en convaincre : sa politique étrangère a été moulée dans cet ouvrage. Et il n'en démordra pas.

Or, Mein Kampf souligne expressément que Hitler est résolu, d'une part à régler ses comptes avec la France, moins par vengeance que par désir de pacifier l'Ouest, d'autre part et postérieurement à cette phase de conquérir un espace vital à l'Est. Il est hors de question, selon lui, de cohabiter avec l'U.R.S.S., puissance dégénérée parce que slave, et criminelle parce que juive.

Dès lors, je vois mal pourquoi il conviendrait de disqualifier ce livre et de privilégier quelques vagues propos entourant une démarche diplomatique visant la France et la Grande-Bretagne alors que les Panzer foncent sur Dunkerque.

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Mais rappelons une fois de plus votre thèse. Selon vous, et dans l'hypothèse où l'Angleterre et la France auraient signé la paix proposée par Hitler à la fin mai 1940, le dictateur nazi aurait renoncé (!) à envahir l'U.R.S.S. et aurait été disposé à éviter aux Juifs le génocide qu'ils ont subi.

Vous ajoutez que Hitler a pris la décision d'envahir la Russie après l'attaque britannique de Mers el Kébir, le 3 juillet 1940. La résolution de Churchill l'aurait en effet amené à forcer le destin, et à s'en prendre à l'Union soviétique. Et voici quelle était votre preuve :

C'est très clair d'après les journaux de Jodl et de Halder : avant le 3 juillet, il n'est question que de ménager la bonne entente avec l'URSS pour isoler la Grande-Bretagne et la contraindre à la paix; après, il n'est question que de liquider l'Etat soviétique.


A quoi j'avais répliqué :

Ce qui se révèle là être une interprétation tendancieuse des journaux de Jodl et Halder. En vérité, ce dernier songe depuis le mois de mai à préparer l'invasion orientale. C'est à la mi-juin qu'est élaborée une première mouture du plan, baptisé Otto. Dès le 25 juin, des troupes sont redéployées à l'Est - voir Benoît Lemay, Erich Von Manstein. Le stratège de Hitler, Perrin, 2006, p. 200. Si Hitler n'en sera informé que le 21 juillet, il est difficile à admettre que de telles manoeuvres aient pu s'effectuer à son insu : il a ainsi laissé faire, préférant voir ses généraux agir d'eux-mêmes plutôt que de les solliciter, quitte ensuite à jouer la surprise. Et ce n'est que le 29 juillet que le Führer communique sa décision à Keitel et Jodl, puis à ses autres haut-responsables de l'armée deux jours plus tard. C'est qu'entre-temps, l'Angleterre a officiellement rejeté sa dernière proposition de paix... avant la suivante.

Ces faits prouvent que Hitler a laissé se développer l'idée d'une invasion de la Russie parmi ses généraux avant Mers el Kébir. Vous prétendez, mais sans le prouver, que le raid britannique a scellé sa décision : en réalité, cette décision était déjà prise depuis longtemps. Tout au plus l'intransigeance britannique lui permet-elle de mieux faire avaler, aux plus récalcitrants de ses généraux, la pilule de Barbarossa - et encore, certains ne vont-ils pas s'inquiéter d'une guerre sur deux fronts ?


Naturellement, ce passage n'a pas fait l'objet du moindre commentaire de votre part. Il est tellement d'arguments auxquels vous ne répondez pas, François... Mais passons.

Ces omissions de votre part pourraient à la rigueur s'expliquer par une étude lacunaire du dossier. Mais à la lumière de ce qui va suivre, il vous faudra m'apporter une autre explication.

Selon vous, les journaux des généraux Jodl et Halder ne faisaient nullement mention d'hostilités avec l'U.R.S.S. avant le 3 juillet 1940 ? Outre que cette "preuve" n'en était pas une, il se trouve que j'ai cherché à vérifier votre affirmation.

Et voici ce que j'ai trouvé dans le Journal du général Halder, à la date du 2 juin 1940 : Hitler a affirmé ce jour-là que "maintenant que l'Angleterre est prête à signer la paix, il va régler leur compte aux bolcheviks" (cité dans Alexandre Nekritch, L'Armée rouge assassinée, Grasset, 1968, p. 39, et dans Karl Klee, Das Unternehmen "Seelöwe", Musterschmidt, 1958, p. 189).

Bref, Hitler a bel et bien déclaré à ses généraux qu'il comptait liquider l'U.R.S.S. sitôt la paix signée avec la Grande-Bretagne. Et il l'affirme bien avant Mers el Kébir. Un mois avant, pour être exact.

Ce qui ne vous empêche pas de prétendre publiquement que "d'après les journaux de Jodl et de Halder : avant le 3 juillet, il n'est question que de ménager la bonne entente avec l'URSS pour isoler la Grande-Bretagne et la contraindre à la paix; après, il n'est question que de liquider l'Etat soviétique" !

Les termes employés par le Führer le 2 juin 1940, non seulement démentent catégoriquement votre assertion, mais annihilent votre thèse, car démontrant que Hitler envisageait bel et bien une invasion de l'U.R.S.S. après la conclusion de la paix avec la Grande-Bretagne. Et il s'agit là... comment disiez-vous... ah oui : de "propos d'époque".

Admettez-le : comme dans d'autres cas, votre thèse ne repose sur rien d'autre que des omissions et des erreurs de lecture.

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Hitler et le général Halder. Le premier révèle au second,
dès le 2 juin 1940, son intention de "régler leur compte aux
bolcheviks".

Nouveau messagePosté: 01 Aoû 2007, 06:24
de François Delpla
A la bonne heure ! Si le fond ne varie guere et si les procedes sont stables, le vocabulaire s'enrichit : criminel a present je suis, du moins par ma pensee.

Puisqu'une bonne part de l'argumentation reside dans mes alleguees non-reponses, je me permets de rappeler cette question peu relevee : que vise Hitler ?

Nous sortons (peniblement) de nombreuses decennies d'errance ou on ne lui pretait (dans l'immense majorite des cas) aucune espece d'intelligence ou d'habilete, aucune planification a long terme et tout au plus une chance de joueur de poker doublee d'une cruaute terroriste qui aurait longtemps triomphe grace a la lachete ou a la perfidie des dirigeants francais, britanniques ou sovietiques (a doser selon preferences). Errances redoublees a partir des annees 1960 sous l'influence du fonctionnalisme, un rouleau compresseur en bon acier ouest-allemand. Ses pilotes s'interdisaient par principe de depister la moindre idee directrice, tant ils s'attachaient aux rapports de forces et faisaient tout decouler d'iceux.

Lukacs, Costello et votre serviteur, parfois efficacement seconde par Nicolas Bernard, ont tire beaucoup de fruits de postulats inverses : un regime fou certes, mais intelligemment dirige, realiste, connaissant les bornes a ne pas franchir pour obtenir des succes durables. D'ou la decouverte, boudee par tous nos predecesseurs alors qu'elle leur tendait les bras, d'une paix a deux doigts d'advenir "sur le sable de Dunkerque", empechee par la presence fortuite de Churchill, juste a temps, in the right place, et par ses efforts, eux-memes a deux doigts d'echouer.

Ce Hitler vise, d'apres nous, un nouvel equilibre des puissances -celui-la meme qu'il esquisse dans MK : Etats-Unis, Grande-Bretagne, Allemagne, Japon, chacun dominant sa zone.

Le Hitler que concoit Nicolas depuis que j'ai perdu ses faveurs (relativement) et son tutoiement (absolument) ne recherche pas un tel equilibre. Il fait semblant. Il vise la domination du monde et ne sait pas s'arreter.


PS.- Je ne suis pas en mesure de repondre sur la bribe du journal de Halder datee du 2 juin. Je compte y revenir quand j'aurai sous les yeux le texte complet.

Nouveau messagePosté: 01 Aoû 2007, 14:33
de Nicolas Bernard
François Delpla a écrit:Le Hitler que concoit Nicolas depuis que j'ai perdu ses faveurs (relativement) et son tutoiement (absolument) ne recherche pas un tel equilibre. Il fait semblant. Il vise la domination du monde et ne sait pas s'arreter.


Intéressant. Où ai-je écrit que Hitler voulait dominer le monde ? Merci de prouver vos dires.

Falsifier les propos d'autrui ne vous mènera pas loin. A ce stade du "débat", votre attitude est pitoyable. Digne d'un véritable escroc intellectuel.

Nouveau messagePosté: 01 Aoû 2007, 15:11
de Daniel Laurent
Et c'est reparti.... comme en 14 !

Etrange phenomene.
Sur les fils ou l'un intervient sans que l'autre y participe (Et vice versa), c'est tres vite tout a fait passionnant.

Mais des que les 2 sont sur le meme fil, c'est rapidement epuisant, je le dis en toute franchise et sincerite et ce malgre la tres grande et amicale sympathie que j'ai pour l'un des 2 intervenants et le respect de l'amateur que je suis pour l'autre.

Suivant ce fil de pret, permettez-moi egalement de vous signaler, Messieurs, que la frequentation baisse avec la hausse du ton....

Nouveau messagePosté: 01 Aoû 2007, 15:18
de HistoQuiz
Ras-le-bol :twisted:

Dites ??? vous ne partez pas en vacances ??
Je clos ce fil le temps que les esprits se calment



Nouveau messagePosté: 02 Aoû 2007, 18:04
de François Delpla
Ras le bol !

en vacances j'y suis

j'en profite pour faire a la faveur de courtes haltes espacees au cyber du coin de la plage une reponse calme, murie, centree sur le fond, nullement polemique et il suffit que j'aie une reponse aboyante de deux lignes pour que l'agresse se fasse engueuler autant que l'agresseur

enfin ne faites pas les naifs, exigez (a plusieurs, avec des plumes nouvelles) que nicolas reponde serieusement et vous verrez que les inconvenients s'envoleront et que ce debat absolument essentiel sur un tournant de la SGM trouvera son ton et son rythme

M***e, remerde et reremerde !

Nouveau messagePosté: 02 Aoû 2007, 18:38
de Daniel Laurent
François Delpla a écrit:pour que l'agresse se fasse engueuler autant que l'agresseur

Je laisse l'equipe de moderation mediter cette phrase qui me parait essentielle.

Et note, au passage, que le Cyber du coin ou Francois se trouve ne dispose que de claviers anglo-saxons et que, par consequent, il poste sans accents, comme un autre exile exotique que je ne nommerais pas...
:D

Francois parle de "a plusieurs, avec des plumes nouvelles".
C'est un appel a tous ces silencieux qui suivent ces debats, ne disent rien, mais, selon ce que j'en lis dans ma boite MP et sur d'autres forums, n'en pensent pas moins.

Allons, au travail et exprimez-vous, chers membres !

Nouveau messagePosté: 02 Aoû 2007, 20:08
de Nicolas Bernard
Alors, mon cher François, nous allons procéder autrement : où ai-je écrit, selon vous, que Hitler "vise la domination du monde" - alors que je martèle depuis des années qu'il n'a jamais eu l'idée d'envahir l'Amérique et qu'il se contrefichait de l'Afrique et de l'Asie orientale ?

J'attends votre réponse - même si je sais qu'elle ne viendra pas, puisque vous avez purement et simplement inventé de tels propos.