François Delpla a écrit:Pour commencer, datons-là, cette paix. Et pour faire le moins de what if possible, appuyons-nous sur un événement bien réel : la démission remise à Churchill par Halifax le soir du 27 mai, que Cadogan et Churchill lui-même le convainquent de reprendre. [...] La paix est donc signée rapidement, disons avant la fin de mai, la démission de Halifax entraînant celle du cabinet et la nomination de ce même Halifax au 1O DS.
Discutable. Il faut au moins cinq jours pour parvenir à un cessez-le-feu, après de rapides négociations - voir notre réalité : Pétain annonce le 17 juin qu'il faut cesser le combat, et l'armistice de Rethondes est signé le 22 juin. Dans votre petit scénario, l'armistice aurait eu à être signé dans la première semaine de juin.
La France se retrouve avec un gouvernement Reynaud, un Mandel ministre de l'Intérieur et un Pétain complètement en l'air, coupé de tout en France depuis son ambassade à Madrid (avril 39) et entré au gouvernement le 18 mai comme vice-président sans portefeuille pour doper le moral de l'armée... qui n'a plus à se battre.
Mais l'armée reste l'un des éléments de stabilité du régime. Elle est dirigée par Weygand, pas franchement des plus républicains. Pétain, le "héros de Verdun", est au gouvernement. Or, la France vient de subir une défaite, d'autant plus écrasante qu'elle est survenue, toujours dans notre uchronie, en trois semaines, c'est à dire autant que la Pologne. La ligne Maginot n'a servi à rien. Et si la France s'en sort dans un très relatif honneur, c'est uniquement par souci de générosité du vainqueur.
Bref, le peuple français ne va pas manifester sa joie envers un Président du Conseil vaincu par une puissance étrangère. En revanche, un Pétain pourra toujours se poser en option alternative.
Que la Troisième République ait à subir les conséquences de la défaite, c'est une affaire entendue, mais au profit de qui et de quoi ? C'était un lieu commun dans les années 30 de dire qu'il fallait renforcer l'exécutif mais précisément Reynaud faisait partie à cet égard des têtes chercheuses, et Mandel des praticiens, donnant l'exemple d'une direction à poigne, qui matait les lobbies, dans ses différents ministères. De surcroît de Gaulle a commis sa mini-épopée de Montcornet, exaltée par Weygand et l'état-major, sanctionnée par une promotion au grade de général. Il y a donc moyen de le faire entrer au gouvernement et de capitaliser, à son profit comme à celui de Reynaud, la campagne de 1934-35 pour les divisions blindées.
Absurde ! Si Hitler est aussi intelligent que vous le dites, il interdira totalement le développement d'une arme blindée au profit de la France. Relisez
Mein Kampf :
Car il faut qu'on se rende enfin clairement compte de ce fait : l'ennemi mortel, l'ennemi impitoyable du peuple Allemand est et reste la France. Peu importe qui a gouverné ou gouvernera la France ; que ce soient les Bourbons ou les Jacobins, les Napoléons ou les démocrates bourgeois, les républicains cléricaux ou les bolchévistes rouges : le but final de leur politique étrangère sera toujours de s'emparer de la frontière du Rhin et de consolider la position de la France sur ce fleuve, en faisant tous leurs efforts pour que l'Allemagne reste désunie et morcelée. [...] C'est pour cette raison que la France est, et reste, l'ennemi que nous avons le plus à craindre. Ce peuple, qui tombe de plus en plus au niveau des nègres, met sourdement en danger, par l'appui qui il prête aux Juifs pour atteindre leur but de domination universelle, l'existence de la race blanche en Europe. Car la contamination provoquée par l'afflux de sang nègre sur le Rhin, au cœur de l'Europe, répond aussi bien à la soif de vengeance sadique et perverse de cet ennemi héréditaire de notre peuple qu'au froid calcul du Juif, qui y voit le moyen de commencer le métissage du continent européen en son centre et, en infectant la race blanche avec le sang d'une basse humanité, de poser les fondations de sa propre domination.
Et il ajoute :
Dans le chapitre précédent sur les alliances allemandes, j'ai déjà désigné l'Angleterre et l'Italie comme les deux seuls Etats dont nous aurions tout intérêt à nous rapprocher étroitement, même au prix de grands efforts. Je veux maintenant marquer encore ici l'importance militaire d'une telle alliance.
La conclusion de cette alliance entraînerait au point de vue militaire, dans l'ensemble et dans le détail, les conséquences exactement opposées de celles qu'aurait l'alliance avec la Russie. C'est d'abord le fait capital que d'aucune façon un rapprochement de I'Angleterre et de l'Italie ne comporte fatalement un danger de guerre. La seule puissance dont il faut considérer qu'elle prendrait position contre l'alliance, à savoir la France, ne serait pas, dans le cas considéré, en mesure de le faire. L'alliance donnerait par contre à l'Allemagne la possibilité de prendre en toute tranquillité les mesures préparatoires requises, dans le cadre d'une telle coalition, en vue d'un règlement de comptes avec la France. Car l'essentiel, dans une semblable alliance, c'est que non seulement l'Allemagne ne sera pas exposée subitement, dès sa conclusion, à une invasion ennemie, mais encore que s'écroulera d'elle-même la ligue de nos ennemis, cette « Entente » qui nous fut si démesurément funeste ; ainsi l'ennemi mortel de notre pays, la France, tombera dans l'isolement.
En conséquence :
Ce n'est pas dans une orientation à l'Ouest ou une orientation à l'Est, que se trouve l'avenir de notre politique extérieure, mais bien dans une politique de l'Est, au sens d'acquisition de la glèbe nécessaire à notre peuple allemand. Mais comme il faut en avoir la force, et que l'ennemi mortel de notre peuple, la France, nous étrangle impitoyablement, ef nous épuise, il faut prendre sur nous de faire tous les sacrifices susceptibles de contribuer à annihiler les tendances de la France à l'hégémonie. Toute puissance est aujourd'hui notre allié naturel, qui considère avec nous, comme insupportable, la passion d'hégémonie de la France sur le confinent. Aucune démarche vis-à-vis d'une de ces puissances ne doit nous paraître trop dure, aucun renoncement ne doit nous paraître impossible, si nous avons finalement la possibilité d'abattre l'ennemi qui nous hait si rageusement.
En d'autres termes, il convient de mettre hors de combat la France pour mieux conquérir l'Est. C'est bien une paix carthaginoise que prévoit Hitler, même si, dans l'hypothèse d'une paix conclue avec Londres, il se dispensera d'occuper notre pays.
Politiquement, outre la République radicale, il est probable que le Front populaire ait du plomb dans l'aile, en raison des 40h, de l'effondrement communiste et de quelques autres choses. Il faut d'ailleurs voter immédiatement, la chambre de 1936 ayant tout juste atteint le terme de son mandat. Mais ni Reynaud, ni Mandel, ni de Gaulle ne sont de gauche !
Dans le contexte d'un désastre militaire aussi subit que celui qui a frappé la Pologne, l'alternative ne se pose plus en termes de droite et de gauche, mais en termes de républicains et d'anti-républicains.
Tout est mûr pour un gouvernement pénitent, ressemblant à cet égard à celui que forme Pétain dans l'histoire réelle, mais aussi un gouvernement "belliciste", animé par les gens de droite qui ont alerté contre le danger hitlérien (outre les précités, on peut nommer Marin, Kérillis, Champetier et quelques autres). Des objections ?
Un gouvernement
belliciste ? Dites-moi... Le nouveau gouvernement provisoire qui a pris le pouvoir après les deux chutes de Napoléon, il était favorable à la poursuite du conflit ? Le gouvernement provisoire qui a signé la paix avec l'Allemagne, en 1871, là encore il était belliciste ? Le gouvernement allemand de 1918 a-t-il cherché immédiatement à réarmer, ou son obsession n'était-elle pas plutôt le maintien de l'ordre ?
Le gouvernement français qui serait surgi de la défaite n'aurait certainement pas été belliciste. Jamais Hitler n'aurait laissé faire une chose pareille. Dans le cas contraire, quelle utilité y avait-il à une guerre contre la France ?