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Madeleine Riffaud

Cette rubrique renferme tout ce qui concerne le front ouest du conflit, y compris la bataille des Ardennes ainsi que les sujets communs à tous les fronts tels, les enfants et les femmes dans la guerre, les services secrets, espionnage...
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Madeleine Riffaud

Nouveau message Post Numéro: 1  Nouveau message de witz  Nouveau message 02 Fév 2007, 17:13

Madeleine Riffaud lieutenant FTP
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Il est facile de mourir à 20 ans pour une cause que l'on croit juste" : ce 19 août, Madeleine Riffaud sait que chacun de ses instants a été volé à la mort. "Un jour c'est un jour. Toute heure compte", lui avait dit une compagne de captivité. Le 23 juillet, cette membre des FTP, baptisée Rainer dans la clandestinité, avait été arrêtée après avoir abattu un officier allemand, sur le pont de Solférino. Un milicien l'avait vendue 10 000 francs à la Gestapo.

Rue des Saussaies, elle est torturée pendant trois semaines tandis que le phonographe passe en boucle des airs de Bach. "Un jour, j'ai reconnu un des Concertos brandebourgeois, et je me suis dit que plus jamais je ne réussirais à l'écouter. Ma plus grande trouille, c'était d'être violée pendant ma détention. Quand les SS débouchaient le champagne, vous faisaient laver, vêtir d'une chemise propre, c'était mauvais signe. Mais je me suis souvenue qu'ils ne violaient pas les juives. Un soir où quatre officiers se réjouissaient d'une petite fête en ma compagnie, j'ai demandé à voir le commandant. Je lui ai dit que j'étais juive. L'homme était déçu, contrarié : j'étais mignonne."

La prisonnière doit être fusillée le 5 août. Son exécution est repoussée. Le 15, elle s'échappe du dernier train de déportés qui part de la prison de Fresnes vers le camp de Ravensbrück. Elle est reprise. Après une médiation du consul de Suède, Raoul Nordling, elle est finalement libérée dans la nuit du 18 au 19 août. "Les officiers nazis ont déclaré qu'ils ne nous laisseraient pas franchir la porte sans nous abattre. Alors on s'est collés derrière Nordling pour ne pas recevoir de balles." Après une nuit de repos dans un dortoir de la gare de l'Est, Madeleine Riffaud repart se battre. Son courage lui vaudra d'être nommée lieutenant au feu, quatre jours plus tard, après l'attaque d'un train allemand.

Le 19, en fin d'après-midi, Nordling a négocié une trêve entre les belligérants. Le résistant Jean Bèze se souvient : "Le 21 août, avec deux copains, je vendais L'Humanité pour la première fois, boulevard de l'Hôpital, en criant : 'Le journal des 75 000 fusillés !' En une demi-heure, plus de 100 exemplaires étaient écoulés. Soudain, nous avons entendu des tanks. Tout le monde s'est éparpillé comme une volée de moineaux. Le lendemain, la vente à la criée a recommencé ! Plus tard, avec d'autres FTP, on a serré un collabo dans un local du parti de Déat. On l'a laissé en vie, mais il n'était pas beau à voir. Je ne suis pas fier d'avoir participé à ça, mais ça m'a défoulé."

Une période d'incertitude qui exaspère André Carrel, 27 ans, alors vice-président du Comité parisien de libération (CPL). "Dès le 20, les débats commencent au sein des différentes organisations. Dans la rue, certains combattants nous interpellent, d'autres nous engueulent, en nous demandant ce qui se passe. J'ai alors le sentiment que ma colère, mon opposition viscérale à l'arrêt des combats était partagée par le Paris populaire."

Voilà le récit de l'attaque du train qu'a fait Madeleine Riffaud devant des enfants de centres aérés du 19ème.

"Tôt ce matin du 23 Août 1944, alors que les résistants des télécoms s'étaient débrouillés pour que les Allemands n'aient aucune communication , j'ai reçu un coup de téléphone avec ce message : "Compagnie Saint Just, vous vous devez vous poster au pont de Belleville-Villette afin de stopper à tout prix un train car s'il peut pénétrer dans le ventre mou du 19ème où il n'y a plus de barricades et où ça risquerait d'être une tuerie générale."
À son correspondant; la lieutenant Franc-Tireur-Patriote expliqua qu'elle n'avait que 4 hommes à disposition. "Démerdes-toi" lui répondit-on, ce qu'elle fit avec prouesse en embarquant son équipe dans "une traction avant chargée de toutes les munitions disponibles : grenades à manche d'origine allemande liées entre elles pour mieux les balancer, bouteilles incendiaires fabriquées par l'Union des Femmes Françaises, des explosifs divers, des grenades et chacun sa mitraillette."
Aprés avoir fait sauté à la mitraillette la serrure de la grille du parc des Buttes Chaumont, les résistants arrivèrent prés du pont, alors que la locomotive et le premier wagon de tête avaient déjà passé la tranchée des Buttes-Chaumont : "Ce n'était pas trés rigolo car les Allemands étaient sur les marche-pieds des wagons et balayaient avec la mitrailleuse pour nettoyer le terrain. Marcel et Guy d'un côté, de l'autre côté de la tranchée moi et Marcel, un autre camarade plus âgé, tous planqués sous les arbres. On a balancé tous les explosifs sur la locomotive qui a été endomagée et sur un wagon qui s'est un peu couché. Les SS avaient la trouille et se sont retirés dans le tunnel en emmenant un de leur blessé. Ce qui était marrant c'était qu'en chargeant la traction, on avait emmené une caisse de feux d'artifices et quand on les a balancé sur le train, c'était vraiment Hiroshima avec sons et lumières. Les Allemands ont alors eu la troulle et ont esssayé de reculer la loco dans le tunnel. Mais ils étaient désormais bloqués entre nous dans le 19ème qui tenaient la sortie du tunnel des Buttes-Chaumont et les gars du 20ème qui venaient d'avoir des morts au niveau de la rue de la Mare ... "
"On a réussi à trouver un cheminot à la retraite qui habitait pas loin, un certain Monsieur Jarreau qui est descendu sur les voies, s'est glissé sous la locomotive avant d'y grimper pour la faire avancer d'environ 300 mètres, sans prendre une seule balle. Et cet homme est rentré tranquilement dans son petit appartement pour continuer sa vaisselle, sans que personne n'ait songé à le remercier pour son action ... Les 80 Allemands qui étaient dans le train se sont rendus face à nous quatre et 300 personnes qui nous avaient rejoint (le Commandant, le nouveau Maire du 19ème avec son écharpe tricolore, les policiers, toutes les forces du quartiers des FFI ou des OCM, des copains venus des barricades). C'était une opération assez jolie car on n'a pas fait couler le sang et on a passé une journée extraordinaire de fête autour du train dans le parc. La libération de Paris était une vraie fête car on pensait que c'était bien de se battre libre. On pouvait crever le soir sur les barricades, ça n'avait pas d'importance, on se battait enfin à la lumière, avec notre propre identité, on n'était plus clandestins, tout le monde était gai, heureux et uni ..."
Madeleine Riffaud raconta aussi une anecdote concernant ce train où il y avait plus de 80 Allemands bien armés, mais aussi "un wagon rempli de munitions de toutes sorte et un autre truffé de victuailles bien françaises (charcuteries, fromages, vins et conserves) et une caisse de capotes anglaises. De quoi repartir en campagne vers l'Est que ces Allemands ne purent rejoindre à cause de l'arrêt de leur train en plein parc des Buttes-Chaumont. La bouffe récupérée était bienvenue auprès des riverains des Buttes-Chaumont et permit d'agrémenter la joie retrouvée d'un Paris en train de se libérer. Les armes prises sur les boches permirent d'alimenter les combats du soir même sur les barricades à la République contre l'artillerie allemande ... "
Profitons-en pour rendre hommage à Guy, l'un des principaux artisans de cette attaque de train du 22 Août 1944, qui a continué la guerre sur le Rhin, en a perdu la vie après avoir eu ses deux jambes arrachées ...
La rédaction a enquêté pour savoir quand et combien de trains furent arrêtés par les résistants FFI et FTP de 19 et 20èmes arrondissements de Paris ?

Quand l'action a-t-elle lieu ? Le 23 Août 1944 au matin dans la tranchée des Buttes-Chaumont avec le premier train et dans la journée du 23 Aôut 1944 et la nuit suivante autour de la gare de Ménilmontant avec les 2 trains suiveurs. Sous la plume de Bruno Carrière, on peut lire ceci dans la Saga de la Petite Ceinture (page 179) :
"Dans les semaines qui précèdent la libération de Paris (Août 1944) la Petite Ceinture fait l'objet de plusieurs coups de main : attaque d'un train allemand au fusil-mitrailleur du haut de la passerelle de Picpus, coupure des voies de raccordement de Bercy et l'Évangile-Villette, etc ... Le 24 août 1944, l'ordre est donné d'arrêter tout mouvement sur la ligne. Trois trains dirigés de la gare de Lyon sur la gare du Nord sont interceptés par les FFI (Forces Françaises de l'intérieur) des 19ème et 20ème arrondissement. Soutenus par des unités dépêchées à la hâte de quartiers périphériques. Mission accomplie : à 15 h 30,, 137 soldats allemands sont faits prisonniers et un matériel important capturé."

Bruno Carrière nous a confirmé qu'une coquille s'était glissée dans son article et que c'est bien le matin du 23 Août 1944 qu'a eu lieu l'opération des Buttes-Chaumont, les combats ayant continué dans l'après-midi, la soirée et la nuit du 23 Aout 1944 à Ménilomontant autour de la passerelle de la rue de la Mare, causant 5 morts chez les résistants, comme en témoigne la plaque installée rue de Belleville au dessus de l'ancienne gare de Ménilmontant, on peut lire ceci : "À la mémoire des héros tombés le 23 Août 1944 dans l'attaque victorieuse des trains nazis : François Boltz 38 ans, Louis Godefray 53 ans, Adjeman 50 ans et deux patriotes inconnus. Gloire immortelle à ces braves morts pour la France." Une autre plaque de la passerelle de la rue de la Mare installée sur la grille côté Nord par le groupe "Libération Nord 20ème section" indique : "À la mémoire de nos camarades : François Boltz, Louis Godefroy du groupe PIAT tombés le 23 Août 1944 pour la libération de Paris.'
Donc cette action d'éclat ne s'est pas déroulée le 22 Aôut 1944 comme l'indique la plaque installée par les autorités municipales mais bien le 23 Août entre 5h00 et 15H00 comme le précise Madeleine Riffaud.

Quelle était la teneur du convoi ? Sans doute 3 trains : le premier bloqué sous le tunnel des Buttes-Chaumont par l'équipe du 19ème, les deux autres étant ainsi retenus avant et après le pont de la rue la Mare, au niveau de la gare de Ménilmontant. Combien de prisonniers allemands et quel butin ? Armes, nourritures, oeuvres d'arts volées par les allemands ... encore un mystère pour une affaire à suivre ...

Des précisions nous ont été apportées par les archives de l'historien Pascal Payen-Appenzeller qui a retrouvé un article du journal "Combat du Jeudi 24 Août 1944, où l'on pouvait lire (en page 2) qu'à Ménilmontant (donc du côté de la passerelle de la rue de la Mare), "dans l'après-midi d'hier, les FFI ont mis hors d'état de nuire quelques soldats allemands qui gardaient un train de munitions sous le tunnel de Ménilmontant. Après une attaque d'une heure, ceux-ci se sentant en état d'infériorité se retirèrent à l'intérieur du tunnel pour mieux se défendre, mais les FFI considérant avec inquiétude la lourde menace qui pesait sur le quartier, n'hésitèrent pas à descendre sur la voie et à enfumer le tunnel. Craignant l'asphyxie, les soldats ennemis ne tardèrent pas à se rendre aux forces de la liberté qui les firent prisonniers."

Donc, il semble bien que le premier convoi fût arrété aux Buttes-Chaumont par l'équipe de Madeleine Riffaud. Le second convoi, dont on ne connaît pas vraiment le contenu, fut bloqué par le second entre le milieu du tunnel des Buttes-Chaumont et la rue de la Mare, tandis que le troisième convoi dont parle "Combat" était bloqué dans le tunnel de Ménilmontant, entre la rue de la Mare et la rue de Bagnolet.

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André Calves (1920-1996) fut un militant politique et résistant de la première heure. Alors qu'il était recherché par la Gestapo en Bretagne il échappe miraculeusement à une arrestation et entre dans les FTP de la région parisienne où il combattra, sous le pseudonyme de Christian Garnier, dans les rangs de la Compagnie Saint Just jusqu'à l'insurrection. Nommé lieutenant à la libération, il rejoint la colonne Fabien, se bat en Lorraine mais refuse d'intégrer l'armée. Il est l'auteur d'un livre intitulé "Sans bottes ni médaille" édition La Brèche (mars 1984). On le voit, ici, posant au milieu d'un groupe de FTP des compagnies Saint Just et Guy Mocquet pendant la Libération de Paris; à sa droite, derrière les deux hommes en chemise blanche, Madeleine Riffaud.
Source: reportage sur la chaine PLANETE 2004
Dernière édition par witz le 24 Avr 2007, 17:25, édité 1 fois.


 

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Madeleine Riffaud

Nouveau message Post Numéro: 2  Nouveau message de Colombe  Nouveau message 22 Avr 2007, 16:34

J'ai vu récemment sur France 2 ou France 3 un reportage qui lui était consacré et où elle témoignait sur son entrée et son parcours dans la résistance.

Dans ce reportage, elle précisait que l'idée de dire qu'elle était juive pour échapper aux viols n'était pas d'elle mais d'une femme âgée prisonnière comme elle.

Quant au dernier train de déportées en partance pour Ravenbrück, selon ses propres dires, elle ne s'en échappe pas vraiment : un allemand demande aux femmes enceintes de descendre et sa voisine qui était un agent des services secrets britanniques se lève, attrape Madeleine Riffaut par la main et la pousse dehors avec elle. Elle ne voulait pas spécialement descendre car elle ne pensait que "tout allait recommencer" (les tortures, les questions...). C'est en tout cas ce qu'elle a raconté devant la caméra.

Ce qu'elle a également raconté c'est que l'exécution de ce soldat allemand "au hasard" avait été décidée par elle pour "redonner du moral aux troupes" suite à une série de morts dans leurs rangs. Elle raconte qu'elle a été arrêtée sur place et, si ma mémoire est bonne, elle précise en effet qu'elle a été arrêtée par des français mais ne parle pas de la transaction financière de 10.000 francs.

Madeleine Riffaud a participé à la Libération de Paris.

@ +

Cécile


 

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